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« Contredire l'idée que le 10 aurait disparu »

Pour la sortie de L'Odyssée du 10, nous avons posé dix questions à ses auteurs. Ils ont distribué les transversales. 

Auteur : La rédaction le 21 Oct 2019

 

 

Jeudi sort en librairie L'Odyssée du 10, de Raphaël Cosmidis, Philippe Gargov, Christophe Kuchly et Julien Momont. Une expédition dans l'histoire des meneurs de jeu, dont les auteurs nous racontent les découvertes.

 

 

 


On dit que les numéros 10 sont en voie de disparition. Vous voulez sauver l'espèce?

 

Christophe. On veut d'abord essayer de la comprendre. Plutôt que sauver l'espèce, qui disparaît aussi à cause de ses défauts, j'aimerais que l'on puisse sauver la créativité collective – peu importe le poste. Travailler sur l'histoire du football m'a fait aimer des joueurs des générations précédentes, mais je reste très attaché aux meneurs reculés à la Miralem Pjanic ou Jorginho, plus qu'aux numéros 10 dribbleurs.

 

Julien. L’espèce n’est de toute façon en voie de disparition que si on la fige dans son acception passée. Dans ce cas, on pourrait en dire de même de beaucoup d’autres postes ou rôles dans une équipe. Ce sont justement toutes les mutations du 10 et du contexte dans lequel il doit évoluer aujourd’hui qui promettaient une richesse thématique à explorer. En un sens, le destin historique du 10 est un bel emblème de l’évolution du football, de son athlétisation et de sa scientifisation notamment.

 

Philippe. Assez logiquement, c’est l’une des questions qui revient le plus souvent quand on présente le sujet du livre. Ce qui reflète aussi et surtout l’attachement à un numéro 10 "mythifié", qui incarnerait une forme d’âge d’or du football d’avant. Et c’est totalement légitime. Mais on peut aussi penser qu’il y a là une forme d’anachronisme, de vouloir sauver une espèce dans une idée qui ne correspond plus au jeu actuel (ce qu’on est en droit de déplorer, bien sûr). Ce qu’on essaie de montrer, pour rester dans le champ lexical naturaliste, c’est que l’espèce s’est adaptée, au sens darwinien du terme. Elle a évolué, pour échapper à ses prédateurs (les défenseurs rugueux), aux changements de son environnement (la densification et l’accélération du jeu). À partir de là, est-ce qu’il faut "sauver" l’espèce ou plutôt essayer de l’observer dans sa version renouvelée?

 

« C’est ce qui est intéressant avec le 10 : son histoire n’est pas figée, ni dans le passé, ni dans le futur d’ailleurs. »

 

Qui est le premier 10 de l'histoire?

 

C. On peut envisager la réponse sous deux aspects: le numéro et le poste. Si on se concentre sur le numéro comme métonymie, c'est Pelé à la Coupe du monde 1958. Sur le rôle de meneur de jeu en tant que tel – et on l'évoque en détail dans un chapitre dédié aux origines tactiques du 10 –, on ne peut pas vraiment donner un nom puisque, dès les débuts du football, certaines équipes responsabilisaient un attaquant ou un demi dans la construction du jeu. Même s'il est beaucoup plus que ça, j'aurais tendance à répondre Alfredo Di Stéfano, qui marquait beaucoup de buts parce qu'il était en capacité de le faire, mais était sans cesse le moteur de ses équipes.

 

 

 

 

J. Tout dépend en effet de ce qu’on entend par numéro 10. Le numéro en tant que tel n’est apparu qu’à partir de la fin des années vingt en Europe, sous l’impulsion d’Herbert Chapman, inventeur du W-M et pionnier dans l’utilisation des numéros dans le dos des maillots. La plus ancienne preuve vidéo de l’existence du 10 sur un terrain remonte toutefois à 1924, dans un match de coupe aux États-Unis, sans précision sur l’identité du porteur. Le rôle d’organisateur, de créateur du jeu dans une équipe existait en tout cas dès le début du XXe siècle, notamment dans les équipes influencées par l’école écossaise du jeu, marquée par la passe et le collectif, en opposition à l’école anglaise du dribble. C’était soit un demi au cœur du jeu, soit un attaquant qui décrochait, comme Matthias Sindelaar dans la Wunderteam autrichienne des années trente, ou Nándor Hidegkuti dans le Onze d’or hongrois des années cinquante.

 

P. On pourrait aussi ajouter des pionniers tels que Antonio Sastre, qui a contribué à forger l’identité du football argentin, elle-même ayant considérablement nourri l’idée qu’on se fait du 10. De la même façon, j’ai une affection pour José Manuel Moreno, l’un des membres de la Máquina de River dans les années 40, qui n’était pas un 10 au sens contemporain du terme, mais qui en partageait certains attributs, notamment hors terrain. C’était un jouisseur, un danseur de tango qui passait sa vie en soirée avant de détonner sur le terrain le lendemain. C’est ce qui est intéressant avec le 10: son histoire n’est pas figée, ni dans le passé, ni dans le futur d’ailleurs. On peut le retrouver par bribes chez certains joueurs qui n’en étaient pas, selon la définition qu’on en donne (ou qu’on cherche).

 

« Riquelme incarne parfaitement l’idée d’un joueur qui devient beau grâce à la manière dont il caresse le ballon. Totti aussi : le romantisme du 10 dans toute sa splendeur.»

 

Quel joueur incarne l'archétype du 10?

 

C. Il y a tellement de profils que c'est difficile de répondre, mais j'ai envie de mettre en valeur Juan Román Riquelme. Dans El País, son ancien sélectionneur José Pekerman dit qu'il est "antisystème dans le football moderne", et ça correspond assez à l'idée qu'on peut se faire du numéro 10. Alors que le jeu allait de plus en plus vite, lui ne faisait que ralentir et survivait grâce à la façon dont ses pieds permettaient d'exécuter ce que ses yeux voyaient avant les autres. Ce surnom, "el Ultimo Diez", lui va parfaitement. Selon l'époque où on le place, il peut soit être une star du football, soit un joueur qui serait snobé par la plupart des centres de formation.

 

J. On parle souvent du numéro 10 alors qu’il faudrait parler des numéros 10. Il y a une pluralité fascinante d’interprétation du rôle: certains sont plus organisateurs et passeurs, d’autres déstabilisateurs et dribbleurs, certains préfèrent donner la dernière passe, d’autre marquer, certains sont plus milieux, d’autres plutôt attaquants… Le 10, c’est tout ça à la fois. C’est Zidane et Maradona, Bergkamp et Pelé, Platini et Giresse, des profils totalement différents qui endossent une responsabilité similaire, le leadership technique – et moral pour certains – de leur équipe.

 

 

 

 

P. On s’en est rendu compte au moment de faire l’index, pour voir quels étaient les joueurs les plus mentionnés. Et certains ressortaient clairement du lot, peut-être plus que l’influence réelle qu’ils ont eue dans l’histoire du foot. Typiquement, Riquelme. C’est peut-être un biais générationnel, ou bien lié à son caractère anachronique, justement, mais il incarne parfaitement l’idée d’un joueur qui devient beau grâce à la manière dont il caresse le ballon. Et de la même façon, mais avec un peu plus de succès, je pense que Totti incarne aussi très bien ça : le romantisme du 10 dans toute sa splendeur.

 

Y a-t-il un âge d'or du 10?

 

C. Même s'il y a eu une belle période en Serie A autour du changement de millénaire, c'est vraiment dans les années quatre-vingt que s'imposait l'idée qu'il fallait absolument un ou plusieurs meneurs de jeu pour attaquer correctement.

 

J. Dans le livre, Benjamin Nivet nous confie d’ailleurs regretter de ne pas avoir joué dans les années quatre-vingt, la décennie qui lui a donné envie de devenir numéro 10. Le football français de l’époque est le symbole de cet âge d’or, avec une sélection bâtie autour de trois ou quatre meneurs de jeu, et des 10 dans pratiquement tous les clubs (Zénier, Bazdarevic, Vercruysse, Passi, Touré, Ferreri, Susic et tant d’autres).

 

« Certains 10 aiment les attaquants remiseurs, d’autres se régalent avec des flèches qui leur donnent une plus grande marge pour réussir leurs passes. »

 

Quel schéma tactique laisse la meilleure place au 10?

 

C. Il faut séparer l'analyse que l'on peut faire de manière extérieure et ce qu'en disent les joueurs, qui savent évidemment mieux que nous ce qui était le plus agréable sur le terrain, mais n'ont pas forcément expérimenté tous les schémas. Plusieurs meneurs nous ont dit préférer le 4-2-3-1 au 4-4-2 losange, qui n'offre que deux solutions vers l'avant et délaisse les ailes. Actuellement, je ne vois rien de mieux que le 3-4-1-2 utilisé par l'Atalanta avec Alejandro Gómez en numéro 10. Le système combine les deux attaquants du losange avec plus de soutien sur les ailes, puisque les latéraux évoluent très haut.

 

 

 

 

J. Tous les schémas qui le placent au cœur du jeu, même si le 4-4-2 bordelais d’Élie Baup avait permis à Johan Micoud et Ali Benarbia de briller. Le reste est une question de préférence personnelle et dépend aussi des profils des joueurs autour du 10. Certains aiment les attaquants remiseurs (Valbuena nous a confié avoir adoré jouer avec Giroud, Carrière avec Moldovan…), d’autres se régalent avec des flèches qui leur donnent une plus grande marge pour réussir leurs passes (Bodmer avec Odemwingie)... "Tout dépend de l’animation!"

 

Raphaël. Il faut à la fois lui créer de l’espace et le laisser s’y balader, souvent latéralement, de l’axe droit à l’axe gauche pour trouver un espace. Je pense qu’une organisation avec deux milieux derrière lui et deux attaquants devant lui offre le plus grand confort. Les milieux attirent plus bas, les attaquants fixent plus haut, le 10 profite ainsi d’un espace plus long. Mais le même résultat peut survenir d’un mécanisme différent, en particulier avec les faux 9. À Liverpool, Firmino n’a au départ personne devant lui, mais finit avec Salah et Mané très haut dans une zone intermédiaire entre le couloir et l’axe. Les centraux ne peuvent pas sortir sur ses décrochages sans se mettre en danger dans la profondeur, donc ils sortent moins.

 

« On ne peut pas confier les clés de l'animation du jeu à quelqu'un qui ne fédère pas et n'a pas l'intelligence sociale de comprendre ce dont ses partenaires ont besoin. »

 

Le 10 est-il forcément un joueur intelligent?

 

C. C'est une obligation, et pas que sur le terrain. Il doit non seulement être créatif balle au pied, en faisant ou en voyant mieux que les autres, mais aussi être une sorte de référent dans le vestiaire. On ne peut pas confier les clés de l'animation du jeu à quelqu'un qui ne fédère pas et n'a pas l'intelligence sociale de comprendre ce dont ses partenaires ont besoin.

 

J. Il y a la faculté de voir le jeu, de l’anticiper et de l’interpréter pour prendre la bonne décision. Et souvent, avec le 10, ce sera un choix que le spectateur n’aura pas vu venir. C’est de l’intelligence situationnelle, la faculté à établir des modèles de prédiction du jeu, par opposition à ce qu’Éric Carrière appelle les joueurs qui "prennent des photos" et ne font pas concorder leur prise de décision avec l’évolution dynamique de la situation. La faculté aussi de s’adapter aux caractéristiques de chaque partenaire, de chaque adversaire. Cela relève parfois de l’intuition, le fruit de nombreuses heures passées à jouer. Mais le grand 10 n’a pas que l’intelligence, il a aussi la faculté technique d’exécuter sa pensée. C’est de l’intelligence dans l’action.

 

P. Il faut qu’il soit intelligent, et surtout qu’il ait les moyens de mettre cette intelligence en pratique. Inversement, être techniquement bon ne suffit pas. C’est une généralité, mais les 10 qu’on a rencontrés insistent tous là-dessus, probablement parce qu’ils ont vécu cette symbiose entre l’œil et le pied de l’intérieur. C’est con à dire, mais comme nous l’expliquait Rudi Garcia (oui oui), certains joueurs sont dotés d’une véritable intelligence de jeu, d’une vision qui dépasse la moyenne, mais n’arrivent pas à faire la passe qui va avec. On l’a rencontré quand il était encore en poste à l’OM, alors peut-être qu’il parlait de Radonjic, qui sait…

 

R. Le 10 est presque plus visionnaire qu’intelligent. Il imagine autant qu’il analyse, et c’est d’ailleurs sa capacité à deviner et créer le futur qui caractérise son intelligence très particulière. C’est une intelligence qui ne s’encombre pas de la logique évidente : cette intelligence amène à former des solutions supérieures et alternatives.

 

« On peut désormais trouver des traces de ce qui a fait la gloire du numéro 10 dit "traditionnel" un peu partout sur le terrain. »

 

Quels joueurs actuels sont de vrais 10, ou pourraient l'être?

 

C. Mesut Özil en est un, avec tout ce que sa carrière dit du rapport du football moderne au poste. Karim Benzema et – de façon encore plus visible – Roberto Firmino sont des meneurs qui jouent en attaque. Sans doute que Philipp Lahm aurait fait un bon meneur et que Joshua Kimmich le serait également.

 

 

 

 

J. On peut d’ailleurs désormais trouver des traces de ce qui a fait la gloire du numéro 10 dit "traditionnel" un peu partout sur le terrain. Un gardien, comme Marc-Andre ter Stegen ou Ederson, peut faire preuve du sens de la passe du meneur de jeu, comme les défenseurs latéraux, devenus dans certaines équipes les déclencheurs des offensives par la passe depuis des zones moins sous pression, à l’image de Trent Alexander-Arnold à Liverpool. Il y a aussi le cas évident des organisateurs reculés devant la défense, qui auraient été 10 il y a trente ans, mais ne peuvent pas évoluer plus haut aujourd’hui compte tenu de la densité axiale du football moderne, qui impose de l’explosivité. Comme plusieurs interlocuteurs nous l’ont dit, chacun doit un peu être numéro 10 dans sa zone aujourd’hui.

 

P. Peut-être que certains joueurs aujourd’hui pourraient le devenir à la faveur du vieillissement ou d’une sale blessure, et de la perte d’explosivité qui en découlera. Je suis curieux de voir comment un Griezmann vieillira, par exemple. Est-ce que le foot saura lui laisser une place, est-ce que lui saura la prendre?

 

Les nouveaux 10 sont-ils les 6, ou les 8?

 

C. Je ne sais pas si ce sont vraiment les 6 de manière générale, même si le profil du destructeur se raréfie, mais ce ne sont pas les 8. Comme Paul Pogba, ils peuvent montrer des aptitudes créatives de meneurs qui leur permettent aussi de jouer un cran plus haut, mais ce sont avant tout des détonateurs de jeu qui doivent avoir une vraie densité physique – puissance ou endurance, idéalement les deux. L'exemple de Toni Kroos est assez frappant : ancien numéro 10 au-dessus du lot chez les jeunes, il est devenu l'un des meilleurs au monde en reculant d'un cran, mais devient dur à utiliser depuis qu'il galère à courir. Dans l'absolu, le bon meneur peut jouer à peu près partout – David Alaba a aussi été formé à ce poste – mais il n'y a que devant la défense qu'on retrouve des "analystes du jeu" peu mobiles.

 

J. C’est un peu des deux, si l’on parle de 6 organisateurs à la Busquets, Pjanic ou Jorginho. Ce sont des joueurs chargés, grâce à leur position face au jeu, d’alimenter les éléments de percussion, qui feront la différence au cœur des blocs défensifs grâce à leur vitesse, leur dribble et leur explosivité. Pour les 8, ils sont les nouveaux 10 s’ils évoluent systématiquement entre les lignes, comme à Manchester City. C’est la zone du 10, entre les milieux et les défenseurs adverses. Kévin de Bruyne et David Silva sont 10 chargés chacun de l’animation d’une moitié du terrain.

 

« Avec la qualité de son jeu long et sa capacité à jouer en une touche, Totti aurait pu jouer devant la défense, dans un monde parallèle ! »

 

Qui reviendra en premier: le 10 ou le libéro?

 

C. Sur Twitter, j'espère que ce sera le Libéro Lyon, mais sur le terrain, j'ai du mal à voir comment le poste pourrait revenir sous sa forme originelle. Avoir des centraux relanceurs oui, mais ça n'a pas trop d'intérêt de rester en couverture quand les numéros 9 s'éloignent du but. Donc les numéros 10, si tant est qu'ils soient vraiment partis.

 

J. La lecture du livre conduira, je l’espère, à contredire l'idée que le 10 aurait disparu. Quant au libéro, l’évolution de la règle du hors-jeu l’a, je pense, définitivement rangé dans la catégorie des curiosités du foot d’avant. L’assistance vidéo encouragerait même certaines équipes, comme Liverpool, à adopter une ligne défensive (à plat, donc) encore plus haute, grâce à l’assurance que le moindre lacet adverse hors-la-loi sera sanctionné…

 

R. La mise en place du hors-jeu passif pourrait néanmoins inciter les équipes à réutiliser des libéros. Les défenses à trois centraux sont d’ailleurs revenues avec cette règle, même si des facteurs offensifs ont également participé à cette résurgence, en Italie et en Angleterre notamment.

 

Qui jouerait numéro 10 dans votre team?

 

C. Si je veux gagner, je prends des joueurs capables de tout faire sur un terrain et qui empilent les trophées. Donc Lionel Messi ou Alfredo Di Stéfano, qui sont les deux meilleurs de l'histoire, à mes yeux. Mais, pour le plaisir des yeux, ce sera Michael Laudrup, qui était un vrai génie créatif sur le terrain.

 

J. Il y a les évidents (et le visionnage des matches me conduit à clamer que Maradona est bien supérieur à Pelé). Mais un 10 qui m’a emballé "en vrai", c’était Mathieu Bodmer à Lille. En plus, il est l’un de nos interlocuteurs les plus intéressants dans le livre. Certains meneurs de jeu ont du mal à verbaliser et à expliquer leur vision du jeu, mais lui nous dévoile certaines clés concrètes et les points de référence qui orientent ses prises de décision sur le terrain. Il se fie notamment aux couleurs des chaussures des adversaires autour de lui pour repérer si un joueur n’est pas dans sa zone habituelle et a donc laissé un espace à exploiter.

 

 

 

 

P. En bon défenseur de cœur, je prendrais surtout des joueurs pour "neutraliser" le 10 adverse (d’autant qu’on a interviewé quelques sympathiques ex-défenseurs, tels que Bernard Casoni ou Jean-Marc Furlan, qui nous ont donné quelques pro-tips pour faire rougir les chevilles adverses). L’avantage d’une équipe trop dépendante d’un grand 10, c’est que tu sais où appuyer pour faire mal. En revanche, avec cette maudite VAR, ça devient un peu plus compliqué…

 

R. Francesco Totti, car il raconte une partie de la transformation du 10, il l’a vécue avant tous les autres en étant un faux 9 pré-Messi. Avec la qualité de son jeu long et sa capacité à jouer en une touche, même dos au jeu, il aurait peut-être pu jouer devant la défense dans un monde parallèle! Et puis, surtout, c’est un incroyable créatif, par la passe plus que par le dribble, et c’est ce versant-là du 10 dont je suis le plus nostalgique.

 


L'Odyssée du 10, de Raphaël Cosmidis, Philippe Gargov, Christophe Kuchly et Julien Momont. Éd. Solar, 17,90 euros. En librairie le 24 octobre.

 

 

Pour vous procurer “L’Odyssée du 10”, vous pouvez (par ordre de préférence) :
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Réactions

  • leo le 26/10/2019 à 00h21
    tes fessées
    24/10/2019 à 22h08
    ---

    Notre incompréhension vient du fait que tu vois le 10 comme "le dépositaire du jeu", "l'organisateur", "celui qui oriente" et moi pas.

    Si on prend nombre des grands 10 du football, dont tout le monde, j'espère, s'accordera à dire que c'étaient des "vrais" 10, ils n'étaient pas les organisateurs ou en tout cas pas du tout les seuls organisateurs. Allez, un peu de name-dropping (et même des années 80) :

    Michael Laudrup au Barça jouait avec Ronald Koeman en défense central et Luis Milla puis Pep Guardiola au milieu de terrain (et avec parfois Eusebio, un autre organisateur/meneur en latéral droit dans un 3-4-3, pour faire un clin d'oeil à l'autre débat). Ce sont ces deux-là qui orientaient le jeu et par qui passaient les passes redoublées.

    Diego Maradona, en équipe d'Argentine, jouait avec Osvaldo Ardiles au milieu, puis avec Batista et enfin avec Redondo, c'étaient eux les organisateurs.

    Zico jouait devant Toninho Cerezo puis Falcao.

    Dans le Brésil 58, c'est Didi qui était le milieu organisateur, le meneur reculé d'aujourd'hui, en 70 Gerson. Pelé était très offensif, comme Maradona ensuite ou Messi aujourd'hui.

    Thomas Hässler jouait devant Lothar Matthaus (qui était plus relayeur/box-to-box que 10).

    En équipe de Roumanie, c'est au moins autant Popescu qui tient ce rôle d'organisateur que Gica Hagi.

    Même en équipe de France, on peut voir Giresse comme plus organisateur que Platini, qui jouait plus haut et était beaucoup plus finisseur (mais bon, Giresse aussi était 10).

    Mais en fait, tout est déjà dans ce que dit Julien Momont : "On parle souvent du numéro 10 alors qu’il faudrait parler des numéros 10. Il y a une pluralité fascinante d’interprétation du rôle: certains sont plus organisateurs et passeurs, d’autres déstabilisateurs et dribbleurs, certains préfèrent donner la dernière passe, d’autre marquer, certains sont plus milieux, d’autres plutôt attaquants… Le 10, c’est tout ça à la fois. C’est Zidane et Maradona, Bergkamp et Pelé, Platini et Giresse, des profils totalement différents qui endossent une responsabilité similaire, le leadership technique – et moral pour certains – de leur équipe."

    Difficile de dire que Lionel Messi n'endosse pas le leadership technique (et même moral, depuis déjà très longtemps, et souvent à outrance) des équipes dans lesquelles il évolue et que ses caractéristiques techniques et tactiques ne ressemblent pas à celles de bien de grands 10 du passé.

La revue des Cahiers du football