L'Euro vu du stade : Turquie-Croatie et Espagne-République tchèque
Récit à Paris et Toulouse de deux des matches les plus attendus de ce début de compétition. L'un plus craint que l'autre par les autorités mais finalement tous disputés dans une bonne ambiance.
Turquie-Croatie
La rame du métro 9 tremble sous les sauts et les chants croates. Il est presque 13h et les supporters font leur chemin vers le Parc des Princes. Pour ce premier match dans l’enceinte du PSG, Turcs et Croates sont bouillants et garnissent très rapidement plus de la moitié du stade. Je suis assis juste derrière le banc turc, entre celui-ci et les loges VIP. Trézéguet, Wiltord, Karembeu, Wenger… tous sont venus voir ces deux équipes qui pourraient créer la surprise.
Grosse explosion des supporters des deux bords à l’entrée de leur équipe. Les gardiens turcs sont les premiers à fouler le pré, accueillis comme des héros par toute la tribune Auteuil, qui a des airs de stade Atatürk. Les Croates squattent Boulogne. Émotion lors des hymnes. Quelques Turcs commencent à siffler l’hymne croate, joué en premier. Ils sont immédiatement calmés par leurs concitoyens. Puis ils s’époumonent sur la Marche de l’Indépendance. Le match est d’une intensité énorme. Les tribunes sont bruyantes. Dans sa loge VIP, une larme coule sur la joue de Nasser Al-Khelaïfi.
La première mi-temps, largement digne d’un championnat d’Europe, est ponctuée par une frappe géniale venue du pied de Luka Modric. Auteuil devient silencieuse, Boulogne exulte. Les maintes attaques turques n’y feront rien. La Turquie laisse la victoire à la Croatie. En sortant du stade, les supporters rentrent ensemble, certains plus souriants que d’autres, mais ensemble. En attendant l’Espagne et la République tchèque, qui jouent le lendemain à Toulouse.
Espagne-République tchèque
Le vol EasyJet 4025 partant de Paris Orly est rojo. Une vingtaine de supporters s’envolent direction la ville rose pour le premier match de leur équipe. À l’arrivée, le temps est pluvieux, très loin des standards du sud-ouest de la France. En sortant dans la carrièra dels Filatièrs, qui lie Esquirol aux Carmes, on se retrouve en plein Madrid, jour de match de la Roja. Les rues résonnent des chants à la gloire de l’Espagne. Les transports sont complètement inopérants pour se rendre au Stadium: la CGT bloque le dépôt des bus, les tramways sont arrêtés par la mairie, et aucun métro ne dépose près de l'enceinte. Les supporters des deux camps marchent donc une vingtaine de minutes, du Palais de Justice jusqu’au stade.
Les Espagnols donnent de la voix, immédiatement contrés par des Tchèques clamant leur amour pour Tomas Rosicky. Le Stadium ne connaît que rarement une telle ambiance. Les Tchèques sautent en cœur pour montrer que le pays de Kafka est bien présent ici aussi. La cérémonie d’ouverture lance les hostilités et les supporters ibériques dansent en tribune. Comme à Paris, silence absolu lors des hymnes. Même sans paroles, l’hymne espagnol donne la chair de poule. Le soleil envoie un rayon sur le stadium et le kop espagnol jubile. Le coup d’envoi est donné par Morata d’une passe en retrait. Je suis assis entre une famille tchèque et deux potes espagnols. La beauté de l’Euro c’est aussi ça.
Sur un tacle appuyé de Busquets sur Rosicky, les deux camps s’expliquent tant bien que mal dans leur langue maternelle. Piqué délivre les siens, après maintes tentatives de la Roja. Le stade explose et entonne la Marcha Real. Les Tchèques poussent, mais en dehors d’un Petr Cech de classe mondiale, ils sont plus limités et s’inclinent. Le reste de la soirée se fera en terrasse, place des Carmes jusqu’à tard dans la nuit.