Une coupe franche
Un peu effacée des mémoires, ou dénigrée rétrospectivement, la Coupe d'Europe des vainqueurs de coupe fit pourtant un merveilleux trophée européen.
C’était dans le manifeste des Cahiers du foot de 2003: “La glorieuse Coupe des coupes fut dans ses dernières saisons l’ultime compétition impliquant, pour y participer, d’avoir gagné quelque chose (à ceci près que les finalistes malheureux pouvaient y accéder quand même si leur adversaire était champion). En regroupant des équipes spécialistes des coup(e)s, elle garantissait un spectacle à part et offrait parfois de très belles surprises. Et puis quand on y pense: "Coupe des coupes", quel joli nom…“ Oui, la C2 fut une vraie princesse injustement traitée, mais qui a su malgré tout s’écrire une histoire digne de ses atours.
Miss Europe
Tout d’abord, cette compétition est toujours restée, de sa naissance à sa disparition, une coupe à élimination directe, préservant la fameuse saveur à la fois nostalgique et vivace des joutes footballistiques du Vieux Continent. Une authenticité qui était renforcée par la possibilité qu’elle offrait à des équipes de divisions inférieures d’y participer. Un peu comme, voire plus que, l’Europa League de nos jours, elle permettait de voyager à travers l’Europe, dans tous ses coins et recoins. Plus que ses consœurs, la C2 était un prolongement naturel de ses nourrices, les coupes nationales. Elle était belle, non pas pour son prestige, mais par sa formule, son idée, son histoire, sa forme, son spectacle.
Cependant, elle fut libertine, volage, “ouverte”, puisqu’aucun club ne l’a gagnée deux fois de suite. Dès la seconde édition en 1962, la Fiorentina, tenante du titre, perd face à l’Atlético Madrid. L’année d’après, les Colchoneros durent la laisser filer. Il en sera de même pour le Milan AC en 1974, Anderlecht en 1977 (qui la reconquit toutefois l'année suivante), Parme en 1994, Arsenal en 1995, le PSG en 1997. Faut-il y voir un clin d’œil, une logique implacable ou le comportement d’une fille pas si facile que ça au final? Même le prestigieux Real Madrid ne l’a jamais ramenée à la maison, perdant deux finales en 1971 et en 1983.
Cendrillon
La C2 fut, et est encore trop souvent décriée, critiquée, considérée comme la Coupe d’Europe de plus faible niveau. Comme la mémoire collective qui retient du PSG sacré en 1996 la finale contre le Rapid Vienne, alors que le plateau cette année-là fut des plus relevés et que les duels face au Celtic, à Parme et à La Corogne ne furent pas de tout repos pour le club francilien. Il ne faudrait pas plus oublier que la C2 bénéficiait d’une couverture médiatique plus importante que la C3, et que son prestige était supérieur.
La Coupe des coupes permettait une meilleure hiérarchisation des clubs européens. Elle donnait au continent une alternative plus équilibrée, un visage hétéroclite et plus divers – une Europe où tout le monde semblait pouvoir trouver son compte. Même si ses débuts furent difficiles à cause du manque de reconnaissance dont souffraient les coupes nationales (l’Espagne et la France n’envoyèrent pas de candidat lors de la première édition), l’engouement rencontré par les matches décidèrent l’UEFA et les fédérations à la récupérer et à la pérenniser. Certains pays organisèrent même une compétition domestique à cause du succès de la C2.
C’est une belle histoire
Comme la Coupe de l’UEFA, elle permettait à certaines équipes de se roder et de se construire en gagnant un titre majeur. Elle a pu écrire l’histoire de beaucoup de clubs, dont le dernier n’est pas le FC Barcelone. Le club catalan s’y est fait un palmarès et un nom avant de gagner la C1 tardivement, en 1992. Il en va de même pour Chelsea, vainqueur en 1971 et 1998, et champion d’Europe seulement en 2012.
Les routards de la nouvelle Ligue des champions sont loin d’être les seuls à avoir fait leurs armes avec la C2. D’autres s’y sont fait un palmarès, voire une histoire européenne tout court. Pêle-mêle, on peut citer la Fiorentina, Tottenham, l’Atlético Madrid, Manchester City, les Glasgow Rangers, Anderlecht, le FC Malines, le Parma AC. Et à l’image de Manchester United qui signa en 1991 un retour victorieux en battant le FC Barcelone en finale (2-1), après les cinq années de suspension des clubs anglais à la suite du drame du Heysel, permettons-nous de rêver de la résurrection de la Coupe d’Europe des vainqueurs de coupes.
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