Touche pas à mon arbitre
Tribune des lecteurs - En écho au dossier du n°17, un lecteur a pris sa plume pour la planter dans les contradictions de l\'arbitrage et suggérer une nouvelle lecture des règlements...
"Beaucoup n'osent plus parler de l'arbitrage. On peut dire Guy Roux est gros, mais pas l'arbitre est mauvais". Cette maxime est bien celle de Guy Roux, ancien entraîneur d'Auxerre. Si l'ex-technicien bourguignon n'est pas le plus grand penseur de notre temps, il a le mérite d'être clair. Le football européen se pose de nombreuses questions (trop) sur l'arbitrage, mais n'agit pas assez. L'intersaison devrait être l'occasion de repenser l'arbitrage.
Problème d'autorité
Quelle instance va innover et prendre une décision? Mettre un micro sur le maillot jaune de Gilles Veissière, pour l'entendre alpaguer les joueurs durant une finale de coupe de la Ligue, ne suffit plus. L'Olympique lyonnais n'est pas allé à Istanbul, Monsieur Frisk ne distribuera plus de cartons jaunes. Les "couacs" liés à l'arbitrage sont trop nombreux. Le football, sport populaire, a toujours été confronté à des problèmes avec l'autorité. L'arbitre et ses assesseurs représentent le pouvoir, la puissance, la tutelle. Pour autant, les hommes en noir restent le plus souvent des acteurs discrets. Inutile de crier: "Police partout, justice nulle part". Et si l'arbitre est un "enculé", c'est probablement le fait des joueurs anarchistes, des supporters contestataires, des entraîneurs syndicalistes et des présidents libéralistes.
Non, la principale difficulté pour un arbitre, c'est d'être seul, sur un grand rectangle vert, avec pour seuls copains, deux types grassouillet qui courent le long d'une touche, et soulèvent un drapeau de temps en temps. Qui pour aider, soulager, accompagner l'homme au sifflet? Le quatrième arbitre est trop occupé à calmer les bancs de touche et à inscrire des numéros invraisemblables (de 1à 99) sur un panneau. La vidéo pourrait devenir le cinquième arbitre. Mais, nul doute que le préposé à la vidéo, devant son écran plasma préférera regarder les plus beaux buts de Cantona, plutôt que de visionner cinq fois le tacle acharné de Cyril Rool sur Lilian Laslandes. L'idée d'arbitres de surface de réparation a également germé. Des futurs juges de lignes apparaîtraient au stade Bollaert. Comme à Roland Garros, ils s'assoiraient sur une chaise, prêts à recevoir deux à trois ballons dans le visage par match, et prêts à afficher sur leur maillot le logo d'une grande banque parisienne. Après une discussion avec une dizaine d'adjoints, l'arbitre central resterait pourtant à la merci des critiques, des jets de fumigènes. Il y aura toujours un responsable sur le terrain, un homme qui doit prendre la dernière décision. Si les règles ne changent pas, les réactions qu'elles suscitent resteront les mêmes, et ce quel que soit le nombre d'arbitres.
"Flair-play"
La solution pourrait venir d'une nouvelle lecture du règlement. Deux solutions: soit les arbitres ne sifflent plus que les crachats, les coups de boules et les tacles par derrière les deux pieds décollés, soit ils réprimandent le moindre tirage de maillot. Il ne s'agit pas d'être intransigeant. En 2005, les journées de Ligue 1 n'ont offert aux spectateurs que 2,11 buts par match. Si l'arbitrage devient moins sévère, les filets ne trembleront plus que cinq fois pour dix matches de L1 (deux inscrits par Lyon, et trois encaissés par Marseille ou le PSG). Pour une fois, les instances du football devraient suivre ceux qui prônent le fair-play et le "flair-play": les rugbymen. Ces derniers parlent souvent d'esprit du jeu. Lorsque dans un regroupement, un joueur talonne à la main, il est sanctionné. Il n'y a pas de fautes, de contacts, mais son geste est contre l'esprit du jeu. De même, lorsqu'un "première ligne" plaque au-dessus des épaules, il prend un carton jaune et subit dix minutes d'exclusion, autrement dit un véritable avertissement.
Imaginez, une finale de Champions league. L'arbitre siffle le début du match. Une équipe joue de manière musclée pour casser le jeu. À la 13e minute, carton jaune. Jusqu'à la 23e, ils seront dix. Le joueur fautif est déçu, on ne l'y reprendra plus. Toutes ces pistes plus ou moins bonnes doivent être explorées. Pourvu que la FIFA, l'UEFA, la FFF, et autres sigles qui ne mouillent pas le maillot s'activent. Guy Roux aura toujours un gros ventre, mais râlera moins souvent.