Martinez 2022, l’arrêt du (XXIe) siècle
Un jour, une parade - Le 18 décembre 2022 à Lusail, dans les derniers instants d'une étrange Coupe du monde, Emiliano Martinez repousse la frappe de Randal Kolo Muani.
Lorsque l'arrêt qu'effectua l'Anglais Gordon Banks en 1970 face à Pelé est désigné comme l'arrêt du siècle, cela sous-entend celui du XXe siècle. Or, depuis l'an 2000, le nouveau siècle n'avait pas encore célébré la parade de gardien dont il ferait sienne. C'est alors que surgit l'Argentin Emiliano Martinez face au Français Kolo Muani, le 18 décembre 2022 à Lusail.
S'il est difficile de comparer les exploits de Banks et de Martinez sur le plan strictement technique, le contexte penche largement en faveur de l'Argentin. Le portier anglais a stoppé la tentative de Pelé au cours d'une rencontre du premier tour alors que l'Argentin s'est interposé face à Kolo Muani à la dernière minute de la finale de la Coupe du monde.
Si Banks n'avait pas stoppé Pelé, son équipe aurait été menée au score, mais n'aurait pas été éliminée (elle perdra de toute façon la rencontre sans grandes conséquences). Si Martinez avait été battu par Kolo Muani, l'Argentine aurait tout simplement perdu la Coupe du monde.
D'un miracle l'autre
Longtemps, on a cru que l'Argentine remporterait sans trop de frayeur cette finale de la Coupe du monde 2022. Les coéquipiers de Lionel Messi mènent 2-0 depuis la 36e minute et maintiennent longtemps leur avantage face à une équipe de France, tenante du titre, qui passe tout bonnement à côté de son match.
Mais la rencontre bascule soudainement à dix minutes de la fin lorsqu'un penalty est accordé aux Français, que transforme Kylian Mbappé, et que cette réduction du score est immédiatement suivie par un but miraculeux, une reprise de volée du même Mbappé. L'Argentine doit se remettre à l'ouvrage face à un adversaire ragaillardi.
Les prolongations sont nécessaires pour tenter de départager les deux équipes. Les figures emblématiques de chaque sélection y vont de leur but, Lionel Messi côté argentin et Kylian Mbappé, encore sur penalty, côté français. Les occasions se multiplient de part et d'autre alors que deux équipes atteignent la 120e minute sur le score de 3-3.
Mais l'arbitre accorde quatre minutes de temps additionnel, et bientôt un coup franc pour les Français devant leur surface. Hugo Lloris expédie au loin un ballon que Nicolás Otamendi repousse, mais qu'Ibrahima Konaté, qui a remplacé Raphaël Varane dix minutes plus tôt, récupère dans le rond central. Il lance Randal Kolo Muani pour un face-à-face avec Emiliano Martinez à l'entrée de la surface.
En étoile
Après avoir laissé rebondir, l'attaquant de Francfort déclenche sa frappe du pied droit. Face à lui, le gardien argentin s'est déployé à la manière d'une étoile, les quatre membres en croix et le bassin proche du sol. Le positionnement parfait dans une telle situation, appliqué avec sang-froid malgré l'enjeu et la fatigue nerveuse de plus de deux heures de match.
La frappe tendue de l'attaquant français percute alors le pied gauche du gardien argentin. Le ballon est renvoyé vers le défenseur Cristian Romero, lequel le dévie de la tête pour éviter que Marcus Thuram ne s'en empare. Nicolás Otamendi écarte vers Lionel Messi.
Certes, deux autres occasions suivront, pour chacune des équipes : l'Argentin Lautaro Martinez verra sa reprise de la tête passer à côté, puis Kylian Mbappé sera contré à l'issue d'un étourdissant slalom dans la surface argentine. Mais au moment où l'arbitre Szymon Marciniak siffle la fin des prolongations, c'est l'émotion de l'arrêt de Martinez sur Kolo Muani qui prévaut.
Le gardien argentin devient un héros national. Pour cet arrêt, mais aussi pour avoir su perturber les jeunes Français lors des tirs au but. Sacré champion du monde, Emiliano Martínez se voit remettre le trophée du meilleur gardien du tournoi, qu'il célèbre malheureusement d'une manière déplorable. Mais il restera désormais, quoi qu'il arrive, l'homme qui effectua l'arrêt du siècle. Du XXIe, s'entend...