Les enfants de la bulle
Tout le 9ème art, de Winsor Mc Kay à l'OuBaPo, des écoles franco-belges à l'émancipation de la BD des années 70, des comics et strips US aux mangas du soleil levant...
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cachaco le 03/02/2023 à 22h19Les derniers posts m'ont furieusement fait penser à ce sketch du SNL sur le best of du "poet of teen love", on y reconnaîtra qui on devra reconnaître.
lien
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Balthazar le 04/02/2023 à 14h56[Chris Ware, Rusty Brown]
Au dos de ce drôle d'objet qu'est Rusty Brown (de même forme et de mêmes dimensions toutefois que Jimmy Corrigan), il y a entre autres un petit encadré presque illisible où l'on peut déchiffrer ceci :
« Jugements et impressions notables sur les œuvres précédentes de M. Ware
Jimmy Corrigan
« Peut-être le plus grand accomplissement réalisé à ce jour dans cet art » - Dave Eggers
(…)
« Une œuvre de génie. » - Zadie Smith
Building stories
« L'expression la plus rare du génie ; c'est à la fois déchirant, désopilant, violemment intime et profondément lucide. » - J.J. Abrams
« Tellement au-dessus du lot qu'on chercherait presque la faille rien que pour prouver que c'est l'œuvre d'un être humain. » - The New York Times Book Review
« Aucun autre auteur de ce média n'arrive à la cheville de Ware en termes d'originalité, de résonance, de complexité et de justesse. La réaction la plus adaptée est la stupéfaction. » - The Guardian
« (…) [Ware] a créé quelque chose qui, si cela se peut, est plus littéraire que la littérature contemporaine dans son ensemble. » - Rick Moody »
Deux choses me paraissent dignes d'être notées.
La première, c'est que, si l'on a l'habitude de ce genre de collage destiné à nous persuader de la valeur d'une œuvre ou d'un auteur, on ne se souvient pas d'en avoir lu d'aussi élogieux. Une seule de ces phrases, lue dans une critique littéraire, nous porterait à la méfiance, et l'on parcourrait aussitôt l'article à la recherche du seul élément qui puisse faire foi : une citation. (Dans le même esprit, Cioran disait que dans les livres de psychiatrie, les propos des fous étaient la seule chose qui l'intéressaient.)
Bon, je ne peux pas reproduire les pages, donc il va falloir faire confiance à ces jugements – ou chercher sur Internet, ou encore se procurer l'ouvrage (qui coûte un peu cher mais que toute médiathèque digne de ce nom devrait posséder).
En effet, et c'est la deuxième chose notable, sans laquelle la première n'aurait guère d'importance, Rusty Brown (je ne me prononcerai pas sur Buiding stories que je n'ai pas encore lu, mais ce qui suit vaut bien sûr aussi pour Jimmy Corrigan)... est parfaitement digne de ces éloges à première vue délirants.
J'en profite pour poursuivre le dialogue entamé avec John sur le fil littéraire (car oui, John, tout ce que tu me dis, vois-tu, je continue d'y penser des jours et des jours durant…) Comme j'émettais l'idée que nous avions, dans le domaine de la littérature française, beaucoup perdu depuis environ un siècle, John me répondit ceci : « D'abord, cette histoire de dégringolade historique qui conduirait à la perversion de mes goûts… Non, mais quoi ? Balthazar, cela s'appelle l'Histoire justement : ce qui est Grrand et Univerrsel sent toujours un peu la naphtaline. »
Rusty Brown et Jimmy Corrigan ne sentent pas le moins du monde la naphtaline. Quand on pense qu'il y a un siècle environ, cet art en était aux petits mickeys... Il me semble indéniable qu'un chemin immense a été parcouru – vers le haut. Aucune raison d'exclure qu'un tel chemin puisse être parcouru aussi vers le bas, qu'à certaines époques, en certains lieux, dans certains arts, on puisse assister momentanément à une perte de complexité, de vérité, de beauté, de sens. C'est la vie.
(Je me souviens de Pierre Bergounioux rayant d'un mot, lors d'une conférence, toute la littérature médiévale : « Enfantillages. » Je ne suis pas sûr que Chrétien de Troyes résiste mieux que nos récents prix Nobel à la comparaison avec Balzac, Hugo ou Proust.)
Enfin, bref, si ce n'est pas encore fait, lisez Chris Ware ; vous en arriverez certainement à la conclusion, comme plusieurs des critiques cités plus haut, qu'en dépit de toutes les réserves que légitimement elle suscite, on a parfois bien du mal à se passer de la notion de génie.
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r_v_matou le 04/02/2023 à 15h10HS:
Ton témoignage m'interpelle.
Tu l'as certainement fait, mais je me dois de te demander si tu as remis Gainsbourg dans son contexte historique ?
Sans tomber dans le c'était mieux avant, bien des générations ont souvent une méconnaissance des précédentes.
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Lionel Joserien le 04/02/2023 à 15h30Excellent sketch, merci. Will Ferrell is our king.
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Red Tsar le 04/02/2023 à 18h07Je n'aime pas la notion de « génie », qui me paraît implicitement placer l'artiste à la fois « au-dessus » et « en dehors ». Ce n'est que mon ressenti confus et j'aurais du mal à argumenter plus loin (Call me Schtroumpf grognon).
Mais si Chris Ware en est un, il faudrait alors préciser de quel type de génie il est. Il me semble que, justement, ce qui rend son œuvre incomparable, c'est qu'il n'est pas « au-dessus », mais « dedans », capable de saisir et de rendre avec une extrême sensibilité toutes les facettes de l'humain, de l'humain concret (en ce sens, il me fait penser à Will Eisner). Ce n'est pas un de ces génies qui regarde l'humanité de manière surplombante et vit dans une sorte de tour d'ivoire, ou une statue de marbre hiératique, mais un homme parmi les hommes.
Si le Chris Ware auteur de bande dessinée ne peut qu'impressionner, je lui vois deux autres grandes qualités :
- c'est un artiste total : sculptures, collages, maquettes, jouets en bois, couvertures (pour des revues musicales confidentielles comme le New Yorker)... Il crée dans des domaines très différents des pièces qui se répondent et forment un univers vaste et cohérent ;
- c'est un artisan dévoué à son métier : c'est fascinant de voir ses planches de près ou des vidéos qui le montrent au travail. La main et le cerveau sont indissociables. Il y a une méticulosité dans le travail manuel qui force le respect. Il peut passer plusieurs jours sur une simple planche qui finira anonyme au milieu d'un album, quand d'autres te font un crobard en dix minutes et le mettent sur Instagram pour avoir l'impression que et salivent en pensant aux NFT.
Tu connais peut-être déjà tout ça. Mais, dans le doute, voici une série de documents sur Chris Ware, mis en ligne suite à une exposition de ses travaux (Angoulême puis Paris) : lien
Enfin bref, me voilà à pinailler sur un mot comme une vieille mamie qui trouve que l'eau de son thé n'est pas à l'exacte température et qui oublie l'essentiel. Comme le dit Balthazar : lisons Chris Ware.
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Balthazar le 04/02/2023 à 19h14Ha, ha ! Je te tiens, Schtroumpf Gauchiste !
Article 1 : Ça peut pas être un génie vu qu'on est tous égaux.
Article 2 : Si jamais c'était quand même un génie, alors ce serait un génie ouvrier, vu qu'il travaille beaucoup et qu'il est proche du peuple.
Un peu comme Neymar, quoi.
Un grand merci pour le lien !
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Red Tsar le 04/02/2023 à 19h22Au moins, ma propagande cryptique aura tenu plus d'une heure avant d'être déjouée.
La dernière fois que j'ai voulu bluffer, JJ m'a percé à jour en moins de dix minutes.
Ne jamais jouer au poker. Ni aux échecs. À la bataille, peut-être ?
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Julow le 04/02/2023 à 21h57Je ne connais(sais) rien à la BD. Il y a une dizaine d'années j'ai, grâce à ce fil, qu'il soit béni, lu Jimmy Corrigan. J'ai rarement été aussi stupéfait par une oeuvre d'art — par sa perfection, son absolue cohérence, son intensité, sa plénitude. (Ouais, je fais des phrases de quatrième de couv'). La Messe en si, genre. Ou Phèdre. Ou La Dolce Vita. D'ailleurs, je dirais plutôt chef-d'oeuvre que génie : c'est l'objet qui est incroyablement complet, fini, bouclé.
(toujours grâce à ce fil je suis en train de lire From Hell - bon, faudrait que je pense à filer du pognon aux CDF pour qu'ils continuent, quand même)
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Pascal Amateur le 04/02/2023 à 22h02C'est moi ou vous n'êtes pas top clairs : de Chris Ware, on commence par quoi ?
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Julow le 04/02/2023 à 22h06Jimmy Corrigan !