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Episode 49: Où quand on a Boyer, la caravane passe

11/12/2008 – 9:55

 

(Si vous n’avez pas lu les épisodes précédents, pour la seconde fois d’affilée, ce n’est pas catastrophique: vous pouvez prendre le train en marche maintenant… Mais ensuite méfiez-vous, nous serons bien moins permissifs.)

 

Par un beau jour de 1904, un Monsieur respectable, répondant au nom de Félix Boyer si l’on parlait assez fort (il était un peu sourd), et résidant à Saint-Germain-en-Laye, prit une décision sinon étrange du moins inhabituelle: il créa dans la forêt de sa localité, au lieu-dit « le Camp des Loges », un club omnisports appelé Stade Saint-Germain. Enfin, omnisports, c’était vite dit: ce qui intéressait surtout l’ami Félix, c’était la section football.

 

L’Histoire ne nous en dit pas des tonnes sur ce Monsieur, mais enfin, il y a de quoi s’interroger: pourquoi un honnête homme, sain de corps et d’esprit, qui n’avait jusque là présenté aucun symptôme de maladie mentale, s’est-il lancé dans cette aventure? Les sources les plus fiables nous indiquent qu’il était mû par un fort ressentiment, une volonté de s’opposer à quelque chose… Mais quoi donc? D’où venait cette rancoeur farouche? Passons ensemble en revue les hypothèses les plus plausibles.

Ecartons d’emblée la motivation purement sportive: non, Félix Boyer ne voulait pas juste créer un club capable de s’imposer dans le panorama du football parisien. D’ailleurs, il avait peu d’espoir de jouer rapidement les premiers rôles. C’est qu’à l’époque, les grands clubs ne manquaient pas, à Paris, avec en particulier deux géants qui s’affrontaient régulièrement pour la suprématie francilienne, voire nationale: les fourbes Britanniques du Standard Athletic Club et les bons gars bien de chez nous du Club français. Vouloir taquiner ces deux mastodontes aurait relevé du délire.

Alors quoi? Rendre la monnaie de leur pièce aux étudiants de Westphalie qui venaient de fonder Schalke 04, et ce en prévision du spectacle inoubliable donné lors de la Coupe de l’UEFA 2008? Non, bien sûr, ce n’était pas cela, d’autant qu’on ne rigolait pas avec la Teutonnie en cette époque de provinces perdues et de ligne bleue des Vosges.

D’aucuns, non sans arguments, ont avancé l’hypothèse politique. En 1897, le Red Star avait été créé, dans l’optique affichée de drainer les jeunes Franciliens vers le socialisme. Et, en 1904, Jean Jaurès venait de fonder L’Humanité (notre illustration). Se pourrait-il que le père Félix ait voulu s’opposer aux menées interlopes de la lie gauchisante?

 

Une mise en page pourrie, pas de photos, mais Jean Jaurès comme patron à la place de Michel Moulin: pas de doute, l’Huma de l’époque était bien tout l’inverse du 10Sport.

 

Eh bien non, le père Félix, il s’en foutait… Il n’en avait rien à secouer de la politique, plusieurs témoignages concordent pour nous l’affirmer.

Alors, la religion, peut-être? Depuis 1903, une commission parlementaire menée par le grand-père de Jimmy Briand s’attaquait à l’épineuse question de la séparation de l’Eglise et de l’Etat, entraînant un an plus tard la rupture des relations diplomatiques entre la France et le Vatican, ainsi que des affrontements croissants entre cléricaux et anti-cléricaux (notre illustration). Serait-il possible que Félix Boyer ait voulu créer son club pour rameuter des troupes vers l’un ou l’autre camp?

 

 

 

Cet Ultra catholique troublant l’ordre public et molestant un gendarme va écoper de trois ans et demi de prison, à l’indignation du camp clérical.

 

Eh bien non derechef, pas plus… Le Félix était un catholique mollasson, vaguement pratiquant, pas du tout militant, qui se moquait des biens de l’Eglise comme de sa première souris.

 

Mais grands dieux! Que reste-t-il? Pourquoi donc se mit-il en tête de créer le Stade Saint-Germain? Mais pour une raison toute simple, la meilleure qui puisse motiver un homme: pour emmerder son gendre, jeune cadre dynamique à la Société Générale, qu’il ne pouvait absolument pas encadrer – et ce d’autant plus que sa femme l’idolâtrait et que sa fille en était folle amoureuse. Or ce bellâtre imbus de lui-même avait créé en 1903, avec quelques collègues, le Club Athletic de la Société Générale, qui s’entraînait Porte de Saint-Cloud, à deux pas du récent Parc des Princes (notre illustration). Et qu’il n’avait pas fait mystère de son ambition, avec ce petit air arrogant qui le caractérisait: un jour, avec ses collègues, il jouerait sur cette pelouse.

 

« Ca, jamais », s’était dit Félix Boyer. Ce brave homme, qui en plus avait confié ses économies à la Banque de Paris et des Pays-Bas, nourrissait à la fois un mépris profond pour son gendre et une fascination pour ce que, en ce temps où les Sudistes n’avaient pas encore le leur, on appelait « le Stade vélodrome du Parc des Princes ». Il en avait suivi les travaux, il avait vu la structure colossale émerger de terre, et il fit le voeu solennel: « moi vivant, j’empêcherai de toutes mes forces mon crétin de gendre et ses banquiers prétentieux d’occuper indûment ce magnifique écrin ».

 

 

 

3200 places, des équipements ultra-modernes pouvant accueillir un public guindé: nul doute, le Parc des Princes est le stade de l’avenir (sur cette photo: le France – Suisse de 1905)

 

Et voilà. C’est comme ça que tout a commencé. L’origine du monde, ou presque. Sans Félix Boyer, pas de Susic, Raï ou Fabrice Fiorèse… Putain on l’a échappé belle.

 

Impossible de clore ce chapitre sur l’année 1904 sans évoquer un autre visionnaire, le peintre Franz van Stuck, qui nous a laissé de cette année-là ce tableau saisissant:

 

 

 

Gaby Heinze se débarrassant subtilement du marquage de Didier Drogba sur un corner dans le camp marseillais (détail).

  1. 3 625 réponses to “Episode 49: Où quand on a Boyer, la caravane passe”

  2. Yes! bravo pour vos commentaires artistiques!

    De le duc du bar le 11/12/2008

  3. C’est tellement véridifiant que j’en suis à me demander si ce n’est pas historique…

    (Sur la photo manifestatoires, « l’ultra catho » m’a plutôt l’air d’un sous-chef des cognes, vous savez, avec melon, pébroque -pas visible sur l’image- et chaussettes à clous.)

    De Didier_F le 11/12/2008

  4. Bon, très bien, rigolo toussa…bref, comme d’hab (par contre ça manque toujours de débats constructifs sur l’arbitrage (par ex: a votre avis, les arbitres sont-ils mauvais, incompétents ou malhonnêtes (plusieurs réponses possibles (je kif le multi-parenthésage imbriqué, mes confuses))), ou sur le niveau de la L1 mais bref).

    Ce que j’aimerai pour noël, c’est d’avoir un accès direct à l’intégralité de Paris Saint Graal. En effet, et sans vouloir critiquer le camarade webmaster des cahiers, faut avouer que ça rame un chouïa ce qui rend la navigation entre les 49 chapitres du roman aussi fluide que le jeu monégasque.

    De Bancabrelle&Dugachis le 12/12/2008

  5. C’est sympa d’évoquer l’arrière grand-oncle de Jean-Sébastien Jaurès.

    De Archie le 17/12/2008

Pas de commentaire à faire sur ce sujet, merci de contacter M. Martinon.