La malédiction du numéro 9
En équipe de France, le port du maillot n°9 n'a jamais porté chance à son propriétaire. De 1958 à 2006, inventaires des victimes.
Auteur : Bruno Colombari
le 22 Mai 2006
Dans l’histoire du football, certains numéros valent plus cher que d’autres. Le 10 de Pelé, Platini, Zico, Maradona ou Zidane consacre souvent le meneur de jeu, le joueur créatif à partir duquel s’élabore le jeu offensif. Le 9 est celui de l’avant-centre, du buteur comme Gerd Müller, Paolo Rossi, Jean-Pierre Papin ou encore Ronaldo. Mais curieusement, chez les Bleus, ce numéro 9 semble porter la poisse lors des grandes compétitions.
9 à l'envers
Jusqu’en 1986, celui-ci ne correspond pas à un véritable avant-centre. En 1958, il est confié à un certain Casimir Hnatow (jamais sélectionné), mais c’est le 17, Just Fontaine, qui entre dans l’histoire. En 1966, il est porté par Didier Couecou, milieu de terrain. En 1978, c’est Dominique Bathenay qui en hérite (les numéros sont alors attribués par ligne et par ordre alphabétique). En 1982 et 1984, Bernard Genghini le récupère avant de le laisser à Luis Fernandez en 1986.
À partir de 1992, il revient aux attaquants. Jean-Pierre Papin, tout nouveau Ballon d’Or et qui empile les buts avec les Bleus, l’endosse lors de l’Euro en Suède. Il marque les deux buts français, mais quitte la compétition au premier tour. C’est sa dernière phase finale en équipe de France, et le début de la fin de sa carrière, avec un transfert au Milan AC où il s’enterrera.
En 1996, Youri Djorkaeff est un numéro 9 atypique, dans une attaque tristounette composée de Dugarry, Madar et Loko. Il marque un but contre l’Espagne, mais à l’image d’une équipe très défensive, il ne montre rien d’intéressant. Il se rabattra d’ailleurs sur le 6 pour les trois prochaines phases finales – le 6 qui est un 9 à l’envers.
En 1998, le maillot maudit est attribué à un nouveau venu, Stéphan Guivarc’h. Buteur prolifique en championnat de France, le Breton manque toutes ses occasions, dont un festival en finale contre le Brésil. On ne le reverra plus qu’une fois en Bleu.
Tunique maléfique
En 2000, le numéro porte-poisse est récupéré par l’un des plus grands espoirs du foot français, Nicolas Anelka, récent champion d’Europe avec le Real Madrid. Brillant lors des matches de préparation, le Parisien s’éteint peu à peu, perd sa place au profit de Dugarry et se fait voler la vedette en finale par Trezeguet. Pour Nicolas aussi, c’est le début d’une longue descente qui le privera des trois prochaines compétitions.
En 2002, personne ne se bouscule pour hériter de la tunique maléfique. Elle échoue donc sur les larges épaules de Djibril Cissé, la dernière (à tous les sens du terme) trouvaille de Roger Lemerre. Cissé fait ses débuts internationaux treize jours avant la Coupe du monde et perd contre la Belgique. Il entrera trois fois en cours de match en Corée mais ne marquera pas – tout comme les Bleus d’ailleurs.
En 2004, Cissé est suspendu suite à une expulsion avec les Espoirs. C’est encore une nouvelle recrue, le Mancunien Louis Saha, qui hérite du mauvais œil. Il semble plus en forme qu’un Thierry Henry maladroit et qu’un David Trezeguet immobile, mais Santini ne lui laisse que quelques poignées de minutes contre la Suisse et la Grèce. Trop peu pour faire mieux que donner des regrets.
Et 2006 ? Pour la première fois cette année, le fameux numéro 9 a été attribué à un de ses anciens propriétaires : Djibril Cissé, qui se pose un peu là en tant que poissard – même s'il pourra toujours se servir de ce chiffre pour faire comprendre à Rafael Benitez qu'il n'est pas un ailier. Espérons quand même qu'il en fasse bon usage.