Samedi 27 septembre, Hartlepool United accueillait Portsmouth pour le compte de la 10è journée de D4. J’y étais.

La semaine dernière, j’étais machinalement parti pour voir mon club, Sunderland, recevoir Swansea au Stadium of Light samedi aprèm. Pis je me suis dit qu’au lieu de me cogner une énième purge Black Cat et être morose tout l’après-midi, autant assister à un p’tit match sympa dans un p’tit club de mon coin, histoire de faire ma B.A pour le foot grassroots et voir de près comment les gueux vivent par la même occasion.

Alors, que je vous explique, dans un rayon de 60 kms autour de chez moi, comme petit club pittoresque t’as : a) Darlington – option vite abandonnée car vraiment trop déprimant (Darlo est passé de la D4 à la D9 en un temps record – long à expliquer, passons ; en D8 aujourd’hui) ; b) Gateshead – possible, mais j’aime ni leur stade (enceinte d’athlé de 12 000 places à 90 % vide les jours de match) ni leur quartier mort et excentré (zone pavillonnaire, 1 seul pub, familial) donc non ; c) Blyth Spartans – ouais pourquoi pas mais j’étais chez eux y’a pas longtemps donc niet aussi ; d) Newcastle United bien sûr, mais les Mags jouaient à l’extérieur donc impossible.

Restait plus que les Monkey Hangers donc. Hartlepool, avant-dernier, vs Portsmouth, 11è.

[Cliquez sur les photos pour les agrandir]

Hartlepool pour les Nuls

Monkey Hangers, ou Pools, sont les deux surnoms de Hartlepool, ville côtière de 90 000 âmes située au bord de la Mer du Nord, entre Sunderland-la-moche et Middlesbrough-la-super-moche-et-polluée-en-plus (because industries chimiques, d’où le surnom de Boro, les Smoggies). La grande métropole du coin qui sauve la mise, c’est Newcastle, à 50 bornes au nord, cité plutôt élégante, si ce n’était pour un méchant furoncle de 52 404 places qui défigure le centre-ville depuis plus d’un siècle.

La croissance de l’économie britannique a zappé Hartlepool. Le coin est « post-industriel » comme on dit pudiquement. Les locaux disent ne pas avoir ressenti la dernière récession, celle démarrée en 2008. Et pour cause, ajoutent-ils l’air résigné, on n’est jamais vraiment sorti de la grande dépression des années 30 ici. Les plus optimistes d’entre eux décrivent Hartlepool comme une ville jeune et pleine d’atouts. Comprendre : le week-end, des dizaines d’établissements abreuvent des milliers de jeunes soiffard(e)s. Et le week-end commence dès le jeudi soir ici. Chaque drinking hole a sa paire de videurs. Et comme partout ailleurs au Royaume-Uni, ça descend autant que ça s’embrouille ou castagne, surtout à la fermeture, de minuit à 2 heures du mat. Veni, vidi, vomi.

Selon la blague locale, avoir des rapports protégés à Hartlepool signifiait qu’on se mettait sous un abri bus pour copuler.

En 2011, Hartlepool avait le plus fort taux de chômage des 18-24 ans du pays et, vers 2000, l’un des taux de grossesse juvénile parmi les plus élevés du monde occidental (résorbé depuis). Il y a une douzaine d’années, circulait cette cynique blague dans les salles de profs et les plannings familiaux du coin : ici, le protected sex veut surtout dire qu’on se met sous un abri bus pour copuler.

Heureusement, y’a le football, et localement on est servi. Chacun y trouve son bonheur. Les plus sains d’esprit supportent les Black Cats, à 30 kilomètres ; les moins finauds Middlesbrough, les cyclothymiques Newcastle United et aux grands neurasthéniques du cru, il reste Darlington. Pour tous les autres c’est Hartlepool, les Monkey Hangers, les Pendeurs de singes.

Un singe obscène comme mascotte : la faute à Napoléon

Mais d’où vient ce surnom étrange ? Ben c’est encore de notre faute pardi. Enfin, celle de Napoléon plus exactement. En 1805, l’un de ses navires s’échoue dans le coin. Seul survivant du naufrage : un singe qui porte l’uniforme de la marine française. Les autochtones, qui redoutaient une invasion de l’ennemi juré, traduisent la pauvre bête devant un tribunal populaire. Le primate ne pipe mot et refuse de répondre aux questions ; c’est con un singe au fond malgré ce qu’on nous raconte à la télé. Les Hartlepooliens, qui n’ont jamais vu ni Français ni singe de leur vie, décrètent que le mammifère est forcément un espion français et le pendent séance tenante. Surtout, n’insultez pas le premier Rosbif que vous croiserez, ce n’est qu’une légende.  Il existe une autre version beaucoup plus sordide, que n’aurait pas renié Emile Louis, mais passons vite dessus.

Aujourd’hui, le singe est le symbole de la ville et d’Hartlepool United. Tellement plus qu’un symbole d’ailleurs. En mai 2002, Stuart Drummond, la mascotte déjantée du club (H’Angus The Monkey”, notez le jeu de mots) se fait élire maire d’Hartlepool. Comble de l’humiliation pour les autres candidats : pour toute campagne, ce Coluche local s’est contenté de déconner non stop en dégainant son slogan fétiche : « Des bananes gratuites pour tous les écoliers ».
Gros buzz médiatique et terrible
camouflet pour Blair et son gouvernement qui tentaient alors de convaincre la population britannique du bien-fondé d’élections municipales à la continentale (voir ce wiki). Et voilà-t-il pas que l’un des tous premiers maires directement élus est un illuminé payé 53 000 £/an pour faire le singe… Drummond restera maire onze ans ! (il devra toutefois s’allier avec les Travaillistes et rentrera dans les clous. Fin 2012, un référendum local mettra fin à la malheureuse expérimentation et Drummond quittera son poste courant 2013. La ville est depuis revenu au système traditionnel britannique de gestion des municipalités, ici).

Le mec était pas trop net faut dire. En tant que mascotte d’Hartlepool de 1999 à 2002, il s’était fait virer de deux stades, celui de Scunthorpe en 2000 pour gesticulations obscènes derrière une stadière et à Blackpool en 2001 pour des faits similaires sur une poupée gonflable… Et pour l’anecdote, il ne tint jamais sa promesse sur les bananes. Ah ces politiciens, tous les mêmes.

Quelques FACTS sur Hartlepool United :

Depuis l’accession en Football League, en 1921, Pools a passé son existence à yoyoter entre la D3 (années 2000) et la D4, où ils végètent depuis l’an dernier (19è, sur 24).

Pools (alors Hartlepools United) fut le premier club de Brian Clough manager. C’est à Pools que la paire Clough-Taylor se fit les dents et se signala pour ses dons de faiseur de miracles. Clough sera limogé fin avril 1967 après un énième accrochage avec le propriétaire et recruté par Derby County, D2. Clough surnomma fameusement Hartlepool « the edge of the world », le bord du monde (la ville et le club ont toujours eu une image de coin un peu isolé et à part, moins aujourd’hui évidemment avec le développement du réseau routier régional et les technologies modernes de communication).

Deux Newcastle United legends y ont fini leur carrière : Peter Beardsley (59 capes anglaises) et Nobby Solano (95 capes péruviennes).

Pour un petit club, Pools compte pas mal de celebrity fans, dont Jeff Stelling, l’un des présentateurs vedettes de Sky Sports (célèbre pour les Soccer Saturday un peu déjantés avec Chris Kamara, Dean Windass et consorts), le réalisateur Scott Ridley et le rocker US Meat Loaf qui explique pourquoi dans ce clip, à 1’22 (très marrant).

Depuis quatre saisons, les vraies celébrités d’Hartlepool sont leurs supps, les Poolies : ils se déguisent pour le dernier déplacement de la saison. En 2012, leurs 171 Schtroumphs ont fait le buzz (ci-dessous dans le Tube londonien, en route pour Charlton).

Hartlepool a le pire ratio de victoire à domicile de la Football League depuis août 2012 : seulement 33 % (17 victoires sur 51 matchs).

Inutile de vous faire un topo sur Portsmouth hein, vous connaissez déjà sûrement bien l’ancien club à Vincent Péricard si vous nous suivez. Pour plus d’infos sur la D4 cette saison ainsi que les quelques cracks présents aujourd’hui sur le terrain (Pat Agyemang, Nicky Shorey, Marlon Harewood – tous ex Premier League ou D2 –, Jed Wallace et Danny Hollands), j’en parlais longuement ici et ici.

Assez de schtroumpheries, passons à l’avant-match.

L’avant-match, au pub évidemment

C’est en train, de Newcastle, que je me rends au match. A ma descente du train, je n’ai qu’à faire quelques mètres pour atteindre mon premier objectif, le Rat Race Ale House, situé sur le quai. L’endroit est singulier et né d’un concept original, le micropub, un mouvement qui apporte une bouffée d’air frais en Angleterre face au rouleau compresseur des grosses chaînes de pubs, impersonnelles et génériques, qui contribuent à couler les pubs traditionnels depuis une bonne décennie (environ 1 500 fermetures par an).

Ancien kiosque de gare reconverti en micropub en 2009, le Rat Race est particulièrement micro : 6 mètres par 4 à tout casser. Sur le mur (et leur site Internet), une affichette avertit de la fermeture du pub le week-end prochain par mesure de précaution « à cause de soi-disant supporters qui ont causé des problèmes par le passé ». Peter, l’affable patron, un ex informaticien qui a utilisé sa prime de licenciement pour se lancer dans l’aventure, m’explique qu’en septembre 2012 quelques « supporters » de Carlisle United (rival d’Hartlepool, par défaut) avaient mis le bazar dans la gare et autour de son pub. Cette année, il préfère donc fermer.

Ce que me raconte Peter ne m’étonne guère : Carlisle, c’est spécial (j’en avais fait un article). C’est dans cette ville qu’a été inventé le lorry-spotting, navrant hobby de dégénérés en phase terminale d’oisiveté qui passent leur week-end à photographier des camions depuis des ponts autoroutiers et comparent ensuite leurs prises sur Internet (Conversation standard : « T’as spotté combien de Daf X22 Norbert Dentressangle sur la bretelle 34a pendant tes dernières vacances ? – Ben, 8 seulement mais j’ai filmé le dernier Scania Eddie Stobart avec l’Opticruise et remorque triple essieu. Absolument méga. Je retourne camper derrière le dépot à Pâques »).

Les murs du Rat Race sont décorés de 1 000 ronds à bière. Ils en servent presque la moitié, dont – évidemment – la Blue Monkey et ISIS, la bière des Djihadistes.

Le pub est trop petit pour avoir comptoir, tireuses à bière et tout le matos alors quand on commande, Peter disparaît dans une petite remise et ressort avec le nectar. Les bonnes semaines, il y stocke 400 différentes sortes de bières & cidres.

Deux pubs plus tard, j’arrive à Victoria Park, « The Vic » pour les intimes, stade de 7 800 places sans grand charme, refait à neuf dans les Nineties. Abords peu engageants, l’enceinte est coincée entre une ligne de chemin de fer, des ronds-points et des grandes surfaces. Ces précisions ont leur importance, comme vous le verrez.

Devant Victoria Park, un supp de Hartlepool déguisé en « Français typique », avec béret, fausse moustache et collier d’oignons. Y’a du progrés depuis 1805 mais clairement, les mecs sont encore bien marqués.

Le match

Je suis à la bourre et file directement dans les Populaires (20 £ la place debout). Honnête chambrée, 3 500 spectateurs (la D4 fait 4 300 de moyenne), dont 500 supps de Portsmouth qui donnent de la voix malgré leurs dix heures d’autocar. Parmi eux, le fameux John Portsmouth Football Club Westwood (ci-dessous), que j’ai déjà eu l’occasion d’admirer de près, notamment au Stadium of Light. Le mec n’a pas raté un déplacement de Pompey depuis 1980 paraît-il.

Contrairement à tant de clubs plus huppés, pas d’hymne à la con ici que personne ne chante, ça démarre direct.

Les temps forts du match.

8’ : A la stat « Tir non cadré/hors cadre » chère aux dataholics, faudrait ajouter celle du tir hors stade : premier ballon envoyé au-dessus des tribunes, basses. Un odieux raté d’un bleu et blanc qui finit probablement sur la ligne de chemin de fer ou dans un caddy sur le parking de Morrisons (hypermarché collé au stade).

15’ : Premier quart d’heure mort, à peine un tir cadré et même pas un tacle assassin. On ne peut même pas parler de kick and rush, (malheureusement) non. C’est une sorte de mélasse de football, sans jeu ni cours du jeu, un résidu fait de mauvaises passes, de surplace, de cafouillages, de courts ballons imprécis sans cesse contrés, de longs ballons directement en touche et autres phénomènes non identifiables. Engagé mais sans plus.

18’ : Le niveau d’excitation passe soudain de zéro à Red Alert car on m’a assuré avant le match qu’à 19’08 secondes (date de fondation du club) il y aurait une protestation en masse des supps contre la boîte propriétaire du club depuis 1997 (IOR, société pétrolière scoto-norvégienne). En 2014, Hartlepool a vendu deux jeunes joueurs talentueux à Peterborough pour 1,5 million £ (Jack Baldwin et Luke James, ce dernier récemment) sans chercher à les remplacer. De fait, le seul vrai attaquant de l’effectif est Marlon Harewood, 35 ans, qui a marqué 3 buts sur ses 27 dernières apparitions (2 000 minutes de jeu).

Ergo, les supps sont révoltés et parlent de tout faire péter aujourd’hui. Gros buzz là-dessus sur les réseaux sociaux (dont leur principal forum de supps, très actif, 650 000 posts !) avec des fils interminables (ici par exemple) où les échanges ont tendance à vite virer à la brachycérophilie.

Fait tout de même inquiétant : des supps recommandent « de ne surtout rien acheter à la buvette à la mi-temps car ça serait leur filer du fric à ces enculés de propriétaires ». Je préviens mon camarade de travée le plus proche que, nonobstant mon soutien fraternel et idéologique à leur légitime lutte contre le Grand Capital, je ne cautionne pas du tout ce genre de boycott et me désolidariserai illico de leur petite jacquerie.

Concrètement, un max de supps sont censés quitter leur place et se rendre derrière leur tribune respective en candant des slogans anti IOR pendant 10 minutes. Apparemment, ça s’annonce méga. L’asso des supps a prévenu le club : on va vous déclencher une World War III version tribune. Youpi, une insurrection. Je prépare mon appareil photo et me mets en position.

19’08. Absolument rien, walou, zilch, nada. Comme d’hab avec ce genre de truc, ça a fait un gros pschitttt. Bah, le militantisme est mort depuis longtemps en Angleterre, faudrait une bonne révolution pour réveiller tout le monde. Je décide d’entonner la Marseillaise mais me souviens de ce qu’ils ont fait au singe et me ravise illico.

25’ : Deuxième tir par-delà les tribunes, odieux raté d’un jaune (Portsmouth) qui finit probablement sur la ligne de chemin de fer ou dans un wagon de charbon en partance pour la centrale de Drax à 100 kms de là.

38’ : Troisième ballon expédié hors stade sur un dégagement en catastrophe d’un bleu et blanc, corner. Je demande à mon voisin combien ils en envoient sur orbite comme ça par match. « Oh, parfois une dizaine, me répond-il en se marrant. Jusque y’a deux ou trois ans, le club avait des stadiers à l’extérieur pour les récupérer mais ça revient trop cher alors on se débrouille autrement. »

J’essaie de voir en fonction d’un plan Google Map du quartier où ce ballon a pu atterrir cette fois.

Mi-temps : Enfin. Buvette time.

55’ : Domination de Portsmouth depuis cinq minutes, on a même eu le droit à une occasion franche, si si.

Survoltés, les supps de Pompey entonnent leur fameux Pompey Chimes, deuxième plus vieux chant du football anglais après le On The Ball de Norwich City.
Enfin, quand je dis « chant » faut le dire vite hein parce que ça fait juste : «
Play up Pompey, Pompey play up » et basta (l’était plus long à sa création en 1900 mais je vous passe les détails).

C’est super limité mais vu le contexte de vide sidéral, je trouve ce chant absolument fascinant.

60’ : Je me force pour essayer de trouver le moindre petit geste technique super intéressant mais non, rien à faire, je m’emmerde dur. Du coup, j’explique à un jeune stadier sympa de l’autre côté du grillage me séparant de la tribune des supps de Portsmouth que je fais un reportage sur ce match pour un gros média français (le mec a l’air impressionné) et lui demande la permission d’aller dans la tribune extérieur pour photographier des supps de Pompey.

L’accès d’une tribune à l’autre est impossible sans ressortir du stade (et encore), alors j’insiste poliment en racontant que le gros média pour lequel je bosse m’envoie de Paris car on s’intéresse de près à Nigel Atangana, le Frenchie de Pompey, présent sur la pelouse. Le stadier ouvre de grands yeux (je l’imagine se demandant : « Quoi, un Français qui s’appelle Nigel ? Et pourquoi pas un Anglais qui s’appellerait Marcel pendant qu’on y est. Putain d’Europe, tout fout le camp. »).

Tout ce que gars aurait à faire est d’ouvrir une porte grillagée et m’accompagner sur quelques mètres mais, health & safety oblige, ça coince. Il s’en remet à son chef qui me mate bizarrement. Le chef s’adresse alors à l’un des dix policiers de faction dans le no man’s land entre les tribunes (malgré les mégas coupes budgétaires, doit y avoir minimum 50 Bobbies dans ce petit stade hyper calme, on se croirait en Vigipirate).

Le chef s’éloigne et converse avec chépaki sur son talkie-walkie (le Grand Chef des Stadiers ? Le proprio du club ?). Quel binz pas possible pour franchir une simple porte. Le capo des stadiers revient vers moi et, l’air très officiel, me fait : « Impossible de vous laisser accéder à la tribune extérieur pour votre reportage, il aurait d’abord fallu demander la permission au club. » Bon, ben, ça m’apprendra à me big up en faisant croire que je suis un grand reporter tiens ; si j’avais dit que c’était pour la collec personnelle de ma grand-mère mourante qui supporte Pools depuis 1930, il m’aurait sûrement laissé circuler et avec une escorte en plus.

65’ : Cinquième ballon sauvagement bouté hors du stade. A en juger par la trajectoire, celui-ci a dû finir sur le rond-point du centre commercial, pas impossible même qu’il ait pris la direction du Pôle Emploi tout proche s’il a été dévié par un camion. Aidé par mon voisin de main courante, je commence à bien visualiser le plan du quartier.


Chaude ambiance au Vic.

77’ : Marlon Harewood (35 ans, ex Premier League) entre en jeu. Vu sa grosse frappe aléatoire, ça risque pas de nous arranger le ratio de ballons hors stade.

80’ : Harewood touche son premier ballon et rate un contrôle facile. « Et dire que c’est payé 1 500 £/semaine ça », peste mon voisin.

Arrêts de jeu : Ça s’anime enfin, 2 tirs vaguement cadrés dans les dernières minutes.

93’ : Terminé.

C’est le troisième 0-0 d’affilée contre Portsmouth à domicile. Comme disent les Anglais, on s’éclate plus à regarder la peinture sécher que des purges pareilles mais ce point permet au moins à Hartlepool de passer 22è et donc sortir de la zone rouge.

Je rejoins des supps déprimés au Mill House, pub sympa mitoyen au stade, avant de quitter Hartlepool, sceptique sur leurs chances de se maintenir en Football League.

Le classement et le résumé TV du match ici dans le Football League Show de la BBC, à 1h10’50 (attention, géolocalisation). Même en raclant les fonds de surface, ils n’ont trouvé que 3 occasions à montrer.

Kevin Quigagne.

Dans la même série :
Gashead for a day
Belfast and Furious

12 commentaires

  1. lomaia dit :

    superbe histoire merci !
    j’avoue que ça doit être vraiment dépaysant et authentique d’aller voir des matchs de D3 et D4

  2. Kevin Quigagne dit :

    Merci à toi.

    Dépaysant oui, ça c’est certain, par rapport à la PL que je vais voir régulièrement. C’est surtout les stades qui sont dépaysants d’ailleurs (places debout et toussa), car des purges comme celle de samedi, on en voit aussi un paquet en PL/D2 ! (donc Sunderland, Newcastle et Middlesbrough). Même si c’est forcément plus technique itou itou en PL, une purge, c’est une purge (= a shocker/dross game/snorefest/snoozefest en anglais, qui ne manque pas de vocabulaire pour ce genre de match).

    Authentique, je sais pas, je n’aime pas trop ce qualificatif pour parler de football, mais je vois ce que tu veux dire.

    Quand je vivais dans le South Yorkshire avant 2002, j’allais régulièrement voir de la D3-D4 dans tout le Yorkshire, aussi Derbyshire, Nottinghamshire, Greater Manchester, etc., j’étais célibataire, plus dispo, etc. et ça grouillait de clubs évoluant dans les échelons inférieurs de Football League, dont Hull (East Yorkshire), qui était en D4 à l’époque ! J’allais aussi souvent dans le Lancashire à un moment, là ça cartonnait niveau D3-D4, t’avais Burnley, Preston, Oldham, Bury, etc.

    J’ai malheureusement beaucoup moins l’occasion de voir de la D3-D4 aujourd’hui car seul Hartlepool évolue à ce niveau dans le North-East, hormis Darlington jusque y’a 3 ou 4 ans (le reste des clubs autour de Newcastle a toujours été soit PL/D2, soit non-League – de mon vivant je veux dire).

    A environ 1h30 de Newcastle, y’a Carlisle qui évolue niveau D3-D4 depuis des années, ça vaut le déplacement, stade à voir, j’en parlais dans mon Spécial D4 de fin août. La ville est sans intérêt mais la région – Cumbria – est sublime (Parc national du Lake District).

    J’essaie aussi de voir de la D3-D4 quand je retourne dans le Yorkshire/Derbyshire chez amis & famille mais je privilégie plutôt mon second club, Wednesday (D2 – enfin, en général D2 car parfois D3 aussi…).

    Ces dernières années niveau D3-D4 dans cette région-là, je suis allé à Barnsley, Rotherham, York, Doncaster et Chesterfield (le coin de Chesterfield est particulièrement intéressant niveau football, avec Mansfield pas loin, car féroce rivalité d’origine politique & syndicale fascinante entre Chesterfield, D3 cette année et Mansfield, D4, l’oeuvre de Thatcher…).

  3. xavier dit :

    Super article. Tu aurais dû préciser au stadier que tu travailler pour le site d’investigation qui a sorti l’affaire de la Dream Football League, je suis sûr que ça l’aurait impressionné.

  4. Antipop dit :

    Merci pour cet article, je me suis fendu la poire tout le long (ou bien disons que ça ma donné la banane, pour rester dans le thème du maire-mascotte).

  5. Solskpier dit :

    Super lecture ! Merci. Toujours aussi agréable de te lire !

  6. Kevin Quigagne dit :

    Merci à tous.

    Ce qui est intéressant avec ce genre de match vraiment mauvais, ce sont les CR « officiels » sur Internet et ceux de la presse locale. Car évidemment, les journalistes du cru se doivent d’être indulgents ou bienveillants s’ils veulent continuer à entretenir de bonnes relations avec le club, le manager et les joueurs. S’ils écrivaient comme je le fais que le match a été une purge, que l’attaque a été d’une nullité diabolique, etc. ils tiendraient pas longtemps.

    Niveau club Premier League, les critiques passent car il s’agit souvent d’un quotidien régional, avec plusieurs reporters, une certaine force de frappe et le match est rapporté par plein de sites internet et de journaux nationaux de toute manière donc inutile d’essayer de minimiser et pipeauter, ça se verrait. Dans les p’tits journaux locaux, c’est pas du tout la même chanson. Alors le reporter doit positiver à fond, être très diplomatique et se montrer super enthousiaste même quand rien ne l’invite à le faire…

    Lu dans les quelques CR de ce match qui traînent sur Internet :

    Dans un quotidien de Portsmouth :

    « Ce Hartlepool-Portsmouth a été frustrant dans l’ensemble ».

    (de l’art de l’euphémisme) C’est effectivement pas faux…

    « Agyemang s’est montré souvent très menaçant »

    Menaçant ? le mec a vendangé 2 fois et n’a quasiment rien fait d’autre.

    « Portsmouth] a largement dominé la deuxième mi-temps »

    Bah, pendant 7 minutes max et le reste du temps ça s’est neutralisé assez piteusement des deux côtés de la ligne médiane.

    Le quotidien d’Hartlepool parle lui d’un début de match « frantic » (rythme effréné – ouais, les 2 premières minutes quoi) et d’un match « généralement disputé sur un tempo élevé »

    C’était surtout la verticalité qu’était élevée. Ça courait pas mal, mais dans tous les sens comme des poulets sans tête.

    Plus loin, le reporter écrit qu’Hartlepool n’a pas su trouver son « killer touch »

    Son killer touch ? Euh, Hartlepool était avant-dernier au coup d’envoi, tu parles d’un killer touch !

    Et pour finir, ce superbe exemple de minimisation : « Brobbel a tenté une demi-volée mais non cadrée. »

    On peut dire ça comme ça. Ou alors écrire ce qu’il s’est vraiment passé : le ballon a atterri sur le parking du supermarché voisin.

    Selon les stats de la BBC, sur 23 tentatives des 2 équipes (ça doit être « tentatives » au sens super large alors), 3 cadrées seulement (zéro cadrée sur 12 pour Hartlepool), ici :

    http://www.bbc.co.uk/sport/0/football/29289672

    @ Xavier.

    Effectivement, j’aurais dû…

    Ce jeune stadier était très sympa, on a pas mal discuté en 2è mi-temps (il s’emmerdait aussi) et on a fait connaissance. Il m’a donné rendez-vous au Mill House, derrière le stade, pour un verre d’après match.
    Il m’a dit être maçon à son compte et que ça l’arrangeait de faire stadier au lieu de payer 350 £ pour son abonnement. C’est sa première saison en tant que stadier et il touche 40 £ par match (payé de 13h à 17h15 environ), environ 9 £ de l’heure, ce qui est très généreux par rapport à Sunderland où les mecs touchent le salaire minimum horaire (6,50 £) et où ils ne peuvent guère regarder le match puisque pas mal d’entre eux doivent faire face aux tribunes (ils ratent pas grand chose à vrai dire) ou rester beaucoup plus concentrés sur les potentiels problèmes ; difficile donc pour eux de mater le match, contrairement à dans des clubs comme Hartlepool où ils peuvent suivre le match tranquillos et même discuter avec les spectateurs.

  7. Magpie fan dit :

    Super article reportage, meme si j’ai moins aimé les piques sur Newcastle United, mon club… (je suis franco-anglais, je vis au R-U depuis 7 ans et dans le North-east depuis 4).

    C’est informatif, détaillé et ça capture bien l’atmosphère des divisions inferieures, que je connais mal.

    Je connais un peu Hartlepool, c’est vrai que ça a souffert et ca souffre toujours(un gros centre d’appel a fermé y’a pas longtemps par exemple) mais la ville s’améliore, y’a une marina sympa et c’est pas mal vers le port. La mairie a l’air de faire plus pour la ville depuis 2 ou 3 ans, par raport a la précedente, c’est ce qu’on m’a expliqué en tous cas.

  8. Colonel Moutarde dit :

    Ah ben voilà, le coach de Hartlepool a démissionné après une triste défaite 3 à 0 à domicile contre Carlisle, dernier du championnat (qui passe avant-dernier grâce à cette branlée). C’est à ce match-là que tu aurais dû aller, Kevin. Si ça se trouve, les supps ont vraiment fait la révolution ce jour-là (ou alors ils ont pris le double de pintes pour oublier).

  9. Kevin Quigagne dit :

    @ Magpie Fan

    Merci pour les précisions sur Hartlepool.

    Commisération pour le reste. Belle réussite pour vous hier : 4 occasions cadrées, 2 buts.

    Sunderland a fait encore mieux niveau réalisme : 3 occasions cadrées, 3 buts !

    @ Colonel Moutarde.

    Ouais, “Coops” a officiellement jeté l’éponge (ou a-t-il été limogé par consentement mutuel ?).

    S’ils ne recrutent pas, ça risque de vite sentir la non-League pour eux, donc l’anonymat et une grosse baisse des revenus (en gros, budget divisé par 2). Et pis bonjour la difficulté pour remonter en Football League hein, une seule montée automatique et l’autre à la loterie des play-offs. Un gros club comme Luton a mis 5 ans, Cambridge 10 et des relativement gros clubs comme Wrexham ou Grimsby y sont coincés depuis des années.

    Comme je le craignais dans ma Preview D4 de fin août, vendre Luke James début septembre a fait mal. Ils n’ont plus aucun avant-centre pur ou milieu offensif buteur (comme l’était James), hormis Harewood (35 ans) qui ne joue que des bouts de match. D’ailleurs, les supps me disaient la semaine dernière qu’ils faisaient souvent jouer un latéral gauche ou arrière central devant ! (un truc comme ça, un mec qu’avait été avant-centre chez les poussins).

    Sans ça, t’as raison, j’aurais dû aller au match d’hier, ça a eu l’air de gronder (ai vu ça aux actus régionales ce soir). Et Hartlepool a cadré 1 occasion ! (0 au match auquel j’ai assisté); Carlisle, 3 cadrées, 3 buts.

    http://www.bbc.co.uk/sport/0/football/29388967

    Pour ce qui est des pintes, c’est bon, grâce aux progrès de la science, le supp lambda en Angleterre n’aura bientôt plus besoin de se saoûler pour noyer son chagrin. Dans quelques semaines, le NHS (Service National de Santé) devrait autoriser un médoc appelé Nalmefene, un truc conçu pour remplacer la consommation d’alcool. Apparemment, les essais cliniques ont été probants. Super, on aura juste à avaler nos pilules les jours de match pour évacuer le blues d’après-match.

  10. Karl-Osvalo arma dit :

    Super article !

    Le long passage sur les négociations pour accéder à la tribune « visiteurs » nous fait parfaitement ressentir le niveau de jeu proposé sur la pelouse !!

    On t’a bien senti à l’affut de quoi que ce soit qui pourrait détourner ton regard du pré !

    J’ai ressenti la même chose en regardant River / Boca dimanche soir !

  11. devikink dit :

    Très sympa ce compte-rendu et description du cadre.
    Pour en savoir un peu plus sur la légende du singe, il y a cette bonne BD « Le singe de Hartlepool » par Lupano et Moreau qui est sortie y a 2 ans chez Delcourt.
    http://www.bedetheque.com/BD-Singe-de-Hartlepool-Le-Singe-de-Hartlepool-169020.html

  12. Kevin Quigagne dit :

    @ Karl-Osvalo.

    Merci. Ouais, aller observer de près la tribune Visiteurs, discuter avec eux et prendre des photos des supps de Pompey était mon seul salut. J’aurais bien aimé prendre en photo le fameux John Portsmouth Football Club Westwood en train d’agiter sa clochette fétiche (il l’agite quand les supps chantent leur hymne, « Pompey Chimes » – chimes = carillon. Il avait un tambour et un clairon dans le temps mais les stadiers apprécient de moins en moins son goût pour les instruments encombrants et bruyants).

    @ devikink.

    Merci. L’a l’air très bien cette BD. Certains auteurs de commentaires sous la présentation de la BD ont l’air de prendre tout ça super au sérieux !

Répondre