Ni buts ni soumises » La sensation camerounaise

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La sensation camerounaise

Toutes les équipes ont joué un match dans la Coupe du monde 2015. Les favoris l’ont à peu près tous emporté sans montrer grand chose et la hiérarchie a globalement été respectée. La sensation est venue d’Afrique, du Nigeria qui a tenu en échec la Suède et surtout du Cameroun qui a atomisé l’Équateur avec la manière.

Comme d’habitude dans les compétitions féminines les surprises sont rares, surtout dans le contexte d’un plateau élargi : non seulement les équipes nouvelles venues sont en général moins fortes que les anciennes (puisqu’elles ont eu besoin de l’élargissement pour se qualifier), mais elles n’ont pas non plus l’expérience de la gestion de ce genre d’événement.

Toutes les têtes de séries ont remporté leur match et on se dit que la Fifa a eu du flair en plaçant le Brésil dans le premier chapeau plutôt que la Suède puisque l’équipe scandinave n’a pour sa part pas réussi à venir à bout du Nigeria.

Pour autant, seule l’Allemagne a convaincu face à une équipe de Côte d’Ivoire écrasé par l’événement et qui a explosé autant physiquement que techniquement. Elle peut au moins se consoler d’avoir évité de dépasser la plus lourde défaite qui reste l’apanage de l’Argentine en 2007, déjà contre l’Allemagne.

Le Canada, le Japon et la France ont fait le service minimum face à des adversaires d’un autre calibre, et les États-Unis et le Brésil n’ont fait mieux qu’au tableau d’affichage. Bref, tout le monde a bien intégré que la compétition serait longue et qu’il fallait laisser à d’autres le soin d’être en forme dès le début.

L’Europe constrastée

Les outsiders européens ont connu des fortunes diverses. Si la Norvège a effacé sans trembler l’obstacle thaïlandais, la Suède a donc buté sur le Nigeria. Pourtant les Suédoises menaient 2-0 dès la demi-heure de jeu et encore 3-2 à quelques minutes de la fin. Mais le jeu était proche du néant et seul le troisième but venait d’une action construite, les deux autres étant des coups de pieds arrêtés. Le choix de Pia Sundhage de faire jouer un jeu de possession à son équipe1 semble avoir du mal à fonctionner depuis deux ans. Caroline Seger est une très bonne relayeuse mais si elle doit être meneuse de jeu, cela limite beaucoup les possibilités de son équipe. Du coup, les flèches Lotta Schelin, Sofia Jakobsson et Kosovare Asllani2 ne sont ni à la conclusion de belles actions collectives, ni de belles passes en profondeur.

Les débutantes ont connu des fortunes diverses. Les Pays-Bas ont gagné « comme un favori » contre la Nouvelle-Zélande, mais la densité du groupe les obligera sans doute à faire encore au moins un résultat pour sortir. La Suisse a perdu contre le Japon, sans être outrageusement dominé et peut-espérer profiter de la faiblesse de l’Équateur.

La déception est pour l’Espagne, annonce parfois comme un outsider de la compétition et qui n’a pas réussi à venir à bout du Costa Rica. On peut là plaider le manque d’expérience tant les Espagnoles ont eu des occasions qu’elles n’ont pas su concrétiser.

Sans faute pour la Concacaf

Mais le Costa Rica n’a pas non plus réalisé un hold-up et il vaut certainement mieux que son classement Fifa. Une victoire contre la Corée du Sud samedi l’enverrait en huitièmes de finales. Avec le nul du Mexique et les victoires du Canada et des États-Unis, la zone d’Amérique centrale et du nord est invaincue et justifie son important contingent.

Ce qui n’est pas vraiment le cas de l’Asie où seul le Japon a réussi à s’imposer. L’autre équipe forte de la confédération (mais pas du continent), l’Australie n’a pas vraiment à rougir de sa prestation face aux États-Unis. C’est assez habituel de ressortir d’un match contre les Américaines en ayant le sentiment qu’il y avait la place mais en ayant été battu. Le résultat de la Suède peut donner des idées au Australiennes pour viser la deuxième place.

La Chine a présenté un bloc bien organisé et n’a cédé que sur un pénalty en fin de match mais c’est à peu près tout, alors que la Thaïlande et la Corée du Sud ont été assez nettement surclassées par la Norvège et le Brésil.

Ce dernier reste assez seul dans sa zone. La Colombie confirme sa place de dauphine sud-américaine mais le nul contre le Mexique risque d’empêcher les deux équipes de viser une place de meilleurs troisièmes sauf à réaliser un improbable exploit contre la France ou l’Angleterre.

Et l’Équateur a complètement explosé face au Cameroun, ce qui lui laisse assez peu de perspectives d’avenir dans la compétition avant d’affronter la Suisse puis le Japon.

L’Afrique en force

Toutefois, la performance camerounaise ne doit pas être mesurée qu’à l’aune de la faiblesse équatorienne. Après l’entrée en lice de la Côte d’Ivoire, on ne donnait pas cher des chances des équipes africaines. Puis le Nigeria a tenu tête à la Suède dans le sillage d’Asisat Oshoala (meilleure joueuse de la Coupe du monde U20 l’an dernier). Mais c’était le Nigeria, habitué de la compétition et qui est toujours solide à défaut de réaliser de grandes performances.

Classé cinq places derrière son adversaire, le Cameroun ne partait pas favori mais le match s’annonçait serré. Sur le papier, la force des Camerounaises était plutôt dans leur défense. D’ailleurs elle n’ont pas encaissé de but. Mais c’est l’attaque menée par une vieille connaissance du championnat de France Madeleine Ngono Mani (passée par Saint-Étienne, Soyaux et Guingamp et actuellement à Claix en D2) et surtout par Gaëlle Enganamouit qui a impressionné. Gabrielle Onguene Aboudi a été intenable côté gauche et les joueuses équatoriennes n’ont souvent eu d’autre choix que de faire des fautes qui leur ont valu de concéder trois pénalties et une expulsion. Il sera intéressant de voir si les Camerounaises pourront rééditer ce genre de prestation face à un adversaire plus huppé ou si ce n’était qu’un feu de paille. Le troisième match contre la Suisse sera particulièrement intéressant, sauf bien sûr si dès le prochain contre le Japon, les Camerounaises créent la surprise. Elles sont déjà quasiment qualifiées avec trois points et une différence de buts qui devrait leur assurer une place parmi les quatre meilleure troisièmes au minimum.

Contrairement aux Ivoiriennes, les Camerounaises évoluent majoritairement dans des championnats étrangers. Trois titulaires de cette première journée seulement jouent au Cameroun quand huit Ivoiriennes jouent en Côte d’Ivoire. Et la liste Camerounaise compte 12 joueuses qui évoluent à l’étranger contre 4 seulement pour la liste Ivoirienne. Le championnat français est d’ailleurs le principal fournisseur de l’équipe du Cameroun avec quatre joueuses, Yvonne Leuko d’Arras, Madeleine Ngono Mani de Claix, Jeannette Yango Ngock d’Yzeure et Aurelle Awona à Soyaux, sans compter Francine Zouga qui a commencé la saison à Montpellier mais l’a finie à Chenois en Suisse.

Il est envisageable que cette diaspora permette à la sélection camerounaise d’avoir une expérience supérieure à son homologue ivoirienne. Ou alors il faut simplement considérer qu’il est plus facile de commencer contre l’Équateur que contre l’Allemagne.

Car bien sûr, tous ces commentaires définitifs sur les niveaux et performances seront balayés dès le deuxième match. Puis par le troisième et les équipes qui seront finalement les satisfactions de la compétition ne seront pas celles qui ont fait la meilleure impression le premier jour.



Un commentaire pour “La sensation camerounaise”

  1. Merci pour le bilan, et très bonne conclusion.
    Même si les équipes favorites s’en sont sorties, ça m’a fait plaisir de voir jouer l’Australie et de me dire qu’on est pas à l’abri d’une surprise.

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