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Game Over : l'explosion du football anglais

Football-fiction – Et si l'inflation des droits TV britanniques n'avait que des effets pervers? Cette question, soulevée en catimini par quelques sceptiques, pourrait trouver une réponse. Le scénario du pire, le voici...

Auteur : Mevatlav Ekraspeck le 13 Oct 2016

 

 

Samedi 4 juin 2022. Le monde du football enterre sans fleur ni couronne le football anglais. Battue par la Finlande dans un Wembley qui sonne creux, la sélection nationale ne verra pas le Qatar. Humiliation suprême, les voisins gallois offriront à Gareth Bale un dernier tour de piste international. L’Irlande du duo Mc Carthy-Mc Geady (trente-six ans!), et des Écossais renaissants valident aussi leur ticket international pour la première fois depuis 1998.

 

Stones, Sterling, Wilshere, Smalling, Dier, Alli, Kane, Rashford, Sterling... Toute une génération porte sur son dos une infamie dont elle n'est pourtant pas tant responsable que ça. Ces joueurs avaient-ils vraiment la tête à battre les Lapons après qu’ils eurent pris connaissance de la terrible nouvelle?

 

 

Deux jours plus tôt, Sky et BT, co-diffuseurs du championnat d’Angleterre, annoncent pour l’un son retrait pour raisons économique, pour l’autre sa cessation d’activité, et aucune chaîne ne suit la relance des autorités pour continuer à engager des sommes folles. Et voilà comment le combo BBC-ITV-Channel 4 ramasse les droits pour… 400 millions de livres sterling!

 

 

La NBA du foot, sans la Dream Team

Six ans d’une course frénétique se fracassent contre le mur d’une réalité que peu de décideurs s’autorisaient à percevoir. Six longues années durant laquelle la Premier League devint l’hypertrophie d’un écosystème sportif et économique qui a fini par dégénérer en une forme de maladie: le constat est accablant pour un pays qui a vécu dans sa bulle et dans sa supériorité artificielle sans se soucier du reste du monde. Indéniablement, la Premier League a regroupé depuis 2016 la majorité des meilleurs footballeurs de la planète, ne les partageant qu’avec les cadors espagnols, le Bayern Munich, la Juventus Turin, et quelques clubs portés par des fonds exotiques, le Paris SG en tête. Et pourtant, ce sont ces dernières entités qui dominent les compétitions européennes. Depuis le Chelsea de Mourinho en 2012, voilà dix ans qu’aucun club britannique n’a accédé à la finale de la Ligue des champions. En Ligue Europa, Liverpool n’a pas non plus de successeur depuis six ans. Comment une telle hyper puissance peut-elle autant peiner au moment de se confronter à ses semblables moins fortunés?

 

Les effets pervers de la concentration des meilleurs en une seule et même compétitions furent nombreux et ravageurs. Le premier d’entre eux fut la perte totale de repères internationaux. "Nous sommes la NBA du football", déclare Sir Dave Richards courant 2017, quand la première division anglaise affiche fièrement des effectifs et des salaires qui font de chaque rencontre un All-Star-Game suivi par des millions de téléspectateurs. Il fanfaronne… Mais à force de jouer entre elles, quelques stars en oublient les fondamentaux.

 

Quand les Messi, Ronaldo ou Müller continuent à se faire remuer dans quelques obscurs traquenards par des joueurs rustres mais motivés entre Augsbourg et Tenerife, les patients anglais, eux, perdent l’habitude de se confronter à ces joueurs qui visent plus le tibia que l’excellence. Un jeu assez spécifique se développe alors, très opposé au bon vieux kick and rush, plaisant à voir, mais tactiquement pauvre. On est loin des standards de la Bundesliga, qui remplit les stades allemands et européens, et de la créativité espagnole. D’ailleurs, Teutons (2018) et Ibériques (2020), qui se débarrassèrent de cette pauvre France dans les deux dernières finales internationales, voient leurs footballs portés par ces dynamiques-là.

 

 

Spectacle à tout prix et repli sur soi

Cependant, la Premier League se doit d’être spectaculaire. Or, le "whistle and flag gate" marque le premier pas du déclin européen et interne. Suite à l’élimination en phase de poule des quatre représentants britanniques de la Ligue des champions 2019, un arbitre craque et livre aux tabloïds un impensable aveu: depuis deux ans, les hommes du sifflet ont des consignes de laxisme concernant les hors-jeu et les fautes, afin de laisser le jeu se dérouler et favoriser les réalisations. L’interdiction de l’utilisation des révélateurs de ligne durant la retransmission des matches avait déjà fait tiquer l’opinion publique, titillée par la multiplication des litiges d'un championnat que les penalties étranges ont également aidé à devenir, de très loin, le plus prolifique.

 

Cela coupa aussi net la compétition anglaise des réalités bien plus rudes des joutes européennes. Difficile de scorer quand TOUS les hors-jeu sont signalés… Pas simple de se faire secouer sans que ça siffle. Quel paradoxe! L’arbitrage à l’anglaise totalement dénaturé! "We don’t care", titra ce bon vieux Sun quand Tottenham, dernier rescapé d’un énième naufrage anglais, se fit sortir sans ménagement par le Celta Vigo en huitièmes de la Ligue des champions 2020. Le FA’s board ne dit pas moins que cela en rappelant que du point de vue financier, et étant donnée l’exposition médiatique supérieure de la Premier League comparée à celle de la C1, il valait mieux se concentrer sur un bon classement outre-Manche que sur un parcours réussi en Europe. Et dans les faits, une sixième place anglaise rapporte plus qu’une finale européenne. L’UEFA s’en offusqua, mais, subtile, ne fit rien pour changer les choses. La réforme de sa compétition phare était satisfaisante, et elle n’avait besoin des clubs anglais qu’en tant que faire-valoir. Ou mécènes.

 

 

Car le jeu produit par ces quasi franchises britanniques n’était paradoxalement pas glorieux une fois sorti de l’entre-soi insulaire. Avec trente joueurs sous contrat, tous venus des quatre coins du monde, internationaux ou pas loin de l’être, les gestions d’effectifs devenaient compliquées. Dès qu’un élément brillait ailleurs qu’en Espagne ou en Allemagne, il était phagocyté immédiatement par le conglomérat anglais. Dans ce patchwork de stars plus ou moins avérées, difficile de survivre. Le turn-over est permanant, les transferts aussi. Il n’y a plus aucune stabilité d’effectif et les entraîneurs s’arrachent les cheveux pour tenter d’installer une continuité de jeu d’une année à l’autre, quand le mercato hivernal ne vient pas tout bouleverser avant.

 

En quelques années, la Premier League est devenue le réservoir à joueurs de toute l’Europe. En 2020, Manchester City affiche fièrement cinquante-cinq joueurs sous contrat, dont vingt-six en prêt en France, Belgique, Pays-Bas, Grèce et Portugal. Plus deux en Écosse. Un an plus tard, seuls vingt-neuf joueurs sélectionnables ou sélectionnés pour l’Angleterre figurent sur l’ensemble des feuilles de matches de l’avant-dernière journée. De l’autre côté du mur d’Hadrien, Rangers, Celtic, Aberdeen, Dundee et consorts sont devenus une forme d’annexe, une ligue de développement pour tous ces Britanniques qui cherchent simplement à jouer, barrés qu’ils sont par des cohortes d’étrangers surpayés. À leur contact, les footballeurs écossais se mettent à progresser au point que la sélection nationale et les clubs redeviennent pénibles à affronter.

 

Les jurisprudences Ballotelli et Ben Arfa, précurseurs d’un mouvement de reflux en 2015 et 2016, se multiplient. Des dizaines de gars brillants partis s’enterrer dans le bourbier anglais retrouvent le sourire et le football dans des championnats devenus annexes, et recouvrent leur statut de star. La France bien sûr, mais aussi le Portugal, la Grèce et la Turquie bénéficient du retour parmi les morts d’un certain nombre d’égarés du Channel. Le bras d’honneur adressé à la tribune présidentielle par Fekir, prêté au LOSC par Arsenal, quand les Dogues vinrent pulvériser les Gunners 5-1 à l’Emirates (triplé du garçon), fit ainsi couler beaucoup d’encre outre-Manche. Les Anglais, qui envoyèrent à Lille un zombie, ne l’avaient pas vu venir…

 

 

Au bar, citoyens!

Ce qu’ils n’avaient pas anticipé non plus, c’est la baisse du nombre d’abonnements TV et la chute des revenus publicitaires. Car si les places dans les enceintes anglaises étaient déjà hors de prix, il finit par en être de même des abonnements. Les supporters et téléspectateurs commencent à ne plus supporter les sommes indécentes à avancer pour le Sky Sports Pack, et en bons Anglais qu’ils sont, préfèrent aller au pub voir le match plutôt que de se saigner pour rester dans leur canapé. Face à la baisse des abonnements et à cet engouement retrouvé pour les visionnages en troupeaux plein de bières, les diffuseurs réagissent et demandent des sommes folles pour les échoppes qui souhaitent retransmettre les matches.

 

 

Las, les bistrotiers britanniques ne se démontent pas non plus et finissent, en janvier 2020, par décréter la grève du foot anglais! Rugby, NBA, snooker, courses de chevaux, mais aussi foot étranger et, ô sacrilège, hurling et sports gaéliques prennent place sur les antennes des bars, en lieu et place de la Premier League. Et pendant que le marché interne s’assèche, les crises financières qui secouent l’Asie en général et la Chine en particulier finissent de couper les robinets à fric. Quant au Moyen-Orient, Qataris et consorts commencent à voir la fin du règne des pétrodollars arriver, et l’instabilité géopolitique croissante du secteur ne rassure pas les acteurs financiers locaux.

 

L’argent devient rare, mais il faut payer les salaires et les arriérées de transferts. Le monde des agents, qui s’est goinfré depuis plus d’une décennie en vendant tout et n’importe quoi aux clubs anglais, ressemble à une fourmilière éventrée par le pétard d’un sale gosse. "On est passé de l’eldorado à l’eldoradin", se désole un des plus gros pourvoyeurs de jeunes Français à des clubs de seconde zone. Et les effets du Brexit commencent à se faire sentir: les variations qui impactent le taux de change de la livre et les ratés de l’économie anglaise n’arrangent rien.

 

 

Pauvre Angleterre, Angleterre pauvre...

Pendant que la banqueroute guette, les clubs continuent à ne plus passer l’hiver dans les compétitions européennes, et après les fiascos de 2018 (quatrième d’une poule Uruguay-Ghana-Japon en Russie) et 2020 (quatrième de la poule de Londres, sortis par le trio Slovénie-Grèce-Monténégro), les Anglais voient la Finlande les priver du premier Mondial entièrement climatisé de l’histoire. Ce n’est pourtant ni le talent ni le potentiel qui manque, mais les joueurs locaux ne trouvent plus, dans leur compétition domestique, un cadre pour progresser et apprendre. Même s’ils sont pour beaucoup titulaires dans leurs clubs respectifs, ils sont tous impactés par la baisse du niveau général de la Ligue. La formation anglaise est panne sèche car les joueurs étrangers peuplent aussi les centres de formations. C’est ainsi que dans les U20 de 2022, on ne compte pas moins de onze joueurs qui ne sont pas nés sur l’île, tous susceptibles de retourner vers leurs sélections d’origine.

 

Les sélectionneurs se succèdent mais rien n'y fait: les stars européennes qui règnent en maître sur le championnat s'adaptent comme par enchantement aux exigences des joutes européennes quand ils sont de nouveau entourés par des environnements tactiques et techniques plus adaptés aux réalités du football. Les joueurs britanniques, eux, sont incapables d'afficher cette polyvalence et, pire, sont orphelins de leurs patrons. Ils ne souffrent d'aucun déficit, ni dans l'engagement, ni dans le maniement de la balle, mais en six ans toute culture tactique a disparu, ventilée par le fric et la nécessité absolue du spectacle. L'obligation de résultat n'est plus vraiment de mise étant donnés les émoluments auxquels un relégué en deuxième division à droit. Enrichi mais ramolli, tel est le constat que fait Pogba quand il revient en Italie après cinq ans à MU.

 

Ce samedi 4 juin 2022, tel un vulgaire junkie, le football anglais est mort d’une overdose de fric. La bulle spéculative des droits TV a explosé, et quelques clubs avec. Repartir de zéro avec un champ de ruines en guise d’héritage, telle est la mission confiée à Thierry Henry, nouveau sélectionneur, et à la FA qui vient de mettre le championnat sous tutelle par le biais d’un salary cap drastique et d’une règle déjà discutée sur le nombre d’étrangers autorisé par clubs. "On est revenu en 1985, après le Heysel: nous sommes pestiférés", tonne Sir Alex Ferguson. Les championnats européens s’attendent à récupérer pour une misère ces réfugiés du foot, quand, déjà, ils accueillaient gratuitement ou presque des hordes entières de joueurs en prêts, sortis des vastes lofts anglais. "Game over", pleure le Daily Mirror.

 

Réactions

  • New Zorro le 13/10/2016 à 21h14
    Chelsea vient de signer un deal avec Nike qui lui rapportera 60M de livres par an jusqu'à 2032 selon le Guardian.

  • osvaldo piazzolla le 14/10/2016 à 00h31
    @Metzallica, leur équipe est un désastre depuis 50 ans au pays de "Fifty years of hurt" :)

    Sinon, à propos du passage sur le prix des abonnements télé, il y a quelque chose qui je crois est déjà en train de se passer et qui aurait pu être mentionné, c'est que de plus en plus de pubs en Angleterre proposent les retransmissions des matches anglais en grec ou en portugais, parce que ça leur coûte moins cher en abonnement télé.

  • Espinas le 14/10/2016 à 14h04
    J'en remets une couche.
    Soccernomics disait que les clubs de foot étaient un peu comme des entreprises "too big to fail" avec leur poids symbolique et qu'il y aurait toujours les pouvoirs publics et des repreneurs pour continuer.

    Admettons que l'économie du foot anglais soit très impactée (genre de droits TV divisés par 2), il y aura soit la possibilité de ne plus achetre de nouveaux joueurs aux tarifs précédents, soit les faillites qui libèrent des contrats + renaissance du club avec des nouveaux contrats à la baisse.


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