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Marseille vu du ciel » Le journal de Robert

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Entre deux rumeurs de retour d’anciens (Thauvin, Maoulida, Lucho, Taiwo…), Lassana Diarra a donc été élu capitaine de l’Olympique de Marseille.

Vous aussi, votre première réaction a été «Il faudra m’expliquer comment un joueur qui s’est annoncé au PSG puis plus généralement sur le marché des transferts peut être élu capitaine de l’équipe ?»

Et il est vrai que pour en arriver là, soit il y a eu un quiproquo et Diarra est en fait le capitaine de soirée de l’OM, à savoir le mec qui ne sait pas trop pourquoi il est (toujours) là, qui attend seulement de se barrer et qui n’a rien d’autre à faire que de regarder, dépité, ses camarades faire n’importe quoi ; soit nous sommes devenus une république bananière et le capitaine élu démocratiquement est le pire choix possible pour l’avenir de l’équipe.

Heureusement pour vous, je garde des yeux et des oreilles partout.

Passi : «Les gars, je vous ai réunis aujourd’hui parce que Gunter est trop occupé pour désigner un nouveau capitaine. Bielsa ne m’ayant toujours pas répondu, je vais vous laisser décider à ma place.

Gunter est vraiment très occupé.

Zambo Anguissa : «On n’attend pas Lass pour commencer ?»

Passi : «Non, il viendra quand il peut.»

Samba : «Le plus simple c’est de donner le brassard au plus vieux. Comment il s’appelle le black qui a le corps de ma grand-mère ?»

Passi : «Abou ? Brice, il faut un joueur sur le terrain.»

Diaby : «Je pense être bientôt prêt, sans doute pour le boxing-day.»

Nkoudou : «Attendez si cette saison on fait de la boxe moi je demande à être transféré à Tottenham.»

Cabella : « On ne va pas y passer deux heures, j’ai un rendez-vous chez le coiffeur. Faisons simple, comme l’an dernier, désignons notre gardien.»

Escales : « L’albatros ! »

Rabillard : «Ah, j’ai vu ça au bac !

Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule !

Lui, naguère si beau, qu’il est comique et laid !

L’un agace son bec avec un brûle-gueule,

L’autre mime en boitant, l’infirme qui volait !»

Passi : «Au moins c’est réglé.»

Pendant ce temps, Alessandrini, qui a récupéré le casier de Mandanda, y trouve le baladeur de son ancien capitaine.

Thauvin : «Vas-y Romain, passe le moi !»

Alessandrini fait mine de ne pas l’entendre ou le voir et garde le baladeur pour lui jusqu’à ce que ses coéquipiers se mettent à le siffler.

Alessandrini : «Modou, à toi !»

Alessandrini fait mine de lancer le baladeur à Sarr mais l’envoie trop haut. Et sur son voisin.

Sarr : «Moi c’est Bouna…»

Alessandrini : «T’es arrivé quand ?»

Sarr : «Il y a un an…»

Alessandrini : «Je ne t’ai jamais vu sur le terrain.»

Rekik récupère le baladeur et se met à danser et chanter sur son siège.

Rekik est néanmoins arrêté par Tuiloma : «Hey, you touched my tralala !»

Khaoui : «Je sais que je viens seulement d’arriver, mais étant le meilleur buteur de la préparation, j’ai le droit d’avoir un avis : pourquoi pas nommer Zinédine capitaine de l’OM ?»

Gomis : «Le Machach ? Sois sérieux ! Pourquoi pas le petit Aaron ? Il a les gènes du meilleur buteur du club.»

Lopez : «Cela veut dire qu’il a aussi les gènes du hors-jeu…»

Bedimo : «Les joueurs qui tournent le moins durant un match sont les défenseurs, il faudrait peut-être voir parmi eux… »

Doria : « J’étais capitaine do Brasil espoirs…»

Bedimo : «Rolando ?»

Rolando : «Ils sont en train de me mettre à la porte parce qu’ils ont les boules que le Portugal ait battu la France… Pourquoi pas Hiroki ?»

Sakai : «Je très fier Olympique Marseille !»

Aloé : «Tu te sens de parler avec les arbitres ici ?»

Sakai : «Je très fier Olympique Marseille !»

Andonian sort alors son téléphone et montre une vidéo à Sakai, qui devient tout jaune.

Bedimo : «Tomáš ?»

Hubočan : «Yes, Hubočan !»

Passi : «Non, il ne peut pas.»

Bedimo : «Il reste qui en défense alors ?»

Pelé : «Personne, comme l’an dernier».

Diarra entre alors dans le vestiaire.

Diaby : «Salut Lass, nous parlions du capitaine.»

Diarra : «Oui ?»

Passi : «Il a dit oui, vendu.»

Le climat autour de l’OM m’amène aujourd’hui à faire la mise au point suivante :

Depuis maintenant 7 ans, ma femme et mère d’enfants dont je ne suis pas toujours le père, qui se passionne autant pour l’OM que moi pour une gestion saine et cohérente de mes fonds, m’a succédé. Par respect pour ma mémoire, et alors qu’elle devait faire croire qu’elle avait beaucoup d’autres importantes tâches et responsabilités, elle n’a malheureusement jamais abandonné le club et fait son maximum pour faire pire que moi. Ou son minimum pour faire mieux, c’est selon.

Nous avons eu des bas en finissant champion de France en 2010 (la dernière fois était en 1992 selon la police, en 1993 selon les gens encore debout dans les virages) et remporté la coupe de la Ligue 3 fois, 2010, 2011 et 2012 (et qui peut décemment s’en vanter ?). Mais nous avons aussi eu des hauts, de cœur, notamment en ce moment. Je suis fier des succès et ne blâme personne pour avoir attendu que je passe l’arme à gauche pour y parvenir. Non, même pas PSG – Bordeaux 1999. Sauf peut être Lilian Laslandes, mais c’est plus une histoire de coupe de cheveux. Les pauvres résultats de cette saison par contre, je l’avoue, me font plaisir.

Je souhaite rappeler que ma femme a dû remettre à titre personnel plusieurs dizaines de millions d’euros. A ma connaissance, aucune personne privée n’a consenti un tel effort sur la période en France. Même pas Vincent Bolloré en indemnités de licenciements ! Et croyez-moi, les aller-retours avec le Panama ou se maintenir à niveau après la naissance de jumelles, ça coûte autrement plus cher qu’un Bakayoko ou un Berizzo.

Aujourd’hui, les investissements doivent répondre à des objectifs commerciaux et politiques qui dépassent largement le cadre du sportif. Car si ce dernier rentrait dans le projet, le PSG aurait depuis longtemps fait mieux que l’Olympique Lyonnais en Ligue des Champions. Cela n’a jamais été le cas ni pour Margarita ni pour moi (même si j’ai des finales de Coupe d’Europe à mon actif, moi) qui avons mis notre argent (enfin, le mien) par amour et passion du football et de l’OM en particulier. Un peu par naïveté, aussi. Et laissez-moi vous dire que, s’il n’est pas aveugle, l’amour est sacrément ingrat. Je comprends Margarita quand elle pense que le temps des mécènes est révolu et qu’il est venu le temps des cathédrales.

Je comprends la frustration de ne pas voir l’OM pouvoir être compétitif à ce niveau et je vous informe qu’après toutes ces années de gestion à la petite semaine, Margarita a pris la décision de céder le club au meilleur investisseur possible pour le long terme. Ou pour le court terme si José Anigo a un PEL à craquer. Et que même s’il faut, elle ira proposer à Foucault.

J’aime quand un plan se déroule sans accroc

J’aime quand un plan se déroule sans accroc

Le prix n’est pas notre préoccupation première. Je le redis, nous avons acheté Habib Bamogo ou Florian Thauvin, donc l’argent, nous en avons encore à gaspiller. Enfin, elle, moi, il ne me sert plus à rien. Par contre la capacité du nouvel actionnaire à dépenser à pertes, pardon, à avoir un solide sens de l’humour, pardon, à construire une équipe qui gagne au plus haut niveau est essentielle. Et croyez-moi, quand il faudra se baser sur Rekik et Romao, être capable et avoir le sens de l’humour ne seront pas les moindres des qualités. Ça, et être un peu magicien. Margarita a donc demandé à mon équipe de conseillers de s’en occuper. Rassurez-vous, il s’agit de la même équipe qui supervise le recrutement de l’équipe première depuis plus de 10 ans. Rassurez-vous toujours, ce ne sont pas ces incompétents qui ont fait venir Dimitri Payet ou Lassana Diarra, ces gens-là ont déjà été remerciés depuis longtemps. À l’instant où le pigeon sera sélectionné, elle en informera Monsieur le Maire et les supporters. Nan, je déconne, vu comme ils nous ont toujours fait suer, ils seront les derniers au courant. Ils le verront au stade s’il est encore debout et qu’il reste du monde en tribunes.

De graves problèmes de santé de l’un de nos fils (je crois qu’il est de moi celui-là) n’ont pas permis à ma veuve de venir soutenir l’équipe et le management ces dernières semaines. Croyez bien qu’elle le regrette profondément et que c’est bien la seule raison pour laquelle Vincent Labrune et Michel sont toujours là. Ça plus le gros chèque qu’il faudrait leur faire : elle paye déjà bien assez cher des chèvres pour les résultats que nous connaissons, elle ne va pas en plus payer des singes savants pour qu’ils partent. Quand un club va mal il est d’usage de renvoyer l’entraîneur, plutôt que les joueurs. Chez nous, nous allons virer tout le monde, terrains d’entraînement, staff, salariés et club compris.

Je sais ce que nous avons fait et que Margarita continue de faire son maximum pour l’OM et j’espère que chacun à son niveau fera le maximum pour l’amour de ce magnifique club. Même si pour cela, il faut porter un costume à la place de ces affreux joggings si un repreneur passait au siège, un jour. Nous pouvons encore gagner la coupe de France. Sur un accident. Nous pouvons surtout encore descendre en Ligue 2, ce qui serait aussi un accident. Je compte sur tous pour défendre notre honneur. Ou au moins votre emploi. S’il vous plait, ne déconnez pas, je ne veux pas retourner à Sochaux l’année prochaine.

Vive l’OM.

Bob-Loulou.

Jamais à l’abri d’une bonne idée, Vincent Labrune a donc réussi à éclairer notre mercato hivernal avec le prêt de Florian Thauvin dont Newcastle se sera lassé en moins de six mois. L’opération est belle, mais le retour de celui qui a illuminé notre saison 2014-2015 aurait pu être parfait si nous avions cédé aux demandes anglaises de « vrai » transfert (le fameux humour anglais). Cette direction a encore une belle marge de progression, tout espoir est permis pour l’avenir.

Et l’avenir proche, c’est la mise en place d’une opération commando « Objectif Ligue de Champions » pour conclure ce mercato en feu d’artifice en faisant revenir au bercail 11 anciennes gloires locales.

  • Gardien : Steve Mandanda, parce qu’il est temps qu’il comprenne qu’il finira sa carrière à l’OM. Mais si un Stoke se décide à lâcher 35 millions, Elinton Andrade fera parfaitement l’affaire. Le karma, ça ne s’achète pas.
  • Défenseurs :
    • Manuel Dos Santos, au moins avec lui le couloir était bien cimenté.
    • Marcel Desailly, pour montrer à Laurent Blanc et Zinédine Zidane ce qu’est un véritable challenge sportif.
    • Stefano Torrisi, parce qu’aligner Paolo de Ceglie manque de panache.
    • Juan Ángel Krupoviesa, pour perpétuer le mythe du flop argentin.
  • Milieux de terrain :
    • Alou Diarra : le nom de Lassana, l’abattage et presque le prénom de Diaby. Le remplaçant idéal de Romao.
    • Charles Kaboré, parce que.
    • Florian Thauvin, parce que Mauricio Isla est trop sobre et fait trop de passes. Et puis il est déjà revenu…
    • Jérôme Leroy, pour redonner l’envie de se battre aux milieux de terrain.
  • Attaquants : Patrick Bosso et Robert Pirès, car seul un duo Bob l’épongesque pourra remplacer Michy.

Remplaçants : Jean-Pierre Papin, Bixente Lizarazu, Habib Beye, Christophe Dugarry, Reynald Peydros, Franck Sauzée et Franck Leboeuf. Non seulement, on ne les entendra plus dans les médias, mais en plus, leurs anciens collègues seront peut-être indulgents avec nous. Ou éviteront de nous diffuser en prime time pour ne pas en dire du mal.

Entraîneur : Bernard Tapie, le seul entraîneur français à avoir gagné la Ligue des Champions.

Ils n’ont pas passé le cut : Cédric Carrasso, Stéphane Trévisan, Mehdi Benatia, Renato Civelli, Carlos Mozer, Ronald Zubar, José Delfim, Pascal Johansen, Mathieu Valbuena, Ibrahima Bakayoko, Didier Drogba, Mario Jardel, Mamadou Niang, Cyrille Pouget, Fabrizio Ravanelli, José Anigo, Abel Braga, Rolland Courbis, Pape Diouf, …

Ils seraient bien venus mais ils sont trop occupés : Basile Boli et Manu Amoros.

Abasourdi par le départ de Bielsa, refroidi par les refus (même Pascal Dupraz a préféré signer au Canal Football Club !), Vincent Labrune a trouvé une idée de génie pour relancer son OM.

La Star Academy, que dis-je, le Koh Lanta des entraîneurs : ils sont 19 sur la ligne de départ et, sélectionnés selon des critères bien précis, ils ont un match, un seul, pour faire leurs preuves.

À l’issue de la phase aller du championnat, un jury composé d’Avy Assouli, Rolland Courbis et René Malleville choisira celui qui a été le plus convaincant et qu’ils estiment le plus à même de mener l’OM vers les sommets.

En exclusivité, voici les 19 noms retenus.

1ère journée : SM Caen. Marcelo Bielsa.

2nde journée : Stade de Reims. Sidney Govou, qui devait assurer ce déplacement, n’a pas résisté à la mise au verre. Et si le choix a été difficile entre lui et la glacière, c’est donc Franck Passi qui a pris la première tournée.

3ème journée : ES Troyes AC. Oubliez les Prandelli, Montella et autres Spalletti. Quitte à ne pas « renier ses gènes ou sa race », autant prendre le meilleur. Et je veux bien sûr parler de Fabrizio Ravanelli, pas de Roberto Benigni.

4ème journée : En Avant Guingamp. Non José, on ne pourra pas les envoyer en Ligue 2 en les battant fin août, mais ça sera toujours ça de pris.

5ème journée : SC Bastia. Les propos de François Ciccollini ne pouvaient rester impunis. Et Lorik Cana s’y connait en punition.

6ème journée : Olympique Lyonnais. Il a longtemps tenu la corde, mais Volker Finke doit finalement s’incliner devant Michel, homme de la situation, même s’il trouve Sarr doux et que Koné marrave.

7ème journée : Toulouse FC. Pour un mec qui a joué à Francfort, la saucisse, c’est une question d’honneur. Jürgen Klopp se fait donc un plaisir de remettre les Toulousains à leur place.

8ème journée : Angers SCO. Il n’y a pas que José Anigo qui a des clauses particulières à l’OM. Il y a aussi Albert Emon. Et puis bon, personne d’autre ne voulait y aller.

9ème journée : Paris Saint-Germain. À court de challenges, Zlatan Ibrahimovic décide de se confronter au dernier adversaire à sa mesure : lui-même.

10ème journée : FC Lorient : Abedi Pelé ayant refusé le poste (c’est possible, des bons souvenirs à Lorient ?), c’est un Pascal Dupraz revanchard du 3-5 de l’année dernière qui prend ce match en charge. Et comme lui aussi peut se moquer du football, il ramène Kassim Abdallah et Saber Khalifa avec lui.

Et moi et moi et moi !

Et moi et moi et moi !

11ème journée : Lille OSC. S’ils avaient eu de l’humour à la Ligue, ils auraient fait jouer ce match pendant la CAN. Avec des effectifs au complet, la confrontation manquera de piquants, mais Claude Leroy ira malgré tout chercher le titre de meilleur entraîneur français d’Afrique.

12ème journée : FC Nantes. Comment ça, Charles Aznavour n’est pas entraîneur de foot ? Parce que vous croyez que Bernard Casoni, c’était quoi ? Et puis au moins, comme ça, nous saurons qui est l’Arménien préféré des Français.

13ème journée : OGC Nice. Au chômage depuis son licenciement, Grégoire Puel décide de régler son Oedipe avec un diplôme d’entraîneur.

14ème journée : AS Saint-Étienne. Ils me font rire les Américains avec leur Mayweather – Pacquiao. Il aura fallu 15 ans pour l’organiser, mais le voilà le vrai combat du siècle : le second round entre Marcelo Gallardo et Christophe Galtier, live from les couloirs de Geoffroy Guichard. Je peux vous l’avouer dès maintenant : le match (de foot) n’aura même pas lieu, les deux entraîneurs n’arrivant jamais jusqu’au terrain.

15ème journée : AS Monaco FC. Lassé de s’en prendre à Arsène Wenger, Rafael Benitez ou Eva Carneiro, José Mourinho décide de s’attaquer au seul entraîneur au monde qui a un président multimilliardaire et qui ne parvient qu’à se faire prêter El Shaarawy par le Milan AC.

16ème journée : Stade Rennais FC. D’accord ce n’est pas le même sport (mais peut-on encore considérer Rennes comme une équipe de foot ?), d’accord ce n’est pas une finale, mais qui mieux que Vern Cotter maîtrise la science de la lose ?

17ème journée : Montpellier HSC. Inquiet à l’idée que son fils croise la route de Romao, Christian Gourcuff accepte le poste juste pour mettre ce dernier sur le banc. C’est un peu oublier les probabilités (que l’un soit blessé et l’autre suspendu) mais toutes les raisons sont bonnes pour voir un serpent de mer entraîner l’OM.

18ème journée : Gazélec Ajaccio. Parce que seul un anaconda peut succéder à un serpent de mer : Claude Makelele.

19ème journée : Girondins de Bordeaux. Cette série dure depuis bien trop longtemps, et le Grand Patron m’en devait une. Il fait donc revenir Ivan Markovic.

Bob-Loulou.

La semaine prochaine, loin du tumulte de la Coupe du Monde, ce sera la reprise pour l’OM. Laissez-moi vous plonger dans ce que peut être cet apéritif de la saison.

Été 2010. Après une année riche de succès, Jean-Claude DASSIER décida d’organiser un grand banquet de reprise à l’aube de la seconde saison de Didier DESCHAMPS. Tous – ou presque ! – étaient conviés ; et j’y étais pour vous.

Mes derniers mots sont sans doute les plus forts.

* * *

LE BANQUET DE REPRISE


Platon

Il m’a été raconté, l’ami, que vous vous êtes bien amusés hier soir au banquet donné par Jean-Claude DASSIER : tout le monde y est allé de son couplet philosophique et cela a été si percutant, d’après ce qui m’a été dit, que certains en sont venus aux mains et que la discussion s’est terminée dans le sang.


Bob-Loulou

Comment Pape DIOUF a-t-il pu savoir cela, cher hôte ? Il ne participait pas à notre dîner.


Platon

Il prétend que c’est par le médecin Christophe BAUDOT : lui était bien présent à votre gueuleton ?


Bob-Loulou

C’est vrai, mais pas quand la controverse a éclaté. Il est arrivé au moment où la dispute battait son plein, mais avant que les coups ne pleuvent. C’est pourquoi je suis surpris qu’il ait pu décrire des événements dont il n’avait pas suivi la progression : ce sont des faits précis qui ont provoqué la dispute et l’ont fait dégénérer en bain de sang.


Platon

C’est pour cela que Pape DIOUF m’a incité à venir te trouver afin de savoir ce qui s’est passé dans les moindres détails. Christophe BAUDOT lui-même avait avoué qu’il n’avait pu assister à toute la scène. En revanche, il m’a dit que tu serais capable de me le répéter de mémoire : car tu n’es pas homme à écouter à la légère un tel langage ; tu serais même plutôt familier de ce genre de discours ! Alors, ne nous prive pas d’un festin si croustillant, car je n’en connais pas de plus délicieux ; d’autant que nous allons nous en régaler dans une ambiance paisible, loin des bruits et des fureurs de ces vieilles peaux et de ces jeunes blancs-becs que l’ivrognerie a poussé à éructer des quolibets que la bienséance réprouve.

La Victoire de Deschamps

La Victoire de Deschamps

Bob-Loulou

Tu vas un peu vite en besogne, mon cher hôte ; tu voudrais que je révèle sur la place publique ce qui est née d’une saoulerie collective. Il vaudrait mieux recouvrir tout ça du voile de l’oubli et n’en rendre coupable que le seul Dionysos. Mais le dieu autorise-t-il le premier venu à connaître les ravages de ses orgies ? Ne nous comportons pas comme des gens dénués de savoir-vivre, curieux de fourrer leur nez dans des affaires qui doivent rester entre quatre murs. Comme dit le poète, « j’abhorre l’invité qui a trop de mémoire ». De fait, Christophe BAUDOT a eu tort de ne pas tenir sa langue devant Pape DIOUF, et de répandre ainsi les odeurs par trop avinées du repas d’hier sur nos footballeurs de bonne compagnie. Non, tu n’obtiendras rien de ma bouche !


Platon

Tu te fais prier, cher Bob-Loulou ! Cela ne te ressemble pas ! Je sais bien que tu meurs d’envie de raconter ton histoire ! Plus encore que moi d’écouter. J’ai même la conviction que si nous te privions d’auditoire, tu raconterais ton histoire à une colonne ou à une statue, voire même dans L’Équipe. Tiens, si je te quittais à l’instant, je suis sûr que tu me supplierais à genoux de t’écouter avant que je me sauve. C’est alors moi qui feindrais de te snober ; mais puisque c’est comme cela, nous allons enquêter ailleurs. Tu n’auras plus qu’à la boucler !


Bob-Loulou

Bon, bon, ne nous emportons pas ! Je vais tout te raconter puisque tu insistes. Mais surtout, motus et bouche cousue, n’est-ce pas ?


Platon

Cela ne sera pas nécessaire car, te connaissant comme si je t’avais fait, tu te chargeras toi-même de divulguer l’aventure au tout-venant.

Mais au fait, pour quelle occasion Jean-Claude DASSIER vous a gavés comme ça ?


Bob-Loulou

Il organisait pour le club un banquet, afin de marquer la reprise de la nouvelle saison.


Platon

Belle occasion pour fêter aussi la non-sélection de Benoît CHEYROU et Hatem BEN ARFA, qui l’ont échappé belle ! Qui participait donc à ce festin ?


Bob-Loulou

Je ne vais pas énumérer tous les présents. Je suppose que tu as envie de connaître les philosophes et les lettrés : il y avait donc le vieux stoïcien Stéphane MBIA ; en sa compagnie se trouvait Didier DESCHAMPS, celui qu’on surnomme « le Labyrinthe » et qui est le précepteur d’Édouard CISSÉ, tout juste prolongé par Jean-Claude DASSIER. Parmi le clan des péripatéticiens, je te citerai Gabriel HEINZE, tu sais, ce parleur infatigable, ce maniaque du détail toujours prêt à entrer dans la bagarre et que ses élèves nomment « l’Épée » et le « Poignard » ; il y avait aussi BRANDAO, l’épicurien, et quand il entra dans la salle, les stoïciens firent la grimace et détournèrent leur regard comme s’ils avaient vu un ignoble parricide ou un profanateur. Bref, tous les familiers de la maisonnée de Jean-Claude DASSIER avaient été conviés, ainsi que le grammairien Souleymane DIAWARA et le rhéteur Mamadou NIANG.

Fraîchement marié, Cesar AZPILICUETA arriva en même temps que Lucho GONZALEZ le platonicien, son maître de philosophie, un personnage de belle allure, ma foi, d’une dignité confondante avec un visage qui reflète une grande pureté de mœurs : on le surnomme, d’ailleurs, « le Dogme » tant sa rigueur est proverbiale. Aussi, dès qu’il est arrivé, toute l’assemblée s’est levée avec respect, comme en présence d’un être d’exception : en fait, l’entrée triomphale de Sa Majesté Lucho ressemblait en tous points à celle d’une divinité.

Et tous les autres, que je ne te présente pas.

Le temps était venu de passer à table. Tous les invités étaient là : on installa les supporteurs – en surnombre – sur les banquettes de droite, non loin de l’entrée, ainsi que les femmes, au premier rand desquelles Margarita. Quant à la meute, devant la porte, on l’installa en fonction de la dignité de chacun.

Devant les spectateurs fut en premier placé Jean-Claude DASSIER. Ensuite, un doute nous saisit quand il fallut décider qui il convenait de placer en premier : le capitaine, à savoir le stoïcien Mamadou NIANG ? Ou Lucho GONZALEZ l’épicurien ? Il était tout de même prêtre des Dioscures et fait partie du gratin. Mais très vite, Mamadou NIANG mit fin à notre perplexité en jetant ces mots à l’adresse de Jean-Claude DASSIER : « Si je m’assois après ce disciple d’Épicure, je fiche le camp d’ici et demande mon transfert. ». À ces mots, il s’empressa d’appeler son esclave et feignit de sortir, et obtint dans son chantage le soutien et la surenchère du doyen Taye TAIWO. Mais Lucho GONZALEZ lui dit : « Vas-y, installe-toi à la première place, Mamadou. Toutefois, sans chercher polémique, permets-moi de te dire que tu aurais dû me laisser la priorité, car malgré la haine que tu ressens envers le grand Épicure, je suis investi de fonctions sacerdotales de meneur. ».

« Je suis bien content de m’être payé la tête d’un de ces prêtres épicuriens », maugréa aussitôt Mamadou NIANG. Et, en disant ces mots, il s’étendit confortablement sur sa banquette. Les joueurs, personnels et dirigeants s’installèrent ensuite selon leur ordre d’arrivée et leurs affinités ; Lucho GONZALEZ près de Gabriel HEINZE ; plus tard, après Charles KABORÉ vint mon tour – invité inattendu -, précédant Didier DESCHAMPS et son disciple Édouard CISSÉ, et enfin le rhéteur Souleymane DIAWARA, et le grammairien Stéphane MBIA.

Elinton Andrade, pas de chocolat.

Elinton Andrade, pas de chocolat.

Platon

Dis donc, ce banquet était une véritable Académie ! Mazette ! Il y en avait du beau monde ! Bravo à Jean-Claude DASSIER d’avoir eu la bonne idée de remplir la panse de la fine fleur du club.


Bob-Loulou

Mon cher ami, cela veut dire qu’il n’est pas un grossier parvenu : c’est un authentique amateur de football, et il passe sa vie en compagnie des sages de son club.

Le festin a commencé tranquillement : les plats étaient variés, et je t’épargnerai la liste fastidieuse des sauces, galettes et ragoûts en tous genres. Un seul terme pour te décrire le tableau : l’abondance. Bientôt, Gabriel HEINZE dit à Lucho GONZALEZ : « Regarde le vieux schnock là-bas – c’était de Mamadou NIANG qu’il parlait, j’ai l’oreille baladeuse – comme il se goinfre ! Tu as vu, son manteau est maculé de sauce ! Regarde comme il fait passer des morceaux à son esclave derrière lui ; il croit peut-être qu’on ne le voit pas ! Il a oublié qu’il n’était pas seul à manger ? Montre son petit manège à Bob-Loulou, qu’il en soit témoin. ». En vérité, je n’avais pas besoin d’être informé, car du haut de ma citadelle, cela faisait longtemps que j’avais remarqué ses agissements.

C’est au moment où Gabriel HEINZE parlait que notre cynique José ANIGO fit irruption dans la salle – tel Alcibiade, la classe en moins – : il n’avait pas été convié, et il s’exclama, d’un air tout à fait décontracté : « Ménélas arrive de son propre chef ! ». Les invités trouvèrent qu’il avait un sacré culot et ils lui lancèrent quelques flèches bien aiguisées du genre : « Ménélas, fou que tu es ! » ou « Agamemnon n’est point en son cœur satisfait ! ». D’autres grommelèrent quelques petits mots d’esprit du même acabit. En fait, nul n’osa critiquer vraiment l’importun de service. José ANIGO était redouté : avec sa voix de stentor, c’était le plus gouailleur des cyniques, et il dépassait tout le monde dans le genre, y compris Hatem BEN ARFA, ce qui fait qu’il inspirait une certaine méfiance.

Diawara - Mbia, charnier central.

Diawara - Mbia, charnier central.

Finalement, Jean-Claude DASSIER le complimenta, le priant de s’asseoir entre Stéphane MBIA et Souleymane DIAWARA. « Peuh ! répondit le cynique, vous me prenez pour une femmelette ou quoi ? Me prélasser comme cela sur des coussins pour bouffer ? Sûrement pas ! Je vais manger debout, en me baladant de-ci de-là, à mon gré. Quand j’en aurai assez, je poserai ma pelisse par terre et je reposerai ma tête sur mon coude, comme on le voit sur les peintures qui représentent Cristiano RONALDO. ». « Comme tu veux », répliqua Jean-Claude DASSIER. Et José ANIGO se mit à circuler dans la salle en grignotant et, comme les Scythes qui émigrent vers des terres grasses, lui s’aventurait du côté des serviteurs qui apportaient les plats…

Bref, il mangeait, mais son esprit restait vif puisqu’il nous fit un petit speech sur le vice et la vertu en se moquant de l’or et de l’argent, si bien qu’il demanda à Jean-Claude DASSIER l’utilité de ces coupes brillantes et foisonnantes alors que, selon lui, les coupes d’argile n’étaient pas moins pratiques. Jean-Claude DASSIER interrompit brusquement ses commentaires tout à fait déplacés ; il ordonna à son échanson de lui tendre un énorme skyphos et d’y verser un pastis très pur. Il croyait lui avoir ainsi cloué le bec. Or il ne se doutait pas que cette coupe allait être le point de départ de gros pépins. En effet, dès qu’il eut pris le skyphos, José ANIGO fit silence, puis, d’un seul coup, il se jeta sur le sol à moitié nu, s’allongeant de tout son long comme il avait menacé de le faire auparavant ; la tête appuyée sur son coude, et il tendait son verre de la main droite comme l’Héraclès chez Pholos.

Les coupes passaient à travers toute l’assistance : on se portait mutuellement des toasts et on faisait la causette à la lueur des torches. Soudain, je m’aperçus que le ravissant petit échanson placé à côté de Vitorino HILTON esquissait un sourire furtif – je crois qu’il est de mon devoir de noter ces anecdotes d’apparence futile mais agréables à raconter. J’étais curieux de connaître la raison de ce sourire polisson. Peu après, le mioche, s’approchant de Vitorino HILTON, lui reprit sa coupe : je vis notre homme lui serrer fiévreusement les doigts tout en lui glissant deux drachmes en même temps que le skyphos. Le jeune esclave se remit à sourire béatement en sentant que l’on pressait ses petits doigts, mais il ne ressentit pas les drachmes et, au lieu d’encaisser sans faire d’histoire, il fit tomber bruyamment les piécettes à terre. Nos deux personnages se mirent alors à rougir de honte. Aussitôt, les autres convives demandèrent à qui était cette monnaie. Le gamin affirma qu’il n’en savait rien ; quant à Vitorino HILTON, près duquel la clameur avait fusé, il jura qu’il n’avait rien perdu. Finalement, cet incident fut sans conséquence : à vrai dire, peu de gens n’avaient prêté attention, sauf Jean-Claude DASSIER qui pria l’esclave d’aller se faire voir ailleurs, tandis qu’il fit signe à un muletier ou un palefrenier, une belle bête, ma foi, mais beaucoup plus âgé que notre marmot, de se poster auprès de Vitorino HILTON. Le mini-scandale tourna court. Mais imaginons ce qu’il en aurait été de la réputation de notre philosophe si la rumeur s’était propagée parmi les invités et n’avait point été étouffée dans l’œuf ! Par bonheur, ce finaud de Jean-Claude DASSIER avait su à merveille cacher les intimes faiblesses de cet ivrogne libidineux de Vitorino HILTON.

Après l’incident, José ANIGO le cynique, déjà passablement éméché, se mit à rugir pour exiger le silence en dirigeant son regard vers le clan des supporters et des femmes : « Eh bien ! Je bois à ta santé, Margarita, au nom sacré d’Héraclès ! ». À ces mots, tout le monde s’esclaffa et le cynique s’écria : « Bande d’abrutis, vous riez parce je porte un toast à la dame en invoquant Héraclès, mon patron ? Eh bien ! Apprenez, mes lascars, que si elle ne saisit pas la coupe que je lui tends, Vincent LABRUNE sera incapable de lui donner un vrai mâle comme moi, vigoureux et instruit dans toutes les matières ! ». Tout en s’époumonant, il dégrafa ses vêtements et montra délibérément son membre à toute l’assemblée ! Les invités se mirent à rire jusqu’à l’hystérie ! De plus en plus en colère, José ANIGO nous lança un regard acéré comme un poignard, et l’on comprit qu’il n’était pas prêt de se calmer, loin s’en faut : je crois même qu’il aurait fini par blesser l’un de nous avec son bâton. Mais une galette onctueuse fit son entrée au bon moment pour apaiser ses velléités agressives, et il s’empressa dès lors de se goinfrer.

Tous les convives étaient ivres : ça bavardait et ça criait dans tous les coins. Ce rhéteur de Souleymane DIAWARA déblatérait, et ses discours étaient chaudement applaudis par les servants debout derrière lui. Quant au grammairien Stéphane MBIA, installé à la dernière place, il nous concocta un pot-pourri, mêlant des bouts de vers de Pindare, d’Hésiode et d’Anacréon, ce qui finit par composer une ode des plus farfelues mais qui avait le mérite de prédire la suite des festivités, comme on peut en juger par les vers suivants :

« Les boucliers se sont heurtés…

Tout n’est que pleurs et bruits victorieux des soldats… ».

Mamadou NIANG, de son côté, parcourait les lignes d’un livre de ses exploits écrit en caractères minuscules que son esclave lui avait donné dans le dos de Steve MANDANDA alors que celui-ci était sorti, entre les deux services.

Comme d’habitude, il y eut une pause dans l’arrivage des plats, au cours de laquelle Jean-Claude DASSIER, imbattable quand il s’agit de meubler les temps morts, donna l’ordre à un bouffon d’entrer en scène et de faire un numéro de fantaisiste pour divertir les invités. Un petit homme plutôt laid pointa alors le museau de la tête gominée, et pénétra la salle dans une roulade bien lancée. Il exécuta une danse qui tenait plus de la contorsion que d’autre chose, se disloquant à qui mieux-mieux jusqu’au grotesque, maugréant quelques anapestes dans un douteux accent girondin. Pour couronner le tout, il se paya la tête des spectateurs.

Ceux qui en prenaient pour leur grade riaient quand même de bon cœur. Mais quand vint le tour d’Hatem BEN ARFA d’être charrié, et qu’il s’entendit traiter « joueur nihiliste » par le bouffon – qui venait de se faire souffler l’expression -, son sang se mit à bouillonner – il était certainement jaloux du comique qui monopolisait les applaudissements des convives. Il posa sa pelisse à terre et intima l’ordre à son concurrent de le provoquer au pancrace : en cas de refus, il recevrait des coups de bâton ! Pauvre Mathieu VALBUENA – c’était le nom du mime ! Il dut s’exécuter et se mettre en position de combat. Soyons francs : c’était vraiment excitant de voir l’austère philosophe rentrer dans la bedaine d’un histrion ou se faire étriper à son tour. Certains invités étaient choqués, d’autres au contraire se trémoussaient d’aise. Bref, Mathieu VALBUENA, roué de coups, finit par capituler ; mais Hatem BEN ARFA ne profita pas de l’éclat rire général et frénétique et retourna immédiatement jouer seul près du banc.

Nicht Ben Arfa

Nicht Ben Arfa

À peine ce pugilat de pacotille avait-il pris fin que le médecin Christophe BAUDOT fit irruption. Il s’excusa de son retard, nous affirmant qu’il avait dû s’occuper du cas du flûtiste Elinton ANDRADE, un quidam fortement détraqué du cerveau. Il nous fit le récit savoureux de sa visite. Il était entré chez son patient sans savoir que le malheureux était déjà en proie à une crise de folie furieuse. Après avoir refermé la porte derrière lui, l’homme, le menaçant d’un couteau, lui confia sa flûte double et lui ordonna de jouer un air. Le médecin, incapable de s’exécuter, l’autre le frappa sauvagement sur la paume des mains à l’aide d’une courroie. Pour se tirer de ce guêpier, Christophe BAUDOT eut recours à un astucieux stratagème. Il proposa une compétition à son patient : celui qui jouerait le plus mal recevrait un nombre exemplaire de coups sur les mains. Le médecin joua le premier et fut exécrable ; puis il remit la flûte à son concurrent – qui eut grand mal à s’en saisir – tout en s’emparant de la courroie et du couteau, qu’il s’empressa aussitôt de jeter par la fenêtre, au beau milieu de la cour. Dès lors, il put se défendre plus facilement du dément et appela les voisins à son secours. Ceux-ci arrivèrent à la rescousse, enfoncèrent la porte et tirèrent le médecin de ce mauvais pas. Au cours du récit, il faisait étalage à l’assemblée des bleus et des bosses qu’il avait reçus pendant cette mésaventure. Au final, son histoire fut accueillie avec autant d’enthousiasme que l’affaire du bouffon. Ensuite, Christophe BAUDOT alla se faire une petite place près de Stéphane MBIA et engloutit les restes du festin. Sa visite était d’inspiration divine car sa présence allait être précieuse pour la suite des événements.

Un esclave surgit alors au milieu de la salle, se disant l’envoyé du stoïcien Laurent BONNART, lequel lui avait ordonné de lire de sa plus belle voix une lettre de sa main avant de retourner sur ses pas. Jean-Claude DASSIER consentit à cette lecture ; l’esclave se posta sous une lampe et lut.


Platon

Ce devait être une lettre de remerciement, c’est sans doute l’usage en telles circonstances ?


Bob-Loulou

Nous avons eu la même réaction. En fait, ce n’était rien de tout cela. Voilà le contenu de ce libelle :

Laurent BONNART, philosophe, à Jean-Claude DASSIER :

« Au sujet de comportement à l’égard des banquets, ma vie entière peut en témoigner. Tous les jours, je croule sous les invitations de clubs encore plus fortunés que le tien, et je n’ai jamais accepté de me rendre à une de ces réunions car je sais trop bien les fureurs et les ivrogneries qui les caractérisent. Mais j’ai des raisons profondes de t’en vouloir parce que, malgré la tendre sollicitude que j’ai pour toi, tu n’as jamais daigné me compter au nombre de tes amis. Alors que nous nous côtoyons sans cesse, je me sens rejeté. Mais ce qui me blesse cruellement, c’est ta superbe ingratitude. Vois-tu, pour moi, le bonheur n’est pas de se régaler d’une brochette de sanglier, d’un civet de lièvre, d’une part de galette – j’en savoure à satiété chez d’autres gens qui connaissent mieux que personne le savoir-vivre. Sache qu’aujourd’hui même, je pouvais me rendre chez mon ami Henri LEGARDA qui organisait un magnifique banquet où mon gosier aurait du poulet loué les mérites ; or j’ai décliné l’offre pour pouvoir me rendre à ton banquet. Naïf que j’étais !

Tu m’as laissé sur le carreau pour favoriser d’autres gens. Tu n’as jamais été capable de savoir qui était le meilleur car tu es dénué de tout bon sens. Je crois savoir pourquoi tu me tiens éloigné : je le dois à tes éblouissants philosophes Mamadou NIANG et Labyrinthe, dont j’ose affirmer – Adrastée va me massacrer – que je peux leur clouer le bec d’un seul syllogisme. Allons, qu’ils me définissent la philosophie ; qu’ils dissertent sur ces notions primaires d’état accidentel et d’état permanent ! Sans oublier les idées complexes, le Cornu, le Sorite, le Moissonneur. Moi aussi je peux te dire que tu as tout ce que tu n’as pas perdu, or n’ayant point perdu de cornes, tu as donc des cornes ! Bref, continue à bien t’enrichir l’esprit avec de tels flambeaux de la sagesse. Pour ce qui me concerne, persuadé que le beau est la seule vertu, je supporte sans trop de mal l’affront qui m’est fait.

Toutefois, pour t’ôter la moindre chance de t’excuser en prétextant un regrettable oubli de ta part, dû au surmenage des préparatifs, sache que, par deux fois, aujourd’hui même, je t’ai salué : une fois, dès l’aurore, dans ta maison ; une seconde fois, au temple des Dioscures au cours d’un sacrifice. Voilà. C’est ce que je voulais dire pour me justifier auprès de cette noble assistance.

Et si tu t’imagines que je fais tout ce raffut pour un vulgaire dîner, rappelle-toi l’histoire d’Œnée. Artémis entra dans une vraie fureur en voyant qu’elle était la seule à ne pas être conviée au sacrifice, tandis que tous les autres immortels y avaient part, et remémore-toi Sophocle : « La fille de Latone au trait qui vise juste, lâcha aux champs d’Œnée le sanglier robuste. ». Homère a d’ailleurs écrit sur ce thème : « Oubli ou grave erreur, il commit une faute. ».

Je pourrais t’en citer encore beaucoup d’autres, mais ces quelques spécimens te feront comprendre l’homme que tu dédaignes sur les conseils d’un Didier DESCHAMPS, à qui tu as confié l’éducation de ton équipe. En un sens, tu as fait un bon choix, car il sait donner du plaisir à certains de tes garçons pour qui il a d’exquises complaisances… Il forme une sacrée paire d’amis avec certains… Si je n’avais pas au fond du cœur quelque remord à dévoiler ces choses immondes, je t’avouerai un secret dont tu pourras vérifier la véracité, si tu le désires, auprès de Julien RODRIGUEZ le pédagogue. Mais loin de moi l’envie de ternir l’ambiance de la fête, ni de me livrer à la médisance pour des motifs aussi répugnants. Didier DESCHAMPS, cependant, a besoin d’une bonne leçon, lui qui m’a remplacé avant même mon départ. Mais au nom de la sainte philosophie, je m’abstiendrai désormais de la moindre parole.

Ceci encore : apprends que j’ai recommandé à mon esclave, au cas où tu voudrais me donner un morceau de sanglier, de cerf ou une galette au sésame, de refuser : je n’ai pas envie qu’on dise que je l’ai envoyé chez toi pour ça. ».

Pendant ce temps, Julien Rodriguez...

Pendant ce temps, Julien Rodriguez...

Pendant la durée de la lecture, mon doux ami, la sueur sortait par tous les pores de ma peau. J’étais piteux et, comme le dit Homère, je ne voulais rien de moins qu’être englouti dans les entrailles de la terre, ou embauché pour Téléfoot. Mais je vis mes compères de table s’esclaffer à chaque mot de la missive. La plupart des rieurs connaissaient bien Laurent BONNART, beau vieillard à la tignasse peignée et au profil des plus dignes. Comment cet individu avait-il pu les abuser sur sa vraie personnalité avec ses traits d’une rigueur insoupçonnable. Au début, je me disais que si Jean-Claude DASSIER avait évité de le mettre sur la liste des invités, ce n’était pas par légèreté, mais parce que la réputation de respectabilité et de gravité du personnage empêchait qu’on le conviât à une sauterie compromettante…

Quand l’esclave eut terminé sa lecture, les convives regardèrent du côté d’Édouard CISSÉ et de Didier DESCHAMPS. Ils tremblaient comme des feuilles et leur mine constipée confirmait les accusations proférées par Laurent BONNART. Jean-Claude DASSIER était bouleversé. Ses traits reflétaient une lourde anxiété. Malgré tout, il offrit une tournée générale et reprit un air enjoué afin de faire oublier ces instants de malaise. Puis il congédia l’esclave, disant qu’il prendrait ses dispositions plus tard. Dans le même temps, Édouard CISSÉ se leva de sa banquette et s’éloigna discrètement sur un signe de son pédagogue qui lui-même obéissait très probablement à un ordre de son président.

Gabriel HEINZE qui, depuis longtemps, cherchait une bonne occasion de s’en prendre à un stoïcien, et qui se morfondait de n’avoir pu jusque-là dénicher un prétexte valable, trouva matière à polémiquer grâce à la lettre de Laurent BONNART : « Qu’est-ce donc, vociféra-t-il, beau travail que celui du charmant Chrysippe et des admirables Zénon et Cléanthe ! Quoi ! Des formules sans queue ni tête, une philosophie à l’emporte-pièce, bref, une horde de Laurent BONNART. Eh bien, quelle folle dignité traverse la lettre de ce grand vieillard ! Le comble, c’est Jean-Claude DASSIER en Œnée et Laurent BONNART en Artémis ! On aura tout vu ! Par Héraclès, c’est du propre et de bon augure dans le cadre d’une fête comme la nôtre ! ».

« Par Zeus et Maradona, lança Lucho GONZALEZ de sa hauteur, sans doute a-t-il flairé la préparation d’un succulent sanglier et il paraissait tout à fait naturel de parler de celui de Calydon, ben voyons ! Mais qu’attends-tu donc, cher Jean-Claude DASSIER, au nom de la divine Hestia ? Apporte-lui sans tarder les premiers morceaux de la bête car, vois-tu, je suis terrorisé à l’idée que ce pauvre vieillard ne meure de faim comme Méléagre. Qu’il n’ait crainte : Chrysippe classe ces denrées dans la catégorie des bagatelles. ».

« C’est toi qui parles de Chrysippe, jeta bruyamment Mamadou NIANG qui parut se réveiller d’un long sommeil, tu oses comparer un philosophe de pacotille comme Laurent BONNART à de grandes figures philosophiques comme Cléanthe et Zénon, sages parmi les sages. Quelle espèce d’homme es-tu pour délirer ainsi ? C’est bien toi, Lucho, qui coupas les cheveux d’or des Dioscures, un sacrilège qui conduit à ton éviction de l’Albiceleste ? Et toi, Gaby, n’est-ce pas toi qui séduisis la femme de ton propre disciple ? Qu’on a surpris en pleine action et à qui on a infligé une punition dégradante entre toutes ? Ah ! Vous ne pouvez pas vous taire, dégénérés que vous êtes ! ».

« C’est cela, oui ! Mais moi, au moins, répondit du tac au tac Gabriel HEINZE, je ne donne pas ma femme au premier venu ! Je ne me remplis pas les poches avec les économies d’un étudiant étranger et je n’ai pas juré à Athéna Poliade que je n’en ai pas vu la couleur ! Ce n’est pas moi non plus qui pratique l’usure ; je ne torture pas mes supporters quand ils ne peuvent pas payer mes photographies dédicacées dans les délais prévus. ».

« Mais tu ne vas pas nier, rétorqua Mamadou NIANG, que tu as vendu du poison à Mauricio POCHETTINO afin de le mettre à la retraite ! ».

Pendant qu’il disait ces mots, il jeta le contenu d’une coupe au nez de ses interlocuteurs. Comme Stéphane MBIA était dans le voisinage, il fut, lui aussi, victime de l’arrosage : c’était justice ! Lucho GONZALEZ, tout en s’essuyant, prit à témoin ses compagnons de table de l’injure qu’on venait de lui faire. Gabriel HEINZE – il n’avait pas de coupe – se retourna et cracha à la face de Mamadou NIANG, puis, tirant sur sa barbiche de la main gauche, il s’apprêtait à lui asséner un bon direct : il aurait achevé le vieillard si Jean-Claude DASSIER ne l’avait retenu de la main et n’avait eu la judicieuse idée de passer par-dessus Mamadou NIANG pour se mettre entre les deux ennemis, les obligeant à se calmer.

Durant ces péripéties, ami des Cahiers du football, j’étais assailli par mille pensées : un dicton me revint alors à l’esprit : « À quoi sert la connaissance si l’on ne sait pas corriger sa conduite ? ». J’avais sous les yeux la crème de la philosophie qui se donnait en spectacle devant un public friand. Je me disais que ce vieux dicton avait du bon, somme toute ! La connaissance, j’en suis persuadé, détourne du bon sens ceux qui vivent dans les livres et s’imprègnent des idées qu’ils véhiculent. Parmi tous ces penseurs, pas un qui n’ait au moins une chose à se reprocher : celui-là agissait à vous donner la nausée, celui-ci discourait de façon répugnante. Ils n’avaient même pas l’excuse du vin : la lettre de Laurent BONNART n’avait-elle pas été rédigée dans la pleine maîtrise de ses moyens ?

En fait, tout était sens dessus dessous ! Les supporters, ces gens ordinaires, mangeaient avec un tact exemplaire, sans boire un verre de trop ; ils se comportaient le plus raisonnablement du monde, se contentant de faire honte aux autres, objets pourtant de leur vénération quelques instants auparavant, lorsqu’ils les considéraient comme des modèles de vertu. En revanche, les sages, eux, n’avaient aucune tenue, criaient comme des fous, se gavaient comme des porcs et se donnaient des coups ! José ANIGO l’admirable, lui, pissait sans vergogne au milieu de la pièce, se fichant éperdument des femmes qui se trouvaient là. Pour décrire convenablement le tableau, disons que le festin rappelait l’histoire d’Éris évoquée par les poètes. Celle-ci, on le sait, n’avait pas été conviée aux noces de Pélée et, pour se venger, elle lança la funeste pomme qui déclencha la fameuse guerre de Troie. Car la lettre de Laurent BONNART projetée en plein cœur de la fête était aussi une pomme de discorde, porteuse de ravages aussi graves que ceux dont parle l’Iliade.

Gabriel HEINZE et Mamadou NIANG ne décoléraient pas malgré le rempart corporel de Jean-Claude DASSIER : les injures fusaient de part et d’autre. « Oui, grogna Gabriel HEINZE, je vous ai convaincus que vous n’êtes qu’une bande d’imbéciles et ça me suffit ; demain, je me vengerai avec plus d’éclat. J’attends ta réponse, Mamadou, et la tienne, Taye : vous prétendez dédaigner les richesses, alors pourquoi faites-vous tant d’efforts pour en accumuler ? N’est-ce pas vous qui faites des courbettes devant les richards ? Ne pratiquez-vous pas l’usure ? Ne dispensez-vous pas votre enseignement moyennant un gros salaire ? Et dire que, par ailleurs, vous n’avez pas de mots assez durs pour stigmatiser le plaisir et déconsidérer les épicuriens. C’est pourtant vous qui vous jetez dans la fange, enculant à la chaîne ou bien vous faisant mettre à votre tour ! Et quel esclandre quand on oublie de vous inviter ! Et s’il arrive qu’on vous invite, vous avalez les bons morceaux et, par-dessus le marché, vous en donnez à vos esclaves. ». À ces mots, Gabriel HEINZE tira la serviette où l’esclave de Mamadou NIANG avait engrangé des victuailles de toutes sortes : il voulait les faire tomber mais échoua car le domestique résista avec vigueur à son assaut.

Et Lucho médusa ses adversaires.

Et Lucho médusa ses adversaires.

« Bravo, Gabriel, ajouta Lucho GONZALEZ, qu’ils nous expliquent la raison pour laquelle ils nous défendent de goûter au plaisir alors qu’ils en savourent les fruits plus que n’importe qui ! ».

« Non, non, interrompit Mamadou NIANG, c’est à toi, Gaby, de nous expliquer pourquoi tu ne considères pas l’argent d’un œil indifférent ! ».

« Non, non, c’est à toi ! » La dispute s’éternisait lorsque Benoît CHEYROU se dressa de tout son corps pour bien montrer qu’il existait encore et dit : « Il suffit ! S’il vous plaît, abordons plutôt les thèmes dignes d’une fête honorable ! Discutez, écoutez à tour de rôle, sans vous chamailler, comme notre maître Platon conçoit la conversation : une diversion agréable. ». Cette proposition fut largement plébiscitée par les convives, surtout par Jean-Claude DASSIER et Didier DESCHAMPS qui avaient l’espoir d’apaiser la situation. De ce fait, Jean-Claude DASSIER retourna à sa place, persuadé que la paix était revenue.

Peu après, nous fut servi le repas absolu : il consiste en un poulet, un morceau de sanglier, du lièvre, du poisson, des galettes de sésame et des bellaria, ces mille petites friandises qui croquent sous la dent et que l’on ramène à la maison. Un hic, pourtant : il n’y avait pas un plat par personne. Ainsi, pour Jean-Claude DASSIER et Benoît CHEYROU, ils devaient piocher dans un plateau commun. Même chose pour le stoïcien Mamadou NIANG et l’épicurien Lucho GONZALEZ, ainsi que pour Gabriel HEINZE et Taye TAIWO, enfin, pour Cesar AZPILICUETA et le kinésithérapeute. Pour Didier DESCHAMPS, double ration, puisque Édouard CISSÉ était sorti. Mémorise bien cette disposition, cher hôte, car elle est cruciale dans la tournure finale de mon récit.


Platon

J’ai bien enregistré.


Bob-Loulou

Stéphane MBIA le grammairien s’exprima le premier : « Je commence nos discussions platoniciennes, si vous n’y voyez pas d’inconvénients. ». Puis, après un silence, il dit : « Devant un tel parterre de gens cultivés, il aurait fallu disserter, c’est mon avis, sur les incorporels et l’immortalité de l’âme ; mais pour me prémunir des avis de ceux qui ne partagent pas nos points de vue, je ferai un commentaire sur la notion de mariage : c’est un sujet inoffensif, n’est-ce pas ? Pour ma part, je crois préférable de ne point se marier et, dans le sillage de Platon et de Socrate, il vaut mieux pratiquer l’amour des garçons : les adeptes de cet amour sont en effet les seuls à s’accomplir dans la vertu. Certes, la nécessité implique qu’on se lie aux femmes, mais – et je ne fais que suivre les préceptes platoniciens – il serait plus judicieux qu’elles soient mises en commun : ainsi, plus de jalousie à redouter ! ».

Un rire assourdissant retentit à l’écoute de ces propos d’une affligeante stupidité. Souleymane DIAWARA s’écria : « Quand tu auras fini avec tes barbarismes idiots, tu nous préviendras ! Car pourquoi et à propos de quoi serions-nous jaloux ? ».

« Comment donc ! Tu oses parler, petite fiente », lui rétorqua Stéphane MBIA. Souleymane DIAWARA était sur le point de lui répliquer par une insulte de haut vol lorsque Charles KABORÉ, gentil tout plein, ma foi, déclara : « Stop ! Moi, je vais lire un épithalame ». Et il se lança :

« Grâce à sa confiance en Jean-Claude DASSIER,

La belle Margarita LOUIS-DREYFUS

Apparaît plus charmante, dans cet ornement parfait,

Qu’Artémis ou Cypris !

Et toi, jeune épousé, club que je porte dans mon rhésus

Plus gracieux que Nérée ou le fils de Thétis,

Je te salue. Vous méritez que je proclame

Votre belle union dans cet épithalame. ».

Comme tu peux l’imaginer, des ricanements accueillirent ces vers de mirliton.

Kaboreilles

Charles Kaboreilles

Arriva le moment où tous les convives devaient prendre leurs mets. Jean-Claude DASSIER et Benoît CHEYROU prirent ce qui se présentait sous leurs yeux. Idem pour Cesar AZPILICUETA, Taye TAIWO et Gabriel HEINZE. Quant à Didier DESCHAMPS, il saisit sa part mais voulut s’accaparer la portion de Édouard CISSÉ absent. Il dit alors : « C’est à moi ! », et il s’opposa énergiquement aux autres joueurs qui voulaient lui arracher la volaille des mains. Ils tiraient comme sur le cadavre de Patrocle ! Pour finir, il dut s’avouer vaincu et lâcha sa proie, provoquant l’hilarité générale surtout quand il se mit à grogner et à jouer les martyrs.

Lucho GONZALEZ et Mamadou NIANG étaient sur la même banquette, tu le sais. Mamadou NIANG en haut, l’autre au-dessous ; leurs parts étaient bien réparties et ils se servirent sans remue-ménage. Néanmoins, la poularde face à Lucho GONZALEZ était un peu plus grassouillette que celle qui était devant lui : c’était bien sûr le fruit du hasard. Alors Mamadou NIANG – sois très attentif, cher hôte, car mon récit va devenir captivant, crois-moi – alors, dis-je, Mamadou NIANG délaissant sa volaille, chipa celle de Lucho GONZALEZ, plus dodue, dois-je le répéter. Car l’idée même que son compagnon de table disposât d’un morceau plus consistant que le sien était aux yeux de Mamadou NIANG proprement insupportable. Et les cris reprirent de plus belle ! Ils se ruèrent l’un sur l’autre, se crêpèrent le chignon, se frappant avec la malheureuse poularde ! Ensuite ils se prirent par le gras des bras, et réclamèrent de l’aide : Lucho GONZALEZ demanda le renfort de Gabriel HEINZE, et Mamadou NIANG voulut comme alliés BRANDAO et Souleymane DIAWARA. Bientôt, tous les convives se rangèrent d’un côté ou de l’autre, sauf Rudy RIOU, qui ne prit part à rien, qui garda une scrupuleuse neutralité.

La mêlée fut générale. Mamadou NIANG, empoignant une coupe posée devant Fabrice ABRIEL, la jeta en direction de Lucho GONZALEZ., mais elle fut interceptée par Steve MANDANDA. BRANDAO reprit le projectile, mais il rata sa cible, et l’objet alla s’écraser près de Benoît CHEYROU. Répliquant, il manqua de peu son tir qui échoua sur une colonne, avant de tomber sur le crâne de Julien RODRIGUEZ, qui fut sérieusement blessé ! Alors les femmes se mirent à hurler et les supporters entrèrent dans la danse ; et Cesar AZPILICUETA se lança à son tour dans la mêlée, terrorisé par l’ambiance qu’il découvrait. À noter que José ANIGO fit sensation en se battant pour son propre compte. De son bâton, il assomma Gabriel HEINZE, mit en morceaux la mâchoire de Lucho GONZALEZ et amocha de nombreux esclaves qui leur portaient secours. Mais ces derniers ne se replièrent pas pour autant. Soudain, Gabriel HEINZE, d’un doigt, énucléa Mamadou NIANG puis lui trancha le nez d’un coup de dents. Puis Lucho GONZALEZ, voyant Didier DESCHAMPS sur le point de le défendre, le débusqua de sa banquette et lui fit mordre la poussière. Ils avaient tous gagné leur invitation aux noces de Pirithoos !

Le grammairien Stéphane MBIA tenta – sans succès – de les séparer et ne réussit qu’à recevoir un coup dans les dents, cadeau de Gabriel HEINZE qui l’avait pris pour Souleymane DIAWARA.

Pour expulser Heinze, il faut trois cartons jaunes.

Pour expulser Heinze, il faut trois cartons jaunes.

De calme, luxe et volupté, tout n’était plus que vacarme et lamentations. Les femmes sanglotaient autour de Julien RODRIGUEZ, tandis que certains supporters s’efforçaient d’arrêter le carnage. Mais il y avait José ANIGO qui venait de mettre hors-jeu la meute adverse et continuait à s’en prendre à tous ceux qui s’aventuraient jusqu’à lui. C’eût été une véritable hécatombe s’il n’avait pas cassé son bâton. Moi, je restais tranquille ici-haut, observant tout, ne me mêlant de rien : j’avais plus tôt appris d’Édouard CISSÉ que c’était folie de vouloir s’interposer dans des circonstances pareilles dès qu’il y a risque d’encaisser un coup. C’était, je te l’avoue, le combat des Lapithes et des Centaures : des tables renversées, du sang coulant à flot, des coupes volant dans les airs…

Pour finir, José ANIGO fit tomber un candélabre, si bien que nous fûmes plongés dans une obscurité complète. Comme tu l’imagines, l’affaire s’envenima encore davantage, et ce fut la pagaille générale. Une fois dans l’obscurité, furent commis mille excès en tous genres. Quand on apporta une lampe, on découvrit José ANIGO en train d’effeuiller une joueuse de flûte et sur le point d’aboutir… Mathieu VALBUENA fut surpris en flagrant délit de vol mais il sombra dans le ridicule quand, au moment où il se redressait, le skyphos tomba de son vêtement. Il essaya de se rattraper en prétendant que Steve MANDANDA l’avait ramassé et le lui avait confié dans la confusion pour le mettre en lieu sûr. Et Steve MANDANDA, par une touchante complicité – les voyages rapprochent -, confirma le mensonge.

Le banquet s’acheva sur cette note. Aux cris et aux larmes succédèrent les rires contre José ANIGO, Mathieu VALBUENA et Steve MANDANDA. Les blessés furent évacués sur des civières : ils n’étaient pas jolis, surtout ce vieux croûton de Mamadou NIANG qui, une main sur l’œil pendant, et l’autre sur son nez, hurlait de douleur ; Lucho GONZALEZ, qui n’était pas mieux loti avec ses dents déglinguées, lui lança avec toujours le même esprit de contradiction : « En ce moment, mon cher, tu ne places point la douleur dans la catégorie des choses indifférentes. ». Julien RODRIGUEZ fut recousu par les soins diligents de Christophe BAUDOT et, la tête couronnée de bandelettes, on le hissa dans le char où il devait emmener sa femme. Quelle entrée en matière mouvementée pour Cesar AZPILICUETA ! Quant aux autres convives, ils furent couchés, vomissant de temps à autre sur le chemin qui les menait au lit. Seul José ANIGO resta dans la salle. Impossible de l’en déloger ! Comme il était affalé en travers d’une couchette, on ne pouvait rien faire. Non plus d’Hatem BEN ARFA, qui tricotait seul dans son coin.

Pour en finir, José les posa sur la tables.

Pour en finir, José les posa sur la table.

Voilà, mon doux ami, comment s’acheva ce banquet. Je crois d’ailleurs opportun de rappeler ce vers tragique, qui sera l’épilogue de notre histoire :

« La volonté divine est fort aléatoire ;

Afin de nous surprendre, elle agit et détruit

Nos attentes notoires. ».

En effet, jamais on n’aurait pu penser un seul instant que les événements auraient pris pareille tournure. Mais la leçon me fut profitable et je sais maintenant que pour un homme aussi tranquille que moi, il y a danger à banqueter avec ces vauriens de footballeurs.

* * *

Texte inspiré par Lucien de Samosate, Le Banquet ou les Lapithes, circa 170, à partir de la traduction de Philippe RENAULT.

Avec ce premier bonus, en deux parties, je vous explique en quoi les succès de la saison 2009-2010 étaient prémédités : c’était écrit !

Comme vous le savez, le roman préféré de Margarita est Le Maître et Marguerite, de Boulgakov. Rien de plus normal : c’est l’histoire de l’OM.

Oui : le Maître, c’est moi.

(Tournez cette page si, par Ponce Pilate !, vous avez manqué la diabolique première partie.)

– Seconde partie –

Le Maître s’était trompé : Margarita ne l’avait pas oublié ! Elle s’était évidemment replongée dans le quotidien, mais jamais elle ne l’avait oublié.
Un soir, elle fit un rêve étrange : transportée dans une forêt inconnue, elle apercevait un tremble solitaire, et plus loin, entre les arbres, dans une sorte d’enclos, une petite construction en rondins. Il y avait dans tout cela quelque chose de mort, et de si désolant qu’on avait envie de se pendre à ce tremble. Pas un souffle de brise, pas un mouvement de vie dans les nuages, pas une âme. Contrée infernale pour un vivant ! S’ouvrit alors toute grande la porte de cette construction de bois, et le Maître apparut.
L’espoir de retrouver celui qu’elle aimait renaquit, et Margarita sortit de chez elle. Dans la rue, elle rencontra un certain Didier Deschamps, et sa surprise fut grande lorsque ce dernier se mit à lui parler de l’OM et de victoires. Elle lui demanda comme il pouvait envisager une telle histoire, ce à quoi il répondit qu’il savait qu’il s’agissait là du rêve d’un homme, et qu’il pouvait aider Margarita à le poursuivre.
Incrédule mais convaincue, elle accepta de suivre les consignes diaboliques dictées par Didier Deschamps : le soir même, il lui faudra s’oindre le corps tout entier d’un mélange spécialement préparé par Antonio Pintus, et dont elle se fit remettre une ampoule.

De retour chez elle, à l’heure dite, le cœur de Margarita battit à se rompre. Elle se dénuda face au miroir de sa console, et appliqua l’onguent sur tout son corps. Aussitôt, celui-ci devint rose et chaud. Sous la crème, ses rides s’effacèrent, ses lèvres se gonflèrent, ses pommettes se relevèrent, ses seins enflèrent, ses fesses s’affermirent et ses ongles s’allongèrent. Margarita sentit en elle une force et une jeunesse incroyables.
Alors que Vincent Labrune entrait dans la chambre, confus d’y trouver sa chère maîtresse dans le plus simple appareil, mais émerveillé par sa beauté resplendissante, Margarita prit tout juste le temps de le saluer, avant de se saisir d’un balai, de l’enfourcher, et de s’envoler par la fenêtre ouverte au mistral.

Suivant la consigne de Didier Deschamps, elle s’écria « Invisible ! » et constata, en effet, qu’elle n’était pas remarquée par les passants qu’elle survolait ou devant les fenêtres desquels elle passait. Elle profita de ce pouvoir pour rendre une visite à l’éditeur qui avait refusé de publier l’histoire du Maître. En l’absence de ce dernier, elle inonda sa maison par un sortilège diabolique.
Alors qu’elle repartait vers le lieu de rendez-vous, elle eut la surprise d’être rejointe par Vincent Labrune, transformé en pourceau volant. Ce dernier lui expliqua s’être à son tour enduit de la pommade, mais qu’il n’en restait guère assez que pour s’en recouvrir les cheveux : il en résulta cette mutation porcine, dont il assurait s’accommoder maintenant qu’il avait retrouvé sa maîtresse, qu’il peinait à regarder dans les yeux. C’est donc ensemble qu’ils volèrent vers Didier Deschamps.

Celui-ci la présenta à José Anigo, qui lui expliqua que chaque année, le Diable organise un grand bal. Célibataire, il lui manque toujours une maîtresse de maison, et la tradition veut qu’elle se nomme « Margarita ». Parmi les cent vingt-et-une Margarita vivant à Marseille, c’est elle qui fut choisie par le Diable.
José Anigo introduisit ensuite la belle auprès du Diable. Celui-ci jouait aux échecs avec Didier Deschamps : alors que le Diable jetait la tentation sur son adversaire avec une Immortelle polonaise, Didier Deschamps maintenait une ligne compacte et inamovible de quatre pions devant son roi. Tout cela sous le regard attentif de Jean-Claude Dassier, lequel portait pour l’occasion une cravate, ce qui était peu commun pour un chat : à quoi diable pouvait bien lui servir une cravate, lui qui n’avait pas de pantalon ?
José Anigo lui ayant promis que « la reine du bal en sera récompensée au centuple » si elle respectait les consignes, Margarita accepta d’accompagner le Diable pour cette soirée.

Margarita fut rapidement préparée : un liquide chaud et rouge, qu’elle comprit être du sang, fut versé sur elle, jusqu’à ce qu’elle en fut recouverte, et que le tout se transforma en une robe et des souliers faits de pétales de roses. Son rôle était simple : rencontrer tous les invités avec charme, et ne marquer de préférence ni de dédain pour aucun.
À minuit, Margarita poussa un léger cri, et ferma les yeux pendant quelques secondes. Le bal – lumières, bruits et parfums – était tombé sur elle d’un seul coup.
Les invités qui défilaient devant elle s’agenouillaient pour lui baiser le genou droit, et attendaient son sourire en retour. Alors que José Anigo et Jean-Claude Dassier faisaient la conversation à sa place, Margarita cessa rapidement de s’intéresser à ce défilé de rois, ducs, chevaliers, suicidés, empoisonneuses, pendus, entremetteuses, geôliers, tricheurs, bourreaux, délateurs, traitres, déments, mouchards, satyres. En effet, les pires souffrances lui venaient de son genou droit, qui était désormais gonflé et bleu.

Ce ne fut que très tard que le Diable sonna la fin du bal, en donnant à boire à sa maîtresse de maison une coupe de sang. Il était encore minuit. Seuls Vincent Labrune, José Anigo, Didier Deschamps et Jean-Claude Dassier restaient. Éreintée, Margarita but une coupe d’alcool pur tendue par le chat cravaté, et se sentit immédiatement revigorée, au point de se mettre à manger goulûment du caviar.
Pour la remercier de sa présence et de son office, le Diable proposa à son hôtesse d’un soir d’exaucer son vœu le plus cher. Il ne fallut pas bien longtemps à Margarita pour lui dire qu’elle ne désirait rien plus que de revoir le Maître.
Le Diable fit alors apparaître le Maître aux côtés de Margarita. Curieux, il demanda au nouvel invité pourquoi sa belle l’appelait ainsi. Le Maître lui répondit que Margarita avait une bien trop haute opinion du texte qu’il avait écrit en vue de compléter le Grand livre de l’Histoire de l’OM. De plus en plus intrigué, le Diable fit réapparaître le récit que les amants croyaient perdu en cendres, et le parcouru rapidement. Il dit au Maître : « votre œuvre vous apportera encore des surprises… ».
Puis le Diable tendit à Margarita une malle qu’il lui pria de prendre en souvenir de lui, avant de disparaître dans un grand feu de joie.

Magarita ouvrit alors la malle avec Vincent Labrune, José Anigo, Didier Deschamps et Jean-Claude Dassier : elle contenait une Coupe de la Ligue, un Hexagoal et un Trophée des Champions.


__________

Les passages en italique sont repris ou inspirés de la traduction de Claude Ligny, pour : Mikhaïl Boulgakov, Le Maître et Marguerite, Paris, Pocket n°4229, 2008, 581 pages.

CORRESPONDANCES :

Personnages :

Berlioz : Bernard Tapie

Biezdomny : Jean-Claude Gaudin

Le Diable : le Diable

Koroviev : José Anigo

Azazello : Didier Deschamps

Béhémoth : Jean-Claude Dassier

Le Maître : Bob-Loulou

Marguerite : Margarita

Natacha : Vincent Labrune

Lieux :

Moscou : Marseille

L’étang du Patriarche : le Vieux Port

La Moskova : le port de Marseille

Le siège du Massolit, à Griboïedov : la Commanderie

Le théâtre des Variétés : le stade Vélodrome

Autre :

Le roman de Ponce Pilate : le Grand livre de l’Histoire de l’OM.

Avec ce premier bonus, en deux parties, je vous explique en quoi les succès de la saison 2009-2010 étaient prémédités : c’était écrit !

Comme vous le savez, le roman préféré de Margarita est Le Maître et Marguerite, de Boulgakov. Rien de plus normal : c’est l’histoire de l’OM.

Oui : le Maître, c’est moi.

– Première partie –

C’était à Marseille au déclin d’une journée printanière particulièrement chaude. Deux citoyens firent leur apparition à une terrasse sur le Vieux Port. L’OM connaissait alors quelques difficultés, malgré un palmarès récemment enrichi.
Un inconnu se joignit à eux, et leur conta une histoire diabolique : celle de nouvelles victoires de l’OM, écrite par un nouvel actionnaire du club. Oui, le Grand livre de l’Histoire de l’OM, ouvert à une page blanche, et complété par un successeur à Bernard Tapie.
L’inconnu avait beau insister sur la véracité de ces faits, sur l’avènement prochain d’un successeur qui remporterait de nouveaux titres avec l’OM, Bernard Tapie et Jean-Claude Gaudin n’en voulaient rien croire. Ils en riaient presque, mais un rire anxieux. Car l’étranger les inquiétait, et ce d’autant plus lorsqu’il leur annonça, comme preuve de ses talents de visionnaire, que la tête de Bernard Tapie n’allait pas tarder à tomber, avec tous les détails de sa chute.
Énervé par l’inquiétude qui montait en lui, Bernard Tapie décida de s’en aller précipitamment. C’est alors qu’un peu plus loin, subitement, la Justice recouvrit Bernard Tapie et, sur les pavés qui montaient vers la grille du quai d’embarquement du Phocéa, fut projeté un objet rond et de couleur sombre. L’objet heurta la grille, sauta sur le pavé puis roula jusqu’au milieu du quai, où il s’arrêta. C’était la tête coupée de Bernard Tapie.

L’inconnu s’enfuit, et Jean-Claude Gaudin ne réussit pas à le suivre, malgré l’aide du syndicat des taxis. Après un bain dans l’eau glacée du port pour s’éclaircir les idées, il décida de se rendre à la Commanderie, où s’étaient déjà massés les employés de l’OM.
Malheureusement pour lui, pendant son bain, ses vêtements laissés sur une bitte d’amarrage lui avaient été dérobés. Néanmoins, l’urgence de la nouvelle était telle que Jean-Claude Gaudin prit le diabolique parti de traverser Marseille. À pied, du fait d’une grève à la RTM en raison des mauvais résultats de l’OM.
À la Commanderie, l’extraordinaire chute de Bernard Tapie était évidemment sur toutes les lèvres. Mais cette histoire fut bientôt étouffée par le brouhaha de la foule : le spectacle de Jean-Claude Gaudin en slip était un scandale affreux, malpropre, dégoûtant, révoltant. Il ne prit fin que lorsqu’une camionnette eut emporté loin des portes de la Commanderie, dans un hôpital psychiatrique, le pauvre Jean-Claude Gaudin.

Pendant ce temps, l’inconnu de la terrasse sur le Vieux Port persistait dans son imposture qui ne cessait de gagner en envergure : il organisa un grand spectacle dans l’enceinte du Stade Vélodrome. Alors que José Anigo, vêtu d’un costume à carreaux, d’une casquette de jockey et d’un pince-nez, était déjà dans l’arène, deux autres assistants de l’étranger demeuraient pour le moment encore dans les coulisses : Didier Deschamps, lequel portait un chapeau melon, et une canine saillait de sa bouche, rendant hideuse sa physionomie, par elle-même singulièrement abjecte ; et Jean-Claude Dassier, un immonde et gigantesque chat noir qui se tenait diaboliquement debout sur ses deux pattes arrières.
Alors que soixante mille personnes assistaient au spectacle, personne ne releva la supercherie, et tous furent abusés par les millions d’euros gambadant sur la pelouse. En sortant du stade, aucun ne remarqua qu’il n’avait pourtant pas vu de football, et que tous avaient été dépouillés par l’équipe de José Anigo.

Dans sa chambre d’hôpital, Jean-Claude Gaudin rencontra un autre patient. Celui-ci, qui se prétendait écrivain, lui rapporta une histoire invraisemblable, mais qui retint toute son attention : l’homme aurait déjà écrit certaines pages à venir du Grand livre de l’Histoire de l’OM. Saisi par la coïncidence, Jean-Claude Gaudin voulu en savoir plus.
L’écrivain lui raconta alors qu’il était interné pour avoir prétendu pouvoir faire gagner des titres à l’OM. Il lui fit par ailleurs deux révélations fracassantes.
La première eut stupéfait quiconque l’aurait entendue, Jean-Claude Gaudin en tête : l’étranger qu’il avait rencontré avec Bernard Tapie en terrasse sur le Vieux Port n’était autre ni moins que le Diable.

La seconde était plus nébuleuse : il lui conta l’histoire d’une femme, son amante, avec laquelle il avait longtemps vécu un amour passionné, à l’abri des regards. Impressionné par celle qu’il aime encore, l’écrivain avait toujours refusé de lui dire son nom. De fait, elle en avait été réduite à l’appeler « Maître », de son propre choix.
Il avoua une certaine jalousie à l’égard de celle-ci : il lui paraissait qu’elle était autant amoureuse de lui que du récit qu’il écrivait en vue de compléter les pages blanches du Grand livre de l’Histoire de l’OM. Si elle venait le voir chaque jour, elle ne manquait jamais de lire et de relire encore les lignes de cette fascinante épopée.
Un jour, il présenta son roman à une maison d’édition. Avec un rire diabolique, l’éditeur lui renvoya son manuscrit en pleine figure, prétendant n’avoir jamais rien lu d’aussi absurde : de nouveaux trophées remportés par l’OM ? La belle arnaque ! Quelle imposture ! Comment oser se moquer autant des lecteurs et des spectateurs ?
Ce refus atteignit profondément le Maître. Il sombra progressivement dans la déprime, avant de tomber terriblement malade. N’ayant rien d’autre pour se réchauffer que des tongs et du vin blanc, il décida un soir d’hallucination de brûler son manuscrit. Sa compagne arriva juste à temps pour en sauver quelques feuillets : avec un faible cri, elle arracha du poêle, de ses mains nues, le dernier paquet de feuilles que les flammes avaient commencé de ronger par en-dessous, et elle les jeta sur le plancher.
Honteux de son échec, et sali par la critique, le Maître légua toute sa fortune à celle qu’il aimera toujours, et lui dit de s’enfuir, avec l’espoir qu’elle l’avait oublié.

Dans les rues de Marseille, après la farce dont les supporteurs avaient été victimes au Stade Vélodrome, la grogne et le chaos se répandirent plus rapidement que les ordures.

(à suivre)

__________
Les passages en italique sont repris ou inspirés de la traduction de Claude Ligny, pour : Mikhaïl Boulgakov, Le Maître et Marguerite, Paris, Pocket n°4229, 2008, 581 pages.

Après la guirlande de titres de 2010, j’ai immédiatement senti le bon filon. Pas seulement celui de votre audience, grandiose et fidèle malgré tout durant trois années et quelques 145 matches commentés, mais surtout celui du virage d’un club qui entrait dans une nouvelle phase. Un club sérieux et une équipe imprenable, lissés par la communication de Deschamps et Dassier, c’était bien trop beau : l’image imperméable n’a pas tenu longtemps dans ce club sans toit ni loi.

Changer d’ère

Je n’aurais jamais imaginé que l’avènement de Labrune signe le début d’une nouvelle ère. J’avais plutôt parié sur son enterrement en règle, en queue de liste des prétendants éconduits et frustrés du club, derrière Bouchet et Diouf. À voir la mutation physique de Labrune, devenu en quelques mois bouffi et hirsute, je n’aurais même pas été étonné de le voir rapidement me rejoindre. Mais il faut croire que, pour une fin de vie, bouffi et hirsute, c’est plus sain qu’amaigri et chauve. Margarita a dû changer sa recette…

Lorsque j’ai commencé à m’ouvrir à vous – enfin, « commencé », cela faisait quinze années déjà que je vous ouvrais mon portefeuille -, j’ai béatement cru que le club allait se donner le temps de repenser ses fondations : rénovation de l’enrhumeur, chantier de la formation, virages technologiques (désigne aussi l’ambition d’avoir des ultras intelligents), départ des parasites (chauves ou velus), et surtout construction d’un vrai projet de jeu.

Une rue de l’OM à Barcelone, certes, mais à quand un peu de Barça à l’OM ?

Une rue de l’OM à Barcelone, certes, mais à quand un peu de Barça à l’OM ?

Mais, surtout sur ce dernier point, ces dernières saisons ont été dramatiques, à en décourager Raymond, d’autant plus que les effectifs successifs pouvaient malgré tout s’appuyer sur de très bons joueurs de ballons. Certes, il est impossible de faire la même chose avec un Raspentino qu’avec un Valbuena, mais l’histoire du club est autant faite d’Ingessons que de Luchos – du calme André-Pierre, cela ne se mange pas…

Le fond de jeu inexistant et l’envie perdue des joueurs m’ont atterré (un comble, vu du ciel !), abattu (encore !), et condamné (et encore !) : mon épuisement a été à la hauteur de leur fainéantise (puis de la mienne) ; leur désinvestissement proportionnel aux investissements de Margarita (qui n’a pas eu que l’amour en héritage).

toutes les ambitions ont un prix.

Plutôt que l’Europe en soldes, l’OM a soldé l’Europe : toutes les ambitions ont un prix.

Talkin’ bout a revolution

L’espoir, s’il en est, est la volonté de Labrune de faire sa révolution, de rentrer dans l’Histoire. Pompidou a eu son centre artistique, Giscard son Vulcania (avec Lady Di ?), Mitterrand son grand Louvre, Chirac le Quai Branly, Sarkozy a voulu le Grand Paris (il y a même fait rentrer le Qatar), Hollande a eu Julie Gayet… Labrune, lui, veut l’OM nouveau.

Labrune veut “remettre les Marseillais au travail”.

Et les éboueurs sont inquiets : Labrune veut “remettre les Marseillais au travail”.

Pour cela, il entend imposer une révolution, qui doit se concrétiser, après le recrutement ambitieux pour l’avenir de l’été dernier, avec l’arrivée d’un entraîneur de renom : Marcelo Bielsa.

Je ne sais trop qu’en penser. Comme il se dit à Marseille, «Après l’attaquant venu du Pérou, voici donc l’entraîneur passé par le Chili, con, carnet d’adresses à l’appui».

Ce carnet d’adresses devra sans doute pallier le départ de certains joueurs désormais historiques du club, là bien avant Labrune, qui ont connu l’ivresse de la passion de Gerets et des trophées de Deschamps avant la gueule de bois de Baup. Et non, je ne parle pas que de Diawara.

Il faudra aussi réussir à mobiliser certains joueurs, afin qu’ils répondent aux espoirs qu’ils ont pu susciter. Je pense par exemple à Payet. Quand on me demande comment je l’ai trouvé lors du dernier match, je ne sais jamais répondre autre chose que : «Par hasard, derrière Romao».

Valbuena vers d'autres cieux ?

Valbuena vers d'autres cieux ?

Catharsis

Le clou du spectacle – prenez le comme mon ultime cadeau, à la fois inespéré et incomplet, un peu comme mon passage à l’OM – est le vrai-faux départ d’Anigo. Il n’a pas eu de chance le pauvre ; sans doute paie-t-il le vice d’avoir envoyé son fils me surveiller. Lors de la réunion du conseil d’administration chargée de déterminer la peine du petit José, j’ai beaucoup ri.

– José, pour l’ensemble de ton oeuvre, nous te condamnons au bagne dans les colonies.

– Aubagne ? Qui je vais superviser là-bas ? Il y a bien le fils de Denis le Dingo, mais bon…

– Non José, le bagne, dans les anciennes colonies, en Afrique.

– L’Algérie, la Tunisie, la Corse, tout ça ?

– Oui, tout ça.

– Et le Maroc aussi ?

– Aussi.

– Le pays du crachat de Barthez et du Trophée des Champions contre Lille ?

– Oui, c’est bien cela, le Maroc.

– Con, c’est un lieu historique du club ! Je vais avoir une augmentation ?

– Évidemment.

– Et une voiture avec chauffeur ?

– Avec climatiseur, oui.

Anigo, émir de Qatar VI.

Anigo, émir de Qatar VI.

Merci donc à tous ceux qui ont suivi ce blog, à ceux qui y ont contribué, et surtout à ceux qui m’ont donné envie de poursuivre une aventure qui ne devait durer qu’une saison. L’OM n’est peut-être pas toujours une formidable raison d’être heureux, mais il restera toujours une magnifique occasion de rire.

De mon côté, je vais profiter de mon temps libre pour dormir, enfin ! Je vais dormir ! Et pas forcément devant un match de l’OM !

Bob-Loulou.

PS : Pour patienter jusqu’à la Coupe du monde, je vais vous offrir en bouquet final deux bonus historiques exceptionnels, à venir ces prochaines semaines. Ensuite, vous retrouverez ce blog dans les « Archives » des Cahiers du football.

JE de nains, JE de vilains

La vie est-elle possible sans Bob-Loulou à la tête de l’Olympique de Marseille ?

La réponse est évidemment non si l’on en croit la farce que jouent en ce moment les acteurs, passés et actuels, de ce club. Ils nous offrent une situation de référence pour les amateurs de psychanalyse.

Tout y est : la perception déformée de certains évènements, l’amnésie, un brin de paranoïa et une bonne dose de mégalomanie.

Ce cirque n’a pas de nom mais ces personnes ont été ou sont bel et bien les présidents du plus grand club de football français.

Pour ceux qui auraient raté les premiers actes de cette farce, sachez que tout a commencé en 2009 lorsque Pape Diouf et Vincent Labrune se sont battus sur mon lit de mort. À l’époque, Vincent Labrune et le conseil de surveillance du club, reprochant à Pape Diouf d’avoir gonflé la masse salariale et laissé partir Eric Gerets, l’ont remercié dans tous les sens du terme, déclarant que « Pape Diouf a été un excellent président, compétent, légitime ». Après sa traversée du désert, Pape Diouf a décidé de publier un livre racontant sa vie et son œuvre, notamment à l’OM. Il en assure une publicité très large, occupant avec aise le paysage médiatique marseillais : en perspective, le destin qu’il s’espère, avec le soutien financier de nababs et de vizirs. Tout cela ne plaît guère à la direction du club, qui se veut solide malgré la tempête économique et qui peut s’enorgueillir d’une gestion vertueuse et de choix juteux (la gestion des transferts d’Alou Diarra, le départ bien négocié de Lucho González, la solde de Loïc Rémy, le salaire d’André-Pierre Gignac, le recrutement de Florian Raspentino, la montée en puissance des jeunes comme Fabrice Apruzesse…) qui permettent aujourd’hui à l’OM de lutter à nouveau pour le titre.

Inutile de vous conter cette histoire plus en avant, vous savez comme moi qu’à la fin, c’est José Anigo qui gagne. Je ne vous parlerai pas non plus de chiffres, je n’ai jamais su lire les comptes de l’OM ni un classement à la moyenne anglaise.

Je tiens néanmoins à dire à tous les supporteurs de l’OM que je suis meurtri par ce qui est fait de mon héritage.

Passe encore que Margarita ait décidé d’enlever du mur de notre chambre ma collection placomusophile pour le revendre sur eBay (afin d’acheter Florian Raspentino) et d’accrocher à la place la photo du titre de Champion de France 2010 – même si, personnellement, le sourire de Didier Deschamps et la chemise mal repassée de Jean-Claude Dassier m’empêcheraient de dormir.

Mais voir mon OM être maltraité de la sorte, un chiffon posé au milieu d’une cour de récréation que des coqs mal plumés tentent de s’accaparer, cela me fait mal au cœur.

Cela me fait d’autant plus mal au cœur que j’avais confiance en celui à qui j’ai confié sa gestion, jusqu’à ce que Vincent Labrune me fasse clairement passer son message en produisant Les infidèles. Je suis presque étonné que Margarita n’y ait pas eu un petit rôle.

Ils feraient bien de se méfier, tous, car un coq bien plus gros est entré dans la basse-cour et il a tout compris.

Avant d’acheter des bons joueurs au risque de voir leur moral être descendu en flèche par la PQR (rien à voir avec les QPR, notre partenaire minceur), mieux vaut d’abord acheter la PQR de sorte qu’elle n’entache pas la sérénité de nos chèvres.

De même, plutôt que de batailler pour toutes les questions qui touchent à la gestion du stade, mieux vaut être à la tête de la municipalité qui en est la propriétaire.

Pierre Dubiton, qui vient de me rejoindre, confirme d’ailleurs que la chasse est ouverte.

Bref, diriger l’OM, c’est bien plus qu’un jeu.

Cliquez pour accéder gratuitement à la version officielle du publi-communiqué.

Salut les vivants,

Je ne vous ferai pas l’affront de vous parler du match d’Ajaccio. Malgré ce que les Américains tentent de vous faire croire, il y a des limites à la torture. Repenser à ces 90 minutes de longs ballons envoyés sur Brandao – qui n’a pas gagné un duel aérien depuis plus longtemps que l’armée japonaise – éveille en moi une soudaine passion pour le waterboarding.

J’ai en revanché pensé tout le week-end à ce brave Patrice Carteron. J’ai reçu des menaces de mort plus qu’à mon tour et je n’ai pu m’empêcher de ressentir pour lui une certaine sympathie. Oh, comparaison n’est pas raison. Patrice n’a pas les moyens d’envoyer deux primates jouer aux osselets avec les genoux de partenaires d’affaires un peu trop sensibles (vous avez compris à quoi me servait Piotr Swierczewski, désormais?). Cela explique peut-être sa voix chevrotante en conférence de presse. Dans mon secteur, on ne chevrotait pas beaucoup.

C’est ce qui m’inquiète le plus. On m’a assez souvent reproché ma naïveté dès qu’il s’agissait de football, mais des menaces de mort? Des gangsters en Bentley? Une bande de jeunes à l’accoutrement ridicule dont l’œil ne pétille plus que lorsqu’une caméra est pointée sur eux? À quel moment ma passion pour le football s’est-elle malgré moi muée en passion pour le rap? Si j’avais voulu jouer aux policiers et aux voleurs, j’aurai investi en Colombie, pas en France! (J’ai aussi investi en Colombie hein, mais pour autre chose. Cela devra fera l’objet d’un autre blog).

Encore une histoire d’agents. Je n’ai pas la prétention d’être un exemple dans beaucoup de domaines, mais j’ai fini par apprendre à m’en occuper. Garde tes amis près de toi, et tes ennemis encore plus près. Pape Diouf me savonne la planche? Président! Anigo fricote avec des agents peu scrupuleux? Directeur sportif! En revanche, il faut savoir choisir un camp. On ne peut pas avoir la peste et le choléra.

Ça ne s’improvise pas une guerre des clans. C’est ce que Labrune n’a pas compris. Quel petit con celui-là. Vouloir mettre Bernès et Anigo dans le même bateau, quelle idée. J’ai toujours dit qu’il fallait le laisser dans l’ombre. C’est un vampire: à la lumière il s’autodétruit. Vous l’avez entendu, parler de pognon à chaque fois qu’on lui tend un micro? Avec un sens du tempo que seul Cyril Chapuis pourrait lui envier. Sortir « Il n’y a qu’un seul grand club en France et c’est l’OM » juste avant de perdre quatre fois de suite, chapeau. J’aurais dû lui expliquer. On appelle ça le théorème inverse de Valbuena. Plus tu es grand, plus ça fait mal quand tu tombes.

Bob Loulou.