Des Minots d’or
Un documentaire émouvant retrace l'épopée des Minots de l'OM, héros inattendus de la remontée du club dans l'élite au début des années 1980.
En introduction du film, Éric Di Meco parle de gars pour la plupart "tombés dans l'anonymat". Ces gars, c'étaient encore de jeunes adultes, des minots. Les fameux Minots qui ont sauvé l'OM au début des années 80, tout d'abord en lui permettant de se maintenir en Division 2 en 1981, puis de remonter dans l'élite trois ans plus tard.
Un anonymat certes, un oubli c'est moins sûr. Une méconnaissance, c'est par contre certain. Même chez les suiveurs de l'OM conscients de cette époque singulière de l'histoire du club, il s'agit de moments et d'acteurs souvent difficilement identifiables.

Réhabiliter cette histoire et ses personnages, "que ce film soit la référence sur les Minots", c'est donc l'objectif de ce remarquable documentaire Les Minots. Le football à l'état pur. À la baguette, on retrouve Mourad Aerts, Benjamin Courmes, Julien Lafont et le site indépendant d'actualités sur l'OM Football Club de Marseille.
Le film a d'abord été diffusé dans un cinéma de Marseille l'an dernier, cherchant alors un moyen de diffusion plus large. Il a donc finalement atterri sur Canal+, qui le propose sur sa plateforme pour quelques mois.
Du cœur et du talent
Suivant un format classique, la réalisation alterne images et commentaires d'archives (non dénués d'un caractère désuet dans les expressions et le niveau de langue utilisés), et récits des membres de cette équipe. Parmi eux, ont répondu à l'appel Éric Di Meco, José Anigo, Jean-Charles De Bono, Marc Lévy, Marcel De Falco, Christian Caminiti, Jean-Yves Francini, François Lapinta, Michel Flos, Michel Castellani, et l'entraîneur-joueur Roland Gransart.
Le film fait aussi le choix judicieux de ne pas utiliser une voix off en tant que narrateur principal, mais de convoquer le journaliste local Mario Albano, qui assure les remises en contexte et les transitions. Surtout, les auteurs laissent la place à tous les intervenants, sans accorder de préférence aux plus connus (Di Meco et Anigo), leur permettant de faire eux-mêmes le récit de cette incroyable aventure.

Le documentaire commence avec les années noires. Celle de la descente à la fin de la saison 1979/80, alors que l'équipe compte dans ses rangs des joueurs de grande qualité comme Marius Trésor ou Didier Six, et Bernard Bosquier comme entraîneur.
La suivante voit le club mis en liquidation judiciaire, lequel doit donc faire appel à ses jeunes, qui ont remporté ensemble la Coupe Gambardella deux ans auparavant. Des jeunes joueurs avec du courage et du cœur à revendre, mais surtout du talent, et qui resteront invaincus pendant vingt matches.
En toile de fond, il y a les turpitudes de la gestion du club, les dirigeants Christian Carlini et Claude Cuny n'étant pas épargnés pour leur gestion tantôt despotique, tantôt nébuleuse - avec notamment une histoire incroyable de repreneurs corses basés au Venezuela qui n'est pas sans rappeler le futur Jack Kachkar.
Jouer pour l'OM
De là à dire que cela fait partie de la nature du club, il n'y a qu'un pas. En fil rouge, il y a surtout l'adhésion progressive du public, de plus en plus nombreux, de plus en plus amoureux de cette équipe qui lui ressemble, avec pour points culminants les matches OM-Montpellier 1981 et OM-Thonon 1984.
Parce que le cœur de cette histoire se trouve là, dans la relation passionnelle qui va lier ce groupe de joueurs au club, cette bande de joyeux combattants à son peuple. Le documentaire rappelle d'où vient chacun d'entre eux, ce qui va construire leur identité en tant que joueurs et surtout en tant que groupe.
Il est rafraîchissant, également, de voir Marcel De Falco dire que son seul rêve était de jouer pour l'OM, et de ne pas avoir gardé trop d'amertume après qu'on lui eut demandé de quitter le club. Qu'importe, il aura, ils auront tous participé à l'aventure et aucun ne doit être oublié.
On regrette juste le relatif manque d'images d'archives (certaines se répétant un peu par séquences), et que les conditions sanitaires des dernières années n'aient probablement pas permis d'organiser des témoignages croisés entre les protagonistes.
Cette histoire trouvera un certain écho dix ans plus tard, là encore en D2, quand le club phocéen devra y descendre à la suite de l'affaire VA-OM, pour y vivre non pas le purgatoire annoncé mais une période chérie. C'est ce qui fait aussi l'un des plus grands charmes de l'OM : cette capacité dans l'adversité à savoir écrire des pages parmi ses plus belles.