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Il y a trente ans aujourd’hui, s’achevait la plus longue grève de l’histoire du Royaume-Uni, celle des mineurs (5 mars 84 – 3 mars 85). Un long et violent combat contre le gouvernement Thatcher où le football fut parfois de la partie.

On a coutume de dire, en forçant parfois un peu le trait, que le football s’immisce volontiers dans les évènements historiques au Royaume-Uni. Exagération ou pas, il est indéniable que les liens entre le football et la grève des mineurs de 1984-1985 sont riches et variés. Logique me direz-vous, tant les passerelles entre football et industrie minière sont, ou plutôt étaient, foisonnantes.

L’histoire que j’ai choisie de vous raconter, celle d’une communauté déchirée par la grève et en partie réconciliée par le football, est puisée dans le vécu de la ville minière d’Easington, située au sud de Newcastle (North East), un environnement que je connais pour y vivre et travailler depuis plus de vingt ans, d’abord dans le South Yorkshire (Sheffield) puis dans le North East. Mais avant tout, plantons le décor.

A.S : Teenage Kicks n’a pas soudain décidé de concurrencer les Échos ou le Diplo. Ce premier volet est avant tout une mise en contexte pour la deuxième partie qui traitera essentiellement de football. Le tout était trop long pour le publier d’un seul jet.

A voir : cette superbe galerie de photos sur la grève.

L’adversité comme source de motivation suprême

Tout d’abord, un rappel pas forcément inutile : une quantité phénoménale de footballeurs/managers britanniques furent mineurs de fond, tâtèrent de la mine ou évitèrent in extremis cette voie. Parmi les plus illustres, citons Billy Meredith, Herbert Chapman, les frères Bobby & Jack Charlton, Jackie Milburn, Matt Busby, Bobby Robson, Gerry Hitchens, Jock Stein, Bob Paisley et Bill Shankly. Rien que le club du village minier où Shanks grandit forma cinquante professionnels !

Une plaisanterie des années trente, déclinée ensuite en de multiples versions, disait que pour dégoter de bons footballeurs dans les bassins miniers, il suffisait au président du club professionnel local de se rendre à la houillère du coin, se positionner en haut d’une fosse et gueuler : « J’ai besoin d’un défenseur et d’un avant-centre » pour qu’un tas de têtes casquées remontent à la surface.
Dans plusieurs régions britanniques [1], le public fut longtemps constitué d’une forte proportion d’hommes associés de près ou de loin à la mine. Sans bien sûr exagérer la portée actuelle, forcément limitée, de ce riche héritage, la connection football-mine se manifeste parfois encore plus charnellement, comme dans le cas du Stadium of Light de Sunderland bâti sur les galeries de Monkwearmouth Colliery (ici). Ce qui donne à des remarques du style « Danny Graham est vraiment au fond du trou » ou « Jozy Altidore va au charbon mais que dalle » une profondeur qui rendrait ce duo pied-nickelesque presque touchant.


Lampe de mineur géante et roue minière aux abords du Stadium of Light de Sunderland

D’une manière plus générale, les liens entre ballon rond et industrie sont à l’origine même du football britannique. Parallèlement aux conditions indispensables à son essor à partir des années 1860 (entre autres : harmonisation des lois du jeu, repos le samedi après-midi, développement du chemin de fer – voir dossiers TK ici et ici), pour que le football prenne véritablement son envol, il fallut qu’il soit porté par les grands acteurs de la révolution industrielle –  les capitaines d’industrie victoriens, les ouvriers, les syndicats. De fait, si on analyse la genèse du football à travers le prisme socio-économique, ce sport peut légitimement être considéré comme un pur produit des grandes conquêtes sociales de l’époque.

Des débuts du football professionnel au Royaume-Uni (1885 en Angleterre, 1893 en Ecosse) aux Seventies, des générations de jeunes mineurs chercheront coûte que coûte à devenir footballeur pro et notamment durant les années de marasme de l’entre-deux-guerres. L’extrême dangerosité et la dureté du métier poussaient ces Gueules noires à tout faire pour échapper à leurs conditions ; bouffer de la vache enragée est le meilleur des moteurs pour réussir, dit l’adage populaire, et le football représentait alors le seul « ascenseur social » pour ces jeunes-là.

Cette longue association entre football et mine a souvent été marquée par des gestes forts et/ou médiatisés, exprimés surtout pendant les grandes grèves (1912-1926-1972-1974-1984). Comme ces innombrables collectes d’argent autour des stades, ou Brian Clough [2] défilant au côté des mineurs en 1984 en appelant à la solidarité dans les médias (« Tous les supporters de football issus de la classe ouvrière devraient faire une donation au fond des mineurs »). L’historique football-mine est parsemé d’anecdotes croustillantes. Par exemple quand Jock Stein, ex mineur et le mythique manager du Celtic de 1965 à 1978, glissa un billet de 5 £ dans un seau de collecte alors qu’Alex Ferguson, qui l’accompagnait ce jour-là (et lui-même ouvrier syndicaliste des chantiers navals glasvégiens jusqu’à 23 ans), « oublia » de verser son obole… Le jeune Fergie fut alors dûment sermonné par Stein et s’empressa de s’exécuter ! Pendant la grève de 1984-85, Stein apostospha même durement les camions conduits par des « scabs » (non grévistes) chargés de transporter le charbon.


Brian Clough, vers 1994, défilant contre la fermeture de l’un des derniers puits du North Nottinghamshire

Le contexte général, côté mineurs

Le 5 mars 1984, la grève des mineurs démarre officiellement, à la suite d’une fermeture de puits dans le Yorkshire ordonnée par le gouvernement Thatcher via le National Coal Board, l’équivalent britannique des Charbonnages de France. La moitié des mineurs du Yorkshire arrête immédiatement le travail. Environ 200 000 mineurs sont concernés dans 180 sites miniers disséminés en Grande-Bretagne, même si tous ne seront pas grévistes. Officiellement, « seuls » 20 000 emplois sont menacés dans les années à venir (Thatcher dit vouloir fermer une vingtaine de puits considérés non rentables par son gouvernement – les mines étaient alors fortement subventionnées, à hauteur de 900 millions £ pour l’année 1983).

Toutefois, le seul syndicat de la branche, le puissant NUM – National Union Mineworkers –, est convaincu que l’objectif dépasse les 100 000 d’ici 1990 et qu’à court terme, l’objectif de Thatcher est de privatiser entièrement le secteur. L’avenir donnera raison au NUM (ainsi que des archives ministérielles de 1984 autorisées à la parution l’an dernier : 64 000 suppressions d’emploi étaient programmées d’ici 1987).

Mais pour l’heure, il s’agit de rassembler. Tâche délicate puisque cette grève est illégale, une majorité de mineurs adhérents y seraient opposés. Nul ne sait précisément quelle proportion, les dirigeants du NUM ayant refusé de faire voter la base. La démarche controversée et antagoniste du NUM annonce la couleur : cette grève risque d’être sanglante. Des heurts triangulaires police > mineurs grévistes > mineurs non-grévistes éclatent d’ailleurs dès les premiers jours, après que la police a profité de l’illégimité de la grève pour confisquer du matériel syndical et forcer les piquets de grève à laisser les non-grévistes travailler. Le 15 mars, un premier mineur décède, dans des circonstances tragiques. Malheureusement, ces affrontements ne sont que les trois coups qui annoncent le triste spectacle. Les tensions iront crescendo et les violences graves seront routinières.

Le contexte général, côté Thatcher

Non que tout cela perturbe terriblement Margaret Thatcher. Cette dernière a été plus habile que son prédécesseur conservateur, Edward Heath, en 1974 (les mineurs, unis, avaient fait plier les Conservateurs) et elle a tiré les enseignements des revers du passé. Euphémisme : la Dame de Fer fait de cette lutte une affaire personnelle et a le mors aux dents. Elle a même orchestré le clash, pour venger les siens : « Le dernier gouvernement Conservateur a été annihilé par les grèves des mineurs de 1972 et 1974, avait-elle confié à son ministre de l’Intérieur dès sa prise de pouvoir en 1979, et bien nous provoquerons une autre grève et nous sortirons vainqueur. »

Les mineurs jouissent alors d’une bonne image dans la société, admirative de leur immense courage. Thatcher a jaugé la robustesse de leur capital sympathie et sait qu’elle ne peut pas foncer tête baissée. D’autant plus qu’elle a déjà essuyé une avanie, en 1981, quand elle dut annuler un programme de fermetures de puits sous la pression du NUM. Mais elle sait aussi que les temps changent et que le zeitgeist joue en sa faveur.

Autant le Royaume-Uni avait émergé des Seventies sur les rotules (chienlit généralisée, inflation et taxation records, etc.), autant il donne l’impression d’avoir démarré les Eighties la confiance en bandoulière, même si certains indicateurs économiques ont viré au rouge vif (e.g le nombre de sans-emplois qui a doublé depuis 1979, dépassant les 3 millions en 1982). Le contraste avec la décennie passée est saisissant, notamment dans les mentalités.
L’époque est désormais au capitalisme décomplexé, ostentatoire. L’argent n’est plus sale et les devises provocantes des Yuppies, ces nouveaux démiurges de la pensée ultra-libérale, telle If you’ve got it, flaunt it » (allez-y, exhibez ce que vous possédez), s’imposeront comme les slogans tendances des Eighties. Quand la France marche au « Touche pas à mon pote », le Royaume-Uni carbure au “Greed is good” (la cupidité, c’est bien). La société britannique est en pleine mutation – la middle-class émascule progressivement la classe ouvrière – et Thatcher compte bien exploiter sa cote de popularité au zénith pour mater toute rébellion en s’octroyant le beau rôle.

Son objectif ultime va bien au-delà d’un simple combat personnel anti-mineurs : il faut envoyer un message fort aux syndicats, très militants, réduire leur influence et avoir ainsi les coudées franches pour réformer des pans entiers du droit du travail, à commencer par la législation sur les modalités et préavis de grève. In fine, il s’agit de mener à bien, le plus en douceur possible, le programme de démantèlement et privatisations-dérégulations des secteurs publics et entreprises d’état – British Gas, British Rail, British Telecom, etc. (les mines et tout le secteur de l’énergie avaient été nationalisés au sortir de la Seconde Guerre mondiale par le gouvernement travailliste de Clement Attlee et sont considérés par les Conservateurs comme des bastions gauchisants – « Je détestais ces programmes collectivistes de nationalisation de l’après-guerre. Il fallait redonner la liberté aux citoyens », fulminera Thatcher plus tard).

De l’art du conflit

La cuisante défaite des Travaillistes aux General Elections de juin 1983 (meilleurs résultats des Conservateurs depuis 1959) avait annoncé de fortes turbulences sociales et une radicalisation de certains secteurs. Du coup, Thatcher a anticipé : elle a fait stocker des réserves de charbon équivalentes à cinq mois de consommation, a demandé aux centrales thermiques de se tenir prêtes à utiliser des combustibles fossiles autres que le charbon (gaz, fioul, huiles) et a fait embaucher des routiers non syndiqués pour le transport entre dépôts. L’armée de terre est même en stand-by, au cas où. C’est la face visible de l’avant-combat.

En coulisses, Thatcher fourbit ses armes. Elle réunit régulièrement son état-major pour aiguiser au mieux sa deuxième lame, celle de la division. Elle sait que le moyen le plus efficace pour fragmenter ce bloc pour de bon est d’appliquer énergiquement la recette éprouvée du “Divide and rule”. Telle sera sa feuille de route, dresser les uns contre les autres. Thatcher a donc échaffaudé une série de stratagèmes visant à morceler le mouvement et le faire imploser de l’intérieur ; les négociations se feront puits par puits, les propositions de reclassement seront sélectives, les promesses faites à certains groupes ou puits seulement. Avec dans son arsenal clivant, quelques mesures particulièrement mesquines, des coups bas « ad hominen » lui reprocheront certains, telle la réduction des aides sociales aux familles grévistes.

La fille d’épicier réservera aux syndicalistes, et par extension à tous les mineurs grévistes, le même surnom qu’elle donnera aux hooligans : the enemy within, l’ennemi de l’intérieur.


A. Scargill s’amuse du masque porté par une manifestante

C’est loin d’être la première grève des mineurs mais celle-ci s’annonce particulièrement longue et âpre. Elle le sera : 362 jours, 11 morts, 20 000 blessés, 11 500 arrestations, 8 500 grévistes assignés en justice. Et au-delà des chiffres, des communautés entières décimées.
A la tête du mouvement, Arthur Scargill, l’ennemi juré de Thatcher, un syndicaliste marxiste jusqu’au-boutiste et président du NUM qui dirigera les opérations et organisera la résistance depuis son fief de Barnsley (20 kilomètres au nord de Sheffield), gros bassin minier et épicentre de la lutte.

C’est dans ce contexte bien particulier, « toxique » dirait-on aujourd’hui, que se déroulent les évènements ci-dessous.

Easington : 10 000 habitants, 2 700 mineurs de fond

Printemps 1984, Easington & Easington Colliery, East Durham, 30 kilomètres au sud-est de Newcastle et 15 de Sunderland, l’un des bassins houillers alors parmi les plus productifs au monde. On appelle ces vastes zones des coalfields, littéralement « champs de charbon ». Les deux Easington forment une petite ville d’à peine 10 000 habitants où la plupart des hommes sont employés dans l’activité minière. On extrait tellement de charbon dans toute la région depuis le XVIIè siècle que la langue anglaise s’est dotée de l’expression suivante : To carry/take coals to Newcastle, approximativement « vendre de la glace aux Esquimaux ». Au sortir de la Grande Guerre, 275 000 hommes trimaient dans les mines autour de Newcastle, un actif sur trois et un quart du total britannique sur ce secteur.

Le North East (2 600 000 habitants) dut sa croissance spectaculaire au XIXè siècle à l’exploitation et l’exportation du charbon, directement ou indirectement. Ce minerai fut l’un des principaux symboles et vecteurs de développement de la révolution industrielle.
C’est grâce au charbon par exemple que les premières
locomotives au monde furent exploitées commercialement au sud de Newcastle, au départ purement pour des raisons pratiques d’acheminement du charbon (le rendement exponentiel des mines, étroitement liés aux besoins gargantuesques générés par l’industrialisation effrénée, exigeait des moyens autres que quelques chevaux tirant des wagonnets). Toute la richesse de la région découle de l’activité minière. Cette prospérité favorisera grandement l’essor de la construction navale (transport du charbon) et de l’industrie lourde. Elle permettra aussi à de géniaux inventeurs locaux d’émerger, tels George Stephenson (considéré comme l’inventeur du chemin de fer moderne), Joseph Swan (pionnier de l’électricité) ou l’ingénieur et industriel George Armstrong (hydroélectricité).

Malgré sa faible population, le canton d’Easington est aussi un mini hotbed du football, l’une de ces mini places fortes qui transpire le ballon par tous les pores. L’international anglais Adam Johnson (Sunderland) y a grandi ainsi que Paul Kitson (ex Leicester, Newcastle, Derby, West Ham), Alan Tate (ex Swansea), Kevin Scott (ex Newcastle) et Steve Harper, gardien de Newcastle de 1993 à 2013 ; le père d’Harper était mineur de fond et son oncle, Barry Harper, est une figure locale, arbitre et dirigeant de club (nous le retrouverons dans la seconde partie). Le film Billy Elliott a été tourné ici même [3].

Une communauté, deux ennemis

Comme un peu partout ailleurs pendant la grève, la communauté minière d’Easington (Easington Colliery) est divisée en deux groupes distincts : les grévistes et les « scabs », les jaunes. Comme partout ailleurs, les jaunes y sont haïs. Ils doivent se rendre à la mine escortés et franchir les piquets de grève en bus grillagé, sous la protection de la police. Le scab est bien plus qu’un jaune : c’est l’ennemi, le traître, le suppôt de Thatcher. On tague scab en gros sur les murs de sa maison, on vandalise sa voiture et insulte sa famille. A l’école,

A suivre.

Kevin Quigagne.

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[1] Principalement le South Yorkshire (Sheffield-Barnsley-Rotherham-Doncaster), le North East (Newcastle-Sunderland-Durham), le sud du Pays de Galles (Cardiff-Swansea-Newport), la ceinture centrale des Lowlands écossais (Ayshire-Midlothian-Lanarkshire) et le centre de l’Angleterre (Staffordshire-Derbyshire-Nottinghamshire).

[2] Brian Clough était un socialiste convaincu (au moins « de coeur » comme il disait*) qui, au cours de la grève de 1984-85, n’hésita pas à rendre visite plusieurs fois à des piquets de grève postés devant les mines. Un matin pendant la grève de 1972, il fit même conduire ses joueurs de Derby County (qui sera champion d’Angleterre deux mois plus tard) devant un puits et les força à se joindre aux piquets à l’entrée de la mine en leur disant : « Les gars, restez ici et discutez avec ces mineurs, vous verrez comme ils en bavent. Je veux que vous compreniez la chance que vous avez par rapport à ces gars qui doivent descendre dans les entrailles de la terre pour gagner leur croûte. Je vous laisse et quand je l’aurai jugé nécessaire, je demanderai au bus de venir vous chercher. » Et il était remonté dans l’autocar qui avait filé… Les joueurs s’étaient mêlés aux mineurs une bonne partie de la journée. Peu après, Clough avait fait envoyer aux grévistes une trentaine de billets d’un match de Derby County.

[*« Pour moi, le socialisme vient surtout du coeur. Je ne vois pas pourquoi seule une partie de la société pourrait boire du Champagne et habiter de belles propriétés. » De fait, Clough entretint avec l’argent une relation complexe et ambivalente]

[3] Billy Elliott, the Musical a été créé à Londres et diffusé live sur écrans (cinémas, salles de spectacles) à travers le Royaume-Uni il y a six mois. Elton John, qui a composé la musique, a subventionné le prix des billets dans la région d’Easington (fixés à 1 £) pour permettre au plus grand nombre de voir le show.

Ils ont été tournés ailleurs mais citons-les puisqu’ils ont la mine pour thème central : Pride (bande-annonce) et le sublime Brassed off (bande-annonce), un chef d’oeuvre du cinéma social tourné entre Barnsley et Doncaster (South Yorkshire).

Matchbox vintage – Newcastle United 8 – 0 Sheffield Wednesday (19 septembre 1999)*

Pour le premier match de Robson, Newcastle signe son record pour une victoire à domicile. Deuxième quintuplé de l’histoire de la Premier League pour Shearer.** Sheffield se vengera sur Wimbledon deux semaines plus tard.***

Buts : Hugues (11′), Shearer (30′, 33′ (sp), 42′, 81′, 84′(sp)), Dyer (46′), Speed (78′) ;

Le point sur le classement au coup d’envoi (statto.com)

Après la démission de Keegan en 1997, les managers se sont succédé à la tête de Newcastle, sans parvenir à retrouver le succès de leur prédécesseur. Le club ne doit sa dix-neuvième place qu’à un meilleur goal-average. De plus, leur dernier match à domicile s’est soldé par une défaite, 2-1, contre les voisins de Sunderland. Ca fait tâche.

En Premier League depuis 1992, Sheffield se bat chaque année pour ne pas descendre (septième place comme meilleur résultat). Avec quinze buts encaissés pour trois marqués, la confiance ne règne pas dans le Yorkshire.

Le onze de Newcastle

Coach : Bobby Robson (en place depuis dix-sept jours)

Le onze de Sheffield

Coach : Danny Wilson (premier coach non-anglais du club depuis 1942) (en place depuis un an et deux mois)

Les buts au ralenti

11ème minute : les noirs et blancs se passent le ballon dans l’entrejeu. D’abord à droite, il atterrit dans les pieds de Dyer sur l’aile gauche. Son centre trouve la tête vainqueur d’Aaron Hugues, à peine 20 ans. 1-0.

30ème minute : corner côté droit, Solano et Ketsbaia le jouent à deux. Le premier centre pour Shearer, qui coupe du pied droit au premier poteau. Petit filet gauche. 2-0.

33ème minute : le latéral droit Barton joue le renard dans la surface adverse. Emerson Thome (du Brésil, pas de Savoie) dévie le ballon de la main. Pénalty, que Shearer se charge de transformer en but. 3-0.

42ème minute : dans le rond centrale, Kestbaia transmet à Dyer sur l’aile gauche. Son contrôle n’est pas très professionnel, mais le marquage non plus. Aux abords de la surface, il centre pour Shearer qui devance son défenseur pour marquer son troisième but. 4-0.

46ème minute : Shearer, sur l’aile gauche, qui s’infiltre dans la surface et centre à ras de terre pour Speed. Sa main l’aide à prendre le dessus sur son défenseur, mais pas sur le gardien, qui repousse son tir. Le ballon revient sur Shearer qui centre à nouveau, de la tête. Dyer est en embuscade aux six mètres. D’ailleurs, c’est une action assez confuse. 5-0.

78ème minute : superbe remontée de balle de Newcastle en neuf passes, coup-franc de Solano, dégagement de la défense, corner de Solano, tête aux 10 mètres de Speed. Robson : « We need for Speed. ». 6-0.

81ème minute : Sheffield n’y est plus tellement. Mr. Robinson obtient un coup-franc sur la côté droit, que Solano se charge de frapper. Pressman et Walker se gênent, le ballon atterrit dans les pieds de Shearer. Cadeau, 7-0.

84ème minute : Le pas mauvais Sibon vient de remplacer Donnelly. Après dix secondes de jeu, il fait faute sur Robinson dans la surface. Shearer salue la foule pour la cinquième fois. 8-0.

Et Sheffield dans tout ça ?

Pas grand-chose à se mettre sous la dent, même s’ils n’ont pas été ridicules offensivement. Mais Andy Booth, blessé, est sorti très tôt du match, et Gilles de Bilde n’a pas compensé.

Bilan carbone désastreux pour Sheffield

Bilan carbone désastreux pour Sheffield

This is the end

* Il faut remonter à 1904 pour revoir une telle somme de buts entre ces deux équipes (le 17 décembre, 6-2 en faveur de Newcastle qui jouait à domicile).

* Shearer a été devancé par Andy Cole, le 4 mars 1995, et sera imité par Jermaine Defoe, le 22 novembre 2009, puis par Dimitar Berbatov, le 27 novembre 2010.

* 5-1 à domicile, leur seule victoire sur leurs dix-sept premiers matchs.

Le 3 juillet 2010, toute l’Angleterre tremble. Le tonton flingueur Raoul vient de faire un carton à Newcastle et promet de « buter un maximum de flics ». Une chasse à l’homme sans précédent démarre alors. Le 9 juillet, le fugitif est cerné mais refuse de se rendre. Un homme se présente pour raisonner le déséquilibré, façon Sarko avec Human Bomb. Ce négociateur de choc n’est autre que Paul Gascoigne. Sauf que Gazza, lui, fait ça à la bonne franquette. Dans son kit d’intervention de crise : une canne à pêche, du poulet et des bières…

Raoul, caïd bodybuildé, a encore plus la haine des flics que son célèbre homonyme. Pendant sa détention pour violences, sa petite amie, Samantha, lui a affirmé avoir refait sa vie avec un policier (c’est faux mais elle craint Moat et espère ainsi l’éloigner). Deux jours après sa sortie de taule, l’ex videur de boîte défouraille sur Samantha et son compagnon (la jeune femme s’en sortira). Le lendemain, il tire à bout portant sur un policier à Newcastle, David Rathband (qui, tragiquement, perdra la vue et se suicidera en mars 2012). Le tueur communique avec la police par Facebook et media interposé. Ses messages font froid dans le dos :

« Je déclare la guerre à la police de cette région et j’ai déjà commencé en butant l’un des vôtres la nuit dernière. […] Vous allez payer pour ce que vous m’avez fait à moi et Samantha. Je continuerai à tuer du flic jusqu’à ma mort. »

[cliquer sur les photos facilite la lecture]

Les autorités pensent qu’il se terre sur Newcastle. La police est à cran, elle redoute un carnage. Un mois auparavant, Derrick Bird, un chauffeur de taxi du Cumbria (à 100 kms de là) avait abattu douze personnes et fait autant de blessés en trois heures (ici). La police avait été vivement critiquée pour sa lenteur à intervenir.

La psychose s’installe et les moyens mis en œuvre pour neutraliser Moat sont sans précédent : jusqu’à 4 500 hommes, des hélicoptères, vingt blindés rapatriés d’Irlande du Nord, l’armée de terre en renfort et même des Tornado de la Royal Air Force.

Impasse dans les négociations : à Gazza de jouer !

Le 9 juillet, la police finit par localiser et cerner Moat à Rothbury, pittoresque village de la région de Newcastle. L’Angleterre retient son souffle. Une armée de véhicules médias investit les lieux et des dizaines de radios et télés « retransmettent » l’action en direct. La tension est à son paroxysme dans ce bourg paisible, totalement bouclé par les forces de l’ordre depuis 18 heures. Les pourparlers avec le fugitif ne donnent rien. Moat menace de tout faire péter.

A 21 heures pétantes (et bien rotantes aussi), glorieusement indifférent à tout ce raffut, Gazza se laisse tranquillement tomber de son taxi à l’entrée du village. Il arrive de Newcastle et traîne avec lui tout un barda. L’élocution titubante, il s’adresse aux médias hallucinés :

« Je suis ici pour offrir ma collaboration à la police et sauver mon pote Raoul. »

Son agent, Kenny Shepherd, est prévenu illico et même lui est scié net par ce dernier fait d’armes gazzaïen (« Paul est en train de faire quoi là ? Je suis à Majorque, en train de dîner tranquillement… Je suis sans voix. »).

Gazza tente de convaincre la police qu’il est l’homme de la situation :

« Ecoutez, je suis venu pour aider Raoul, un vieil ami à moi. Vous verrez, je vais vous régler ça, je le connais bien. Il se rendra si je lui parle. Il a juste besoin d’un peu de thérapie et que je lui dise « Allez Moaty, c’est Gazza, ton pote« . Vous verrez, il me connaît Moaty, on est copains tous les deux, on s’est connus quand il était videur dans le Bigg Market [principal coin soiffard de Newcastle]. Il me tirera jamais dessus. »

La police trouve qu’il pue trop la Newkie Brown et le refoule. Un journaliste d’une radio locale (Real Radio) ne vendange pas l’occasion et alpague notre héros du soir. Ci-dessous, la retranscription inédite et quasi intégrale de ce monument radiophonique (in extenso ici). Un moment d’anthologie qui commence avec un Gazza semblant bricoler avec une cigarette et un briquet…

L’interview surréaliste

Journaliste : Terry [le photographe], nous venons d’apprendre que Gazza vient d’arriver sur les lieux, pourrait-on lui parler ?

Photographe : Effectivement, il est avec moi dans la voiture, j’ai dû l’éloigner du village à cause de l’attention qu’il suscite, il dit pouvoir aider Raoul.

[suit alors une bonne minute de bricolage gazzaïenne, on dirait qu’il essaie d’allumer une cigarette tout en marmonnant dans sa barbe]

Journaliste : Paul, bonsoir, vous êtes en direct sur Real Radio, que pouvez-vous faire pour aider la police ? […] Parlez-nous du Raoul Moat que vous connaissez.

Gazza : Raoul Moat, ça fait des années que je le connais, du temps où je jouais pour Newcastle (photo de gauche), il était videur en ville, c’était un vrai gentleman. Je comprends pas ce qui s’est passé, quelqu’un a dû bien l’énerver… Bon, ce soir, j’allume la télé et je le vois ! Alors, OK, il a tué quelqu’un et a blessé deux personnes, bon, c’est vrai, c’est pas sympa… Il a dû agir sous l’effet de la drogue [Moat était accro aux stéroïdes, ndlr]. Bon, maintenant que Raoul est calmé vu que l’effet de la drogue est nul, je me propose d’aller lui parler, il se rendra. Je vous assure, c’est un charmant garçon, je sais que si je lui parle, il rangera son arme… Il réalisera que s’il se rend et va en prison, bon, au final il prendra quoi pour avoir tué une personne et en avoir blessé deux ? Bon, mettons qu’il prenne douze jours, pardon, je veux dire douze ans, en fait, il pourrait sortir au bout de six ans… Moi je sais que c’est un chouette garçon.

Journaliste : Paul, si vous aviez un message à faire passer à Raoul Moat maintenant, que lui diriez-vous ?

Gazza : Ben, que j’ai pris un taxi de Newcastle jusqu’ici et que ça m’a coûté bonbon ! Je lui ai apporté un peignoir, une veste, du poulet, du pain, et, bon je sais que ça va vous faire rire, je lui ai amené une canette de bière et une canne à pêche, car je sais que la police l’a cerné au bord de la rivière… Je voudrais que la police me laisse lui parler, je pense vraiment être le seul qu’il écoutera.

Journaliste : Gazza, maintenant, à ce moment précis, vous comptez aller voir la police et dire « Écoutez, laissez-moi vous aider à négocier, je connais Raoul Moat, je peux vous aider à régler la situation de manière satisfaisante », c’est bien ça ?

Gazza : Ben, je viens de parler à la police. Je leur ai dit que je voulais les aider, que je voulais vraiment aller parler à Moat, que je le connaissais bien, que c’était un bon gars au fond. Mais bon, y’a un gros barrage sécurité et la police ne veut rien entendre. Elle me dit que c’est trop dangereux et qu’il pourrait me descendre mais moi je sais qu’il me tirera pas dessus.

Journaliste : C’est une situation dangereuse, non ?

Gazza : Mais non, c’est pas dangereux. Écoutez-moi bien, je viens de sortir de l’hôpital, un accident de voiture, je me suis pris un mur à 150 kilomètres/h et j’ai survécu, alors ! Prendre une balle ne me fait pas peur, surtout que bon, j’suis du genre chanceux, s’il me vise, il me ratera probablement !

Journaliste : Donc, pour résumer, vous voulez parler à Moat, aider la police dans les négociations, vous…

Gazza (interrompant) : J’ai une veste pour lui, j’ai un peignoir, j’ai du poulet, j’ai du pain, une canette de bière, une canne à pêche… Je veux m’asseoir à distance, et crier « Moaty, c’est Gazza, réponds-moi, t’es où ? » Et je vous assure, il me répondra, il répondra « Je suis ici » et on s’assiéra tous les deux. Y’aura peut-être un peu de friction au début, mais je lui dirai ce qu’il doit faire.

Journaliste et photographe : Vous pensez pouvoir régler la situation comme ça ? Pour vous donc, si je résume, la solution passerait par une discussion d’homme à homme, entre deux potes, au bord de la rivière.

Gazza : Ouais, c’est ça, une conversation entre deux potes de Newcastle, je lui dirai, « Écoute Moaty, fais pas l’idiot, balance le flingue dans la rivière, au pire, tu prendras peut-être douze ans »… Je sais qu’il veut se rendre à ce moment précis parce qu’il n’est plus sous l’influence de la drogue. Je saurai lui parler, le convaincre que personne ne lui fera du mal, qu’il prendra quoi, douze ans… Bon, forcément, il a tué quelqu’un, bon, c’est pas un truc sympa à faire mais il a fait ça sous l’effet de la drogue. Avec les remises de peine pour bonne conduite, il pourrait sortir au bout de six ans.

Journaliste : Paul, avez-vous été en contact avec lui récemment ?

Gazza : Non, j’étais à l’hôpital suite à mon accident de voiture (ici)

Journaliste : Quand lui avez-vous parlé pour la dernière fois ?

Gazza : Y’a un an et demi, à Newcastle.

Journaliste : Et il vous paraissait comment ?

Gazza : Tout à fait normal, aucun problème. C’est vraiment un chouette gars, c’est un gentleman, mais bon, il a pété les plombs quand il a appris que son ex l’avait quitté pour un autre homme, ça détruirait n’importe qui, ça.

Journaliste : Merci Gazza, et bonne chance dans votre tentative de trouver une conclusion pacifique à ce drame.

Gazza : Ouais, rendez-moi un service, souhaitez à Moaty qu’il s’en sorte, c’est pas un mauvais gars, moi je vais aller le trouver, vous savez, je suis venu exprès de Newcastle pour lui parler, et écoutez-moi bien, je suis le seul qu’il écoutera, et j’ai pas peur, oh non !

Journaliste : Paul Gascoigne, merci beaucoup.

Gazza : Merci… et vous pourriez pas m’rendre un p’tit service des fois ?

Journaliste : Oui, quoi ?

Gazza : Envoyez-moi le chèque par courrier… Non, j’ rigole.

A 1 heure du matin, Moat se suicide. Peu après, Gazza démarrera une énième cure de désintoxication à Bournemouth, où il vit désormais (il va beaucoup mieux et a abandonné toute ambition de faire carrière dans le GIGN anglais).

Kevin Quigagne.

Et voilà, that’s all folks pour notre deuxième saison parmi vous.

Cette année, finie l’île de Man pour nos holidays. Marre de visiter les banques et traîner avec le soporifique Mark « The Manx Missile » Cavendish. TK a donc décidé de prendre de vraies vacances, à Doncaster. Il reviendra quand il aura écumé tous les pubs du comté et récupéré les autographes de Pascal Chimbonda et Mamadou Bagayoko (on nous a assuré qu’ils erraient encore dans le coin à la recherche du but).

Fesseboukez-nous si ce n’est déjà fait et suivez-nous sur Twitter. Vous n’aurez aucun mal à nous suivre, notre rythme de croisière est d’un tweet par semaine (deux en cas d’actu brûlante).

Merci à tous & toutes pour votre fidélité, vos commentaires et toussa et nous vous souhaitons la meilleure trêve estivale possible.

On vous laisse avec ces géniales photos ainsi que le guide d’intersaison des clubs de Premier League. Ils joueront un peu partout sur notre belle planète dans les semaines à venir, peut-être dans un stade near you. Bon, vérifiez quand même avant de vous déplacer hein, ce guide est tiré de l’approximatif Daily Mail, donc méfiance. Ça vous évitera de partir pour Pékin en pensant assister à Arsenal v Man United alors que les Gunners sont à Chicago pour y affronter Man City.

Oh, et une dernière chose : vous aussi pouvez faire partie de la légende TK ! Toute collaboration, même pour un temps équivalent au coaching de Torquay United par Leroy Rosenior en 2007 (dix minutes), est la bienvenue. N’hésitez pas à nous poker à l’adresse suivante :

teenagekickscdf@gmail.com

En Angleterre, pendant la période des fêtes, le championnat continue. Des matchs à trois points la victoire, un point le match nul et zéro point la défaite. Si l’on se permet de rappeler ce point de règlement, c’est moins par condescendance que par souci de précision, tant subsiste l’idée que cette dizaine de jours serait cruciale pour la suite, que l’équipe qui marquerait davantage de points que ses poursuivants obtiendrait un avantage (moral ?) déterminant.

Alors, vrai ou faux ? Nos petits graphiques révèlent une corrélation surprenante entre le niveau de forme au moment des fêtes et le classement final. Mais il ne se fait sans doute pas de différence plus flagrante entre la bûche de Noël et la galette de l’Épiphanie qu’entre l’Assomption et la rentrée des classes, ou encore qu’entre le Mercredi des Cendres et Pâques. La quasi-sacralisation de ces matchs incite seulement à les ranger dans une case à part, et à créer pour elle des statistiques exclusives.

[Note : les graphiques incluent les matchs s’étant déroulés du 26 décembre jusqu’à début janvier – la date varie en fonction des années. Le classement indiqué est celui au 25 décembre. Est signalé entre parenthèses le nombre de points inscrits par l’équipe. Le nombre de matchs étant rarement similaire, il a fallu créer une échelle commune, de 0 (soit une équipe qui a vomi la dinde) à 1 (soit une équipe qui a eu la fève). Pour obtenir des points de comparaison, nous avons comptabilisé le parcours d’au moins trois équipes pour chaque année, voire davantage suivant la place qu’occupait au 25 décembre le vainqueur final de l’exercice. C’est aussi clair qu’une interception de Mertesacker, non ?]

Saison 92/93

Classement Noël : Norwich (39 pts), Aston Villa (35), Blackburn (34), Manchester United (34)

Classement final : Manchester United (1er, 84 pts), Aston Villa (2ème, 74), Norwich (3ème, 72), Blackburn (4ème, 71)

Saison 93/94

Classement Noël : Manchester United (52 pts), Leeds United (+1)(40), Blackburn (-1)(38)

Classement final : Manchester United (1er, 92 pts), BLackburn (2ème, 84), Leeds United (5ème, 70)

Saison 94/95

Classement Noël : Blackburn (43 pts), Manchester United (41), Newcastle (38)

Classement final :Blackburn (1er, 89 pts), Manchester United (2ème, 88), Newcastle (6ème, 72)

Saison 95/96

Classement Noël : Newcastle (45 pts), Manchester United (35), Liverpool (34)

Classement final : Manchester United (1er, 82 pts), Newcastle (2ème, 78), Liverpool (3ème, 71)

Saison 96/97

Classement Noël : Liverpool (+1)(38 pts), Arsenal (35 pts), Wimbledon (34), Aston Villa (33), Manchester United (31)

Classement final : Manchester United (1er, 75 pts), Arsenal (3ème, 68), Liverpool (4ème, 68), Aston Villa (5ème, 69), Wimbledon (8ème, 56)

Saison 97/98

Classement Noël : Manchester United (43 pts), Blackburn (39), Chelsea (38), Leeds United (34), Liverpool (-1)(31), Arsenal (-1)(30)

Classement final : Arsenal (1er, 78 pts), Manchester United (2ème, 77), Liverpool (3ème, 65), Chelsea (4, 63), Leeds United (5ème, 59), Blackburn (6ème, 58)

Saison 98/99

Classement Noël : Aston Villa (36), Chelsea (33), Manchester United (31)

Classement final : Manchester United (1er, 79 pts), Chelsea (3ème, 75), Aston Villa (6ème, 55)

Saison 99/00

Classement Noël : Leeds United (41 pts), Manchester United (-1)(39), Sunderland (37)

Classement final : Manchester United (1er, 91 pts), Leeds United (3ème, 69), Sunderland (7ème, 58)

Saison 00/01

Classement Noël : Manchester United (43 pts), Arsenal (35), Leicester City (35)

Classement final : Manchester United (1er, 80 pts), Arsenal (2ème, 70), Leicester City (13ème, 48)

(A suivre…)

[Merci à l’indispensable statto.com]

Matchbox vintage – Liverpool 4 – 3 Newcastle United (3 avril 1996)

Considéré comme l’un des tout meilleurs matchs de Premier League depuis sa création, ce LFC-NUFC a d’abord excité par l’ampleur de son enjeu, puis brillé par le plaisir du jeu. Un régal à déguster, car on ne vit que deux fois.

Buts : Fowler (2’, 55’), Collymore (68’, 90+2’) ; Ferdinand (10’), Ginola (14’), Asprilla (57’)

Le chox des étoiles

Le choc des étoiles

Premiers pendant 29 journées, Newcastle se fait dépasser par Manchester United à la défaveur d’une quatrième défaite en six matchs, cette fois à Arsenal (0-2) quelque part dans le temps. Liverpool a également perdu à Notthingham Forest (0-1), mais conserve sa troisième place. Toutefois, rien n’est joué. De multiples matchs en retard subsistant, le suspense demeure en haut de tableau.

Danse avec les Stars du centre.

Danse avec les Stars du centre.

Liverpool

David James

John Scales – Mark Wright – Neil Ruddock

Jason McAteer – Jamie Redknapp – John Barnes (c) – Rob Jones

Steve McManaman

Stan Collymore – Robbie Fowler

Coach : Roy Evans (en charge depuis deux ans et deux mois)

Newcastle

Pavel Srníček

Steve Watson – Steve Howay – Philippe Albert – John Beresford

Peter Beardsley (c) – David Batty – Robert Lee – David Ginola

Faustino Asprilla – Les Ferdinand

Coach : Kevin Keegan (en charge depuis quatre ans et deux mois)

Le match

Newcastle donne le coup d’envoi de cette guerre des abîmes, obtient même un corner, mais se fait surprendre par Fowler. Après une remontée de balle très propre, Redknapp hérite du ballon au milieu du terrain, qu’il expédie aussitôt vers Jones, sur l’aile gauche. Celui-ci transmet en une touche à Collymore qui centre sur Fowler. Déjà auteur de 23 buts, le buteur Red profite de l’hésitation du tchèque Srníček pour faire chauffer Anfield.

Newcastle est touché, mais pas coulé. Maîtrisant la possession du ballon, les minutes suivantes semblent à leur avantage, grâce à un pressing haut et agressif. Asprilla et Ginola tentent leur chance, mais James veille au grain. A la 10ème minute, ils sont logiquement récompensés de leurs efforts. Après une touche de Watson, Asprilla se joue de Ruddock (petit pont) pour rentrer dans la surface et centrer sur Ferdinand qui, aux six mètres, et malgré la vigilance de Wright, trompe un James apathique.

L’enjeu galvanise les Magpies, l’opération Tonnerre sur Manchester est en marche. Ainsi, quatre minutes plus tard, la défense récupère un ballon dans son camp, transmet à Ferdinand au milieu du terrain, qui lance Ginola dans la profondeur. Après une course de trente mètres, le français résiste au retour en forme de poursuite impitoyable de Scales et vient tromper James du pied gauche. Les Reds touchent les grands fonds. Leur trou noir a duré cinq minutes.

A la 18ème minute, Redknapp réveille un peu ses troupes en tentant un tir des 20 mètres qui frôle le poteau droit de Srníček. Mais si l’anglais ne trouve pas le cadre, il a le mérite de recadrer quelque peu ses coéquipiers, au cœur de la tourmente. Car Liverpool ne convainc pas, et l’on se demande si McManaman ne pense pas déjà à sa reconversion sur ESPN. A la décharge des milieux de terrain, il est vrai qu’ils n’ont que peu l’occasion de briller, tant le ballon file d’un but à l’autre à une vitesse folle.

Si la défense de Liverpool parvient désormais à juguler les attaques adverses, ni Fowler (23ème minute, après un coup-franc de Redknapp), ni Redknapp himself (31ème minute, sur une frappe aux 20 mètres), ni McManaman (43ème minute, seul aux 6 mètres mais très, très approximatif de la tête) ne peuvent égaliser.

L’arbitre décide de siffler la pause. Après 45 minutes aux allures de haute randonnée, le ballon peut enfin souffler. Half time.

Supporter de Newcastle, l'envoyé spécial de Teenage Kicks était soucieux.

Supporter de Newcastle, l'envoyé spécial de Teenage Kicks était soucieux.

La deuxième mi-temps commence comme la première : beaucoup de déchets techniques, mais un rythme soutenu et un scénario dramatique qui compensent. Guerre et passion sont au rendez-vous.

Fowler, décidément la fièvre au corps, est le premier à se mettre en évidence. A la 55ème minute, il reçoit un ballon face au but au point de pénalty de la part de McManaman. Sa reprise puissante fait mouche. Les Reds reviennent dans la partie.

Mais dans la foulée, le French Lover Ginola récupère un ballon au milieu du terrain, fait la passe entre trois défenseurs pour Lee, qui sert Asprilla en profondeur. Aux vingt mètres, celui-ci met l’extérieur de son pied droit pour tromper James, sorti faire la cueillette.

Alors, pour conjurer le jour du fléau, Liverpool repart de l’avant. Et parvient à recoller dix minutes plus tard, grâce à Collymore, venu dans la surface à la réception du centre de McAteer.

Le score est nul, et aucune des deux équipes ne semble s’en réjouir. Bien que Liverpool se crée les meilleures occasions (par Fowler et Barnes, notamment), Ferdinand est tout proche de marquer après avoir gagné son duel à double tranchant face à Harkness, rentré à la pause à la place de Wright, mais James apporte sa première contribution du match en repoussant la frappe de l’attaquant anglais.

A dix minutes du terme, le vétéran Ian Rush remplace Rob Jones, pour l’un de ses derniers matchs sous le maillot Carlsberg. Roy Evans choisit la carte du cœur, car les diamants sont éternels.

On rentre alors dans le temps additionnel, et l’expert McManaman obtient un corner. Qui ne donne rien.

A la 92ème minute, Barnes trouve Rush en double une-deux pour infiltrer la surface des Magpies, puis sert Collymore sur sa gauche. Esseulé, le justicier solitaire anglais contrôle et trompe Srníček dans son angle fermé. Boom ! Anfield est en furie, Keegan est furieux. Full-time.

De mauvaise humeur, il ira pondre un résumé de 15000 signes.

De mauvaise humeur, il ira pondre un résumé de 15000 signes.

Le classement du Top 5 restera inchangé. Il se dit que Roy Evans était au service de sa Majesté Alex Ferguson. Cette année-là, Newcastle a peut-être laissé à Anfield ses espoirs de remporter son premier championnat depuis 1927. Pleure ô pays bien-aimé.

Bonus : les buts et un point de vue du Guardian sur ce match.

(Cette chronique contient 23 messages subliminaux)

Matchbox vintage – Tottenham Hotspur 4 – 2 Newcastle United (3 décembre  1994)

Saison 1994-1995 historique, puisque c’est la dernière à compter 22 clubs et l’avant-dernière à limiter le nombre de remplaçants à trois. Elle voit les Rovers de Blackburn glaner leur premier titre de champion d’Angleterre depuis la première Guerre Mondiale. En ce début décembre, Tottenham et Newcastle ne s’affrontent pas pour du beurre.

Buts : Sheringham (14, 38, 70), Popescu (79) ; Fox (31, 41)

La saison précédente, les Magpies, alors promus, terminaient à une très belle troisième place, et en cette fin d’année, la chance continue de leur sourire (troisième après 16 journées). Ayant précédemment terminé à trois points du premier relégable, Tottenham ne peut pas en dire autant. Avant Newcastle, les Spurs occupent une laborieuse quatorzième place. Ce match de début décembre 1994 promet du spectacle : pire défense du championnat contre deuxième meilleure attaque.


Tottenham

Walker

Austin – Calderwood – S. Campbell – Mabbutt

Anderton – Howells – Barmby – Popescu

Sheringham – Klinsmann

Coach : Gerry Francis (en charge depuis trois matchs)

Newcastle

Srnicek

Hottiger – Venison – Neilson – Beresford

Fox – Beardlsey – Watson – Clark

Mathie – A. Cole

Coach : Kevin Keegan (en charge depuis deux ans et demi)

Le match

Seize ans, cela semble une éternité. Certains inscrivaient leur fils au club de football, d’autres y jouaient dans la cour d’école. Tottenham jouait en blanc et Newcastle en bleu. Jurgen Klinsmann n’entrainait pas encore le Toronto FC, mais Kevin Keegan avait déjà quelques cheveux blancs.

En cette fin d’automne anglais, le match démarre paisiblement. Comme à Wimbledon, les spectateurs observent les vingt-deux acteurs se rendre la possession. A la 14ème minute, sur une nouvelle perte de balle au milieu du terrain, Barmby récupère le ballon, transmet à Anderton qui, sur un pas, réalise un bijou de passe entre les jambes de son adversaire direct et les deux défenseurs centraux. Sheringham, seul à seize mètres, catapulte le ballon en lucarne de l’extérieur du droit. De quoi réchauffer quelque peu l’atmosphère.

Mais Newcastle trône sur le podium du championnat, et se doivent de l’assumer. Un quatre d’heure plus tard, après un centre d’Hottiger venu de l’aile droite, Clark hérite finalement du ballon sur son aile gauche. Sans contrôle, il place son centre sur la tête de Fox, le plus petit joueur du match. Walker est battu est sur sa gauche.

Les deux équipes se neutralisent dans le jeu, sans parvenir à percer la défense adverse. A la 35ème minute, sur une déviation de Cole, Mathie prend l’avantage sur la défense centrale, mais Calderwood et Walker veillent et obligent l’attaquant Magpie à remettre en retrait pour Clark. Une rare opportunité malheureusement gâchée, dont profite Tottenham pour rebondir. Dans la continuité de cette action, après moult erreurs techniques et sorties en touche, Popescu obient un corner. Anderton trouve Sheringham aux six mètres, complètement esseulé. Sa reprise de volée à ras de terre rentre aux faveurs du poteau rentrant et de la négligence de Clark, pourtant collé à la ligne mais qui manque son dégagement.

Mais, à croire que Newcastle aime le danger, les Magpies vont vite retrouver la faille. Sur un coup-franc aux vingt mètres décalé sur la gauche, la défense des Spurs repousse dans les pieds de Clark qui, aux seize mètres, frappe sans réfléchir. Cela lui réussit davantage puisqu’il trouve le poteau. Fox a suivi, et pousse le ballon dans le but vide.

Malgré une dernière possibilité pour le renard Klinsmann, l’arbitre siffle la pause. Sheringham : deux, Fox : deux. Half-time.

Tottenham semble prendre l’avantage, en début de deuxième mi-temps. Le milieu de terrain, dont le tout jeune (20 ans) et déjà imposant Barmby, montre de l’influence, sans toutefois rendre leurs attaquants très dangereux. Passés un but d’Anderton refusé pour hors-jeu, et une belle occasion ratée du malchanceux Clark, c’est Sheringham qui se (rere)met en évidence. A la 70ème minute, sur une contre-attaque enclenchée par Klinsmann sur la droite, l’allemand fait la diagonale, passe à l’anglais sur sa gauche qui transmet instantanément à Austin sur son aile droite. Celui-ci se met sur son pied gauche, et trouve Klinsmann seul aux six mètres. Celui-ci a le temps de contrôler, de refaire ses lacets et de cirer ses chaussures, mais préfère jouer le ballon de la tête. Srnicek repousse dans les pieds de Sheringham, qui ne se fait pas prier. Triplé et cinquantième réalisation sous le maillot des Spurs.

Newcastle tente de revenir, en vain cette fois. Et Tottenham enfonce le clou dix minutes plus tard. Sur une perte de balle de la défense centrale, Popescu récupère le ballon aux quarante mètres, dribble un premier venu, passe trois hommes-gruyères à l’aide d’un une-deux et tire aussitôt aux dix mètres. Srnicek, délaissé par une défense apathique, ne peut qu’effleurer le ballon.

En fin de match, Klinsmann a doublement l’occasion de laisser une trace sur la feuille de match, mais la barre transversale et son plat du pied trop ouvert ont finalement raison de sa ténacité. Full-time.

Première victoire pour Gerry Francis depuis son arrivée à Tottenham, qui finira la saison septième, à dix points de Newcastle, sixième, et à vingt-sept points de Blackburn. La Premier League n’a pas attendu le Big Four pour connaitre de gros écarts.