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Rennes, les damnés de la lose

Malédiction ancestrale, philosophie assumée? La passion de l'échec du Stade rennais reste inexpliquée, mais ses supporters en parlent avec tant de brio… Bonus: l'infographie du niveau de Julien Féret et le onze type des losers rennais.

Auteur : Kireg le 1 Oct 2015

 

 

En mathématiques, on parlerait d’asymptote. En littérature, on évoquerait volontiers la logorrhée. Pour le cinéma, c’est la référence éculée à la calvitie de Jean-Claude Dus qui s’imposerait. C’est un fait: cette incapacité à atteindre son but, cette inaptitude à conclure compose l’ADN du Stade Rennais, sa marque de fabrique ; une carte de visite éternelle de la lose.

 

Pour son premier match officiel le 24 mars 1901, le Stade rennais entre sur le pré plus déterminé que jamais à terrasser le rival du Football Club Rennais. Deux heures et un 0-6 plus tard, le monde est prévenu: il ne faudra pas compter avec ce club.

 

 

 

 

Au fil des ans, puis des décennies, certains observateurs résignés prétendront l’existence d’un cimetière indien sous le Roazhon Park. Faute de squaw, ce seraient plutôt les cowboys de Brokeback Mountain qui viendraient aujourd’hui à l’esprit des supporteurs Rouge et Noir tant ils ont compris depuis longtemps que le plaisir était dans l’attente (lire aussi "Le guide de survie du supporter rennais").

 

En effet, le Brétillien de cœur est trempé dans l’acier trempé (c’est bizarre comme phrase, mais c’est comme ça). Tellement trempé qu’il ferait passer Sisyphe pour un commercial en brumisateurs. S’il a maille à partir avec son palmarès, le Haut-Breton est revenu de tout. D’ailleurs, il ne réclame rien. Il ne fait pas la Manche, mais concède que oui, sur le siècle écoulé, un titre de Rennes, c’est aussi rare en France qu’au Royaume-Uni.

 

On a tout imaginé pour expliquer l’anomalie statistique: des galettes-saucisses chargées en Lexomil, un complot ligérien, l’œuvre fatale du destin, la main de Dieu (toujours dans les sales coups celui-là). Des dizaines de théories furent ainsi élaborées pour expliquer ce constat implacable: "Rennes déçoit toujours".

 

Mais la déception est fille de l’espoir. Enfantée par une espérance vaine et inflexible, alimentée de succès partiels et fugaces, de victoires inutiles et de défaites impossibles.

 

Les soirs où le doute est trop fort, le Rennais marmonne à propos d’une victoire au Parc des Princes à 9 contre 11, et d’une défaite dans la foulée contre Évian. "Y a de l’eau sur la planète rouge!", qu’il se met à beugler, à moitié prophétique, à moitié bourré.

 

Il repart aussi humide (c’est comme "aussi sec", mais en plus mouillé) sur une autre victoire parisienne, deux ans plus tard, et une nouvelle désillusion le samedi suivant face à un Sochaux condamné à la Ligue 2. L’alcool aidant, reviennent alors les souvenirs de la double guingampisation sans préliminaires en finale de Coupe de France, et ceux d’autres petits hommes verts – Terriens ceux-là – tournant autour d’un saladier doré un soir d’Avril 2013.

 

Prenez garde. La diaspora gwennhadienne étant partout, un jour vous ferez face à l’un de ces damnés au maillot floqué Loeschbor. Vous le verrez se débattre, prisonniers de son carcan invisible. Prenez pitié. Susurrez donc à son oreille le mot liberté, quatre lettres salvatrices: "Frei…" Et observez la magie opérer. L’exorcisme sera violent. "4-3 Barthez, tu l’as pas vu venir !", "Fauvergue. Fauveeeergue!", "Eduardoooo! Je t’aime le samedi et les autres jours aussiiiiii!" Il y aura des soubresauts, une agitation frénétique. Des insultes immondes à base de "Da Rocha" seront proférées, mais le calme reviendra dans un murmure: "… et ce but contre Osasuna…"

 

Ils ne demandent pas de châteaux en Espagne les Rennais, même pas la lune. Juste Pampelune.

 

 


Le onze type de la lose en Rouge et Noir

Voici onze joueurs merveilleux qui, tel le pauvre bougre sans le sou du bois de Boulogne, sont venus s’user sur les bords de la Vilaine.

 

 


 

Talent brut découvert lors d’une défaite (faut dire qu’on cherche aussi un peu) des Espoirs Tricolores aux tirs au but, Petr Cech a cru qu’il pouvait échapper à la malédiction. Las, en Octobre 2006, Hunt le bien-nommé manque lui fracasser le crâne lors d’une rencontre de Premier League. Le casque qu’il porte depuis se veut autant une séquelle qu’un rappel : la lose est transfrontalière.

 

Eclaboussant le jeu de sa classe, Mario Melchiot ne passera qu’une seule saison sous la tunique rouge et noire. Comprenant qu’il pourrait bien faire basculer Rennes vers les territoires inconnus du succès, il profite d’un tuyau pour fuir vers Wigan (!). La lose est ironique.

 

John Mensah, dit "Le Roc de Djiporta" (ville aussi imaginaire que l’ambiance de la Beaujoire) tiendra la forteresse rennaise pendant deux années. Fort d’une réputation de défenseur intraitable, il signe à l’OL où il passera le plus clair de son temps sous traitement. La lose a différentes durées d’incubation.

 

Kader Mangane. Des jambes interminables et les dents du bonheur. Après Rennes, la grande tige s’exporte en Arabie Saoudite, en Angleterre et en Turquie pour des performances en demi-teinte. Une expérience mitigée donc. Premier buteur de l'histoire du GFCA en Ligue 1, il nous rappelle à tous que la lose est oxymorique.

 

Né à Douarnenez, ville la plus laide de Bretagne, le petit Romain Danzé comprend très vite que le beau, l’élégance et toutes ces conneries, bah on s’en tape pas mal. L’important c’est de Twitter (verbe du premier groupe et, n’en déplaise au correcteur orthographique, "Il aurait fallu que tu twitasses"). Le Finistérien est donc un joueur du bleu (c’est comme un joueur du cru, mais en plus cuit), rarement saignant et pas vraiment à points non plus. Sur le pré, Roro réussit la performance de ressembler à Clark Kent sans ses lunettes, sans pour autant rien évoquer de Superman – ceci en dépit du grand S tout moche qui orne le maillot stadiste depuis des années. La Danze ne rigole pas, ne sort pas, ne boit pas: un joueur sans foie ni Lois (tu l’as ?). La lose a de l’humour.

 

Écrire des conneries, c’est pas toujours facile. En faire, en revanche… Mesdames et Messieurs: Yann M’Vila. Si Angus MacGyver (c’est son prénom, allez vérifier) peut construire une plateforme pétrolière avec une pile usagée et un vinyle de Demis Roussos, Yann lui peut disparaître dans un goulag russe quelques semaines après avoir marqué avec l’équipe de France. Partir de rien et en faire un tout, ou bien l’inverse, peu importe : "What we have is what we’ve done to what we had". La lose est imprévisible. Et elle écoute de la pop anglaise, aussi, un peu.

 

Jérôme Leroy à Rennes, déjà, pour l’amateur de calembours, ça se pose là. Oui mais voilà, se poser, c’est pas vraiment son truc à Jérôme. Douze clubs en vingt ans de carrière, dont un passage ubuesque au Beitar Jérusalem. Un talent fou qu’il n’exploitera jamais totalement, victime consentante de ses prises de décisions irrévocables. Revenu du Mur des lamentations, Leroy souhaite franchir un palier avec Rennes. Pari réussi : il deviendra meilleur passeur du championnat. Le club le laisse partir. La lose, ça s’entretient.

 

Formé à Rennes, Julien Féret devient vite un jeune titulaire indiscutable de la CFA. Sanction immédiate, le club s’en sépare: "Le joueur manque de caractère". Huit ans plus tard, Julien est aux portes de l’équipe de France. Rennes fait alors preuve de caractère et achète un joueur qu’elle a formé 4 millions d’euros. La lose, ça coûte cher.

 

 

Bien. Bien, bien, bien, bien, bien. Formé au club, Yoann Gourcuff explose (au sens figuré, pour le moment) lors de son épopée bordelaise. Des prestations folles, des soirées européennes incroyables. Le Morbihannais marche (encore à cette époque) sur l’eau. Et là, c’est la dégringolade: blessures en pagaille, descente aux enfers, perte de repères. Les Rouge et Noir le rappellent immédiatement et Yoann prend le large avec Karin Ferri. La lose, ça s’anticipe.

 

Combien sont-ils de Rennais à pouvoir se targuer d’être entrés dans le vocabulaire footballistique ? Deux. Ils sont deux. Mickaël Pagis avec ses frappes "pagistrales", et Olivier Thomert avec ses frappes "de merde". En trois saisons, le natif d’Angers régalera le public de la route de Lorient de buts incroyables, dont ceux du fameux triplé contre l’OL, inscrits dans des angles impossibles, et rebaptisés depuis "l’œuvre au trigone". Trop c’est trop, il assistera à la défaite en finale de Coupe de France depuis le banc. La lose, c’est fragile.

 

Alexander Frei est parfait. Il est LA perfection. Le reste, c’est de la littérature. Comme quoi, même la lose intégrale, Rennes l’a ratée.
 

Réactions

  • Patate Sauzée le 01/10/2015 à 16h00
    Super article !
    Mais quand même Frei, c'est pas mal la lose importée dans sa Nati : expulsé en 2004 pour pétage de plomb sur Gerrard, sur le banc lors des pénos perdus en 2006, blessé dès les premières minutes de son Euro en 2008, absent lors de la victoire contre l'Espagne en 2010 et sorti à la 42ème minute du match suivant...

  • Kireg le 01/10/2015 à 16h05
    Merci bien. Ca vaudrait presque le coup de supporter toutes ces désillusions.

    @ Sens de
    Après un tel commentaire, je peux mourir tranquille.

    @Patate Sauzée
    Blasphème !
    Du coup, même rater une lose parfaite, c'est raté. On n'en sort pas.

  • A la gloire de Coco Michel le 01/10/2015 à 16h10
    Vous incarnez la lose, certes, mais au moins vous faites parler de vous. Tandis que les Toulousains...

  • inamoto le 01/10/2015 à 16h14
    Les toulousains nous ont volé la ligue des champions, en matière de lose on repassera!

  • A la gloire de Coco Michel le 01/10/2015 à 16h26
    En même temps votre dernier match de Coupe d'Europe c'était une défaite 5-1 à Salonique, les Toulousains pensaient vous faire une fleur...

  • Coach Potato le 01/10/2015 à 17h28
    To be defined

    Juste pour fixer les esprits: Il ne faut plus vous appeler les galettes-saucisses mais les asymptotiques maintenant? C'est assez inusité pour un groupe d'ultra mais je le note.

    Plus on avance dans une série, plus on augmente les chances de la voir s'interrompre sauf à Rennes mais si vous parvenez entretenir la déception, vous pouvez connaître l'espoir à nouveau.

    Allez les asymptotiques!

    Tip: Vous avez testé le bas de survêtement fétiche? Sinon, il y a le professeur Sekou-Touré, grand dé-maraboutage sur RDV, mais c'est à la station Marcadet-Poissonnier. Ça vous fait loin sans doute mais pensez-y, c'est à deux pas du stade de France.


  • roberto astonvilla le 01/10/2015 à 21h04
    en tant que douarneniste, je tique un peu sur certain passage.


    Du coup, c'est bien fait si vous gagnez jamais rien. Na.


  • roberto astonvilla le 01/10/2015 à 21h06
    (et puis d'abord, on dit pas galette, on dit crêpe. Les galettes sont des trucs tout durs avec du beurre dedans, on vous apprend quoi,à Chantepie ?)

  • José-Mickaël le 02/10/2015 à 00h58
    Coach Potato
    01/10/2015 à 17h28
    > Plus on avance dans une série, plus on augmente les chances de la voir s'interrompre

    En fait non. Si tu as fait 50 fois de suite face, la probabilité de faire pile (et donc d'interrompre la série) reste la même qu'au début.

    (Je le précise au cas où, même si j'imagine que c'était une boutade.)

  • Coach Potato le 02/10/2015 à 06h44
    José-Mickaël
    aujourd'hui à 00h58

    Rosenkrantz et Guildenstern sont morts.

    C'était une boutade mais pas que. C'est drôle que tu prennes cet exemple, Paul Stoppard en a fait le sujet d'une pièce de théâtre (et film) autour du déterminisme d'une série de pile ou face et aussi de celui plus funeste des deux personnages principaux / subalternes dont on devine dès le titre que ça na va pas bien finir du tout pour eux par la faute de l'auteur.
    En effet, Rosenkrantz et Guildenstern sont censés exfiltrer l'héritier de Danemark à l'étranger où ils seront supprimés. Nous on sait qu'il y a quelque chose de pourri dans ce royaume, pas eux.

    Par contre, la pure logique arithmétique probabiliste s'efface devant des algorithmes logiques dont le maintient dépend de la vérification d'une condition à deux voire trois états. Sur un retour d'information, false ou true qui peut être erroné et lui même sera contrôlé par un autre algorithme dont le retour d'information sera false ou true, on entre dans une logique beaucoup plus floue ou la probabilité de vrai / faux positif augmente pour fausser le résultat du gentil algorithme. Le gentil algorithme est intrinsèquement juste, l'évaluation de sa bonne exécution est plus délicate mais on le contrôlera par un gentil gentil algorithme. En fait il existe un ratio de faux positif qui va augmenter avec le nombre d'opérations. Tous les logiciels fonctionnent parfaitement, c'est bien connu.

    Un système ou une série probabiliste qui fonctionne est un système en panne qui dysfonctionne momentanément. Et puis, la loi de Murphhy prédit que s'il existe un bouton signalé par l'avertissement "ami rennais n'actionne pas cet interrupteur avant la finale de la coupe de France" et que tu fais passer des ultras rennais devant, combien auront l'idée de l'actionner pour vérifier si ça ne fait rien du tout en fait et qu'on peur appuyer dessus quand-même. En fait, si ça se trouve, le Stade Rennais n'est pas victime d'une malédiction de cimetière audonien mais d'un algorithme fonctionnel qui attend de devenir défectueux.

    Si Rosenkrantz et Guildenstern comprennent que leur mort est nécessaire à la pièce et reprennent leur destin en main, ils ne meurent pas. Cela arrivera un jour pour le supporter de Rennes. Rennes gagnera un jour un titre car les conditions de la lose éternelle vérifiée fera l'objet d'un faux positif. Etre false or true, là est le retour de la question. Les rennais vont adorer cette pièce.

    - J'ai le devoir de vous informer que Rosenkrantz et Guiltenstern sont morts mais que le Stade rennais a gagné la coupe de France.


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