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This is Anfield

Récit – On ne le fait pas pour rien, et on ne le fait pas seul: le voyage à Anfield, c'est un aller simple. Et on a des chances d'arriver dans le passé.

Auteur : Raphaël Cosmidis le 10 Oct 2013

 


On sort de ce petit bus décoré par les écharpes rougeoyantes de ses passagers pour débarquer dans une marée de la même couleur, des shorts aux chapeaux, des joues aux nez. Les abords d'Anfield Road sont déjà imbibés par la bière, par les bières. On boit dehors avant de boire dedans, où on se fraye un chemin dans la cohue prenant d'assaut les petits stands qui jalonnent les couloirs étroits de l'enceinte. Anfield rétrécit à l'approche du match, on y déambule en slalomant entre les toilettes envahies par les vessies trop alcoolisées et les enfants qui réclament des "Scouse pies" (comprendre la tarte du coin), on en fait le tour en moins de temps que nécessaire pour saisir tout le paradoxe du stade des Reds.
 

 

Liverpool Anfield Paisley Gateway

 


40.000 voix inlassables

Près du Kop, la porte Bob Paisley, ancien grand coach du club (1974-1983), aux allures de Tony Soprano et aux citations cultissimes. "Si vous êtes dans la surface et que vous ne savez pas quoi faire du ballon, mettez-le dans le but et on discutera des options après", dit-il un jour. Ou encore, après la victoire de Liverpool sur le Borussia Mönchengladbach, à Rome, en finale de Coupe d'Europe des clubs champions en 1977 (la première remportée par les Reds): "C'est la deuxième fois que je bats les Allemands ici. La première fois, c'était en 1944. J'avais roulé à travers Rome dans un tank quand la ville fut libérée." Là, une autre porte, ornée de l'éternel You'll Never Walk Alone. Les lettres dorées bronzent sous le soleil traître de Liverpool, soudain et aveuglant. Non loin de là, la statue de Bill Shankly, immortalisé avec son inévitable écharpe. Shankly, le géniteur du grand Liverpool. Les occasionnels se prennent en photo aux côtés d'un personnage qu'ils ne connaissent qu'à travers les rétrospectives et la mémoire des plus vieux. La grandeur, partout, inscrite, ancrée, comme pour la faire perdurer malgré les périodes aux ambitions atrophiées.
 

L'histoire est martelée par les écriteaux et les traditions. Les joueurs dévalent le couloir menant à la pelouse, surplombés par un panneau "This Is Anfield" leur rappelant où ils mettent les pieds. Et tout le stade qui entonne le chant fétiche, récité chaque quinzaine par 40.000 voix inlassables. Samedi, les supporters bruyants de Crystal Palace ont bien essayé de contester les décibels locaux, avant de se taire. Pour écouter, finalement. On se surprend aussi, à oublier quelques "walk on", à suspendre ses cordes vocales, à regarder autour, les glottes martyrisées par la dévotion. Et on reprend, on rêve que le stade coupe la sono pour laisser la vedette aux chanteurs en chair. On lève la tête bien haut, comme l'ordonnent les paroles, le menton dirigé vers le ciel, les bras écartés pour habiller le stade des écharpes variées qu'amènent les fidèles. Puis viennent les frissons, pendant quelques fractions de seconde suivant l'hymne liverpuldien, avant de se ressaisir et d'applaudir. C'est seulement à cet instant qu'Anfield donne à un match le droit de commencer. Après son dernier fredonnement, son ultime "alone".
 

 

Liverpool Anfield tribunes

 


Un mélange psychédélique et sanguin

Une fois le coup d'envoi passé, Anfield retourne à des dimensions mesurables. Et l'on se rend compte de la modestie de l'enceinte: rien n'est grand, rien ne cause un torticolis. Ni le Kop ni les tribunes latérales. Le contraste entre l'avant-match et le silence relatif pendant une rencontre étonne. Une joie certaine retentit lorsqu'un but est marqué, un espoir se fait entendre lorsque les Reds partent à l'abordage du camp adverse, mais le bruit n'assourdit pas, il caresse l'action, l'accompagne délicatement, pendant que les stewards gesticulent et agitent les talkie-walkies parce que les supporters de Palace ont réussi à craquer des fumigènes.
 

Samedi, Liverpool mène 3-0 à la mi-temps, et on part manger, boire ou pisser sans inquiétude. On entend les "r" roulés dans la bouche des Scouses, les "you" qui deviennent "ye". On retourne aux toilettes une troisième fois. On se demande si prendre un maillot taille S quand on a des seins XL est bien raisonnable. On revient s'asseoir alors que le voisin de derrière s'exclame "Good ball!" sur une passe de Gerrard et s'épuise à attendre quelque chose de bien de Raheem Sterling cet après-midi. Mamadou Sakho sort, applaudi par Anfield après une performance classique: fort dans les duels, appliqué, et parfois maladroit dans les zones dangereuses. On crie quand même "Mamadou!", légèrement seul à cracher le peu de voix qui avait survécu aux trois premiers buts. Agger remplace le Français et l'emporte à l'applaudimètre, lui qui s'est tatoué "YNWA" sur les doigts. Le Danois fait son retour de blessure. Il est désormais un des joueurs les plus anciens du club, un des seuls qui évoquent un Liverpool européen et fricotant avec les sommets, les grandes représentations du Kop, les drapeaux et les écharpes, les tifos et les banderoles, un mélange psychédélique et sanguin du passé glorieux et d'un présent qui se permettait les espérances les plus folles.
 

Il y a quatre ans et demi, les Reds fessaient le Real Madrid 4-0 à Anfield en huitièmes de finale de Ligue des champions. Fernando Torres marquait but sur but. Steven Gerrard courait encore. Quelques mois plus tard, une défaite face à la Fiorentina éliminait Liverpool dès les poules. Le club n'a plus revu la grande Coupe d'Europe depuis. Ce 5 octobre 2013, Liverpool l'emporte finalement 3-1 aux dépens des Londoniens. Avec seize points après sept journées, le club est premier ex-aequo, seulement dépassé par Arsenal au nombre de ballons mis au fond. C'est le meilleur début de saison des Reds depuis 2008.
 

On se remémore alors ces trois vers...

"At the end of the storm,
There's a golden sky,
And the sweet silver song of the lark."

 

Réactions

  • Ba Zenga le 10/10/2013 à 09h33
    C'est LE stade où je veux aller avant de quitter ce bas monde. A ce propos, Jonathan Wilson sort prochainement (le 7 novembre) un livre sur le club intitulé "The anatomy of Liverpool: A history in ten matches". Il y parlera entre autres des finales de 1977 et 2005.

  • Tonton Danijel le 10/10/2013 à 11h38
    Malheureusement pour moi, la seule fois où j'ai mis les pieds à Liverpool, c'était un week-end de trêve internationale... J'ai néanmoins visité Anfield en touriste.

    J'avais fait le Camp Nou de la même manière, j'avais apprécié. Mais Anfield, c'est autre chose. La stade est vraiment tourné sur la nostalgie, conserve quelques boiseries anciennes, on peut retrouver les anciens guichets en bois dans le musée du stade, avec expositions des différents trophées et projection d'un documentaire sur le miracle d'Istanbul contre le grand Milan AC. Mais à part ce rappel récent, c'est une vraie plongée dans la ferveur des années 70. Les vestiaires ont aussi gardé un certain aspect ancien avant de relâcher les joueurs sous le "This is Anfield" qui avait marqué les Stéphanois d'alors (qui ont repris la formule à Geoffroy-Guichard), pour un match mythique car Liverpool n'était pas favori lors de la coupe des clubs champions 1977, Saint-Etienne sortait d'une finale, et avait géré son parcours en éliminant (encore) le PSV Eindhoven en huitième et en battant les Reds 1-0 au match aller.

    Et donc, le premier grand exploit européen des Reds: lien

    La pelouse pelée, Curkovic piégé par une frappe lobée de Keegan, BathenAÏE (prononcé ainsi par les commentateurs anglais) qui donne l'espoir, ruiné ensuite par un jeune joueur à l'origine de la détestation des roux... et Anfield qui chante, qui chante.

    En fait, je me dis que si j'allais voir un match maintenant, je serais déçu, tant ça avait l'air mieux avant.

  • Karim Ben Fantome le 10/10/2013 à 12h50
    Merci pour cet excellent article Raphaël Cosmidis, qui m'a vraiment fait revivre l'expérience que j'avais vécue à Anfield il y a 3 ans. L'excitation d'avant-match, la montée d'adrénaline jusqu'au zenith, le YNWA, très émouvant puis, la redescente, post-orgasmique... Anfield redevient un stade de Premier League. Avec ses bons et ses mauvais côtés. Le stadier nous rappelle à l'ordre quand on reste debout plus de 5 minutes, dans le kop. Envie de leur rétorquer, dans un accent de mangeur de grenouilles "beuteuh zis is Anfield !", mais la mémoire des souvenirs tragiques liés aux reds pendant les 80's incitent à la raison... Et c'est sans doute pas plus mal comme ça

  • 12 mai 76 le 10/10/2013 à 17h07
    Comme Tonton j'ai fait la visite du stade et du musée et on se laisse prendre par l'ambiance, on imagine le vacarme que devait faire l'ancien kop (30 000 places debouts je crois).
    Ce qui m'a le plus marqué, c'est la modestie des vestiaires. Et dans un pub juste à côté d'Anfield, aux murs et plafonds couverts d'écharpes et de fanions de clubs, la première que l'on voit en entrant, c'est celle de Sainté.

  • khwezi le 10/10/2013 à 21h01
    Ben moi j'aime pas trop l'article de Raphaël Cosmidis; ça m'enerve. Pas que ce soit faux, mais agiter les clichés comme ça... Genre les "r qui roulent" et les gosses clamant les "scouse pies". Un peu comme le mec qui va a Bollaert et qui en retient principalement que "l'ambiance est bonne enfant" et que "on y chante les corons".

    Mais y'a tellement plus à raconter ! Et ça devrait évoquer tellement plus !! Le mec est en tribune pendant une des plus excitantes premières MT de Liverpool, qui a l'équipe la plus excitante depuis 5/6 ans (et la finale perdue de 2007), avec un entraineur qui fait la hype (Redknapp qui balance qu'il voulait en faire son adjoint si les incompétents de la FA l'avaient nommé selectionneur, et la FA qui fait bruiter qu'il pourrait prendre le poste en 2014...), y'a les projets de démenagement d'Anfield, y'a... Y'a beaucoup de choses à dire, et même sa chronique je la trouve bof.

    Anfield est un stade que j'ai le privilège d'avoir fréquenté. J'ai eu les honneur du Club house des Kopistes, invité par Stephen "Mono" Monaghan himself. J'ai vécu quelques mois - près d'un an - là bas, et franchement, cette ambiance nostalgie seventies, je suis désolé, mais je ne reconnais pas mon stade, mon club, et je trouve ça totalement à coté de la plaque s'agissant d'une mise en abymes entre le lustre passé, le présent incertain et les ambitions, réelles ou affichées.

    Bref.

    J'aurais pas du le lire.

    On dirait du mauvais So Foot - qui a produit exactement le même truc navrant en 2009.

    Désolé d'avoir plombé l'ambiance.

  • Zidanopoulos le 10/10/2013 à 21h40
    khwezi : j'ai pas eu l'honneur du Club House des Kopistes, ni celui de Stephen Monaghan, ni vécu un an là-bas. Donc évidemment, mon récit n'est pas le même que le tien, qui est sans doute plus proche de la réalité du local.

    J'agite pas les clichés, c'est juste des habitudes qu'on découvre. Il y a vraiment une tarte qui s'appelle Scouse Pie, j'invente rien. Et les "r" sont roulés, et l'accent marqué, et quand on a passé quelques jours à Manchester juste avant, c'est un vrai changement. Quand tu viens plusieurs fois, cette sensation doit se dissiper, j'imagine bien.

    Pour l'étranger, qui vient pour la première fois à Anfield, c'est ce que j'ai ressenti, et c'est ce qu'a ressenti aussi Karim apparemment. Forcément, en venant régulièrement, on doit développer d'autres sentiments...je comprends ta déception.

    Quant à parler du foot de Liverpool en lui-même, bah je le fais constamment dans la Reds Academy sur Horsjeu ou sur Twitter donc c'est dur de me reprocher de ne pas le faire ici, pour une fois.

La revue des Cahiers du football