Ni buts ni soumises » La ruée vers l’or

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La ruée vers l’or

Comme les Jeux Olympiques sont l’occasion de voir des sports pour la première fois (depuis quatre ans), voici une petite présentation du tournoi olympique de football féminin de Rio pour pouvoir briller dans les dîners en ville.

La médaille d’or se dispute à 12 équipes et à la fin, ce sont les États-Unis qui gagnent. Malgré sa troisième place au classement mondial, la France aura besoin d’au moins un exploit pour accrocher une médaille.

Contrairement à ce qui se passe chez les garçons, la Fifa ne craint pas (encore) que les Jeux Olympiques fassent de la concurrence à sa Coupe du Monde chez les filles. Du coup, un an après le mondial, on a une séance de rattrapage avec le prestige olympique en plus et quelques différences qui changent un peu la donne sans altérer le niveau.

La principale différence entre les Jeux Olympiques et la Coupe du Monde est liée à la limitation voulue par le CIO du nombre d’athlètes1et de la durée limitée de la compétition2. On passe donc de 24 équipes de 23 joueuses à 12 équipes de 18 joueuses. Cette réduction aboutit à un resserrement du niveau et surtout à une compétition très dense et cadencée avec un match tous les trois jours à effectif restreint.

Du coup, le tournoi olympique nécessite sans doute des qualités légèrement différentes du mondial. Le réservoir de joueuses d’un pays est moins sollicité avec une liste limitée à 18 mais celle qui sont présentes doivent avoir la capacité d’enchaîner presque autant de matchs en deux fois moins de temps.

Les Américaines sont championnes olympiques en titre.

Les Américaines sont championnes olympiques en titre.

Cela explique peut-être en partie que si l’Allemagne fait quasiment jeu égal avec les États-Unis dans la compétition Fifa, elle n’a jamais réussi à briser l’hégémonie américaine pour la médaille d’or olympique y compris pendant les années 2000 où elles étaient invincibles dans la première.

On trouvera sans doute aussi d’autres explications comme un fond culturel qui fait que le football européen accorde à la suite des garçons moins de prestige à l’olympisme, ou comme un simple caprice du hasard.

Mais depuis la création du tournoi olympique à Atlanta en 1996, l’équipe des États-Unis a toujours remporté le titre sauf en 2000 à Sydney où un but de Dagny Mellgren en prolongation a permis à la Norvège de s’emparer de la médaille d’or, les Américaines devant se contenter de l’argent.

Douze pour trois médailles

Le format de cette compétition à douze est à peu près le même que celui de l’Euro. Les équipes sont réparties dans trois poules de 4. Les deux premiers de chaque poules sont qualifiés pour les quarts de finales, ainsi que les deux meilleurs troisièmes. Quarts de finales, demi-finales et finales (pour l’or et le bronze) sont entièrement définies par le tableau.

Les seules différences entre les Jeux Olympiques et l’Euro3 sont les différences habituelles entre les tournois organisés par la Fifa et ceux organisés par l’UEFA. À Rio, la différence de but générale et le nombre de buts marqués dans le groupe interviennent avant la différence de buts particulière dans les critères pour départager les équipes qui ont le même nombre de points. Et pour classer les troisièmes, la différence de buts et le nombre de buts marqués interviennent avant le tirage au sort4

La formule n’est pas idéale mais à défaut d’un plateau à 16, elle permet une vraie compétition mondiale alors qu’elle serait vraiment très serrée à 8.

Rio mais aussi Belo Horizonte et São Paulo

Comme d’habitude, les tournois de football ne se cantonnent pas dans la ville qui accueil les Jeux. Seul le groupe du Brésil aura lieu principalement à Rio. Les autres seront à 350 km environ à São Paulo et Belo Horizonte. Les troisièmes matchs de poules qui doivent se dérouler en même temps auront même lieu encore plus loin à Salvador de Bahia, Brasilia et même à Manaus qui est à près de 3000 km de Rio. Les tournois masculins et féminins se dérouleront en alternance dans les mêmes stades.

Ce n’est qu’à partir d’une des demi-finale que la compétition reviendra à Rio. Seule la finale aura lieu au mythique stade Maracanã, le reste des matchs à Rio se déroulant au stade Nilton-Santos, antre du club de Botafogo5.

Ainsi en finissant deuxième de sa poule la France pourrait aller décrocher une médaille de bronze (à São Paulo) après une demi-finale à Belo Horizonte sans avoir mis les pieds à Rio. Déjà en 2012, la campagne des Bleues avait eu lieu essentiellement à Glasgow avec un intermède à Newcastle pour le troisième match de poule, ne passant à Wembley que pour la demi-finale avant de finir à Coventry.

Les forces en présence

En dehors des équipes africaines, le niveau est très relevé avec cinq équipes au dessus des 2000 points au classement Fifa. La plupart des continents envoient leurs meilleurs représentants. En Europe, l’Angleterre est absente faute d’avoir pu refaire une équipe de Grande-Bretagne (sinon elle aurait d’ailleurs été qualifiée grâce à sa troisième place au mondial canadien). En Asie, le Japon a explosé lors du tournoi qualificatif et la Chine a dépassé la Corée du Nord qui la devance légèrement. L’Océanie et les Amériques respectent à la lettre le classement.

Seule l’Afrique fait donc exception avec la présence de deux représentants qui ne sont pas les mieux classés. Et si l’Afrique du Sud avait était déjà présent il y a quatre ans à Londres, elle n’est accompagnée ni par l’ancienne puissance hégémonique du Nigeria, ni par le Cameroun qui avait impressionné l’an dernier, ni même par le Ghana, la Guinée Équatoriale ou la Côte d’Ivoire mais par le Zimbabwe, 13e nation africaine.

Bien sûr, l’exemple camerounais a montré que la fiabilité du classement Fifa était moins grande pour les pays qui ont mois d’occasion de jouer des matchs internationaux contre des équipes de haut de classement et que les équipes africaines sont sans doute sous évaluées. Toutefois la présence de l’une d’elle à une place qualificative serait une vraie surprise.

Pia Sundhage a remporté les deux dernières médailles d'or avec les États-Unis et revient à la tête de la Suède.

Pia Sundhage a remporté les deux dernières médailles d'or avec les États-Unis et revient à la tête de la Suède.

Les premières places de l’Allemagne et des États-Unis dans les groupes F et G6 sont très probables. Dans le groupe E, cela devrait être plus serré entre la Suède et le Brésil. Toutefois ces deux dernières devraient se qualifier, tout comme la France et l’Australie dans les deux autres groupes.

La Chine, le Canada et la Nouvelle-Zélande n’ont en théorie pas beaucoup de crainte à avoir pour leur troisième place mais elle ne permettra pas à tout le monde de passer le premier tour. Sur le papier, c’est la Nouvelle-Zélande qui est en mauvaise position. Elle est la moins forte des trois et elle a en face d’elle la plus forte tête de série, le plus fort deuxième et le plus fort quatrième. Bref la prévision à partir du classement Fifa est sans ambiguïté : ce sont la Chine et le Canada qui iront en quarts de finales.

Tableau prospectif suivant le classement Fifa
Quarts de finales Demi-finales Finale
Allemagne 2115 Allemagne 2115 Allemagne 2115
France 2064
Brésil 1982 Australie 2011
Australie 2011
Suède 2002 Suède 2002 États-Unis 2168
Canada 1938
États-Unis 2168 États-Unis 2168
Chine 1914

Bien entendu, ces prévisions seront battues en brèche par la réalité du terrain et il y aura des surprises. Mais si on pouvait prévoir les surprises, ça n’en serait plus.

Des équipes et des joueuses

États-Unis

Quatre médailles d’or et une d’argent en cinq éditions. Championnes du monde en titre. Premières au classement Fifa. Les Américaines sont bien évidemment très largement favorites de la compétition.

La star : Alex Morgan

La joueuse à suivre : Mallory Pugh

La cote :

Allemagne

C’est la dernière compétition de la sélectionneuse Silvia Neid qui emportera sans doute avec elle une partie de ses cadres comme Saskia Bartusiak ou Anja Mittag. Mais la relève est déjà là et l’Allemagne répond toujours présente. Sauf aux Jeux Olympiques.

La star : Dzsenifer Marozsan

La joueuse à suivre : Melanie Leupolz

Surnom : Die Mannschaft

La cote :

France

Même s’il y a un Euro dans moins d’un an, les Jeux Olympiques sont peut-être la dernière occasion de remporter enfin quelque chose en sélection pour une génération sur le pont depuis plus de dix ans. L’avantage c’est qu’il y a trois médailles, chacune étant « quelque chose ».

La star : Amandine Henry

La joueuse à suivre : Griedge Mbock Bathy

Surnom : Les Bleues

La cote :

Brésil

Le Brésil n’est plus l’équipe qui bousculait la hiérarchie et atteignait les finales mondiales et olympiques entre 2004 et 2008. Malgré sa 8e place mondiale, qui est le plus mauvais classement de son histoire, elle va tenter de profiter du fait de jouer à domicile pour offrir enfin à Marta, la meilleure joueuse de l’histoire, un titre avec la sélection.

La star : Marta

La joueuse à suivre : Andressa

Surnom : les Canarinhas

La cote :

Suède

Pas complètement convaincante à domicile en 2013, pas du tout au Canada l’an dernier, la Suède de Pia Sundhage (double tenante du titre avec l’équipe américaine) a su se débarrasser de la Norvège, de la Suisse et des Pays-Bas au printemps pour se donner le droit de venir au Brésil.

La Star : Lotta Schelin

La joueuse à suivre : Stina Blackstenius

La cote :

Australie

Jurisprudence « Japon 2011 » oblige, il faut se méfier de l’équipe d’Australie, devenue 5e mondiale et meilleure équipe de la confédération asiatique.

La star : Lisa De Vanna

La joueuse à suivre : Steph Catley

Surnom : les Matildas

La cote :

Canada

Grâce aux États-Unis, la zone Concacaf dispose toujours d’au moins deux places pour les compétitions internationales, ce qui profite au Canada. Derrière la star Christine Sinclair, le talent est en général parcimonieux mais l’équipe est en général solide pour profiter de circonstances favorables. Par exemple pour obtenir le bronze il y a quatre ans.

La star : Christine Sinclair

La joueuse à suivre : Kadeisha Buchanan

La cote :

Chine

La Chine se réveille sous les ordres de Bruni Bini. Mais elle était déjà quart de finaliste du mondial l’an dernier et a profité de l’explosion du Japon lors du tournoi de qualification pour se faire une place. Elle profitera du groupe le plus faible pour s’assurer au moins une place parmi les deux meilleurs troisièmes. Et en cas de meilleure performance, elle éviterait les États-Unis en quarts de finales pour aller s’offrir un quart de finale difficile mais jouable contre le Brésil ou la Suède.

La star : Gu Ya-sha

La joueuse à suivre : Tan Ruyin

Surnom : les Roses d’acier

La cote :

Nouvelle-Zélande

La Nouvelle-Zélande profite du départ de l’Australie dans la zone asiatique pour avoir sa place réservée à toutes les compétitions7. Le profil est un peu celui du Canada : une équipe sans génie mais solide. Mais Amber Hearn n’est pas Christine Sinclair.

La Star : Ali Riley

La joueuse à suivre : Katie Bowen

Surnom : les Football Ferns

La cote :

Afrique du Sud

Déjà présente en 2012 et capable d’un nul contre le Japon, l’Afrique du Sud n’est pas la plus grosse surprise du plateau mais n’était quand même pas attendue. Il est difficile de penser qu’elle peut espérer grand chose mais l’exemple camerounais pourrait l’inspirer.

La star : Janine van Wyk

La joueuse à suivre : Linda Motlhalo

Surnom : les Banyana Banyana

La cote :

Zimbabwe

C’est évidemment la très grosse surprise du plateau. Le Zimbabwe n’est que la 13e nation africaine mais s’est qualifiée en éliminant deux des participantes à la dernière Coupe du Monde, la Côte d’Ivoire (sur tapis vert) et le Cameroun (sur la pelouse). Il est à craindre que les Zimbabwéennes ne pourront faire mieux que d’essayer de limiter la casse lors de trois défaites. D’autant que le système des meilleurs troisièmes va inciter les équipes à tenter de marquer le plus possible contre les adversaires supposés plus faibles.

La star : Rudo Neshamba

La joueuse à suivre : Mavis Chirandu

La cote :

Pourquoi une médaille des Bleues serait un exploit

La France est actuellement troisième au classement Fifa. La logique voudrait donc qu’en battant les adversaires supposés plus faibles et en perdant contre les plus forts, elle obtienne une médaille de bronze. Mais ce serait sans compter sur les facéties du tirage au sort, voire du tirage qui n’est pas au sort. Placée dans le groupe des États-Unis, les Bleues ont une alternative simple : soit battre les Américaines (mieux classées), soit finir deuxième et affronter l’Allemagne (mieux classée) en quart de finale. Bref sauf surprise8, la route des demi-finales (et donc des médailles) est gardée par les deux seules équipes mieux classées.

Bien sûr, le plus simple serait de battre tout le monde mais c’est difficile même pour la meilleure nation au monde (que n’est pas – encore – la France) surtout dans une compétition aussi dense. Un parcours comme celui proposé à la Suède qui peut arriver en demi-finale en battant la Chine, le Brésil et le Canada. Ou encore sans battre le Brésil, en venant à bout de la Chine et de l’Australie. Il s’agit certes d’adversaire valeureux mais sans commune mesure avec les États-Unis et l’Allemagne. Et ceux qui expliqueront qu’à vaincre sans péril on triomphe sans gloire sont en général les mêmes que ceux qui trouvent qu’un quart de finale contre l’Allemagne est équivalent à un autre contre le Danemark.

Louisa Necib visera une médaille olympique pour conclure sa carrière.

Louisa Necib visera une médaille olympique pour conclure sa carrière.



4 commentaires pour “La ruée vers l’or”

  1. Bon article comme d’habitude. Ça va en effet être très compliqué pour les bleues de voir les 1/2 (sauf surprise du genre l’Allemagne perd contre le Canada). Il est très important déjà de battre la Colombie et après on verra ce que ça donne face aux Américaines. Mais 18 joueuses pour une compétition de 16 jours c’est très chaud.

    Pour la génération Nécib-Bussaglia-Abily…soit ça passe, soit casse (et c’est la retraite).

  2. Je ne dis pas ça parce qu’elles ont gagné hier mais le Canada mériterait une petite médaille de plus dans votre barème je trouve !

  3. Ça fait quand même deux fois qu’on se fait enfler sur les tirages au sort.
    Du coup il va falloir tout faire pour battre les USA car ça ouvre les portes de la finale et donc de la médaille.

  4. Il manque un commentaire sur la Colombie ! Sinon, toujours aussi sympa et complet à lire ! Merci

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