Jeudi soir, on a vu le Feyenoord Rotterdam embêter l’AS Roma. Au XXIe siècle, alors que la Ligue des champions offre toujours les mêmes oppositions, années après années, la Ligue Europa héberge des confrontations originales. Celle entre deux vice-champions, l’un d’Italie et l’autre des Pays-Bas, était l’occasion de revoir des hommes que l’on avait aimés au Brésil l’été dernier. Un en particulier. Il mesure un mètre soixante-dix et idolâtre les milieux barcelonais. Il s’appelle Jordy Clasie, et à vingt-trois ans, il dirige déjà le milieu du Feyenoord, une équipe où les vieux ne sont plus les patrons.

En avril 2014, Ronald Koeman, encore entraîneur de Feyenoord, conseille à Jordy Clasie, Bruno Martins Indi et Stefan de Vrij, trois piliers de son équipe, de répondre au défi de l’étranger, jugeant qu’il est temps pour eux de faire le grand saut. Les deux défenseurs centraux respectent les consignes quelques mois plus tard, s’envolant respectivement pour Porto et la Lazio au sortir d’une Coupe du monde réussie. Martins Indi et De Vrij, titulaires dans le 3-4-1-2 de Louis van Gaal, calqué sur le système qui a si bien souri au Feyenoord de Koeman, ne sont plus des anonymes en juillet 2014.

Clasie, pour qui le Mondial commence à la 62e minute de la demi-finale face à l’Argentine, reste un visage. Une tête de nourrisson posée sur un corps d’adolescent. Il est pourtant le joueur du Feyenoord le plus adulte, adoubé par Johan Cruijff en octobre 2013, après une victoire des Bataves sur la Turquie. L’ancien numéro 14 légendaire de l’Ajax met alors deux hommes en avant : Jasper Cillessen et Clasie, dont le rôle a été important pour « contrôler la rencontre« . Lors de la petite finale du Mondial contre le Brésil, alors que la Seleçao ne joue plus et que le monde ne regarde pas, Clasie, titulaire, réalise une belle prestation, grattant les ballons et organisant le jeu au milieu. Les Pays-Bas l’emportent 3-0.

L’APRÈS BRÉSIL

Sept mois ont passé depuis le dénouement d’une Coupe du monde que Clasie a débutée trop tard. Ronald Koeman est parti à Southampton, et avec lui Graziano Pellè, ancien capitaine. Clasie, formé au club, a hérité du brassard. Autour du rond central, il vagabonde, anticipe les pertes de balles adverses, change le jeu, érafle les chevilles parfois. Feyenoord, désormais entraîné par Fred Rutten, a laissé tomber la défense à trois, revenant à un système plus néerlandais, le 4-3-3 (parfois proche du 4-2-3-1). Clasie patrouille seul devant la défense, donne le la de la circulation de balle. L’ancien club de Dirk Kuyt affiche la plus forte possession du championnat batave (61,7 %), loin devant l’Ajax Amsterdam (54,3 %). Le PSV, leader, emmené par l’explosion de Memphis Depay (vingt-et-un ans, quinze buts et trois passes décisives), n’atteint même pas les 52 %.

Les statistiques de Jordy Clasie par 90 minutes disputées (en date du 29 janvier).

Feyenoord, largement distancé par le club d’Eindhoven et ses vingt points d’avance, ressemble de plus en plus à son nouveau capitaine. Il veut le ballon, ne le perd pas, le récupère vite. Au Stadio Olimpico, la Roma cherche de l’air, étouffée par le pressing haut des hommes de Fred Rutten, Clasie en chef d’orchestre : quatre tacles réussis, deux interceptions, 92 % de passes réussies et sept sur dix aux passes longues. C’est sur une de ses transversales que les visiteurs égalisent, réparant l’injustice qu’une défaite aurait représentée.

Surnommé le “Xavi néerlandais” pour son jeu de passes précis, sa mobilité et son gabarit, Clasie évolue en réalité plus bas, plus proche de la zone réservée à Sergio Busquets. Le milieu romain, souverain en Serie A (62 % de possession, meilleure marque d’Italie), plie face au Feyenoord et son “Jefecito” – le « petit chef, surnom de Javier Mascherano – local. En déplacement, Clasie, Kongolo et les autres prennent le ballon (52 %) et une option avant le retour à De Kuip grâce à un match nul 1-1.

« JE VEUX ÊTRE COMME XAVI »

S’il n’approche pas la surface aussi souvent que son modèle, Clasie souhaite néanmoins l’imiter. “Xavi est injouable. Je veux être comme lui”, a-t-il ainsi avoué à Voetbal International. Mais comme Busquets, celui avec qui il partage des responsabilités plus défensives, il insiste sur l’importance de la géométrie dans le football. “Il faut se positionner intelligemment. Quand j’intercepte le ballon, c’est parce que je sais où il va.” La clé de voûte du Barça rejoint Clasie, dans une interview accordée au Guardian avant le choc contre Manchester City. “Le rôle de pivot (numéro 6) est plus exigeant tactiquement que physiquement : il faut réfléchir, faire des calculs, proposer des solutions offensivement et défensivement. Tout contrôler. Le positionnement est essentiel. Le style de Barcelone signifie que défensivement, on fait surtout face à des contre-attaques. Et il ne faut pas les stopper, il faut les empêcher.

Le nom de Jordy Clasie, déjà murmuré dans les coulisses du Barça à l’époque où Pep Guardiola était à la tête des Catalans, a surtout été annoncé à la Fiorentina l’été dernier. Vincenzo Montella, épris d’une passion torride pour les milieux (la Viola passe son temps à renforcer le coeur de son jeu), voit sans doute en Clasie un successeur potentiel à David Pizarro, autre regista haut comme trois pommes. En attendant de réguler l’expression d’une formation plus huppée, Clasie, qui perd ses cheveux, comme tous les grands penseurs du milieu, s’amuse au pays. Ce week-end, contre l’Excelsior, autre club de Rotterdam, il a battu son record de passes en un match de championnat (124).

Raphaël Cosmidis

Un commentaire

  1. http://job-green.fr dit :

    Quoi ! Encore de la promo ? Et oh, ca va, c est pas si souvent qu on met des gens en avant. Et puis vous etes jamais content, on vous soumet le premier proustballe depuis au moins un an, alors arretez de faire les fines bouches, merci.

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