Le stade parfait n'existe pas
Pour accueillir l'Euro, les stades doivent obéir à des normes dont l’UEFA elle-même reconnaît qu'elles sont impossibles à respecter...
À chaque fois qu’une nation majeure du football ou un club de premier ordre se dote d’une nouvelle enceinte, celle-ci acquiert de facto le statut de meilleur stade du monde. Ainsi l’Allianz Arena du Bayern Munich ou l’Emirates Stadium d’Arsenal FC pour les clubs, ou le stade Olympique de Berlin, encore magnifié par les récents championnats du monde d’athlétisme, et surtout Wembley, ont tour à tour reçu les honneurs des observateurs. Un leadership que contesteront bientôt les nouveaux stades de l’Inter Milan, de la Juventus de Turin ou même de l’Olympique Lyonnais.
Inflation des normes
Pourtant, aucune de ces infrastructures à la pointe de la modernité ne répond au récent cahier des charges "Euro 2016" publié par l’UEFA. L’instance européenne fixe en effet les normes d’accueil pour les compétitions qu’elle organise. Si elle témoigne d’une certaine latitude pour les compétitions de clubs, accordant maintes dérogations (l’Olympique de Marseille n’a ainsi pas à pâtir de l’absence de places assises à dossier dans les virages du Vélodrome…), elle se montre intransigeante concernant le championnat d'Europe des Nations.
Allianz Arena et Emirates Stadium.
Les difficultés constatées dans la réalisation des stades de l’Euro 2012, notamment côté ukrainien, concernant le respect des conditions d’accueil du public et des délais de livraison, ont incité l’UEFA à élever significativement les exigences des normes. Le cahier des charges Euro 2016, publié au printemps 2009, présente ainsi la particularité d’imposer des contraintes jamais encore réunies au sein d’une même enceinte.
L’organisme présidé par Michel Platini est d’ailleurs le premier à reconnaître que son bréviaire compile les "bonnes pratiques", sans toutefois donner un exemple intégral à suivre. Elle propose seulement de compiler la zone mixte de tel stade, l’accueil du public de tel autre, ou encore les loges et business seats d’un troisième site!
Des nouveaux stades déjà dépassés ?
Conséquence directe de cette inflation normative, un stade rénové ne peut intégralement répondre aux cahiers des charges. Difficile, en effet, de faire correspondre la largueur des sièges, la profondeur des gradins, les conditions de visibilité sans détruire et reconstruire l’enceinte. D’autant que, business oblige, les nouveaux stades doivent se doter d’un éclairage de 2.000 lux afin de favoriser la diffusion des matches en HD et disposer, au moins temporairement, de 4.850 places VIP (contre 2.200 pour l’Euro 2012).
Le grand stade lillois, dont le permis de construire a déjà été déposé sur un programme fixe, ne pourra ainsi remplir l’intégralité des demandes. Les futures enceintes bordelaises et niçoises ont pour leur part prévu d’intégrer le cahier des charges UEFA à leur propre appel d’offres de construction.
L’UEFA prône un "héritage" pour les stades accueillant l’Euro. Pourtant, au prix que coûteront les aménagements qu’elle impose, il y a fort à parier que le principal legs sera pour les finances des entrepreneurs ou des collectivités qui paieront le projet.