Archive for février, 2013

Jalousé, copié, vénéré (non, cet article ne traite pas de TK), fréquemment embrassé ou redessiné, après avoir été royalement ignoré pendant des décennies, l’écusson est devenu un objet de culte depuis une vingtaine d’années.

La sacralisation de l’écusson est un phénomène relativement nouveau dans le football britannique, le badge (ou crest) ne s’étant réellement développé qu’avec l’éclosion d’un football commercialement décomplexé à partir des Sixties (voir notre trilogie sur la formidable épopée du maillot anglais, ici et ici).

Les écussons les plus singuliers n’appartenant pas aux clubs qui fraient dans les grandes eaux du foot british (prestige et marketing obligent), il a donc fallu racler les fonds de terroir pour dénicher les perles rares présentées ci-dessous. En positif ou négatif, à vous de juger.

[1 : ma note artistique et 2 : note street cred en tant qu’écusson foot. Belles collections ici et ici]

[Cliquer sur les photos peut rapporter gros]

Le XI d’or et de plomb des blasons britanniques

1) Scunthorpe United (D3)

Cet écusson fut introduit en 1994 à la faveur d’une compétition organisée dans les écoles locales. Le vainqueur fut donc cet emblème symbolisant les liens étroits entre Scunthorpe (« Scunny ») et l’industrie de l’acier. Un design à l’allure toute nord-coréenne qui ne fit pas l’unanimité, loin s’en faut. Si les amateurs d’art réaliste russe furent ravis, les supporters des Iron protestèrent, en vain. Mais à la réflexion, les gamins méritent bien les Félicitations du conseil de classe.

1 : 10 / 10

2 :   9 / 10

Scunny s’est souvent signalé par des blasons étonnants, ci-dessus (respectivement 1976-1979 et 1982-1990 – y’a pas que le « logo » du PSG qui a évolué… Oui Môssieur, j’ose comparer l’aura d’un Scunny à la bande à Zlatan et Goldenballs : le PSG n’a jamais compté dans ses rangs ni Kevin Keegan ni Ray Clemence que je sache).

2) Coleraine FC (D1 nord-irlandaise)

Un ballon au milieu d’une rivière, des pissenlits, un poisson prêt à se faire frire autour d’un feu de camp et un triangle Warning pour avertir du potentiel danger d’éclats de braises. Un camp scout ? Un meeting de Chasse, pêche, nature et traditions ? Nope, ce très bucolique écusson n’a à voir avec Frédéric Nihous ou un jamboree de Louveteaux, explication tragico-iconographique ici.

1 :     3 / 10

2 : – 17 / 10

3) Cromer Town (D11, est de l’Angleterre)

Un crabe fait admirer sa conduite de balle, original. Dans le registre bestioles marines, ça vaut largement les crevettes (Southend United et Morecambe, D4), les pingouins (Lewes FC, D7) et autres poiscalles (Grimsby, D5). Et le chant des supporters de ce club du Norfolk célèbre pour son festival Crab and Lobster ? Come On You Crabs, Allez les Crabes… L’ex Bordelais vice-champion d’Europe Cédric Anselin y a fait une pige crabeuse (en tant qu’entraîneur adjoint). Toute ressemblance avec des pinces existantes est purement fortuite. Ou pas.

1 :   7 / 10

2 : – 3 / 10

4) AFC Liverpool (D9)

Le dernier né des Liverpudliens (founded 2008), créé par des supporters de Liverpool FC exaspérés de devoir payer bonbon pour voir leurs idoles (AFC = Affordable Football Club). A fâcheusement opté pour un design soviétisant, qui rappelle l’écusson de Scunthorpe (en bien moins classieux). Un modèle du genre que ne renieraient pas le Kremlin ou les apparatchiks nord-coréens.

Las, alors que le club comptait récupérer les opposants au foot-bizness pour suivre les traces du successful FC United of Manchester, le démarrage est ultra poussif : 124 spectateurs de moyenne seulement la saison dernière (5 £ le billet adulte). Ce blason à la Kim II-sung y est-il pour quelque chose ?

1 : 0 / 10

2 : 1 / 10

5) Merthyr Town FC (Pays de Galles, D8 anglaise)

Un club taillé sur mesure pour Saint Réné (Girard) ou Saint Tony (Pulis). Avec un nom pareil, ces grands chouineurs devant l’éternel n’auraient pas besoin de ruminations rageuses pour faire passer leur message de persécuté, un simple doigt pointé vers le crest du club suffirait.

Un illustre footballeur a porté le maillot des Martyrs dans les Seventies : l’immense John Charles (93 buts/150 matchs à la Juventus de 1957 à 1962), en tant qu’entraîneur-joueur. Des Gallois qui, en 1987, martyrisèrent un grand d’Italie en coupe d’Europe des vainqueurs de coupe, l’Atalanta Bergame, battu 2-1 à l’aller, voir clip (les Martyrs avaient remporté la Welsh Cup la saison précédente – les Italiens l’emportèrent 2-0 au retour et finiraient 4è de D1 cette saison-là).

1 :   2 / 10

2 : – 5 / 10

6) Airbus UK Broughton FC (Premier League galloise)

Avec un nom pareil, nul besoin d’un dessin pour saisir les liens du club avec l’aéronautique. Etait-il donc nécessaire de faire accoucher le ballon d’un énorme A380 ? Probablement pas. Et cette mention « The wing makers » en guise de jeu de mots (évoquant à la fois la manufacture d’ailes et d’improbables ailiers virevoltants), même feu Maître Capello n’aurait pas osé ce calembour de mauvais aloi outrageusement trompeur sur la marchandise.

1 : 0,5 / 10

2 :    2 / 10

7) Forres Mechanics (D5 écossaise)

Fondé en 1884, notable pour son écusson Norauto (explication ici). Je ne sais pas pour vous mais si je tombais en panne à Glasgow, j’aurais modérément confiance dans un mécano sapé en apôtre. Il n’empêche que ces Mechanics (surnommés les Can Cans) ont sacrément malmené les Glasgow Rangers en Coupe d’Ecosse fin septembre 2012 (courte défaite 1-0).

1 :      1 / 10

2 : – 33 / 10

8. Acton Ealing Whistlers (petit club londonien)

Au moins, quand leur manager raconte à la presse que, malgré la défaite 6-0, il a vu du beau jeu et en tire plein d’enseignements positifs, aucun doute : c’est bien du pipeau.

Club d’Ealing (ouest londonien multiculturel) aux racines folkloriques irlandaises. Davantage un club pour jeunes (voir site), ce sympathique minot de quartier vient tout juste de se voir affilié à la Football Association (donc tout en bas de la fameuse pyramide avec les 7 000 autres clubs, autour de la D25).

Petit mais a tout de même formé l’attaquant Kevin Gallen, ex international U21 anglais et ex pilier de Football League dans les Nineties et Noughties (et même une saison de Premier League avec QPR, 8 buts), 150 buts chez les pros (QPR, Barnsley, Luton, etc.).

Ont bizarrement produit plus de grands musiciens que de footballeurs, allez comprendre (ici). Incompréhensible mais admirable : garder les buts tout en jouant du piano, même debout, ne doit pas être donné à tout le monde.

1 : 5 / 10

2 : 3 / 10

9) Fisher FC (D9)

Parmi les nombreux écussons poissonneux, celui-ci est le meilleur. Un design qui a pour origine feu Fisher Athletic London FC (ex D6), dissous en 2009. Le nom du club n’a rien à voir avec la pêche mais provient de John Fisher, religieux qui mourut en martyr dans le coin.

Mais pourquoi une rascasse en pétard alors ? Tout simplement parce qu’il y a cent ans, ce coin du sud de Londres fabriquait des bateaux dans ses docks (on est au bord de la Tamise).

1 : 5 / 10

2 : 0 / 10

10) Clydebank FC (club écossais, très amateur)

Dans le genre bricolé, cet écusson en impose. Une roue dentée en haut, un bout de vis à droite, un gallion en bas et un ecclésiastique (Saint Patrick) pour compléter le tableau (ce site explique tout).

1 : 1 / 10

2 : 0 / 10

11) Thurso FC (Ecosse profonde, fin fond du fond de l’Ecosse, D6)

Club de Vikings (leur surnom) créé en 1998 dans la ville la plus septentrionale du pays, autant dire plus près des Îles Féroé que d’Edimbourg. D’où la touche très rustique de l’effectif (c’est le capitaine sur le blason).

1:     10 / 10

2:  – 15 / 10

Les remplaçants…

Hereford United (D5)

Il est certes courant de mettre à l’honneur les industries du cru sur l’écusson mais ce n’est pas toujours une bonne idée. Rien de tel pour passer pour des bovins parfois.

Sur le même thème Salon de l’agriculture, en pire, Oxford City (D6) :

Burton Albion (D4)

Burton-on-Trent était autrefois un grand centre de brassage (de bières, pas de vent. Il reste quelques brasseries). Patrimoine local aussi noble qu’envié mais mais était-il judicieux de coller un pilier de comptoir sur le blason ?

Banbury United (D7)

Voyage chez les Amish ou au pays de la Petite maison dans la prairie ?

Tandis qu’à Darlington FC, ex D5 mais dissous l’an dernier (reparti en D9, désormais Darlington 1883), on retourne chez les Quakers.

Goole AFC (D7)

Bristol Rovers (D4)

La grande classe.

Bournemouth (D3)

Bedlington Terriers (D9)

Sunderland (1977-1997)

Sublime, simplement sublime.

Lincoln City (D5)

Le badge des Imps (lutins) de Lincoln, un grand classique.

Wolves (années 70)

Au loup bondissant, je préfère la touche de George Berry (première afro du foot anglais, 1978).

Dumbarton et Dunfermline Athletic (D2 écossaise)

Pour en savoir plus sur ces spécimens, en particulier l’étonnant stade de Dumbarton (ici), consultez Kick off, l’excellent blog foot british de Romain Molina sur le site de l’Equipe (il fait l’Ecosse lui, moi je ne touche pas à ça). La maison colorée du DAFC fait penser à la Hundertwasser House de Vienne.

Le blason pachydermique du DFC rappelle l’éphémère version de Coventry City la saison dernière (ci- dessous à gauche – celui de droite date des années 70). Mal leur en prit car ils descendirent en D3 (l’éléphant réprésente ici la force – c’est aussi l’un des symboles attachés à Saint George, saint patron des Anglais, qui aurait vécu dans le coin ; la ville de Coventry l’inclut sur ses armoiries à partir du XIXè, et le club s’en inspira, comme il était fréquent à l’époque).

Finissons avec Queen’s Park FC (D4 écossaise), pour sa devise : « Ludere Causa Ludendi », jouer pour le plaisir de jouer (devant pas grand monde, malheureusement pour eux : 600 spectateurs. Et dans leur antre majestueux d’Hampden Park – 52 500 places –, ça sonne un peu creux).

Ludere Causa Ludendi… Une bien belle conclusion.

Kevin Quigagne.

Dimanche 24 février, se disputera la plus improbable des finales de coupe : Bradford (D4) contre Swansea (Premier League). Mieux. Cette finale de League Cup, entre deux clubs aux parcours furieusement inverses depuis 2000, tient du miracle. Et avec la succession de glauqueries qui polluent le football britannique depuis plusieurs saisons, cette grosse bouffée d’air frais arrive à point nommé.

C’est Michael Laudrup, le manager de Swansea, qui a le mieux résumé cette finale au lendemain de la qualification des Swans pour Wembley : « Ce match opposera le petit conte de fée au grand conte de fée. »

Conte de fée. Si ce terme taillé pour la coupe est souvent galvaudé, il prend ici tout son sens. Deux fairytales aux trames diamétralement contraires et hors normes, et bien malin qui pourrait désigner avec certitude le minot de ce conte enchanté.

Des précédents mais rien de comparable

Etablir ici une liste un tant soit peu exhaustive des giant-killings de Cup (FA ou League) serait impossible. Et vain : elle a déjà été dressée maintes fois sur le Net et ailleurs (en voici une – à laquelle il faudrait ajouter le récent exploit de Luton Town – D5 – tombeur de Norwich le mois dernier en FA Cup, première fois depuis Sutton United-Coventry en 1989 qu’une D5 eliminait une D1). Seuls deux clubs de D3 ont atteint, et remporté, une finale de coupe (tous deux en League Cup et contre des D1) : QPR, en 1967 – contre WBA – et Swindon Town, en 1969, contre Arsenal.

Avant Bradford, seul un club de D4 était parvenu en finale : Rochdale FC, en 1962. Toutefois, cet exploit ne peut être comparé à celui de Bradford, pour deux raisons. D’une part, l’écart – de moyens – entre un club de D4 et D1 était beaucoup plus faible que maintenant (ce dossier explique pourquoi). D’autre part, au début des années 60, la League Cup était bien moins cotée qu’aujourd’hui et fut délaissée par nombre de grosses écuries de D1. De fait, cette compétition était si peu considérée au départ que sa première finale se disputa en début de saison suivante ! (22 août et 5 septembre 1961).

Cette coupe avait été imposée par Alan Hardaker en 1960, le controversé patron de la Football League (voir bas d’article TK sur les 50 ans de la League Cup). Les clubs de D1 ne furent pas franchement emballés et seuls dix d’entre eux participèrent à la première édition. Parmi ceux-là, aucun n’avait fini dans le Top 5 la saison précédente.
Puis, l’engouement vint timidement : 80 clubs en 1961-62, mais seulement 12 de D1 (sur 22). Rochdale, après un beau parcours (2 D4, 2 D2 et 1 D1 éliminées), fut battu en finale par Norwich City (D2), 4-0 sur les deux matchs.

Sentant que sa coupe allait dans le mur, Hardaker fit deux grosses concessions : à partir de 1967, la finale se jouerait à Wembley avec une qualification européenne à la clé. La League Cup décolla enfin.

Les Bantams clés… et leurs potins de vestiaire

(les petits secrets ci-dessous sont révélés par Matt Duke, l’excellent gardien Bantam, dans le Guardian du 22 janvier dernier).

Phil Parkinson. Manager, 45 ans. Honnête carrière de milieu en Football League, à Bury (D3) et Reading (D3 et D2). Ce licencié en sciences sociales est un féru d’organisation et de préparation physique. Comme tant d’autres, son parcours d’entraîneur est fait de hauts (Colchester) et de bas, voir première partie. Courtisé par plusieurs clubs de Football League récemment, dont Blackpool (D2).

Parkinson ne touche que 1 000 £ / semaine + 1 000 £ par point engrangé… au-dessus de 52 unités (et vu que Bradford n’en a que 44 au compteur – sur 31 matchs disputés, 46 journées – le performance bonus se sera pas mirobolant). Son contrat se termine en juin prochain et les négociations avec le club ont commencé. En place depuis août 2011.

Matt Duke. Gardien, 35 ans, 1m96. Héros des quarts et demi-finales (superbe contre Arsenal, homme du match contre Aston Villa à Valley Parade). Commença tout au bas du bas de l’échelle, en Pub League à Sheffield (équivalent des championnats corpos, non affiliés à la fédération anglaise). Puis vint la non-League (football amateur et semi-pro) à Burton Albion, alors en D7. Vendu à Hull City pour 20 000 £ en 2004, où il disputa 21 matchs de Premier League en 2008-2010.

N’a probablement pas eu la carrière qu’il méritait. Atteint d’un cancer testiculaire en 2008. Au club depuis l’été 2011.

Stephen Darby. Latéral gauche, 24 ans. Liverpool reject (nous en débattions d’ailleurs chaudement sous cet article sur l’Academy de Liverpool, où il fut formé). S’est refait une santé chez les Bantams après quelques prêts infructueux en Football League. D’après Matt Duke, Darby se fait souvent chambrer car il est le sosie de Ken Barlow (étant jeune), un personnage incontournable de Coronation Street, ce soap qui déprime toute l’Angleterre depuis 1960… (et ouais, vous vous cognerez Plus belle la vie jusqu’en 2075 probablement). Au club depuis juillet 2012.

Gary Jones. Solide milieu de 35 ans, capitaine et leader du groupe. L’aboyeur de service et archétype du midfield enforcer. Meilleur passeur (ex-aequo) de la League Cup cette saison. Rochdale Legend (D3 – D4, plus de 500 matchs pour The Dale). Membre d’une école de pilotage sur route, ce que les autres joueurs trouvent « very sad » selon Duke (navrant et digne de chambrage intensif).

Ce qui est bien moins sad, ce sont ses performances héroïques durant cette épopée, a tenu la baraque comme un Roy Keane. Homme du match contre Arsenal en quarts et superbe également contre Aston Villa à domicile en demie. Au club depuis juin 2012.

Rory McArdle. Arrière central, 25 ans. Débuta sa carrière pro à Sheffield Wednesday en 2004 (D2 – D3) mais ne perça pas chez les Owls. A marqué contre Aston Villa (but who hasn’t this season?). International nord-irlandais (5 capes). Compte déjà 39 matchs en 2012-13, l’un des totaux les plus élevés cette saison en League Football (PL + Football League), ce qu’il ne cesse de rappeler aux autres selon Duke ! Malheureusement, une blessure à la cheville le tient éloigné des terrains depuis presque trois semaines (incertain pour dimanche). Au club depuis juin 2012.

Zavon Hines. Ailier droit / milieu offensif, 24 ans. Fut l’un des « Joueurs d’avenir » que le magazine Four Four Two mit en avant dans feu sa page mensuelle The boy’s a bit special (rubrique assez kiss of death !). Ex Espoir anglais, très technique. Il y a du Raheem Sterling / Wilfried Zaha dans ce joueur. Vif et rapide mais croque un peu trop.

Après quatre ans compliqués à West Ham (31 apparitions) et une sérieuse blessure au genou en 2010, l’Anglo-Jamaïcain rebondit aujourd’hui en D4. Au club depuis juillet 2012.

Nakhi Wells. Avant-centre, 22 ans. Dans un bon jour, quand cet international des Bermudes combine en triangle avec le duo Hines-Hanson, l’adversaire disparaît. Commença sa carrière sur son île, au superbement nommé Dandy Town Hornets. Fulgurante progression cette saison, 18 buts (dont 14 en championnat). Rapide et technique, il serait convoité par plusieurs clubs de D2.

Selon Matt Duke, se fait souvent charrier pour avoir acheté une puissante voiture de sport il y a peu… avant même d’avoir le permis (examen qu’il mit une éternité à décrocher, toujours selon notre gardien chambreur). Et conduire un bolide avec des plaques L (Learner) en Angleterre attire un sévère mickey-taking (chambrage). S’est racheté en marquant le premier but des demies à Valley Parade. Au club depuis juillet 2011.

James Hanson. Avant-centre, 25 ans. Ce Bradfordian d’1m93 est le seul joueur de l’effectif à avoir été acheté (au club semi-pro de Guiseley, près de Leeds)… 7 500 £ seulement !
Marqua le but du 2-1 contre Aston Villa à Villa Park en demi-finale, où il joua sous infiltrations avec une fracture à l’orteil. Homme du match contre les Villans à l’extérieur. Travaillait dans un supermarché Co-op de Bradford jusqu’à son premier contrat pro en 2009 (il y fait d’ailleurs toujours ses courses). Les supporters lui ont dédié un chant court mais sympa : « Avant il bossait au Co-op du coin, au Co-op du coin, au Co-op du coin, etc. » Au club depuis 2009.

Egalement :

Curtis Good. Arrière central ou latéral gauche, 19 ans. Australien prêté par Newcastle, qui le refourgua illico en se rendant compte qu’il n’était pas français (donc sans intérêt) après l’avoir acheté à Melbourne pour 250 000 £. Selon Matt Duke, Good dort tellement que l’équipe est persuadée qu’il ne s’est pas encore remis du décalage horaire (il est en Angleterre depuis sept mois). International U20 australien et promis à un bel avenir dans le football selon Duke. A bien neutralisé le Villan Andreas Weimann en demies à domicile. Au club depuis 3 mois.

Carl McHugh. Défenseur, 19 ans. International irlandais U19, excellent durant toute cette campagne. Pas le plus athlétique des arrières mais solide et impressionnant face à Villa. Y est même allé de son but contre les Villans (et depuis, se fait charrier). Au club depuis l’été dernier.

Nathan Doyle. Milieu polyvalent (aussi latéral droit et ailier), 26 ans. Formé à Derby County, ex international anglais chez les Jeunes (des U16 aux U20). Transfuge de Barnsley, D2 (100 apparitions en trois saisons). Au club depuis l’été dernier.

Garry Thompson. Avant-centre / ailier / milieu offensif, 32 ans. Transfuge de Scunthorpe (D2 – D3). Très rapide et technique, a marqué contre Arsenal en quart. Se fait copieusement chambrer pour sa ressemblance avec James Bond-Daniel Craig. Au club depuis l’été dernier.

L’effectif complet en photos.

Avant le match, les Bantams s’échaufferont en survêtement commémoratif du drame de Valley Parade le 11 mai 1985 (voir footnotes première partie de ce dossier et ici), tenues floquées du numéro 56 correspondant au nombre de morts ce jour-là (265 blessés). Pour le manager Phil Parkinson, dans le Times du 20 février, Valley Parade est la « tragédie oubliée » du football anglais.

Deux bonnes anecdotes Bantams pour le prix d’une

Le Dungeon. C’est le surnom du vestiaire extérieur de Valley Parade. De l’avis de tous, l’un des plus pouilleux du football anglais. Il n’y a que 8 douches, confinées dans un espace étriqué, difficile de se doucher à plus de cinq. Un endroit récemment décrit par un dirigeant de Bradford comme squalid (infect). Trois toilettes seulement, au bout d’un long couloir et à partager entre les deux équipes. Selon Paul Rowan, journaliste au Times, les équipes visiteuses se plaignent souvent de l’état des lieux et certains joueurs, de rage, n’hésitent pas à vandaliser les WC ! Selon la légende, quand Arsenal affronta Bradford en 2001 en championnat, Wenger ordonna à l’équipe de filer directement dans le bus, sans passer par la case toilettes-douches !

Bradford City, sur le toit du monde

Bradford City, sur le toit du monde (FOBC = Friends Of Bradford City, groupe de supporters)

Paul Deo, le prêtre chambreur. Ce vicar (pasteur) qui sermonne dans une église de York (à 50 kms de Bradford) est aumônier à Bradford City, une fonction prise très au sérieux dans les clubs anglais (deux tiers d’entre eux en ont un).

Mais Paul Deo est également speaker à Valley Parade et c’est un charrieur de première. Le 8 janvier dernier, Bradford terrasse les Villans 3-1. Après le match, une fois les joueurs rentrés aux vestaires, le spirituel curé gratifie ses ouailles d’une homélie prophétique au micro du stade :

« Allez-y mes enfants, vous pouvez déjà réserver votre chambre d’hôtel à Londres pour la finale à Wembley le 24 février. »

[devant la polémique soulevée quelques jours avant le match retour (!), Deo donnera une version plus édulcorée de ses propos ce soir-là – on l’accusa aussi d’avoir « écorché les noms des Villans » pendant la présentation des équipes et d’avoir réagi wildly sur chacun des trois buts Bantams… Tant est si bien que, selon le Daily Mail – que nous croirons exceptionnellement sur parole pour l’intérêt burlesque de l’affaire – quelques supporters Villans se plaignirent des agissements du curé auprès de la police ! ici]

Quelques jours avant le match retour à Villa Park, Paul Lambert apprend les mots du curé allumeur de la bouche d’un journaliste. Au lieu d’en sourire et pardonner au prêtre pécheur, l’Ecossais se braque (ce qui en dit long sur la fébrilité et l’état d’esprit régnant dans ce club) :

« S’il a vraiment dit ça, il nous a manqués de respect. Il ne faut pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. C’est irrespectueux d’agir de la sorte. On verra ce qui se passera après le match. […] Il y a quinze jours, c’était chez eux. Mais je le redis, je trouve ça irrespectueux de faire ça à d’autres équipes. »

Se faire pourrir par un curé et mordre à l’hameçon, on aura tout vu du côté de Villa cette saison. Du côté de Bradford, on est tellement plus zen. Peut-être parce que leur supporter numéro 1 est… le dalaï-lama.

Kevin Quigagne.

PS : quand on ne fait pas du tourisme à Doncaster ou du lèche-vitrine (sans « s », y’en a qu’une) à Wigan, il nous arrive de poster sur Facebook et Twitter.

Dernière minute : A voir absolument ce double reportage de Philippe Auclair sur Bradford City.

Dimanche 24 février, se disputera la plus improbable des finales de coupe : Bradford (D4) contre Swansea (Premier League). Mieux. Cette finale de League Cup, entre deux clubs aux parcours furieusement inverses depuis 2000, tient du miracle. Et avec la succession de glauqueries qui polluent le football britannique depuis plusieurs saisons, cette grosse bouffée d’air frais arrive à point nommé.

C’est Michael Laudrup, le manager de Swansea, qui a le mieux résumé cette finale au lendemain de la qualification des Swans pour Wembley : « Ce match opposera le petit conte de fée au grand conte de fée. »

Conte de fée. Si ce terme taillé pour la coupe est souvent galvaudé, il prend ici tout son sens. Deux fairytales aux trames diamétralement contraires et hors normes, et bien malin qui pourrait désigner avec certitude le minot de ce conte enchanté.

Aujourd’hui, deuxième partie : Swansea City. Pour en connaître un rayon sur les Swans sans se fatiguer, lire cet article TK d’août 2012.

[tous chiffres en £]

Swansea, l’anti Bradford

3 mai 2003, dernière journée de D4. Stade déglingué de Vetch Field (aka The Vetch), Swansea. Le club joue sa survie et affronte Hull City, 13è. La mission est claire : gagner, sinon  descente en non-League et quasi certitude d’un deuxième redressement judiciaire en trois ans.

Il faudra un miracle pour que les Jacks (leur autre surnom) restent en Football League : un hat-trick de leur avant-centre James Thomas (admirez le travail, à la Messi : 9’30 sur ce clip). Victoire 4-2 et maintien arraché d’un petit point. Ironie de l’histoire, ce Thomas qui joua les urgentistes ce jour-là était ambulancier dans le civil ! (plusieurs joueurs étaient semi-pros).

A noter que Leon Britton, l’actuel brillant milieu de terrain Swan (il vient de prolonger), était déjà là ainsi que le défenseur Alan Tate. On retrouve aussi dans cette équipe… Roberto Martinez, le sorcier de Wigan.

Car ce Swansea version 2012-13, classieux et dominateur, revient de loin, de très loin.

Janvier 2002, les supporters se révoltent et reprennent Swansea City pour de bon, las de voir leur club dirigé par des propriétaires incompétents et absents. Quelques mois auparavant, 600 d’entre eux avaient créé le Swans Trust et racheté une partie du club après les difficultés financières du début des Noughties (années 2000) quand Swansea fut reprit à la hussarde par un consortium anglo-australien qui se débarrassa de 15 joueurs dès son arrivée, provoquant l’ire des instances et des fans.

L’experience aussie tourna court avant que les supporters, assisté de Huw Jenkins (ci-dessus), l’actuel président Swan, ne prennent le contrôle des opérations (détails dans cet article). Ces mêmes supporters qui se cotiseront pour payer une partie des salaires de l’effectif, régler les factures du club et feront appel aux bonnes volontés (artisans bénévoles) pour rendre le vétuste Vetch plus présentable (peinture, remplacement des sièges abîmés, etc.).

En 2004, Swansea est toujours en D4 quand survient le premier véritable tournant sportif du club depuis belle lurette : l’arrivée du manager Kenny Jackett (aujourd’hui à Millwall où il fait du bon travail depuis 2007). Jackett imprime patiemment son style, celui voulu par le board : une équipe organisée pratiquant un football de possession et le plus près possible du sol. Un pari qui s’avère payant. Les Swans montent en D3 en mai 2005 et déménage dans la foulée au Liberty Stadium (20 750 places), élément vital de leur réussite.

Le déclic arrive en 2007

Février 2007, no Jackett required, Kenny est limogé. Arrive Roberto Martinez (ci-contre), l’ex capitaine des Swans (2003-06) joue désormais à feu Chester City (D4). L’Espagnol a 33 ans et c’est son premier poste d’entraîneur.

Débute ce que les médias appelleront « The Swansea Revolution » (puis Swanselona). Roberto confère au club une aura supplémentaire et surtout fait monter les Jacks en D2. Ce faisant, il établit les bases de la success story dont l’apothéose sera la montée en Premier League en 2011.

L’Espagnol sert aussi de mentor à quelques entraîneurs locaux, dont Ian Holloway, l’actuel manager de Crystal Palace (le Bristolien, pendant sa saison sabbatique en 2008-09, l’observera de près et a souvent dit depuis s’être largement inspiré de son style offensif). Sous sa direction, et avec une masse salariale de seulement 6M en 2009, Swansea rate de peu les play-offs d’accession à la PL (8è).

Eté 2009, Martinez cède aux sirènes de Premier League et part à Wigan. Arrive le Portugais Paulo Sousa (1er ci-dessous), qui continue l’oeuvre commencée en 2004 par Kenny Jackett. De nouveau, Swansea échoue de peu aux portes des barrages (7è).

Eté 2010, c’est au tour de Brendan Rodgers de s’essayer à la montée. On connaît la suite, le Nord-Irlandais hissera les Swans en PL au deuxième essai.

Laudrup débarque l’été dernier. A l’instar de ses prédécesseurs, il prône un football offensif en 4-3-3, un jeu en triangle basé sur la possession, le pressing et le contre. Le style est plus direct et tranchant que sous Rodgers. Assurément, le Danois était le candidat idéal pour faire fructifier le précieux héritage légué par le trio Martinez-Sousa-Rodgers et s’inscrire dans ce continuum, cette « philosophie » tant recherchée par le président Huw Jenkins et le board dès 2002.

Une volonté de beau football qui trouve ses racines dans le jeu pratiqué par Swansea… il y a soixante ans. Comme l’explique l’attachant Jenkins (lifelong fan du club) qui parle souvent de « vision », dans le Times du 10 janvier dernier :

« J’ai fait des recherches sur le jeu de Swansea dans les années 50, en D2. On avait des gars comme les frères Ivor et Len Allchurch [Ivor est le meilleur buteur du club, 164 buts], Cliff Jones, Harry Griffiths et ça jouait au ballon, croyez-moi ! »

Plan à long terme, philosophie de jeu, stabilité, tradition… Ce club a tout pour réussir et s’installer durablement en Premier League. Et l’avenir s’annonce radieux : un permis d’agrandissement du stade (à 32 000 places) vient d’être deposé pour satisfaire la forte demande. Les finances sont également au beau fixe, avec des derniers comptes (exercice 2011-12) qui feraient pâlir d’envie tous les chairmen du foot anglais : presque 15M de bénéfices (pour un  chiffre d’affaires de 65M).

Le parcours des deux finalistes

Pour plus de détails, voir tableau de la League Cup 2012-13.

Bradford (les joueurs Bantams seront présentés dans la dernière partie)

Premier tour (70 clubs) : Notts County (D3) 0 – Bradford 1

11 août 2012, tour de chauffe de la coupe maudite. Quiconque aurait dit ce jour-là que Bradford, qui a fini 18è de D4 trois mois auparavant, sortirait 3 Premier League – dont Arsenal – et jouerait la finale à Wembley le 24 février 2013 serait passé pour un fou. Bradford est coté 2 000 contre 1 pour décrocher la League Cup.

Victoire à l’arrache après prolongations, alors qu’un joueur de Notts County rate un immanquable (et donc la qualification) à trois mètres du but à la 91è… James Hanson marque d’un brossé en lucarne dans la prolongation.

2è tour (50 clubs) : Watford (D2) 1 – Bradford 2

Mené 1-0 à la 84è par la bande à Gianfranco Zola, Bradford égalise à la 85è. Puis Garry Thompson marque le but victorieux, à la 93è !

16è de finale : Bradford 3 – Burton Albion 2 (D4)

Bradford se retrouve une nouvelle fois mené et sévèrement : 2-0 à sept minutes de la fin… Avant que l’avant-centre Nakhi Wells ne plante un doublé aux 83è et 90è ! Extra-time. A la 115è, l’ex latéral de Liverpool, Stephen Darby, inscrit le but des huitièmes d’un tir sec.

Trois tours et autant de qualifications in extremis… On commence à se dire que ce Bradford en état de grâce permanent peut surprendre.

8è de finale : Wigan (PL) 0 – Bradford 0

(vainqueur 4-2 aux tirs aux buts, après prolongations)

Quart de finale : Bradford 1 – Arsenal 1

(vainqueur 3-2 aux tirs aux buts, après prol.). Gary Jones, capitaine des Bantams, déclare :

« On a joué Torquay récemment et ça a été plus dur de les battre qu’Arsenal ! »

(les Bantams aiment chambrer… – dans la dernière partie)

Demi-finale (match aller-retour, 8 et 22 janvier)

Bradford 3 – Aston Villa 1

Superbe match des Yorkshiremen qui asphyxient un piètre Villa dominé dans tous les compartiments du jeu (certes, Bentenke, N’Zogbia et Agbonlahor ont copieusement vendangé). Et les spectateurs (22 300, dont 4 000 Villans) de chanter : « Are you Arsenal in disguise ? » et « Can we play you every week ? »

Aston Villa 2 – Bradford 1

Les Bantams restent sur une mauvaise série en championnat : 1 seul point de pris sur les 4 derniers matchs. On se dit que Villa va faire au moins aussi bien que les trois clubs de D4 qui ont dernièrement battu Bradford, dont le minuscule Barnet d’Edgar Davids (entraîneur-joueur) qui vient de corriger les Yorkshiremen 2-0 à Valley Parade.

Parkinson aligne le même XI qu’à l’aller. Inaugurant une nouvelle stratégie de combat, Aston Villa donne un petit drapeau à chacun de ses supporters (40 000 – moins les 6 500 Bantams). Ils l’agitent beaucoup mais ça ne suffit pas, malgré la forte domination Villan (60 % de possession et 21 tentatives de but – mais 6 cadrées seulement) et un dispositif ultra offensif – sorte de 3-1-2-4 – dans la dernière demi-heure.

Scènes de liesse Bantams sous la neige de Birmingham, les supporters entonnent un triomphal « Que sera, sera, we’re going to Wem-ber-ley, que sera sera ». Première finale de coupe depuis… 1911 ! (FA Cup remportée sur Newcastle). La dernière visite des Bantams à Wembley remontait à 1996 (finale des play-offs de D3, Bradford était alors managé par Chris Kamara – si, si, Chris Kamara a bien été manager ! Cette saison-là, Swansea descendait en D4…).

Bradford a déjà engrangé 1,3M £ lors de cette campagne League Cup (surtout en billetterie) et recevra 1M supplémentaire après la finale, principalement en billetterie (45 % des recettes Wembley) et droits télé – les sommes versées au vainqueur / finaliste sont négligeables, respectivement 100 000 et 50 000 £. Les joueurs toucheront eux un pactole de 250 000 £.

Comme le révèlait le site Sporting Intelligence le 23 janvier (ici), si Bradford décrochait la timbale, il deviendrait le seul club de D4 à avoir remporté une coupe nationale dans les 100 premiers pays au classement Fifa. Seul le Sri Lanka Navy a réalisé cette prouesse (le Sri Lanka n’est cependant que 190è à  la Fifa). Toutefois, Navy était un club de D1 relégué en D4 pour des raisons bien particulières Et si Bradford City triomphait, cela transporterait de bonheur Bradford-ville, une cité multiculturelle de 500 000 habitants qui a souvent mauvaise presse.

Le parcours de Swansea

2è tour : Swansea 3 – Barnsley (D2) 1

16è : Crawley (D3) 2 – Swansea 3

8è : Liverpool 1 – Swansea 3

Quart de finale : Swansea 1 – Middlesbrough (D2) 0

Demi-finale :

Chelsea 0 – Swansea 2
Swansea 0 – Chelsea 0

Quelques chiffres

Bradford

Swansea

Budget

4M

65M

Coût total de l’effectif

7 500

26M

Masse salariale (2011/12)

1,3M

35M

Prix (plancher) abonnement adulte

299*

449

Prix billet adulte

20**

35**

Affluence moyenne (2012/13)

10 044

20 329

(*199 £ en early bird, acheté à l’avance ; **Prix unique stade)

Kevin Quigagne.

Dimanche 24 février, se disputera la plus improbable des finales de coupe : Bradford (D4) contre Swansea (Premier League). Mieux. Cette finale de League Cup, entre deux clubs aux parcours furieusement inverses depuis 2000, tient du miracle. Et avec la succession de glauqueries qui polluent le football britannique depuis plusieurs saisons, cette grosse bouffée d’air frais arrive à point nommé.

C’est Michael Laudrup, le manager de Swansea, qui a le mieux résumé cette finale au lendemain de la qualification des Swans pour Wembley : « Ce match opposera le petit conte de fée au grand conte de fée. »

Conte de fée. Si ce terme taillé pour la coupe est souvent galvaudé, il prend ici tout son sens. Deux fairytales aux trames diamétralement contraires et hors normes, et bien malin qui pourrait désigner avec certitude le minot de ce conte enchanté.

A tout saigneur, tout honneur : Bradford ayant sorti trois clubs de Premier League pendant cette campagne (!), aux Bantams d’ouvrir le bal.

[tous chiffres en £]

Les Bantams

Les Bantams, à Villa Park, fêtant leur billet pour Wembley

Une finale « salutaire » pour le moral du foot britannique

Une finale décrite ainsi par Mike Harrison, rédacteur en chef du principal fanzine du club, The City Gent, depuis 1984 (l’un des premiers du pays et le plus vieux en circulation) :

« Cette finale est un coup de fouet salutaire pour les supporters désabusés par le gouffre sans cesse grandissant entre les clubs riches et pauvres. Notre épopée a ravivé la flamme de la passion que beaucoup pensaient avoir perdue dans le football d’aujourd’hui. Les exploits de Bradford rappellent à tous les supporters des petits clubs anglais qu’il faut oser rêver. Ces épopées semblaient appartenir au passé mais tout est possible, toujours. Dans cinquante ans, on parlera encore de notre parcours de rêve. »

Flashback, début des Noughties (années 2000). Bradford évolue en Premier League et dépense sans compter tandis que Swansea, descendu en D4, ferraille devant à peine 3 000 inconditionnels pour ne pas sombrer en non-League [1], sorte de Triangle des Bermudes du football anglais (cf Luton Town ou Grimsby).

Tout l’effectif Bantam a coûté le tiers d’une beuverie téquila-champagne avec Patrice Evra : 8 750 €.

Puis, en 2001, l’énorme bulle éclate à la face des Bantams et la spirale cauchemardesque s’enclenche : dettes faramineuses (jusqu’à 40M £), descente en D2 (il y en aura trois en six saisons) et redressement judiciaire en 2002 (un autre suivra en 2004). Depuis 2007, Bradford est englué en D4 et toujours endetté. Pour preuve, le XI qui sortit Aston Villa en demi-finale le mois dernier a coûté… moins cher qu’une voiture bas de gamme, 7 500 £ ! En fait, c’est tout l’effectif Bantam qui est revenu au tiers d’une beuverie téquila-champagne avec Patrice Evra et au dixième d’une soirée Las Vegas du Secret Footballer…

=

Parallèlement, après les heures sombres de 2000-03, Swansea est repris par les supporters, avec à leur tête Huw Jenkins, homme d’affaires local. Une ascension fulgurante jusqu’au sommet de la Premier League, largement réalisée à la force du mollet et grâce à des choix de personnel réfléchis (dans le dernier volet).

Bradford City, ex kakou de Premier League

S’il fallait résumer le Bradford City des quinze dernières années par une expression anglaise souvent utilisée en sport, rise and fall irait comme un gant. Car peu de clubs britanniques se sont élevés aussi haut avant de tomber si bas (ah si, un autre… Swansea City ! voir leur wiki).

Mai 1999. Sous la houlette du manager Paul Jewell, les Bantams finissent 2è de D2 et rejoignent l’élite qu’ils n’ont plus revu depuis 1921 quand, devant 30 000 spectateurs bien souvent, il se tiraient la bourre avec Bradford Park Avenue, l’autre (ex) grand club local (aujourd’hui semi-pro en D6).
Bradford est aussi une ville de rugby (Bradford Bulls, jeu à XIII, celui de la working-class) où les Manchots ont toujours eu du mal à exister. Pour illustration, les affluences moyennes de Bradford City dans les Sixties et Seventies : à peine 5 000 (époque où la ville connut un fort déclin économique,
effondrement du commerce du coton et textile notamment).

Eté 1999, Geoffrey Richmond, le propriétaire du club depuis 1994, est ambitieux et veut de la vedette. De l’avis général, il a dirigé feu Scarborough FC pendant six ans avec brio et vient de vendre son entreprise pour 10M £. Tout lui sourit et les supporters sont confiants. Ce dont personne ne se doute est que la fortune (relative) de Richmond s’est bâtie sur du sable (entre autres malversations, il a « omis » de payer 3M d’impôts – il sera condamné en 2004) et que ses penchants mégalomaniaques précipiteront le club dans une crise d’une ampleur rare dans le football anglais.

Une tripotée de cadors, has-beens et could-have-beens passeront par Valley Parade entre 1999 et 2001 (achats et prêts), sans y laisser un souvenir impérissable. La liste (non exhaustive) est impressionnante pour un petit club de Premier League. Pêle-mêle, citons : Stan Collymore, Benito Carbone (ci-dessous), Jorge Cadete, Dan Petrescu, Lee Sharpe, Dean Saunders, David Hopkin (acheté 2,5M à Leeds, record du club), Ashley Ward, Peter Atherton, Andy Myers et Ian Nolan.

Sans oublier notre Bruno Rodriguez national qui, dans cette interview de 2010 ne semble pas avoir réalisé que Bradford évoluait en Premier League. Pour lui, Bradford, c’était de la D3… Mettons cette légère méprise sur le compte du piètre niveau d’anglais de l’ex Parisien et de l’état des vestiaires qui ont pu lui faire penser à un club amateur (nous les visiterons dans la dernière partie, prévoyez de vieilles fringues).

Parmi tous ces noms ronflants (pour un habituel pensionnaire de Football League), Dan Petrescu et Benito Carbone laisseront les plus amers souvenirs. Carbone est recruté d’un Sheffield Wednesday à la dérive et qui amorce sa longue descente aux enfers. L’Italien, brillant avec les Owls, floppera et deviendra une hate figure du club. Son salaire de 180 000 £ / mois sera jugé obscene. De plus, pour s’en « débarrasser », il faudra lui verser 800 000 £, sans bien sûr pouvoir le vendre…

Lors de l’ultime match de sa première saison en PL, le club joue quitte ou double. 14 mai 2000, 38è journée, celle de la dernière chance. Problème : Bradford accueille Liverpool, 3è. Miraculeusement, les Bantams se maintiennent, grâce à un but du défenseur David Wetherall et d’une performance défensive héroïque. Avec aussi un moment émotionnel très fort ce jour-là entre Bradford et Liverpool (unis dans la tragédie pour des raisons évidentes) qui observeront une minute de silence pour les quinze ans du drame de Valley Parade (voir article TK) [2].

Une gueule de bois à 40 millions

La deuxième saison de PL, la mayonnaise ne prend pas entre les « vedettes » et Bradford finit bon dernier avec 26 misérables points. Les détracteurs surnomment l’équipe vieillissante la « Dad’s Army de la Premiership », du nom d’un célèbre sitcom anglais des Seventies où un groupe de vétérans gaffeurs est enrôlé dans la Home Guard.

L’après-Premier League sera terrible. A l’instar du voisin Leeds United (à une moindre échelle), que les dirigeants couleront peu après en déclarant haut et fort avoir « lived the dream » [3], le club a maximisé les risques pour rester en PL. Bradford a « chased the dream » dira plus tard le président-propriétaire d’alors, G. Richmond (ci-dessous).

Le rêve s’est envolé mais pas la gueule de bois. Le club est financièrement exsangue et le bout du tunnel est encore loin, il faut par exemple rembourser le coûteux agrandissement du stade (de 18 000 à 25 000 places) entrepris par Richmond, à coups d’emprunts et montages risqués. La spectaculaire faillite de ITV Digital (en 2002), le seul bailleur de fonds de la Football League, finira d’enfoncer les West Yorkshiremen. Saison 2001-02, Bradford se retrouve en D2 avec une pléthore de contrats mirololants (et sans « clause de relégation ») sur les bras.

L’inévitable arrive : redressement judiciaire en 2002, avec 13M de dettes à la clé… (chiffre qui triplera en quatre ans). L’administrateur judiciaire ne fait pas dans la dentelle : d’emblée, il brade ou licencie 16 joueurs, soit les deux tiers de l’effectif professionnel.

L’euphorie de 2000 n’est alors plus qu’un très lointain souvenir ; l’heure est desormais aux réglements de comptes et autres mea-culpa embarrassants. Les dirigeants jurent qu’ils auraient préféré ne jamais connaître la Premier League. Geoffrey Richmond lui-même :

« Jamais, jamais je ne me pardonnerai d’avoir dépensé autant. A la réflexion, ces six semaines [d’acquisition tous azimuts – été 2000] furent de la pure folie et j’en porte l’entière responsabilité. On s’est emballés, beaucoup pensaient que nous pouvions rester en Premier League encore longtemps. »

Eté 2002, Richmond quitte Bradford, « pour le bien du club » avancera-t-il laconiquement [4]. Les frères Rhodes (Julian – ci-contre – et David), déjà « investisseurs » du club depuis le milieu des années 90, prennent le relais, assisté de Gordon Gibb, homme d’affaires local qui possède Flamingo Land, un parc d’attractions du Yorkshire qui fait dans la montagne russe. Tout un symbole.

Attention, chute (libre) de club

En 2003, pour assurer la survie du club (désormais managé – ou plutôt maintenu sous perfusion – par l’ex Red Devil Legend Bryan Robson), le stade de Valley Parade est vendu à une société appartenant… au co-propriétaire Gordon Gibb. Ce dernier le sous-loue au club, pour une fortune (les chiffres oscillent entre 380 000 £ et 700 000 £ / an). Un problème épineux et toujours d’actualité.

Début 2004, rebelote, deuxième redressement judiciaire. Les dettes ont atteint un niveau stratosphérique : 36M £. Bradford est relégué en D3. De nouveau, les Bantams sont sauvés par les Rhodes, qui injectent plusieurs millions de £ pour rembourser les principaux créanciers. Les supporters en ont ras l’obole mais se mobilisent : 300 000 £ collectés.

Mai 2007, le club dégringole en D4. Pour fidéliser un public en baisse (tout de même 8 700 spectateurs de moyenne en 2006-07), Bradford innove avec une batterie d’offres originales (voir ici). L’abonnement Adulte est par exemple fixé au tarif le plus bas du pays : 138 £ (pour 23 matchs). Les affluences monteront à 12 700 de moyenne en 2008-09.

Eté 2007, arrive alors le businessman Mark Lawn (ci-contre), un lifelong fan qui met 3M sur la table pour éponger le gros des dettes.

Quatre managers (dont la club legend Stuart McCall) se succéderont de janvier 2010 à l’arrivée de Phil Parkinson en août 2011 (ci-contre).

« Parky » débarque avec un bilan contrasté. Il a certes hissé le petit club de Colchester en D2 mais ce succès fut suivi d’un échec à Hull (alors en D3), puis d’une expérience mitigée à Charlton (Premier League) où il est d’abord l’adjoint d’Alain Pardiou (l’actuel Consul de France à Newcastle) avant de lui succéder en novembre 2008. Les Addicks sont alors redescendus en D2. Charlton, en proie à de graves difficultés (fin de l’ère mouvementée Simon Jordan – propriétaire, 30M de dettes), descendra en D3 sous sa coupe. Parkinson sera limogé en janvier 2011.

La saison dernière, le club évite la descente en non-League de peu. En décembre 2011, Bradford occupait la 22è place de D4 (sur 24, plus basse position jamais atteinte par un ex club de Premier League) avant finalement de finir l’exercice 18è.

Bradford végète en D4 depuis 2007 (10è en 2008, 9è en 2009, 14è en 2010, 18è en 2011 et 2012) et a beau aller mieux sportivement aujourd’hui, les supporters se plaignent du status quo apparent. Mais comme le disait lui-même Mark Lawn dans une récente interview à la chaîne de radio Talksport :

« Si la famille Rhodes n’avait pas remboursé les dettes et stabilisé le club, les Bradfordiens supporteraient aujourd’hui Bradford Park Avenue [D6] car soit on n’existerait quasiment plus, soit BPA serait dans une division au-dessus de nous. Je ressens beaucoup de plaisir à diriger le club mais aussi du stress. J’ai pris 30 kilos depuis que je m’investis dans Bradford et ma santé a terriblement souffert ! »

Cette saison, après avoir longtemps occupé les places de play-offs (4è à 7è), les distractions de la coupe ont fait rétrograder Bradford en milieu de tableau.

Quelques jours avant la victoire sur Aston Villa en demi-finale, Bradford s’inclinait sèchement face à Barnet (2-0). De surcroît, le club est toujours en difficulté financière : pertes de 4M £ pour l’exercice 2010-11, derniers chiffres disponibles. Rien que la location et l’entretien du stade coûteraient 1,3M £ / an au club, soit le montant de sa masse salariale. Les 2,5M engrangés pendant l’aventure League Cup seront les bienvenus.

Kevin Quigagne.

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[1] Divisions situées sous la Football League, D5 et au-delà. Seule la D5 est professionnelle – à 80 % – le reste est semi-pro (D6, voire D7) et amateur. La différence principale entre la D4 et le premier échelon de la non-League (D5) se situe au niveau a) de l’exposition médiatique donc, logiquement, b) des revenus médias.
a) La D4 est diffusée par Sky (et BBC, résumés), tandis que la D5 doit se contenter de Premier Sports, une chaîne câblée confidentielle.
b) Le minimum revenus médias garanti en D4 est d’environ 600 000 £ / an. Un club de D5 ne touchera qu’environ 10 000 £.
[2] Un récent numéro de So Foot (le # 100) y consacre un papier intéressant, malheureusement entaché de deux erreurs de taille :
1) Dans le chapô est écrit : « […] faisant de ce match le premier drame du football anglais… »
Non. Avant Bradford, il y eut le tristement célèbre Burden Park disaster, 33 morts et plus de 400 blessés.
Un stade rendu fameux par Going to the Match, le tableau de L.S. Lowry, le « peintre de la working-class », acheté aux enchères en 1999 par la PFA (syndicat des joueurs) pour 1,9M £. Il est habituellement accroché au siège de la Football Association (mais parfois prêté, récemment au National Football Museum de Manchester). En mai 2011, un autre tableau de Lowry sur le football s’est vendu aux enchères – pour 5,6M –, The Football Match (et pour ceux qui seront à Londres entre la fin juin et octobre 2013, la Tate Britain consacrera à Lowry sa première exposition).
2) Dans la dernière partie est écrit : « A la suite de ce drame [Bradford], le football britannique prend un virage important dans son histoire : la sécurité dans les stades devient une priorité. »
Non. Certes, un rapport sur la sécurité dans les stades fut rédigé en janvier 1986 (le Popplewell Report) mais vite royalement ignoré. Ce n’est qu’après la tragédie d’Hillsborough le 15 avril 1989 qu’un réel virage fut pris et que la sécurité dans les stades devint une priorité (rapport Taylor).
Le Popplewell Report était le huitième rapport de ce type depuis le premier, le Short Report de 1924 (voir article TK), qui portait sur la toute première finale de FA Cup disputée à Wembley, la célèbre White Horse Final de 1923 : 1 000 blessés, bousculade monstre due à la surpopulation (voir fascinant clip d’époque).
On estime que 300 000 personnes furent admises ou entrèrent illégalement dans Wembley ce jour-là pour une capacité maximale de 127 000 places. Hormis les ventes de joueurs, la billetterie représentait la seule ressource des clubs et il était alors habituel de vendre plus de billets qu’autorisé, parfois trois fois plus ! L’organisation souvent chaotique faisait le reste (la finale de FA Cup 1893 se disputa ainsi devant environ 60 000 spectateurs, au stade mancunien de Fallowfield, d’une capacité de… 15 000 places).
[3] Selon le fameux mot de Peter Ridsdale, ex président fossoyeur de Leeds United. Depuis octobre dernier, Ridsdale est enfin sous le coup d’une interdiction d’exercer toute fonction de director dans une entreprise anglaise, ici.
[4] Geoff Richmond réapparaîtra peu après dans l’organigramme de Leeds United, avant que les Whites n’implosent. Plus tard, en épluchant les comptes de Bradford, l’administrateur judiciaire constatera que Richmond s’est versé de généreux dividendes et « frais de consultations » d’au moins 2,5M. Idem pour son associé Julian Rhodes, jusqu’à 8M – toutefois, Rhodes remboursera intégralement cette somme et poursuivra son association avec le club dont il est maintenant co-président.

Manchester United affrontera le Real Madrid mercredi soir à Bernabeu. Ainsi en décida la main heureuse de Steve McManaman, « l’ambassadeur » de la Ligue des Champions 2012-13, lors du tirage au sort effectué le 20 décembre. L’occasion de revenir sur les rencontres du passé entre ces deux monstres sacrés.

La réaction initiale, logique et saine, fut de saliver abondamment en pensant à la confrontation Mourinho-Ferguson [1] ainsi qu’au grand retour de Cristiano à OId Trafford et son duel à distance avec Rooney.

Mais cette affiche de rêve comporte une dimension supplémentaire, historique. A l’évocation des grands noms d’antan (le club de Di Stéfano, Kopa, Gento et Puskas contre celui des Edwards, Viollet, B. Charlton, Law et Best), ce quart de finale revêt une saveur particulière. Et en se replongeant dans l’album souvenirs, on se remémore vite pourquoi.

1957. Demi-finale Coupe d’Europe des clubs champions

11 avril 1957. Real Madrid 3 – Manchester United 1 (135 000 spectateurs). Clip du match.

25 avril 1957. Man United 2 – Real 2 (65 000).

Extraits du match sur ce clip d’époque (à 1’55, le pauvre Torres se fait écarteler de toute part).

Première campagne européenne pour Man United [2], le progressiste manager Matt Busby ayant choisi d’ignorer en mai 1956 le mot d’ordre du vice-président de la  Football League, Alan Hardaker, à savoir de boycotter cette compétition [3]. Prix du billet à Old Trafford pour l’occasion : deux shillings, soit 10 pence… (0,12 €) [4].

Pour leur baptême du feu européen, les Mancuniens sont servis : Bernabeu est archicomble, 135 000 spectateurs (le record pour un match de Man United). Les champions d’Europe en titre s’avèreront trop forts pour Bobby Charlton et les jeunes pousses de Matt Busby, les fameux Busby Babes.

A l’aller, les Red Devils parviennent à repousser les coups de boutoir des Madrilènes jusqu’à l’heure de jeu mais s’écroulent dans la dernière demi-heure. Les Espagnols n’ont pas que leur talent à faire valoir. Physiquement, ils en imposent et la presse anglaise se dira « choquée » par le jeu rugueux des Merengues. « Meurtre à Madrid » titrera sobrement feu le Daily Herald.

Au retour, sous les tous nouveaux projecteurs d’Old Trafford qui accueille son premier match européen (les trois tours précédents se sont disputés à Maine Road car il dispose d’un éclairage), menés 2-0 à l’heure de jeu, les Mancuniens égalisent brillamment à 2-2 grâce à Tommy Taylor et Bobby Charlton. United, logiquement, s’inclinera toutefois devant la bande à Raymond Kopa, Alfredo Di Stéfano et Francisco Gento, 5-3 sur l’ensemble des deux matchs.

Roger Byrne et Miguel Munoz

Roger Byrne et Miguel Munoz

L’avant-centre T. Taylor marquera deux fois, à l’aller et au retour, et finira deuxième meilleur buteur de la compétition, avec 8 réalisations (derrière son coéquipier Dennis Viollet, 9). Taylor et Viollet, les Rooney et Van Persie de l’époque, un phénoménal tandem à 309 buts en 485 matchs.

Un mois plus tard, le Real raflera le deuxième trophée européen de son magistral quintuplé 1956-1960. De son côté, United décrochera son deuxième titre de champion d’Angleterre consécutif et troisième de l’ère Busby (l’Ecossais avait repris l’équipe début octobre 1945), après ceux de 1952 et 1956, ainsi qu’une FA Cup en 1948. Ce bon Matt qui avait mis fin à une interminable disette : 41 ans pour le dernier titre national – 1911, voir article TK – et 39 ans sans FA Cup.

Le 6 février 1958, la tragédie du crash de Munich décimera l’équipe, faisant 8 morts (dont le susnommé Tommy Taylor, 112 buts pour United) et 9 blessés parmi les joueurs [5].

1968. Demi-finale Coupe d’Europe des clubs champions

24 avril 1968. Man United 1 – Real 0 (63 500).

15 mai 1968. Real 3 – Man United 3 (125 000). Clip du match.

1968, dix ans après la tragédie de Munich et la refonte quasi complète de l’équipe par Matt Busby (championne d’Angleterre en titre, 1967). La Holy Trinity de Bobby Charlton-Denis Law-George Best a remplacé les Busby Babes.

Charlton, un Busby Babe qui survécut au crash de Munich, est devenu une vedette. Et dix ans que Busby rêve d’un triomphe européen, qui serait à la fois synonyme d’hommage aux disparus de Munich et de revanche sur ce foutu destin…

A l’aller, contrairement au superbe affrontement d’avril 1957 entre les deux équipes à Old Trafford, le match est terne et tendu. Une lumineuse reprise instantanée de George Best fait néanmoins la différence en faveur des Mancuniens.

Le retour sera radicalement différent et compte parmi les plus beaux matchs de United en Europe. Matt Busby décide d’adopter un jeu offensif, raisonnant que devant un Bernabeu en ébullition, la meilleure défense est forcément l’attaque.

Malgré les velléités conquérantes de United, les Madrilènes ne font qu’une bouchée de United qui se retrouve mené 3-1 à la mi-temps, le pion mancunien étant un own goal.

15 mai 1968. Tête du petit dernier... Brian Kidd (l'ex adjoint d'Alex Ferguson et actuel adjoint de Mancini)

15 mai 1968. Tête du petit dernier... Brian Kidd (l'ex adjoint de Fergie et actuel bras droit de Mancini)

Après la pause et une causerie churchillienne de Matt Busby, les rôles s’inversent. Le Real ronronne et United en profite pour prendre le jeu à son compte. Pas de Fergie time à l’époque mais cela n’empêche nullement United de revenir à 3-3 dans le dernier quart d’heure, grâce à David Sadler puis à un wing-play virevoltant de George Best conclu par un centre en retrait avec Bill Foulkes à la finition (80è). Man United se qualifie pour la finale (voir clip).

Sans Denis Law, mais avec un Best de feu, United remportera brillamment sa toute première European Cup (victoire 4-1 sur Benfica, à Wembley).

2000. Quart de finale Ligue des Champions

4 avril 2000. Real 0 – Man United 0 (64 119).

Real : Casillas; Salgado, Ivan Campo, Karanke, Roberto Carlos; McManaman, Helguera, Redondo, Savio; Morientes (Ognjenovic, 86è), Raul.

Man United : Bosnich; G Neville, Berg, Stam, Irwin (Silvestre, 87è); Beckham, Keane, Scholes (Butt, 81è), Giggs; Cole, Yorke (Sheringham, 76è).

Les Mancuniens, Champions d’Europe en titre, subissent et doivent leur salut au brio de Mark Bosnich et à la superbe prestation de sa défense (ainsi qu’au manque d’efficacité des offensifs espagnols).

Les quelques tentatives des Red Devils, souvent sur contre-attaque, manquent de précision ou de réussite (but refusé à Yorke pour un hors-jeu limite) mais United préserve toutes ses chances face à un Real inconstant et à la peine en championnat (ils finiront 5è).

19 avril 2000. Man United 2 – Real 3 (59 178). Clip du match.

Man United : Van der Gouw; G. Neville, Berg (Sheringham, 62è), Stam, Irwin (Silvestre, 45è); Beckham, Keane, Scholes, Giggs; Cole (Solksjaer, 62è), Yorke.

Real : Casillas; Salgado, Ivan Campo, Karanka, Roberto Carlos; McManaman (Julio Cesar, 89è), Helguera, Redondo, Savio (Geremi, 65è); Morientes (Anelka, 72è), Raul.

On se souvient surtout de ce match retour pour le show Redondo-Raul (voir clip à 1’07), un duo qui va anéantir les Red Devils. Au-delà de ces brillantes performances individuelles, Real mérite largement sa qualification pour la finale.

La rencontre commence mal pour United avec un own goal de Roy Keane à la 20è minute sur un centre tendu de Roberto Carlos. La suite est sans appel : Raul enfonce le clou aux 47è et 52è. A 0-3, la cause est entendue.

Beckham (d’un superbe but, 1’25 dans le clip) et Scholes, sur pénalty, réduiront l’écart mais le Real était imprenable sur ces quarts. Des Madrilènes qui remporteront la Coupe en corrigeant Valence 3-0 en finale au Stade de France. Raul finira co-meilleur buteur – avec Jardel et Rivaldo – de cette campagne européenne (dix pions).

2003. Quart de finale Ligue des Champions

8 avril 2003. Real 3 – Man United 1 (75 000). Fiche du match.

Real : Casillas; Salgado, Helguera, Hierro, Roberto Carlos; Figo, Makelele, Conceicao, Zidane; Raul, Ronaldo (Guti, 83è).

Man United : Barthez; G Neville (Solskjaer, 86è), Ferdinand, Brown, Silvestre (O’Shea, 58è); Beckham, Butt, Keane, Giggs; Scholes; Van Nistelrooy.

Man United, sans démériter, est fort logiquement battu par un Real dirigé de main de maître par Z. Zidane, sublimement assisté du tandem Raul-Figo.

Les Anglais ne ferment pas le jeu mais sont vite dépassés. Figo à la 12è, d’un superbe brossé en lucarne droite, puis Raul aux 28è et 49è, plient le match. Les Red Devils poussent et réduisent le score à la 52è, par Van Nistelrooy, en embuscade sur un tir de Giggs repoussé par Casillas. Enhardis par ce but, les Red Devils pressent mais en vain, les Merengues restent maître de la situation.

23 avril 2003. Man United 4 – Real 3 (66 708). Fiche et clip du match (excellente qualité, MUTV, à partir de 1’00).

Man United : Barthez, O’Shea, Ferdinand, Brown, Silvestre (P. Neville, 79è), Veron (Beckham, 63è), Butt, Keane (Fortune, 82è), van Nistelrooy, Giggs, Solskjaer.

Real : Casillas, Salgado, Hierro, Helguera, Carlos, Zidane, McManaman (Portillo, 69è), Figo (Pavon, 88è), Makelele, Ronaldo (Solari, 67è), Guti.

Match d’anthologie à Old Trafford où la finale de la Ligue des Champions sera disputée, ce qui ajoute du piment à cette double confrontation. United l’emporte avec la manière mais est cruellement éliminé, 6-5 en aggregate.

Première surprise de taille : Beckham est sur le banc. C’est le début de la fin à Man United pour le Londonien après une année difficile avec Alex Ferguson au plan relationnel. Un état de fait douloureusement illustré par le fameux incident de la chaussure balancée par Sir Alex dans l’arcade sourcilière du néo-Parisien pendant une causerie d’après défaite deux mois auparavant (8 points de suture). Victoria n’apprécia pas qu’on lui esquinte son Spice Boy et le Real Madrid profitera de l’aubaine en fin de saison.

Ce match restera mémorable pour un hat-trick de Ronaldo (voir clip)… et deux buts du beau David que Ferguson fit entrer à l’heure de jeu.

Le Real prend l’avantage par Ronaldo dès la 10è minute, sur une ouverture de Guti. A la 42è, un beau travail de Solskjaer permet à Ruud Van Nistelrooy d’égaliser. Peu après la pause, Zidane et Figo combinent brillamment à l’orée de la surface, Ronaldo hérite du cuir et parachève le travail. Trois minutes plus tard (52è), Helguera marque contre son camp, 2-2.

A la 57è, le Real prend l’avantage, par l’inévitable Ronaldo qui plante une mine dans la lucarne de Barthez. Hat-trick du Brésilien et 2-3. A la 63è, David Beckham remplace Veron. Le paria marque d’entrée, d’un superbe coup-franc à la 71è, 3-3.

A la 85è, Beckham récidive, après un slalom et tir de Van Nistelrooy dans la surface. 4-3 ! Le Real avance sur les rotules mais tient bon, malgré plusieurs bonnes occasions mancuniennes (il aurait de toute manière fallu deux autres buts pour passer). A la sortie de Ronaldo (67è), le public d’Old Trafford lui réserve une standing ovation. Un stade qui se demandera fatalement ce qu’il se serait passé si Beckham avait disputé tout le match. Quatre mois plus tard, un autre Ronaldo arrivera pour faire oublier David…

Un discret inconnu fortuné traîne ce jour-là dans les loges d’Old Trafford, s’interrogeant sur l’opportunité de mettre quelques sous dans le football anglais. Il est tellement émerveillé par le spectacle offert qu’il n’hésitera pas longtemps. Son nom ? Roman Abramovich. Deux mois plus tard, l’énigmatique Russe rachetera le Chelsea de Ken Bates (ici).

Sir Alex sur Mourinho :

« Ses mind games [intox psychologique], je m’en fiche. Ce qui m’importe surtout, c’est qu’il me débouche une bonne bouteille après le match. »

Un Sir Alex qui aura aussi en tête sa toute première rencontre avec le Real Madrid. C’était il y a trente ans, le 11 mai 1983, quand son petit Aberdeen battit le Real de Di Stéfano (manager), Camacho, Stielike et Santillana 2-1 en finale de la Coupe d’Europe des vainqueurs de coupe, grâce notamment à un pion de l’ex Messin Eric Black.

Et s’il fallait retenir une décla…

De Mourinho :

« Je comprends pourquoi il [Ferguson] est remué émotionnellement. Il compte dans son effectif parmi les meilleurs joueurs au monde et l’équipe devrait bien mieux réussir…  Moi aussi je serais navré si mon équipe se faisait dominer de la sorte par des adversaires qui coûtent un dixième de mes joueurs. »

Mars 2004, après le Man United – Porto.

De Sir Alex :

« La première fois qu’on a affronté Chelsea à Stamford Bridge sous José Mourinho, punaise, le vin qu’il m’a servi après le match avait le goût d’un décapant peinture ! Je lui ai demandé « C’est quoi ce truc ? » Il était tellement gêné qu’il promit de m’offrir sa meilleure bouteille pour leur prochaine visite à Old Trafford. »

2005, après le Chelsea – Man United (promesse tenue, la boutanche coûtait 300 £).

Il y a deux jours, dans l’émission TV Football Focus, Sir Alex donnait son avis sur les fameux mind games du Mou : « Bah, je m’en fiche. Ce qui m’importe surtout, c’est qu’il me sorte une bonne bouteille après le match. »

Pour Sir Alex, le message est donc clair : la piquette est interdite.

Kevin Quigagne.

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[1] Et pas seulement lors du mémorable passage du Mou à Chelsea (2004-2007).

Flashback, 10 mars 2004. 90è minute du Man United-Porto en huitième de Ligue des Champions, le score est de 1-0 et les Mancuniens sont alors qualifiés. 91è : but de Costinha pour les Portugais après un mauvais renvoi du gardien Tim Howard sur un coup-franc de Benni McCarthy. 1-1 et 3-2 pour Porto sur l’ensemble des deux matchs. Ce qui fera dire aux médias anglais que « Old Trafford créa Mourinho ». En clair : Mourinho, en partie grâce à son show sur la ligne de touche, venait d’entrer dans la conscience collective footballistique de l’Angleterre. Fort de cette reconnaissance et du succès de Porto deux mois plus tard en finale, Mourinho se présentera comme The Special One lors de sa première conférence de presse à Chelsea le 2 juin 2004. A lire : cet article sur la relation entre Mourinho et Sir Alex.

[2] Contrairement à ce qui est parfois dit/écrit, ce ne fut pas la première participation européenne d’un club anglais. Cet honneur revient aux deux sélections de Londres et Birmingham qui furent de la première édition de la mythique Coupe des villes de foire en 1955.

[3] Hardaker, un protectionniste doublé d’un xénophobe-raciste enragé, considérait que cette nouvelle compétition faisait de l’ombre à la FA Cup. Circonstance aggravante : elle se disputait contre des étrangers. « Trop de basanés et de ritals ! » avait-il confié en off au journaliste du Times Brian Glanville (et célèbre football writer) à propos du football continental. Voir premier chapitre de cet article TK.

[4] 10 p en 1956 = approx. 6 £ aujourd’hui. L’abonnement plancher à Old Trafford vers 1958 coûtait 7 £ (il est de 532 £ aujourd’hui).

Le salaire moyen anglais était d’environ 50 £ mensuels. Presque équivalent à la rémunération… des footballeurs les mieux payés ! Le salary cap (1901-1961) avait en effet fixé le salaire hebdomadaire maximal à 17 £ en 1957. Un maximum perçu uniquement par les meilleurs ou les plus connus / anciens.

En 1960, l’immense Jimmy Greaves par exemple (véritable Messi de l’époque), alors déjà (jeune) international anglais et vedette (à Chelsea), ne touchait que 8 £ / semaine ! (d’où son départ pour le Milan AC – il en revint fissa une fois le salary cap aboli). Cette année-là, la wage bill hebdomadaire de Liverpool FC (D2) était de 517 £…

Le maximum salarial hebdo sera porté à 20 £ en 1958 avant d’être aboli le 18 janvier 1961 (menaces de grèves, voir article TK). Malgré cette libéralisation, le salaire du footballeur mettra du temps à vraiment décoller (à l’exception de quelques stars, telles J. Haynes, J. Greaves ou George Best, le premier à 1 000 £ / semaine, en 1968). La moyenne salariale hebdo des joueurs d’Arsenal en 1971, double vainqueur Championnat-FA Cup, n’était que de 55 £. Même au début des Eighties, il n’était guère impressionnant (bien que représentant cinq fois le salaire moyen anglais). Luther Blissett racontait récemment qu’il ne touchait que 500 £ / semaine à Watford en 1983 juste avant de partir pour l’AC Milan (où il ne toucha d’ailleurs que 800 £ hebdos).

[5] Ne pas manquer de voir le film United, diffusé il y a deux ans sur la BBC 2, et intégralement visionnable ici, avec clip du tournage. Un film tourné un peu partout en Angleterre… sauf à Manchester. En effet, Old Trafford ayant été jugé bien trop moderne, le stade de Carlisle United fut utilisé à la place, ainsi que Newcastle (extérieurs et studios, dans les anciens chantiers navals) et Wimbledon (surtout les entraînements).

Invité[1] : Dark Side of the Mounier
Pour fêter le passage à la nouvelle année, un de nos lecteurs a décidé de partir outre-Manche parce qu’il croyait que l’alcool y était moins cher. Raté. En revanche, il a pu assister à un match de npower League 2. Et ça, ça vaut toute la vodka frelatée du monde.

So, I heard you like rebus.

So, I heard you like rebus.

Bristol Rovers

Fondés en 1883 sous le nom de Black Arabs F.C. (pas de vannes racistes s’il vous plaît, c’est trop facile), les Bristol Rovers n’ont jamais connu l’élite, même s’ils s’en sont approchés dans les années 1950, terminant notamment à quatre points de la montée en 1955-56. Ils végètent depuis dans les tréfonds de la Football League, et luttent cette année pour éviter la descente en Conference.
N’ayant jamais remporté un trophée majeur (hormis la Watney Cup en 1974 – si si, c’est considéré comme un trophée majeur), mais n’ayant jamais quitté la Football League non plus, le club mise donc sur la stabilité molle et vit désormais dans l’ombre de son grand rival de City.
Les Rovers sont surtout connus pour leur ancien stade, Eastville, situé au pied d’une énorme usine à gaz (pas une métaphore), Stapleton Gasworks. Ce stade se situait au bord de la rivière Frome, qui inondait régulièrement Eastville, le tout (y compris le terrain) baignait dans une zone marécageuse et malodorante, d’où le club a tiré son surnom (The Gas ou Gasheads – au départ une insulte de City récupérée par les supps Rovers comme badge of pride).

Plymouth Argyle

Existant depuis 1886, le club pro le plus méridional et occidental de l’Angleterre possède une histoire similaire à celle de Bristol, si ce n’est qu’il évoluait encore en Championship il y a trois ans et sous la houlette d’Ian Holloway saison 2006-2007 (idole de TK et natif de… Bristol) avant deux descentes consécutives. Englué cette année dans le fond du tableau, Plymouth lutte comme son rival d’un soir pour rester dans le monde pro.
Les Pilgrims possèdent la double particularité de posséder le blason le plus classe de la Football League (certains ne sont pas d’accord et trouvent que c’est celui des Rovers, le plus classe, NDLR), et d’évoluer sous la couleur verte la plus moche de l’histoire de la couleur verte.
Depuis une dizaine d’années, Plymouth est devenu une terre d’accueil pour les joueurs français moyens (David Friio, Mathias Kouo-Doumbé, Lilian Nalis). Romain Larrieu, après 12 ans de loyaux services chez les Pilgrims, a été nommé l’été dernier entraîneur adjoint, et le défenseur central Maxime Blanchard, arrivé l’année dernière, a été élu Player of the Year dès sa première année au club.

Le match

Attention, ami lecteur. À partir de ce point, l’article n’est plus écrit par un rédacteur expérimenté, drôle et beau, mais par un lyonnais. Tu es prévenu.

12h35, nous arrivons en vue du stade. Bon, le match étant à 13h, il va falloir penser à se garer. De toute façon ce n’est que de la D4 hein, il ne devrait pas y avoir de problèmes. Deux kilomètres plus loin, nous trouvons une place, il est 12h50. Le temps d’arriver au stade, d’acheter un billet à la seule caisse qui prend la CB, nous entrons dans le stade après 5 minutes de jeu et avons raté le passage du drapeau dans la « Blackthorne Terrace », virage nord du stade portant le nom d’une cidrerie implantée à Cheddar.

Pour la modique somme de 18£ chacun (ce qui est le prix le moins cher du stade), nous nous installons dans ledit virage, juste derrière le but.

Hop, un vieux.

Hop, un vieux.

Premier constat, le public applaudit chaque passe réussie des Rovers, je n’arrive pas à décider si c’est beau ou inquiétant.

Bon, cher lecteur, on ne va pas se mentir, le jeu n’est pas très bon pour ces 10 premières minutes, Plymouth a un jeu qu’on qualifiera de « traditionnel », avec des longs ballons loin devant, que la grande tige aux cheveux blonds Holger dégage sans difficulté de la tête. Du côté de Bristol, on tente de poser le jeu avec des relances courtes, et les milieux John Joe O’Toole et Fabian Broghammer touchent beaucoup le ballon.

18′ : Sur une attaque coté droit, le latéral d’Argyle dégage le ballon en corner. La tribune pousse à base de « Come on Rovers, come on Rovers! » (écoute-moi ça, mon coco). Le corner est tiré par Broghammer, le gardien dégage du poing, directement sur Anyinsah qui se couche bien et envoie le ballon de volée directement en lucarne! La tribune explose, et entame son chant favori : « Goodnight Irene » (pour le son : ici, pour l’explication : ici).
25′ : Nouveau corner pour Bristol, toujours poussé par les « Come on Rovers » et toujours poussé par Broghammer. Et ça fait encore but, c’est cette fois ci Lund qui se jette et fusille le gardien de la tête !
29′ : Mener au score n’est pas arrivé souvent cette saison, les supporters se permettent donc un petit chambrage en règle envers l’autre équipe de Bristol : « Who’s Bristol City? »
30′ : O’Toole n’est arrivé que depuis quelques jours au club, mais il sait comment se faire adopter ! Il dribble deux joueurs et décoche une frappe de 25 mètres qui vient passer au ras du poteau.
35′ : Le gros chauve du premier rang qui tente de lancer des chants différents toutes les 45 secondes à déjà postillonné approximativement 3 litres du mélange salive/bière dont il semble être constitué.
Mi-temps, le moment pour les supporters d’aller s’acheter des cafés et des soupes (je ne vois pas de bières, gueule de bois de premier de l’an ?). Comme nous sommes près de la buvette, c’est le moment de croiser les plus beaux supporters, notamment un respectable grand père, la soixante-dizaine bien tassée, arborant fièrement son bonnet « Gashead ’til I die ».

Hop, un roux.

Hop, un roux.

65′ : Sur un centre coté droit, Hourihane croise une reprise dans le petit filet et redonne l’espoir à la « Green Army », qui se fait entendre pour la première fois du match.
68′ : Berry lance une superbe reprise en ciseau tel Luiz Fernandez. Incontestablement le plus beau geste du match. Dommage qu’il vise l’entrejambe d’Anyinsah plutôt que le ballon. Carton jaune.
76′ : Rentrée de Matt Lecointe pour Plymouth. Il doit avoir un contentieux avec les Rovers puisqu’il est interpellé par nos voisins sous le surnom imagé de « Shithead ».
80′ : Grosse tension dans toute la tribune, il faut dire que les Rovers n’ont pas gagné depuis 6 matchs. Malgré tout, Plymouth a du mal à se montrer dangereux.
82′ : Grosse frappe de Hourihane qui part en lucarne, mais Mildenhall se détend et claque le ballon. Bristol mène toujours.
94′ : Explosion de joie dans tout le stade. On relance un petit coup de « Goodnight Irene », on attend que les joueurs viennent applaudir la tribune puis on quitte le stade.

Pour finir cher lecteur, sache que si tu as pu avoir le plaisir, la chance et l’honneur de lire ce résumé, c’est uniquement en raison du sacrifice de Darksidounette, qui m’a accompagné à ce match. Un grand merci à elle (et à moi aussi, parce que je dois aller voir un ballet en contrepartie quand même).

[1] L’auteur de cet article est un fervent contributeur du fil lyonnais sur les Cahiers du Football. Bien qu’arrogant, petit et adipeux (puisque Lyonnais), il n’en demeure pas moins sympathique.