Episode XXV: Où apparaît une belle plante

(Si vous n’avez pas lu les épisodes précédents, c’est mal, allez les lire… Oui oui, maintenant.)

La nuit du 4 août était bien avancée et l’effervescence commençait à retomber quelque peu quand un délégué à la belle perruque argentée prit la parole. Il s’appelait Francis Borespierre et sa voix bien modulée fit trembler l’assistance:

« Représentants du peuple de France, en cette nuit où nous portons des coups violents et nécessaires à l’édifice inique de l’absolutisme, il est un sujet dont je souhaiterais vous entretenir. Depuis des siècles, notre peuple a été éduqué pour vivre dans l’imitation du monarque souverain. Depuis des siècles, on a bridé ses libres aspirations et ses penchants naturels pour lui inculquer des vérités que sa Raison renie, pour lui imposer des goûts dont son coeur ne veut pas.

« De cela, je prends pour exemple le jeu de paume: parce qu’Henri le Béarnais s’y adonnait entre deux parties fines, il a fallu que le royaume entier le pratique! Que le royaume entier singe les damoiseaux de la Cour et virevolte comme des eunuques en se renvoyant civilement la baballe! Non! NON! Le peuple de France n’est pas fait pour ces voltes d’éphèbes invertis! Le peuple de France a la robustesse du chêne, il aime les rudes affrontements de la soule, il aime le bruit des corps qui s’entrechoquent et du tibia d’Edouard D’Eau qui éclate en morceaux!

« Représentants du peuple de France, je vous le dis: la Révolution ne doit pas s’arrêter aux affaires d’argent et aux affaires de terres… La Révolution doit libérer le peuple du joug des habitudes castratrices… Laissons la paume aux courtisans dégénérés et faisons la promotion d’un jeu réellement révolutionnaire, qui reprendrait les saines valeurs de la soule et du calcio, qui en ferait la synthèse et que nous appèlerions le jeu de plante… Le jeu de plante, dont je vous fais le serment qu’il deviendra bientôt aux quatre coins de la France le symbole de la liberté apportée par notre Révolution! »