Demi-finales de FA Cup ce week-end à Wembley, Chelsea v Man City et Millwall v Wigan. L’occasion de parler de Sunderland donc. Car il y a quarante ans, de janvier à mai 1973, le club du North East (alors ventre-mouiste de D2) signait le plus beau parcours de la longue histoire de la FA Cup (142 ans), jusqu’à la finale, remportée sur le grand Leeds United de Don Revie, meilleur club anglais depuis le milieu des Sixties. Grâce à des joueurs transcendés et un stade mythique, Roker Park. Un temple que les Anciens évoquent souvent la larme à l’oeil.

Lecture de l’intro recommandée (et du reste aussi d’ailleurs). Suite de la première partie.

[Cliquer sur les photos peut rapporter gros ; SAFC = Sunderland]

Huitièmes de finale : le Roker Roar terrasse le grand Man City

Le tirage des 8è n’est pas être tendre avec Sunderland : Manchester City, 4è de D1 la saison précédente. Les Citizens ont de la vedette en pagaille (dont Colin Bell, Francis Lee, Mike Summerbee, Rodney Marsh et Mike Doyle, tous internationaux anglais) et sont donnés favoris pour remporter la Cup, avec Leeds United, détenteur du trophée. City et son manager, le très suffisant Malcolm Allison (dit « Big Mal »), ne sont pas du genre à gamberger. Big Mal parle ouvertement du « petit Sunderland ».

24 février 1973, Man City-Sunderland : 2-2 (54 478 spectateurs, dont 10 000 Black Cats).

Malgré ce match nul acquis dans la douleur, Francis Lee fanfaronne : « Si Man City ne passe pas ce tour, je ferais cadeau au club d’une semaine de salaire. »

Sunderland est alors coté 100/1 chez les bookies pour la victoire finale à Wembley (250/1 au début de la saison). En principe, les Mancuniens ne devraient faire qu’une bouchée des Mackems au retour. Mais les Lads vont sortir le match de leur vie…

27 février 1973. Replay à Roker Park : SAFC l’emporte 3-1 devant 51 782 spectateurs [1].

Cette rencontre sera élue Plus grand match de Sunderland à Roker Park. Doublé de Billy Hughes, l’une des stars de l’équipe, et superbe but de Vic Halom (qui n’est pas sans rappeler la conclusion de cette action).

La Cup fever monte sur Wearside, sevré de gloire depuis les années 30 et son lot de trophées (titre national en 1936 et FA Cup en 1937, l’époque mythique de Raich Carter et Bobby Gurney, 355 buts à eux deux). Roker Park a vibré comme rarement ce soir-là. D’un rugissement profond, presque guttural.

La légende raconte qu’après un Sunderland-Tottenham de mars 1961, le grand Danny Blanchflower fit le tour du terrain en examinant chaque recoin, persuadé que des hauts-parleurs avaient été cachés pour amplifier le bruit du public.

Après la rencontre, le rodomont Francis Lee ravalera ses bravades :

« La ferveur du public était incroyable, on ne s’entendait pas penser sur le terrain. Je n’avais jamais rien connu de tel. »

Dans un article publié quelques jours après un célèbre quart de finale de FA cup à Roker Park devant 61 326 spectateurs en mars 1961 (1-1) ainsi que dans son autobiographie, le légendaire Danny Blanchflower (Tottenham) décrivit la même sensation :

« J’ai déjà été spectateur à Barcelone dans un stade plein et ai connu la foule de Saint James’ Park en délire, ainsi que Old Trafford et ses 60 000 spectateurs déchaînés cette saison. J’ai en tête beaucoup de scènes similaires dans ma carrière. Mais rien ne peut rivaliser avec l’intensité de la clameur entendue à Roker Park quand Sunderland égalisa à 1-1. […] Je réalisai alors ce que voulait dire ce journaliste qui parlait d’un « grondement à percer les tympans » en évoquant le Roker Roar. Je dois avouer que le Roar me terrifia ce jour-là ! »

La légende raconte même qu’après le match, Blanchflower fit le tour du terrain en examinant chaque recoin, persuadé que des hauts-parleurs avaient été dissimulés à des endroits stratégiques pour amplifier le bruit du public !

Trois ans plus tard, Sunderland affrontera Man United en quart de finale de FA Cup à Roker Park (match également légendaire dont nous reparlerons dans la troisième partie). A cette occasion, Denis Law fut tellement secoué par le Roar qu’il ne cessa d’en parler des années durant.

Quarts et demi-finale : presqu’une formalité

17 mars 1973. En quart, Sunderland élimine facilement Luton Town (D2) 2-0 devant 53 151 spectateurs. Buts de Dave Watson et Guthrie.

Un mot sur l’équipe de Sunderland (quasiment toujours la même composition cette saison-là où seule une grosse quinzaine de joueurs furent utilisés) : Jim Montgomery, Dick Malone, Ron Guthrie, Mike Horswill, Ritchie Pitt, Vic Halom, Billy Hughes, Bobby Kerr (capitaine), David Watson, Ian Porterfield, Dennis Tueart. Remplaçant (un seul autorisé) : Brian Chambers.

Les joueurs vedettes (ou qui le deviendront) de Sunderland sont alors [stats entre parenthèses = matchs / buts pour SAFC] :

– le gardien Jim Montgomery (dit Monty, 627 matchs pour SAFC de 1960 à 1977), 1 cape réserviste en équipe d’Angleterre. Remportera la Coupe d’Europe des clubs champions avec Nottingham Forest en 1980 (remplaçant)

– l’attaquant-défenseur central David Watson (1970-75 – 212 / 33, ci-dessus). D’abord avant-centre deux saisons avant d’être repositionné… arrière central (à 25 ans). Signera à Man City (1975-79) puis Southampton (1979-82) et portera le maillot des Trois Lions à 65 reprises (1974-82)

– l’ailier gauche Dennis Tueart (1966-74 – 208 / 56). Le seul Geordie – natif de Newcastle – de l’équipe partira ensuite à Man City où il décrochera six capes anglaises (1975-77)

– Billy Hughes, avant-centre / ailier (1964-77 – 307 / 81). Décrochera une cape écossaise. Voir « Que sont devenus les héros de 1973 ? » plus bas.

7 avril 1973, Demi-finale contre Arsenal à Hillsborough devant 55 000 personnes. Arsenal compte alors parmi les meilleurs clubs anglais depuis plusieurs saisons (4è en 1969, doublé championnat-FA Cup en 1971, 5è en 1972 et 2è en 1973) et vise une troisième finale de FA Cup consécutive. Là encore, on ne donne pas cher des chances des Rokerites. Mais ces derniers vont asphyxier des Gunners dépassés. Billy Hughes sortira un match d’anthologie et donnera la victoire aux Black Cats, 2-1 (clip).

Finale de rêve contre le grand Leeds United

5 mai 1973, Wembley, 100 000 spectateurs. Leeds, meilleure équipe anglaise depuis le milieu des années 1960, est archi favorite. Ses vedettes sont le teigneux petit rouquin Billy Bremner, Johnny Giles, Eddie Gray, Peter Lorimer et Norman « Bites Yer Legs » Hunter (= Norman « Tacle Assassin » Hunter ; avant il fauchait, aujourd’hui il est fauché, ici). Lorimer ne doute pas de la victoire des Whites. Avant le match, il déclare à la BBC que Leeds l’emportera facilement s’ils marquent tôt dans le match. Pour les médias, c’est également David contre Goliath. Brian Clough, consultant pour la télé [2], ne donne pas cher non plus des chances de son ex club (1961-64) : « Si Leeds se met à jouer, ça sera plié en 20 minutes ».

(1 £ le billet « debout », même en 1973, c’était donné)

Leeds se mettra bien à jouer mais Sunderland lui tiendra la dragée haute. Tout comme contre Man City et Arsenal, le milieu de terrain Black Cat, magistralement contrôlé par le rouquin Micky Horswill et le coriace Bobby « Little General » Kerr, va dominer les débats. A la 31è, une demi volée de Ian Porterfield donne l’avantage à Sunderland, 1-0 (clip, à 1’03). Les Whites ne reviendront pas.

Cette finale est restée universellement célèbre pour l’extraordinaire double parade du gardien de Sunderland sur deux tentatives à bout portant de Cherry et Lorimer (ici, à 2’12 et ici). L’arrêt de Monty sur le tir de Lorimer fut élu Greatest Ever FA Cup Save lors d’un sondage réalisé par E.on, le sponsor de la FA Cup de 2006 à 2011 (loin devant David Seaman, Arsenal v Sheffield United demi-finale 2003 et Pepe Reina, Liverpool-West Ham finale 2006 – Petr Cech contre Man United le 1/4/2013 pourrait bien venir intégrer le Top 3 de ce classement).
David Coleman, commentateur vedette de la BBC, était tellement persuadé que Lorimer allait marquer qu’il annonça but ! (ici à 3’27 …Cherry, superbe parade de Montgomery… et Lorimer égalise à 1-1… Non, incroyable ! »). L’exploit de Monty éclipse-t-il la fameuse parade de Gordon Banks sur une tête de Pelé ?

Au coup de sifflet final, le manager Bob Stokoe, bras en l’air, feutre trilby sur le chef, pantalon rouge et gabardine au vent court vers Monty et l’étreint longuement (ci-dessous). Cette course légendaire a été statufiée (devant le Stadium of Light, voir première partie).

En coupe d’Europe la saison suivante (seule campagne européenne de SAFC), Sunderland passera un tour contre les Hongrois de Vasas Budapest (3-0 sur les deux matchs) avant de tomber 3-2 face au Sporting Lisbonne [3].

Que sont devenus les héros de 1973 ?

[entre parenthèses, carrière et nombre de matchs / buts SAFC]

Jim Montgomery, gardien (1960-77 – 627, record du club), 69 ans. Employé comme Ambassadeur de Sunderland AFC après avoir longtemps été entraîneur des gardiens au club.

Dick Malone, latéral droit (1970-77 – 281 / 2 buts), 65 ans. L’Ecossais dirige une entreprise de transport routier à Sunderland.

Ron Guthrie, latéral gauche (1973-75 – 80 / 3), 69 ans. Chauffeur-livreur à Fenwick’s, un grand magasin de Newcastle.

Dave Watson, d’abord avant-centre deux saisons puis… arrière central (1970-75 – 212, 33 buts), 66 ans. Dirige Dave Watson International, société d’événementiel basée près de Nottingham (était ouvrier agricole avant de passer pro – et d’engranger 65 capes anglaises, de 1974 à 1982).

Richie Pitt, arrière central (1968-75 – 144 / 7), 62 ans. Carrière stoppée nette à 24 ans, grave blessure au genou. Entra dans l’enseignement et est toujours prof de maths dans un collège près de Sunderland.

Micky Horswill, ci-dessus, milieu (1971-74 – 91 / 5), 60 ans. Animateur à Star Radio, Newcastle.

Bobby Kerr, milieu et capitaine (1964-79 – 419 / 69), 65 ans. L’Écossais dirigea plusieurs pubs après sa carrière. Se rangea des optiques vers 2010 pour raison de santé.

Ian Porterfield, milieu et buteur de la finale (1967-77 – 256 / 19). Décédé d’un cancer en 2007, âgé de 61 ans. Managea une douzaine de clubs et sélections nationales après sa carrière.

Billy Hughes (le beau moustachu ci-dessous), avant-centre / ailier (1964-77 – 307 / 81), 64 ans. Sera capé une fois pour l’Ecosse. Employé dans un pub près de Nottingham.

Vic Halom, 64 ans, avant-centre / ailier (1973-76 – 134 / 42). Se lança dans la politique (sans succès) puis dans l’immobilier en Bulgarie où il réside toujours. Pige aussi comme scout Europe de l’Est pour Newcastle United [à mon avis, il s’est trompé de coin pour ça]

Dennis Tueart, ci-dessous, principalement ailier gauche (1966-74 – 208 / 56), 63 ans. Quelques années après ses huit ans à Man City, il devint membre du directoire Citizen. En fut éjecté (par email !) à l’arrivée du Thaïlandais Thaksin Shinawatra été 2007. Dirige une société d’organisation de conférences sur Manchester. Tueart fut le premier Anglais à effectuer une saison complète de NASL (USA) en 1978-79, aux New-York Cosmos où il succéda à Pelé. A l’intersaison 1978, Nottingham Forest le voulut mais Tueart choisit l’option  contrat lucratif. Et Forest remporta sa première Coupe d’Europe des clubs champions sans lui. Capé 6 fois par l’Angleterre (1975-77).

David Young, arrière central (1973-74 – 34, 1 but), 67 ans. Remplaçant non utilisé lors de la finale (un seul substitute autorisé à l’époque). Se reconvertit dans la gestion de centres sportifs. Vit dans le Kent.

Bob Stokoe, manager (1972-1976, puis six semaines en avril-mai 1987 comme intérimaire). Décédé en 2004 d’une pneumonie à l’âge de 73 ans.  Hormis cette FA Cup, celui que l’on surnommait le « Messie » fit monter Sunderland en D1 en 1976. A sa splendide statue devant le Stadium of Light (voir première partie).

Et qu’est devenu Roker Park ?

Un peu d’histoire d’abord. A son inauguration été 1898, Roker Park était le septième stade (au sens très large du terme) de Sunderland. Premier match contre Liverpool le 10 septembre 1898 devant 30 000 spectateurs (D1, victoire 1-0). La pelouse, spécialement importée d’Irlande, était d’une telle qualité qu’elle dura… 37 ans ! L’année suivante, Roker Park accueillit un mémorable Angleterre-Irlande : 13-2 ! (Roker Park à cette époque).

En 1929, le célèbre architecte de stade Archibald Leitch fit reconstruire la tribune principale, la Main Stand, portant la capacité du stade à plus de 60 000. L’Ecossais fera également ériger la Clock Stand sept ans plus tard. Durant la deuxième guerre mondiale, Roker Park fut endommagé, Sunderland et Newcastle étant particulièrement visés par la Luftwaffe (chantiers navals, industries lourdes, etc.).

Sunderland quitta Roker Park le 3 mai 1997, après 99 ans d’occupation. Malgré la victoire 3-0 sur Everton ce jour-là (dont un but de Chris Waddle), SAFC descendit en D2. Après le match d’adieu le 13 mai 1997 (victoire 1-0 sur Liverpool, comme en 1898), une cérémonie spéciale eut lieu au cours de laquelle le point central du terrain fut déterré par Charlie Hurley (voir première partie) et transporté au Stadium of Light à deux kilomètres de là.

le passé, Roker Park (photo prise en 1996)

1996. Au premier plan : le futur Stadium of Light. En arrière-plan, Roker Park.

Un lotissement de 130 maisons et appartements sortit de terre un an plus tard (photos). Un coin résidentiel très prisé : le constructeur reçut plus de 2 000 demandes pour « habiter à Roker Park ». Particularité de l’endroit : toutes les rues et impasses portent des noms liés à SAFC ou au football (dont un Passage du Tourniquet), photo ci-dessous. Ces noms furent choisis après une compétition organisée par le journal local. Dommage cependant qu’aucun héros de la finale 73 ou Sunderland legends ne fut sélectionné, un regret exprimé par nombre de supporters Black Cats (un supporter Magpie égaré et médisant trouverait l’endroit manquant d’authenticité : s’il y a bien une Promotion Close – Rue de la Montée – aucune Relegation Street n’a été inclue. Il pourrait bien s’en créer une dans un gros mois…).

Record d’affluence de Roker Park : 75 118, le 8 mars 1933 pour un replay de quart de finale FA Cup contre Derby County. Match resté aussi dans les annales pour des mouvements de foule qui firent deux morts et de nombreux blessés.

Une tragédie que nous évoquerons dans la prochaine partie au cours d’une interview avec une Sunderland legend des Sixties qui nous parlera également, entre autres sujets, de Brian Clough, de Man United, du salary cap, de diététique et de George Best qui eut les jetons de jouer à Roker Park…

Affaire à suivre donc.

Kevin Quigagne.

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[1] Si vous voulez améliorer votre anglais, je conseille vivement le compte-rendu de ce fabuleux match sur ce site de Sunderland : Sunderland-Man City (site tenu par Colin Randall, un supp Black Cat francophile et lecteur de Teenage Kicks – depuis hier)

[2] Brian Clough est alors manager de Derby County (depuis 1967) mais occupe également le terrain médiatique depuis la fin des Sixties (radio, TV, presse), au grand dam de son club (ses incessants coups de gueule et commentaires incendiaires exaspéraient le directoire). Peu après, le 15 octobre 1973, alors que les relations entre Clough et le président de Derby avaient atteint breaking point, Clough démissionnera du club, accompagné de son fidèle adjoint, Peter Taylor. Neuf mois plus tard, « Old Big ‘Ead » débarquera à Leeds United, sans Taylor. Ses 44 jours à la tête des Whites restent comme l’un des épisodes les plus extraordinaires du football anglais. Le livre The Damned Utd ainsi que l’excellent film éponyme sont vivement recommandés.

[3] Les Portugais se distinguèrent aussi hors du terrain : trois d’entre eux furent arrêtés pour vol de cassettes audio dans un magasin de Newcastle et envoyés en comparution immédiate dans un tribunal local (où ils écopèrent d’une amende de 30 £ chacun ; il aurait été fort intéressant de savoir quelles cassettes ils piquèrent mais cette information vitale n’apparaît nulle part, à mon grand regret – svp, pas de blagues déplacées sur l’immense Linda de Suza dans les commentaires, nous avons quelques lecteurs et trices lusitanien(ne)s auxquel(le)s nous tenons beaucoup).

17 commentaires

  1. roberto cabanastonvilla dit :

    je vais dire une chose dont je jure qu’elle est premier degré : cet article me donne envie de pleurer.

    Voir la tribune art déco de wembley
    le billet à 1 euro
    les compos 90% britanniques
    les joueurs qui restent 5,6 dix ans dans des clubs moyens (frankly my dear : ou est le mérite de ryan giggs?)
    « arsenal compte parmi les meilleurs clubs anglais depuis quelques saisons » (donc ça changeait)
    le témoignagne du mackem du billet précédent

  2. roberto cabanastonvilla dit :

    pour le double save de monty, la video proposée est un de ces horribles commentaires ESPN en boite, faits après coup. L’original ici : http://www.youtube.com/watch?v=PZmFoo4payA

  3. Kevin Quigagne dit :

    Comme tu es dur avec Arsenal Roberto…

    L’une des caractéristiques des années 60 et 70 fut la grande compétitivité du championnat : 8 clubs différents furent sacrés champion d’Angleterre dans les Sixties et 6 dans les Seventies (puis quasi hégémonie Liverpool de 1976 à 1990).

    1 £ le billet Debout (3-5 pour place assise) pour une finale à Wembley en 1973, ça fait effectivement rêver. La place dans les kop d’Anfield ou Chelsea (le « Shed ») était alors d’environ 50-60 pence (40-50 p à Sunderland), l’abonnement meilleur marché autour de 10-12 £.

  4. Kevin Quigagne dit :

    Tu a dû zapper un passage Roberto car j’ai mis 3 clips de cette double parade, dont celui que tu mets en lien.

    Tous sont entre la photo du billet de Wembley et celle de Monty & Stokoe ivres de bonheur (je devais interviewer Monty mais il était en Afrique du Sud – il voyage beaucoup et en tant qu’ambassadeur du club est souvent en déplacement – et ça n’a malheureusement pas pu se faire).
    Les 3 liens du clips sont en bleu dans mon texte :

    « ici, à 2′12 et ici » […] « ici à 3’27 »

    Le meilleur est le troisième (la double parade la plus célèbre du football anglais est à 3’37 – et non 3’27 comme indiqué par erreur dans le texte) :

    http://www.youtube.com/watch?v=WM5EJkciC68

  5. ALGDCM dit :

    C’est grand,
    merci

  6. Pablo dit :

    La vache,

    Toujours à fond la forme, Merci!

    ça doit être super classe de se dire « Richie Pitt est mon prof de math »

  7. Kevin Quigagne dit :

    Ah ça c’est sûr que si j’avais Richie Pitt comme prof de maths, moi je redouble ma 3è jusqu’à 35 ans… 8)

  8. roberto cabanastonvilla dit :

    autant pour moi, je me suis mal exprimé au sujet d’arsenal. Je voulais juste souligner le fait qu’un club au top l’était sur une courte période, 5-10, 15 ans maxi et que ça changeait. Je citais arsenal comme j’aurais pu citer Eton, Oxford ou Quimper.

  9. Kevin Quigagne dit :

    Oui car les budgets/revenus étaient similaires d’un club de D1 à l’autre, les effectifs comparables aussi (en taille), idem pour les investissements , les salaires offerts (après la fin du salary cap), etc.
    Tu pouvais vraiment faire la différence avec tes 15 ou 20 joueurs de base. Le fait que y’ait que 1 ou 2 remplacements aida aussi beaucoup les plus petits clubs à se hisser. En avoir 5 ou 7 sur le banc depuis quelques saisons a totalement changé la dynamique à ce niveau-là (je parle même pas des effectifs pro qui peuvent dépasser les 60 joueurs).
    Ce qui explique les Ipswich (sans moyens) champion d’Angleterre en 1962 (j’en reparlerai dans la 3è partie because Alf Ramsey) ou Derby County en 1972 & 75 ou Forest (78 + Europe bien sûr) ou Watford et Southampton (pas champions eux mais 2è, 1983 & 84) etc.

    Bref, jusqu’à l’ère PL, y’avait une certaine homogénéité, avec des exceptions évidemment, Liverpool par exemple de 1976 à 1990 (mais si on examine la liste des 5 premiers ces années-là, ça changeait sans arrêt).

  10. roberto cabanastonvilla dit :

    Kevin, ce que je ne comprend pas c’est que ce modèle-là était bien plus spectaculaire. Puisque les gens ne parlent que de fric, pourquoi ne pas avoir vendu ce modèle-là aux télés ? Une Premier League avec des Watford, WBA, Ipswich, qui s’élèvent et chutent, ça ne ferait pas plus d’audience ?

    (mais bon, l’avocat du diable me dit que ce n’est pas l’argent qui intéresse les dirigeants mais l’argent SANS risque. Et pour amener les gens à supporter ce spectacle, on va leur foutre une propagande incessante, à base de starisation infantilisante des joueurs, d’hymnes pompeux à l’américaine,cf champions league, de telle manière que les jeunes de Londres, Kinshasa, Pékin ou Dijon se balladent avec un maillot du big four (150 euros) sur le dos.

    Et ça marche…

  11. Kevin Quigagne dit :

    En préambule, je te mets ce lien (4 parties) qui explique tout et répond à tes interrogations :

    http://cahiersdufootball.net/blogs/teenage-kicks/2012/02/13/fevrier-1992-naissance-de-la-premier-league-13/

    Oui, ce modèle Football League était spectaculaire du point de vue du terrain et de la concurrence sportive mais il avait un défaut rédhibitoire pour les gros clubs : il ne leur rapportait pas grand chose. Et les protestations de quelques clubs dans les années 70 (vite étouffés par la toute-puissante Football League) se firent bien plus virulentes à l’orée des Eighties.

    N’oublions pas qu’on entrait dans l’ère Thatcher, la décennie de la dérégulation et du libéralisme effrénés, de l’argent décomplexé, des Yuppies, du « Greed is good », etc. Alors, tu penses, les beaux fondements égalitaires de la Football League qui imposait aux clubs (depuis 1888 !) le partage des revenus tout en les contrôlant d’une main de fer firent soudain terriblement ringards, archaïques. Et évidemment, ces principes voleront en éclat au cours des Eighties, et de ce chaos naîtra la Premier League en 1992.

    A partir du tout début des années 1980, les clubs :

    a) cherchèrent désespérement d’autres sources de revenus que la billetterie (le sponsoring, embryonnaire, ne rapportait rien, Liverpool ne touchait par exemple que 50 000 £ / saison de Hitachi ! J’ai même lu que certains clubs durent PAYER les sponsors les premières années, donc début Eighties). Ce qui les conduisit au point b)

    b) voulurent faire sécession avec la Football League pour créer leur propre championnat, de D1, indépendant des autres championnats de la Football League (championnat de D1 qui sera nommé PL 10 ans plus tard). 5 clubs se chargèrent de lancer la jacquerie (voir lien plus haut).
    Ces cinq-là persuadèrent les autres de les rejoindre, se mirent dans la poche ITV et Sky, infiltrèrent les commissions FL, attirèrent les businessmen, etc. et au final bouffèrent la Football League (avec l’aide en sous-main de la FA).

    Ça se passa comme cela. On entend (trop)souvent que Hillsborough fit naître la Premier League ou même (ces jours-ci), très bizarrement, que Thatcher influença beaucoup la création de la PL mais non, absolument pas, ce sont des une contre-vérités. Hillsborough ne fit qu’accélérer ce qui, en avril 1989, était un processus enclenché 10 ans auparavant et inarrêtable. Quant au rôle de Thatcher dans le football, ceux qui pensent vraiment que la Dame de Fer influença grand chose, je leur conseille de se replonger dans les bouquins d’histoire du foot anglais, ou même pas d’ailleurs, juste la lecture de quelques articles de la presse anglaise au hasard sur le Net ces jours-ci suffira. Même le Daily Telegraph, bien à droite, estime son « bilan football » très négatif, ici par exemple :

    http://www.telegraph.co.uk/sport/football/9980402/Margaret-Thatcher-scored-a-political-own-goal-with-her-attitude-to-football.html

    Son influence directe ou indirecte sur la création de la Premier League fut de toute manière quasi nulle.

    Si tu ne tiens pas te taper mon dossier « Naissance de la Premier League », la chose à retenir est que ce modèle Football League était trop égalitaire : l’argent de la TV (et même billetterie dans une certaine mesure) était équitablement distribué entre tous les clubs de Football League, donc 90 clubs dans les Eighties. Ce qui, avouons-le, était injuste. Rochdale ou Darlington en D4 touchaient autant de la Football League que Liverpool (concrétement, pas bézef de toute manière, quelques dizaines de millers de £ / saison mais les gros clubs voulurent mettre fin à tout ça et se dissocier des divisions inférieures). La Football League refusa de lâcher du lest, ou trop peu et trop tard, et le reste, on le connaît.

  12. Abe dit :

    encore, encore, encore!
    et avec les commentaires en plus c’est un régal!
    (merci roberto aussi au passage)

  13. roberto cabanastonvilla dit :

    NUFC-Sunderland : 0-3

    et bien malgré mon penchant, je dis bravo sunderland et c’est bien fait.

    6 britanniques d’un côté, 1 de l’autre.

  14. Kevin Quigagne dit :

    @ Abe. T’inquiète, ça vient, la 3è partie sera très sympa (interview d’un ancien joueur Black Cat de cette époque, il nous parlera de Brian Clough – avec lequel il joua à Sunderland -, Man United, le Dirty Leeds de l’époque, George Best qu’il marqua – il était défenseur – etc.)

  15. Kevin Quigagne dit :

    @ Roberto, tes Mags ont l’air bien nerveux, les affres de la descente peut-être…

    Cette photo est franchement hilarante :

    http://img829.imageshack.us/img829/4438/24892794.jpg

    Celles-ci sont tristes, on les aime bien nos cabines…

    https://twitter.com/Mackem_Helen/status/323432539698110464/photo/1

    http://sphotos-b.ak.fbcdn.net/hphotos-ak-prn1/564218_10151828950548496_889631583_n.jpg

    Gare de Newcastle fermée 2 heures, incidents entre hools Mags et police après le match, vandalisme, etc. Apparemment, incidents dans les trains aussi.

    Clips :

    http://tyneandwear.sky.com/news/article/63543/violent-disorder-by-newcastle-united-fans-in-city-centre-after

  16. Oloron dit :

    Tout ceci est passionant, merci. Il se dégage une telle force de ce monde ancien du football européen, ça me fascine et ça me fascine d’autant plus que c’est un monde qui a quasiment disapru (et qu’à titre personnel je n’ai pas connu du tout). Je viens du monde du rugby rural, sud-ouest, et les effluves de ma jeunesse et de mes années de joueur je les retrouve en lisant ce genre d’article sur le football. Je les retrouve parce que ce football-là, même devant 100,000 personnes, était finalement un football de clocher comme peut l’être un Oloron-Bagnères en Fédérale 2. Les joueurs qui finissent profs de maths, les spectateurs 100% du cru, les rivalités, la fidélité au club, l’état d’esprit,…

    Une remarque en lisant les commentaires et l’analyse de la création de la Premier League. Thatcher et les 80’s ont bon dos, ils n’ont été que des catalyseurs de quelque-chose qui dans l’esprit avait déjà pourri. Ca me fait toujours rigoler de voir le décalage, sur ce sujet comme sur d’autres sujets sociétaux, entre des 60’s rêvées et tellement authentiques, qui en même temps produisaient les causes qui allaient faire voler tout ça en éclat quelques années plus tard. L’ensemble du football britannique (pour moi merveilleux parce que tellement fort culturellement et identitairement) tenait précisément sur des principes dits « archaïques » et « réactionaires ». La FA et la FL étaient des institutions puissantes, conservatrices et arrogantes. Paradoxalement c’est ce pouvoir-là qui permettait à ce football dont nous sommes tous nostalgiques aujourd’hui d’exister. C’est en prétendant « moderniser », « horizontaliser » et « démocratiser » que l’argent s’est engouffré dans les brêches déjà ouvertes par le professionalisme. Car le ver dans le fruit du sport, c’est le professionalisme et seules ces institutions qui nous semblent d’un aure temps ont permis au football anglais authentique de perdurer aussi longtemps. Enfin il existe toujours ce football authentique, mais dans les divisions (très) inférieures.

    Pour info il existe un combat un peu similaire en ce moment dans le monde du rugby en Argentine. La Fédé est tenue par des anciens, genre aristocrates, qui sont les derniers au monde à maintenir leur sport amateur. Contre vents et marées, arrivant cependant à produire des joueurs exceptionnels qui s’exportent dans le monde entier.

    Enfin je parle d’institutions qui « nous semblent d’un autre temps », mais attention: en un clin d’oeil, tout cela peut être rétabli, le professionalisme banni. C’est une décision très facile à prendre d’un point de vue pratique, pusiqu’il ne s’agit que des règlements d’un jeu.

  17. Kevin Quigagne dit :

    Merci de ton commentaire Oloron, je viens tout juste de remarquer ton message fort intéressant (il devait être dans « En attente de modération » et un Bon Samaritain a dû le libérer).

    Oui, la Premier League est surtout née de la volonté de quelques clubs, pas grâce à Thatcher ou à cause d’Hillsborough comme il est encore trop souvent dit et écrit dans les médias francophones. Bien sûr, la création de la PL fut favorisée par le contexte de l’époque (pas seulement footballistique mais aussi sociétal, la décennie de l’argent roi, etc.).

    Oui, la FL et la FA étaient très puissants (hégémoniques même), c’est pour cela que ce modèle créé en 1888 demeura en place si longtemps, plus d’un siècle.

    Je raconte et développe tout ça dans une quadrilogie sortie en février 2012, au moment du 20è anniversaire de la création de la PL.

    http://cahiersdufootball.net/blogs/teenage-kicks/2012/02/13/fevrier-1992-naissance-de-la-premier-league-13/

    http://cahiersdufootball.net/blogs/teenage-kicks/2012/02/15/2021992-naissance-de-la-premier-league-23/

    http://cahiersdufootball.net/blogs/teenage-kicks/2012/02/17/2021992-naissance-de-la-premier-league-34/

    http://cahiersdufootball.net/blogs/teenage-kicks/2012/02/20/2021992-naissance-de-la-premier-league-44/

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