Ni buts ni soumises » À la saison prochaine

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À la saison prochaine

Malgré une conjoncture favorable et la qualification en Ligue des Championnes, le PSG n’a pas encore pris le pouvoir. Lyon a déjà titre gagné avant la fin du mois de février.

Le PSG pourra se consacrer pleinement à la Ligue des Championnes avant de réfléchir à ce qu’il doit changer pour prendre le pouvoir en France. Mais la situation pourrait ne plus être aussi favorable.

La finale du championnat a eu lieu le 21 février, soit trois mois avant la fin de la saison. C’est le problème d’un championnat aussi déséquilibré où deux équipes remportent tous leurs matchs. Il ne reste plus que les confrontations directes pour les départager et si l’une les remporte toutes les deux, ça ne laisse plus beaucoup de suspense.

Comme le calendrier d’après la trêve ressemble à un gruyère1, il ne reste de toute façon que quatre journées, deux en mars, deux en mai. Et le PSG en a déjà joué la moitié2.

Au risque de déflorer la fin de l’intrigue, l’OL va donc remporter son neuvième titre consécutif. Il lui suffit pour cela de remporter deux des ses quatre derniers matchs (ou un et trois nuls). Avec un bilan en championnat d’une seule défaite en 5 ans (et 4 en 9 ans) et des adversaires dont seul Guingamp semble avoir la capacité de le gêner, on voit mal commencer le titre pourrait ne pas être validé fin mars lors du déplacement à Rodez.

Dans le meilleur des cas pour les Lyonnaises, elles pourraient ensuite avoir à jouer la finale de la Coupe de France trois jours plus tard.

Les nombreuses internationales de l’OL pourront donc à coup sûr avoir l’esprit entièrement tourné vers la Coupe du monde dès le 1er avril.

Celles du PSG devront vraisemblablement garder la tête à la Ligue des Championnes plus longtemps. Elles devraient normalement venir à bout de Glasgow City, ce qui les emmènerait vers un mois d’avril consacré à une demi-finale contre Wolfsbourg ou Rosengard.

Sur ce que l’on a vu à Charléty, on imagine mal les Parisiennes pouvoir inquiéter les doubles championnes d’Allemagne ou les championnes de Suède, mais elles peuvent se reprendre, ce qui pourrait les occuper jusqu’à la mi mai.

La métamorphose depuis les confrontations de novembre

Les matchs du mois de novembre avaient été nettement plus serrés, donnant l’impression que l’écart s’était resserré entre les deux équipes. Le blocage psychologique des Parisiennes face aux Lyonnaises semblait évanoui et le bloc défensif bâti par Farid Benstiti avait beaucoup perturbé le jeu de l’OL. Du coup les trois confrontations s’étaient jouées sur des coups de dés avec un bilan finalement partagé (un nul et une victoire partout, trois buts marqués et trois buts encaissés).

Le match d’hier a été très différent par deux aspects. En premier lieu, l’OL a nettement mieux su alterner entre la conservation et le jeu direct. En novembre, Sarah Bouhaddi avait dû être la joueuse lyonnaise qui avait reçu le plus de passes.

Autre différence notable du côté lyonnais, la présence de Camille Abily a permis de fluidifier et d’accélérer le jeu, sans compter qu’elle a comme souvent été décisive. L’absence de Louisa Necib n’a pas été pénalisante, presque au contraire dans un match où le pressing était important et où il était plus utile de jouer en une touche de balle. Et même sur coup-franc, Élise Bussaglia a su la faire oublier.

C’est sans doute une évolution dans le jeu de l’équipe de Gérard Prêcheur. Contre la plupart des adversaires, Lyon joue à son rythme et fait tourner la balle. Les décalages et les talents individuels permettent d’aller au bout des offensives, et assez vite l’équipe adverse lâche physiquement à force de courir après un insaisissable ballon. Mais cette méthode ne fonctionne pas contre une équipe comme le PSG qui a les moyens physique de tenir tout le match et qui est capable d’exercer un pressing important.

Les absences du PSG

Si Lyon a corrigé le tir par rapport aux précédentes confrontations, le PSG n’a pas su ou pas pu continuer sur sa lancée. L’absence de Shirley Cruz et de Lindsey Horan a nuit à la capacité à orienter le jeu et a empêché d’avoir devant un point d’appui que ne constitue pas Kosovare Asllani et à peine plus Marie-Laure Delie. Les blessures Laura Georges et Josephine Henning ont affaibli ce qui est une des forces du PSG, sa charnière centrale qui est l’une des meilleures d’Europe. Les deux joueuses étaient présentes mais diminuées. L’Allemande a même dû sortir dès la mi-temps.

Avec la blessure de Katarzyna Kiedrzynek3, cela ne laissait plus à Farid Benstiti qu’un seul changement tactique, qu’il a utilisé dès la mi-temps en faisant sortir Sabrina Delannoy pour la remplacer par Marie-Laure Delie, entraînant le replacement de Jessica Houara et de Kosovare Asllani.

Shirley Cruz

Shirley Cruz

Mais la présence au coup d’envoi de la capitaine historique du PSG à un poste qui se confirme ne pas être le sien – alors que la titulaire des Bleues joue justement au PSG – était au mieux un pari qui ne s’est pas avéré gagnant. Sans doute destiné à trouver une solution pour compenser l’absence de Shirley Cruz, il avait l’inconvénient de déplacer deux des joueuses en forme du PSG à des postes qui ne sont pas ou plus les leurs, Kenza Dali au milieu et Jessica Houara devant. Cela peut fonctionner contre des équipes de bas de tableau mais c’est très risqué contre Lyon.

C’est une constatation qui se répète : le PSG est en difficulté pour faire le jeu face à une équipe qui lui résiste physiquement. Contre Lyon, cela n’a en général pas été très grave puisque la stratégie était d’attendre et de contrer. Mais cette fois ci, il fallait une victoire aux Parisiennes, si possible par deux buts d’écart, ce qui aurait dû les obliger à faire le jeu. La même chose avait été constatée lors de l’opposition face à Twente.

L’argument de l’état de la pelouse a été avancé par les deux équipes pour se dédouaner à l’avance d’éventuelles difficultés techniques. Toutefois, comme lors de la dantesque demi-finale de Ligue des Championnes où l’OL avait battu Potsdam 5-1, les Lyonnaises n’ont pas paru perturbées par les conditions. Ce n’est sans doute pas illogique. En premier lieu, un mauvais terrain ne favorise pas le jeu technique mais une bonne technique permet de passer outre l’état du terrain. Ensuite, un terrain difficile favorise souvent les joueuses les plus puissantes. Et contrairement aux idées reçues, l’OL dispose d’une puissance physique assez incomparable en Europe. Les conditions étaient donc sans doute plutôt à l’avantage des coéquipières de Wendie Renard.

Le PSG doit réfléchir à son avenir

La saison des deux équipes est donc quasiment terminée4, au moins côté D1. Les esprits commencent à se projeter au delà de la Coupe du monde sur la saison prochaine.

À moins d’une victoire en Ligue des Championnes, la situation de Farid Benstiti semble inconfortable. Le problème n’est pas tant l’absence de titre que l’impression que le PSG est au même point qu’il y a trois ans5. L’argument souvent avancé que l’OL a un temps d’avance grâce au fait que ses joueuses sont ensemble depuis longtemps ne tient pas. Pas face à une équipe dont l’équipe type a été renouvelée de moitié et qui a changé entre temps d’entraîneur et de principes de jeu. Et surtout pas au bout de trois saisons.

L’Olympique Lyonnais de Farid Benstiti avait mis trois saisons à être champion, mais les deux premières avaient surtout servi à comprendre que la solution ne passerait pas par du recrutement tous azimuts à l’étranger.

Farid Benstiti

Farid Benstiti

L’impression de temps perdu par le PSG depuis trois ans est aussi lié au fait qu’il s’agissait finalement d’un temps faible de l’OL. Depuis quelques années, le club de Jean-Michel Aulas est en période d’économie. La politique dispendieuse menée chez les garçons a obligé à couper sévèrement dans les dépenses, ce qui a aussi eu des répercussions chez les filles6.

Là où il y avait 21 joueuses professionnelles expérimentées en 2012, elles ne sont plus que 15 cette saison. Le pari a été de remplacer au plus juste les titulaires (avec un certain succès pour trouver Saki Kumagai et Ada Hegerberg7) et de faire confiance au centre de formation pour faire le nombre. Ou plus exactement cette saison, de compter sur la disponibilité de l’ensemble de l’effectif8 et donner quelques miettes aux jeunes.

Mais l’entrée prochaine dans le nouveau stade et les départs ces dernières saisons de la plupart des plus gros salaires (masculins) du club devraient redonner de la marge à l’équipe féminine pour regarnir un peu son effectif.

Il ne sera pas forcément plus facile de dépasser l’OL à l’avenir que cela pouvait l’être depuis un ou deux ans.

  1. Un gruyère français bien sûr, puisque c’est à la présence de trous qu’on le différencie d’un gruyère suisse.
  2. Contrairement à l’idée reçue, il ne s’agissait pas « d’aider le PSG à préparer les quarts de finales de la Ligue des Championnes » mais simplement de résoudre le problème posé par le fait que les dates de ces quarts de finales coïncidaient avec les deux journées du mois de mars, et qu’entre la Coupe de France et la sélection, il ne restait pas vraiment de week-end disponibles. Ou alors il aurait fallu attendre que le PSG soit éliminé de la Coupe de France, mais c’était un pari risqué.
  3. Karima Benameur a d’ailleurs semblé nettement plus sûre que sa coéquipière lors de la demi-heure qu’elle a joué.
  4. Ce qui est le cas de presque tout le championnat : il reste le duel honorifique entre Guingamp et Montpellier pour la 4e place et sans doute celui entre Albi et Metz pour la dernière place de relégable. Pour le reste, tout semble joué.
  5. Suivant les propres paroles de Farid Benstiti : « On est retombé dans nos travers. C’est encore pire que ce que j’avais vu lors de ma première année ici. »
  6. Pas de mauvaise interprétation : cela traduit surtout le fait que le budget de l’équipe féminine est en grande partie abondé par les revenus liés à l’équipe masculine.
  7. Arrivées toutes les deux de clubs de haut de tableau de Bundesliga, il ne s’agissait pas non plus d’inconnues.
  8. Avec un très bon taux de réussite jusque là puisqu’en dehors des blessures en sélection de Camille Abily et de Louisa Necib, en plus de celle de longue date de Mélissa Plaza, le nombre de matchs manqués sur blessures par les joueuses lyonnaises a été très faible. Beaucoup plus qu’au PSG par exemple.


5 commentaires pour “À la saison prochaine”

  1. Si j’ai bien compris l’article, il reste 4 matchs en deux mois à jouer par l’OL, dont un sera 3 jours avant la finale de la Coupe de France.
    Et deux journées de la Ligue des Champions se retrouvent en même temps que deux journées de D1.
    Sans oublier le fait que le PSG jouait le lendemain du PFC sur le même terrain (le match n’aurait pas pu être décalé ?).

    On a une impression bizarre d’amateurisme même au plus haut sommet.
    Ce qui n’est pas le cas de ce blog, et vu que je ne commente jamais, j’en profite pour te remercier CHR$. C’est toujours très intéressant !

  2. L’ intersaison sera à suivre pour les recrutements des meilleures jeunes françaises. Où iront M’Bock Bathy, Lavogez et Toletti ? Lyon, PSG, encore un an dans leur club, Juvisy ou étranger ?

  3. 1er mars : Quart de Coupe de France
    8 et 15 mars : Tournoi de l’Algarve
    22 mars : 19e journée de D1
    29 mars : 20e journée de D1
    5 et 12 avril rassemblement de l’équipe de France avec France-Canada le 9 et peut-être un autre match (c’est pour ça que la finale de Coupe de France a été avancée du 5 au 1er)
    19 avril : demi-finale aller de C1
    26 avril : demi-finale retour de C1
    3 mai : 21e journée de D1
    9 mai : 22e journée de D1
    14 mai : finale de C1
    6 juin : début de la Coupe du monde.

    Difficile de tout caser si on ne veut pas jouer en semaine, qu’on veut préparer la Coupe du monde (et laisser au moins quinze jours, ce qui doit être dans les règlements Fifa d’ailleurs) et limiter le nombre de doublon.
    En gros, il devait rester la possibilité du 12 avril si on ne fait jouer qu’un match des Bleues mais sinon, c’est bien bouché.

  4. excellent article comme d’hab! ma seule remarque contraire serait de dire que si au plan comptable les deux équipes étaient ex-aequo sur les 3 matchs précedents, c’était paradoxalement dans la victoire du PSG que OL a le plus dominé son sujet. à part un coup franc balancé vers la boîte à partir de leur propre moitié de terrain (signe de désespoir en soi) les parisiennes ont à peine existé. certes lyon n’a pas pu se mettre à l’abri (il n’a pas manqué grande chose) mais le 0-0 faisait leur affaire (1-1 par contre, non) donc il y avait une grande logique dans leur plan, et aucun dans celui de paris (autant qu’on a pu apercevoir un plan sous une telle domination) qui n’a même pas essayé de prendre le jeu à leur compte dans un match où pour elles marquer primait sur gagner.

    je vous rejoins à 100% au sujet de la fausse route que le PSG semble suivre à la boussole. et c’est bien dommage car pour nous aussi cela devient rasoir.

    finalement, kudos d’avoir indentifié l’importance de camille abily dans ce match, un peu obnubilé par la contribution de hegerberg. beaucoup la voyait sur le déclin depuis deux années mais le vrai moteur des fenottes cette saison, à l’ombre du trio de superbuteuses, c’est elle.

  5. A la décharge de Benstiti, combien de matchs « importants » ou « étalons » représentent 3ans en foot féminin, pour une équipe comme Paris qui a grandit d’un coup et s’est donné les moyens rapidement d’écraser la plupart de ses adversaires ?

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