La première partie est ici, tandis que la deuxième est .

Vendredi 15 octobre : enfin, la conclusion ?

Beaucoup de points en suspens.

Le Juge Jordan (la nouvelle célébrité texane) va-t-il abonder dans le sens de la Haute Cour de Londres ? La banque RBS va-t-elle exiger le remboursement prévu aujourd’hui ? Si impossibilité de rembourser, le club va-t-il être placé en redressement judiciaire avec neuf points de retrait ? (Liverpool serait alors à –3 avant de rencontrer Everton dimanche). John Henry et NESV seraient-ils toujours intéressés pour racheter un club alors en redressement ? H & G vont-ils saisir la Cour Suprême des Etats-Unis ? Ou la Cour internationale de justice et des droits de l’homme ? Peter Lim (the new Kenny Huang ?), casaque jaune, toque pailletée rouge, va-t-il surgir de son Disco Inferno déguisé en John Travolta et coiffer tout le monde sur le poteau ? Mill Financial (MF), le new kid on the block, fomente-t-il un sinistre complot pour apparaître de derrière les ragots et rafler la mise devant un directoire médusé ?

On saura tout en fin d’après-midi.

9 h 24. En attendant la fin de l’après-midi, une énième mauvaise nouvelle tombe pour Liverpool : Jamie Carragher vient de prolonger son contrat de deux ans.

On apprend en outre que Mill Financial est hyperactif en coulisses et a proposé à RBS de rembourser intégralement le prêt contracté par H & G (MF a récupéré les actions de Gillett en août après que ce dernier ne s’est pas acquitté des remboursements). La RBS aurait refusé cet arrangement peu scrupuleux. Qui a dit que les banques n’avaient aucun cœur ?

10 h 00 : rumeurs selon lesquelles Hicks tente, dans un dernier élan tordu, de sagouiner la vente du club à NESV en faisant le forcing pour persuader Mill Financial de racheter ses actions (MF qui possède donc déjà les 85 millions d’actions de Gillett, même si ce dernier fait toujours mystérieusement partie du directoire – je sais, c’est étrange, mais plus ça va, moins on sait à qui appartient réellement ce club).

Une course contre la montre s’engage, H & G n’ont plus que six heures pour conclure un deal avec l’énigmatique MF. Situation anxiogène. Contrairement à John Henry-NESV (réanimateur cardiaque des Boston Red Sox et très apprécié sur Boston), on ne sait absolument rien de MF.

Tels des George Marchais sauce ultralibérale, ils ne répondent ni aux questions, ni au téléphone, ni aux courriels, et refusent toute interview. On arrive à peine à trouver un lien internet sur eux.

Voici un extrait amusant que dégotent des journalistes, sur le site de la maison mère (Springfield Financial) : « Springfield sait mieux que quiconque négocier les transactions compliquées de façon créative. » Ça devrait s’avérer utile aujourd’hui…

10 h 30. Enième coup de théâtre. Avant même l’ouverture de l’obscur tribunal texan le plus célèbre au monde, on apprend par Sky que H & G ont « levé » l’ordonnance restrictive qu’ils avaient fait placer sur la vente du club à NESV.

Bonne nouvelle pour Liverpool ? Pas vraiment, H & G ont probablement fait cela dans le but de vendre plus tranquillement le club aux ténébreux de Mill Financial. H & G doivent avoir une dent contre John Henry, un peu quand même.

Malgré la levée de l’ordonnance, H & G déclarent ne pas vouloir lâcher le morceau, ils iront jusqu’au bout. Hasta la muerte.


Ce dernier rebondissement intrigue les observateurs. Voyons voir, il est 4 h 30 du matin au Texas, le tribunal n’ouvrira que dans trois heures pour instruire l’affaire en priorité (demande des autorités anglaises, vu l’urgence). Comment diable se fait-il alors que H & G aient décrété à eux seuls la levée de l’ordonnance restrictive décidée par un tribunal la veille ? H & G ont aussi un pouvoir divin de rendre les décisions de justice, unilatéralement ?

11 h 00. Apparemment, deal conclu entre Hicks et Mill Financial, le texan leur aurait bien vendu ses actions (85M de livres). Cela ne veut pas dire que tout cela est légal… Rien n’est trop légal dans toute cette saga. Le propriétaire des actions est Kop Holdings, société bloquée par la décision de la High Court de Londres.

No pasaran, déclare John Henry, guère inquiet du coup fourré de dernière minute entre Hicks et Mill Financial (actions d’Hicks vendues en douce à MF) : il faudra de toute manière l’accord du directoire pour vendre. Et puis, NESV a un contrat « d’exclusivité » avec le directoire pour racheter le club (valable jusqu’au premier novembre). Hicks rétorque tranquillement qu’il n’a pas besoin de l’accord du board, puisque les proprios, c’est Gillett et lui. Dans leur monde à eux, tout leur appartient et ils rendent eux-mêmes la justice.

11 h 50. John « El Che » Henry prend les armes sur Twitter : « Nous avons un contrat [avec le directoire]. Nous nous battrons pour empêcher MF, H & G de garder le club aujourd’hui. Leur dernière tentative désespérée de s’emparer du club échouera.« 

13 h 00 (7 h 00 heure texane – transportons-nous là-bas). La bataille s’est donc déplacée du Big Four des tribunaux anglais, la High Court de Londres (magnifique bâtiment gothique) au petit poucet du 160th District Court in Dallas (tribunal d’instance moche).

Tous les avocats sont là, prêts à s’entretuer à coups de Dalloz en angliche (ceux de LFC, RBS, NESV et H&G). Le directoire espère obtenir rapidement l’annulation de cette ordonnance farfelue.

Quelques supporters de Liverpool sont là aussi (ceux basés au Texas). Les huissiers leur intiment l’ordre d’éteindre tout portable (ils twittaient non-stop aux médias anglais), sous peine de Death row. Personne ne bronche. On ne reçoit plus de nouvelles pendant une heure. Les premiers symptômes d’état de manque judiciaire apparaissent.

8 h 00 (on n’a pas reculé dans le temps, juste bougé au Texas). Enfin des nouvelles. Le juge Jordan ordonne la dissolution de cette ridicule ordonnance restrictive qui n’a jamais eu aucune légitimité (c’est vrai, quoi, merde). Youpi.

Le juge d’instance Jordan, inconnu il y a 48 heures, gloire internationale aujourd’hui, déclare : « It’s been an interesting two days.« 

C’est un vrai pipole maintenant, il passera sûrement bientôt chez Oprah Winfrey et pourra donc se représenter serein aux prochaines élections de Super Juge de la Cour Suprême du Texas ou d’ailleurs.

Fin des aventures texanes. On l’espère en tous cas.

13 h 00, retour à Londres. John Henry vient d’arriver à un meeting du directoire (ce qui signifie : achat du club imminent).

Des petits malins des bureaux d’en face ont réussi à prendre des photos de la table de réunion. Il y a bien trente personnes autour de la table (immense, elle n’a jamais dû entrer par la porte – mais comme on n’a pas vu la porte, on ne peut donc être sûr de rien).

On apprend aussi que ces fourbes de Mill Financial ont approché les Grands Vizirs de la Premier League pour s’enquérir des modalités de passage du fameux « Fit and proper persons test » (un test que tout nouveau propriétaire potentiel doit passer, et réussit toujours haut la main, même Thaksin Shinawatra l’avait réussi, mention du Jury – c’est Harry Redknapp et Sam Allardyce qui corrigent les copies).

La PL les aurait envoyés promener, en leur répondant sèchement qu’elle ne traitait qu’avec des « directoires légalement constitués » (toujours le mot pour rire cette PL).

Décidément, aujourd’hui, c’est tous les habituels pestiférés qui redorent sacrément leur blason (banque, Premier League plc, etc). Ça doit être « Journée rédemption pour les boucs émissaires ».

Dommage que Kerviel ne soit pas supporter de Liverpool, aujourd’hui aurait été l’occasion idéale pour lui de se racheter.

13 h 45. H & G sont dans les cordes et seraient prêts à jeter l’éponge. L’émétique Tom Hicks livre un long communiqué incendiaire mais à l’arrière-goût défaitiste. Tricheur et mauvais perdant, on en était sûr.

Bien sûr, Hicks clame son innoncence, et répète que rien n’est de sa faute et que lui et son compère Gillett n’ont voulu que le bien du club. En grand carambouilleur ès-manipulation, il présente le duo comme deux héros qui ont sauvé le club d’un redressement judiciaire potentiellement fatal. Il réitère ses accusations « d’escroquerie » portées mercredi à l’encontre du directoire du club, et déclare la vente du club « illégale« . Du grand classique. Ça ne serait pas des anciens d’Enron, H & G ?

Ah oui, j’allais oublier, un petit détail : H & G réaffirment leur intention de poursuivre le directoire et la RBS pour obtenir « au minimum » 1 milliard de livres de dommages et intérêts. La RBS est une banque étatisée depuis la crise de 2007. Si G & H arrivent à gratter un beau magot en dédommagement, cela veut-t-il dire que c’est le contribuable anglais qui devra financer ces vautours ? Ben, logiquement, oui. Mais on n’ose pas y penser.

14 h 00 : On s’attend à l’annonce du rachat du club d’une nanoseconde à l’autre. Tout le monde est à cran. Et s’il y avait un ultime rebondissement sismique dans cette histoire de dingues ?

Où est passé Mill Financial ? On est sans nouvelles d’eux depuis ce matin, c’est louche. Et Peter Lim, il est toujours devant sa Karaoke box à Singapour ? Si oui, on lui conseille de ne pas bouger et d’attaquer le répertoire d’Engelbert Humperdinck, ça devrait l’occuper pour un bon moment.

14 h 15. Le suspense devient insupportable. Les rumeurs de vente imminente du club enflent, en même temps que celles d’un pépin de dernière minute.

La banque RBS s’excite toute seul à l’idée de récupérer ses pesos qu’elle flippait de ne plus revoir (« Ma cassette, ma cassette, rendez-moi ma cassette ») et prépare en salivant la réception du colis de 200 millions et des poussières.

Pas une mauvaise semaine finalement pour les petits Ecossais étatisés, avec l’annonce de bénéfices d’1,3 milliards de £ il y a quelques jours.

14 h 15. Le Guardian révèle que Stephen Hester, le Chief exec de RBS, est un supporter acharné de Man United. Va-t-il faire capoter le truc à la dernière seconde ? Pourquoi tant de retard dans cette vente, faut conclure avant 16 h ! Hester est-il le « traître » de cette affaire ?

En tous cas, gros coup de PR pour la banque RBS, qui sort en Ultimate Hero de cette affaire. Une fois n’est pas coutume.

Patrice Evra, contacté à l’entraînement, déclare qu’il faut être sans pitié avec ce traître qui menace de faire capoter l’affaire (il n’a pas compris qu’Hester est un gentil). Evra est toujours branché sur Knysna FM et déclare : « Le problème dans cette affaire, une fois de plus, c’est ce traître qui rôde autour de la banque, et met en danger le collectif. Il faut l’éliminer. »

14 h 45. Les médias rapportent qu’il y aurait effectivement des complications. Les spéculations vont bon train. Discute-t-on du communiqué belliqueux de H & G livré une heure plus tôt (qui promet de poursuivre tout le monde et sa famille jusqu’en enfer) et essaie-t-on alors de peser chaque mot de l’annonce imminente du rachat ? C’est bien possible.

15 h 35. Les joueurs sortent de l’entraînement. La traditionnelle conf’ de presse du vendredi est remise à plus tard. Roy Hodgson se dit ravi de l’arrivée de ces nouveaux propriétaires. Qu’il ne se ravisse pas trop vite lui, il pourrait bien sauter dès la semaine prochaine.

Les joueurs ne sont guère bavards. Ryan Babel est dans sa tour et se dit au courant de rien. Il déclare cependant qu’il twittera un message cryptique résumant l’affaire. Poulsen, interrogé, botte en touche. Milan Jovanović en profite pour répéter que si les choses s’arrangent, finalement il restera, mais rien n’est moins sûr, ça dépend. Tandis que la légende du club, le gardien number 5 dans l’effectif (remplaçant intérimaire de la doublure de la réserve B), l’ex-Kavalien Charles Itandje, part dans un fou rire incontrôlable avant même que la moindre question ne lui soit posée.

15 h 52 : Ça y est, c’est fait !! Bloomberg est le premier à annoncer la vente du club à NESV. Le magot tant espéré arrive chez RBS en flux tendu. Ça serait marrant qu’il y ait une coupure d’électricité.

15 h 58. Annonce officielle du rachat de LFC par NESV (pour 300M de £). Il était temps, plus que deux minutes et RBS risquait d’imploser. Un cliffhanger pire que la traditionnelle dernière soirée de Mercato.

Une nouvelle ère peut debuter pour le Liverpool Football Club. Les supporters d’Anfield préparent les plumes et le goudron pour H & G.

La quinzaine sera officiellement achevée après le Everton-Liverpool de dimanche. Un derby qui s’annonce des plus explosifs. Mais quoi qu’il arrive dimanche, cela ne sera rien à côté des quinze derniers jours.

Kevin Quigagne

7 commentaires

  1. Rock'n Santa Cruz dit :

    Tout simplement excellent, je me suis marré tout du long, le passage avec le tribunal d’instance de Dallas est totalement surréaliste.

  2. Kemper dit :

    Excellent ! (Very) good job! Mentions particulières à Evra et Itandje.. Un concert de Stevie G en duo avec Phil Collins à Anfield pour fêter çà ?

  3. Gap dit :

    Très sympa et tout, mais j’ai pas compris la raison de la date-butoir pour la vente. Qui l’a fixée et pourquoi ? Quelles conséquences si elle n’avait pas été respectée, et sur la décision de qui ?

  4. teenage-kicks dit :

    Merci pour tous ces commentaires sympas. C’est en effet une saga passionnante, et encore, je n’ai pas pu tout mettre !

    Voir « La saga de la vente de Liverpool » du 27 août dernier (en 2 parties) pour plus d’infos sur la vente, les prêts, les acteurs, etc.

    http://tinyurl.com/24pcayj

    En gros, la date butoir avait été fixée au 15 octobre (16 h 00) par la banque prêteuse, la Royal Bank of Scotland (étatisée à 84 %).

    La dernière rallonge, accordée à H & G en avril dernier, fixait la date limite au 15 octobre (la banque, de facto propriétaire du club, tenait à récupérer au plus vite ses 200 et quelques millions – à un moment, la dette s’élevait à plus de 350M).

    En cas de non remboursement, les conséquences auraient pu être :

    1) un redressement judiciaire*. Option la moins probable, car on pensait qu’un acheteur se manifesterait tôt ou tard cet automne ; mais aussi surtout car la banque n’avait absolument pas intérêt à déclencher un redressement, qui aurait signifié 9 points de déduction, et donc une dévaluation du club pour tout acheteur potentiel. RBS aurait donc très certainement remis à plus tard la date de remboursement (voir 2)

    (*en gros, un administrateur spécialisé dans le football débarque – comme Andrew Andronikou à Portsmouth en février 2010 – et essaie de trouver un acheteur, tout en tentant de récupérer le plus d’argent possible, par vente de joueurs, etc.).

    2) soit un prolongement de prêt (y’en a déjà eu 3), ce qui se serait probablement passé ici.

    Voir ce poste sur cette dette, avec Q & A, sur ce lien du site http://www.liverpool-kop.com

    http://tinyurl.com/27fzlvb

  5. JeanBen dit :

    Juste pour être sur d’avoir bien compris, H&G n’ont perdu « que » leurs 7M de départ ? La vente a servi à rembourser tous leurs différents emprunts ou il leur reste des dettes un peu partout ?

    (sinon, ce serait possible d’uniformiser toutes les polices utilisées dans le blog ? Parce que là, ça pique un peu les yeux.)

  6. teenage-kicks dit :

    C’est ce que j’ai entendu (7M). Mais le montage financier de H & G et leurs multiples prêts est très compliqué à détailler (avec des societés H & G aux Iles Caymans, etc.), même David Conn a du mal à faire la lumière sur la façon exacte dont ce club a été financé et ce qu’ils ont mis de leur poche (Conn est un journaliste anglais spécialisé dans le business foot, qui écrit dans le Guardian surtout). Mais bon, on est quasiment sûrs maintenant qu’ils n’ont quasiment rien mis de leur poche.

    [requête reçue pour la police. Faut savoir qu’on est 6 sur le blog, on a pas forcèment le temps en ce moment, on est aux prises avec une interface difficile à dompter, on va tenter d’harmoniser le plus possible, je crois que le Chef du Gang a fixé le choix sur du Arial calibre 12]

  7. Bi-o-bi dit :

    Le chef du gang! mdr!

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