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Avant-Premier League 2023/24 : le bon et le truand

Preview Premier League - Sympa, nous avons séparé pour vous le bon grain (Luton Town) de l'ivraie (Newcastle United) cette saison. 

Auteur : Kevin Quigagne le 19 Août 2023

 

 

Le club à supporter

 

Luton Town. Les Hatters étaient encore en D5 il y a neuf ans, après avoir évolué en D1 de 1982 à 1992. Le club appartient indirectement aux supporters, via le consortium Luton Town FC 2020 Limited, créé en 2008 par des cadres du Supporters' Trust (détenteur de 50.000 actions du LTFC2020, dont 82% détenues par le businessman Paul Ballantyne), après un grotesque retrait de 30 points qui condamna Luton à la descente en non-League.

Depuis, une banderole "Betrayed by the FA" (Trahis par la fédération) est accrochée dans une tribune. L'actuel directeur général du club, Gary Sweet, est l'un des fondateurs du Supporters' Trust.

Luton Town, c'est aussi le premier club professionnel anglais à refuser le sponsoring des sociétés de paris sportifs, et le premier, dès janvier 2015, à rémunérer ses employés au "Living Wage", un smic facultatif (payable aux plus de 23 ans) supérieur au salaire minimum.

 

 

Le jeune manager Rob Edwards déclarait récemment vouloir "injecter un peu de chaos" dans l'élite. Cette philosophie punk donne un style de jeu conquérant, direct et physique (ça recherche pas mal les athlétiques attaquants Carlton Morris et Elijah Adebayo) s'articulant autour de systèmes disséqués ici, et dans lesquels la contre-attaque et les wingbacks(latéraux-ailiers, pistons) jouent un rôle clé.

L'ossature de l'effectif D2 a été conservée et rehaussée par neuf recrues (pour environ 23 millions), dont le latéral burkinabé Issa Kaboré (prêté par Man City), passé par Troyes et l'OM. Marvelous Nakamba, milieu prêté par Aston Villa la saison dernière, a signé pour trois ans.

Le merveilleusement nommé Zimbabwéen sera l'un des cadres, aux côtés du capitaine Tom Lockyer, de Pelly Ruddock Mpanzu (premier joueur à faire D5-PL avec le même club), des latéraux gauches Ryan Giles et Amari'i Bell, de l'ailier Jordan Clark et des buteurs Morris et Adebayo.

L'ex prodige Ross Barkley arrive (gratos) de Nice et tentera de se relancer après une succession d'échecs. Il est vrai qu'être étiqueté "The next Paul Gascoigne" étant jeune (à Everton, son club formateur) porte rarement bonheur.

Le stade de Kenilworth Road (10.356 places), vestige d'un autre temps, illustre à merveille l'idiosyncrasie de ce club, aussi bien par son caractère unique que par sa désormais célébrissime entrée visiteurs (que je présentais ici en 2012, voir vignette #7).

Le "Kenny" n'étant pas (du tout) aux normes PL, des salles VAR et un centre média équipé de studios d'analyse ont notamment dû être construits. En moins de trois mois (joli tour de force), c'est une bonne partie du stade qui a été totalement refaite ou modernisée, pour un coût d'environ dix millions (détails dans ce clip).

Le gros morceau a été la reconstruction totale de la tribune Bobbers, convertie en loges privatives en 1986 après une première tentative de démolition en mars 1985 des hools de Millwall... Le premier match à domicile, vs Burnley (J2), a été reporté mais le deuxième devrait se disputer au Kenny. Le nouveau stade devrait être terminé courant 2025.

 

Le club insupportable

 

Newcastle. Petit conseil aux Magpies en Ligue des champions : les arbitres y sont beaucoup moins coulants qu'en PL. Car au milieu et derrière, Burn, Schär et Botman en particulier ont bénéficié l'an passé d'une indécente clémence du corps arbitral. Bon sang, même les frotteurs du métro vont moins au contact.

La stratégie antisportive de NUFC (faire tourner le chrono, stats à l'appui) ne les rend guère populaire mais elle a payé. Le coup de génie des Saoudiens : nommer un entraîneur anglais à la touche de gendre idéal, ça invite l'indulgence et amadoue les médias. Les nouvelles consignes sur le time-wasting devraient les forcer à évoluer.

Après avoir tout de même claqué 250 millions nets en recrues en 18 mois, l'équipe n'a ébloui que par à-coups, grâce au jeu occasionnellement très soyeux des Guimarães, Almirón, Isak ou Wilson.

Côté business, NUFC vient de signer un contrat de sponsoring maillot à 25 millions l'année avec la société Sela, propriété du PIF (évidemment). Même avec la plus-value d'une participation en C1, le montant semble élevé (le précédent, avec FUN88, n'était que de 7 millions).

 

 

Fort heureusement, depuis décembre 2021, les impitoyables justiciers de l'instance PL possèdent un outil infaillible pour détecter la magouille, à savoir la règle du "FMV", Fair Market Value. Mais rien d'anormal de relevé en l'espèce. Infaillible, l'outil, on vous dit.

L'entreprise de normalisation du club va bon train, et avec elle la surenchère dans la flagornerie et la fascination pour Amanda Staveley (actionnaire minoritaire de NUFC et le principal visage public des Saoudiens). Seules quelques voix s'élèvent ici ou là pour dénoncer le rachat et l'aberration du concept de club-État. Rendons hommage ici à Barney Ronay et Jonathan Wilson, tous deux du Guardian, parmi les seuls journalistes connus à l'ouvrir sur ces deux thèmes.

Et saluons l'action du groupe NUFC Fans Against Sportswashing qui a créé le fanzine Hailstones in the desert. Ces activistes protestent parfois devant St James' Park (ci-dessus avant le match contre Chelsea le 12 novembre dernier) et montent des coups à l'occasion.

Et, pour couronner le tout, après des essais "concluants" dans le cricket, le rugby et quelques festivals, ainsi que lors d'un double concert à SJP du novocastrien Sam Fender (le "Springsteen anglais", lol), des buvettes de SJP pourraient être remplacées par des murs de "e-bars", des alignements de machines débiteuses de pintes, "éliminant ainsi les files d'attente", vantent leurs commerciaux.

Des distributeurs "censés servir la pinte parfaite à chaque fois", s'enthousiasme Nick Beeson, le concepteur. Bonjour la convivialité... À quand le parfait e-stade ou e-public pour chanter le e-chant idoine ? Une putain d'époque qui sied parfaitement à ce navrant club.

 

 

AVANT-PREMIÈRE LEAGUE

La grande présentation

Nouvelles têtes

Le bon et le truand

 

Réactions

  • Jah fête et aime dorer Anne le 20/08/2023 à 16h47
    Merci pour l'article, comme toujours fouillé, intéressant et plaisant à lire.

    Sur les 30 points de pénalité de Luton, serait-ce possible d'avoir un peu plus d'explications je te prie ?
    Si j'ai bien compris, ce sont en fait deux pénalités cumulées à cause des fautes commises par les anciens propriétaires : une de 10pts pour avoir versé de l'argent illégalement à des agents, une de 20 pts par rapport à la résolution de créances ? C'est cette dernière que je comprends moins bien, d'autant plus que certains articles sont un brin contradictoires.
    En gros, un créancier a refusé la proposition du club par rapport à des dettes et la FA a alors sanctionné Luton ? Mais en plus la FA a imposé un accord de créance et a interdit d'appel Luton sous peine d'exclusion totale du club ?

  • Mangeur Vasqué le 21/08/2023 à 11h52
    Sur les 30 points de pénalité de Luton, serait-ce possible d'avoir un peu plus d'explications je te prie ?

    =================================================================================================================

    Oui, bien sûr. Je vais tenter de répondre à tes questions, c'est vrai que c'est pas les articles un peu confus sur le sujet qui manquent. N'hésite pas à me dire si j'ai réussi dans ma mission de répondre à tes questions ou lamentablement échoué !

    Je te mets d’abord le classement final de cette saison de D4 là (2008-09) pour que tu comprennes mieux le contexte général du foot anglais, D4 dans laquelle se trouvait Luton Town : lien.

    On voit donc, sous le classement, que 4 clubs de D4 se prirent des déductions de points cette saison-là :

    1) Darlington, 10 points, pour placement en redressement judiciaire (tarif syndical). “Darlo” était un bordel sans non, unique même (dans le genre très comique, vu de l’extérieur. Voir cet article lien et mes précisions lien - poste du 29/04/2022 à 00h05 - sur la progressive "descente aux enfers" du club).

    2) Rotherham, 17 points, pour avoir émergé d’un redressement judiciaire sans un plan “CVA” (Company Voluntary Arrangement) conforme aux exigences de HMRC (le Fisc britannique). Le CVA comprend notamment un plan échéancier pour rembourser les créanciers, et il faut qu’il soit solide, surtout vis-à-vis des “créanciers sécurisés” (c-à-d les créanciers qui gravitent dans le monde du football, voir mon poste suivant).

    3) Bournemouth, 17 points, pour les mêmes raisons que Rotherham, et que Luton, voir #4. Les Cherries qui (tout comme Rotherham) s’en sortiront d’ailleurs. À leur tête, un brillant entraîneur de 30 ans qui ferait son bout de chemin : Eddie Howe.

    4) Et Luton, 30 points (en deux fois, 10 pts et puis 20 pts, en juin et juillet 2008, donc un mois avant le début de la saison). 10 points pour transferts irréguliers (des anciens dirigeants avaient effectué des paiements illégaux à des agents de joueurs), et 20 points pour les mêmes raisons que Rotherham. Ces malversations étaient le fait de l’ancienne gouvernance, le bordel remontait au début des années 2000), avant que le club ne soit repris en urgence par les supporters, via un consortium (le LTFC2020) mentionné dans l’article, qui détient toujours le club. Voir lien (“Luton Town Football Club 2020 Ltd (LTFC 2020) was formed in 2008 by a consortium of born-locally, passionate Luton Town supporters with the absolute objective of correcting the imbalances created by many years of previous mismanagement which led the Club into three administrations and ultimately condemned it to non-league lien).

    Ces retraits brutaux de points étaient très courants à l’époque. Rien qu’entre 2007 et 2010, 12 clubs de Football League, plus Portsmouth en Premier League, en firent les frais (récemment, on a eu le Derby County de Wayne Rooney, manager, en D2, 21 points enlevés). De même que les irrégularités diverses, maguilles, etc. ainsi que les redressements judiciaires. Depuis, la législation sur les conditions d’acquisition d’un club, sur les actionnaires, sur la gouvernance, sur les niveaux d’endettement (FPF, etc.), s’est renforcée (j'en parlais dans cet article lien, ainsi que dans les réactions, tous ces escrocs ont poussé les autorités à introduire une nouvelle législation sur l'acquisition et la gouvernance de club (le "owners' and directors' test, parfois appelé le "fit and proper person test", son appellation d'origine) et les instances (FA, Football League, Premier League) agissent pas mal en amont (sauf si tu t’appelles Manchester City bien sûr), elles essaient en tout cas d'être plus pro-active, bcp plus qu’avant.

    Alors pourquoi autant de points retirés à Luton Town ? (comparés à d’autres, si tant est qu'on puisse comparer "like for like", à l'identique). On peut en effet imaginer qu’un amalgame de points (mettons, 20) aurait pu largement suffire, et donner au club une chance de s'en sortir.

    Raison donnée par la FA (fédération anglaise) : c’était la troisième “insolvency” (insolvabilité menant à la faillite, donc redressement judiciaire) de Luton en dix ans. Ce qui signifie à chaque fois, dixit la FA, beaucoup de dettes jamais remboursées.

    La décision (inédite) de leur sucrer 30 points engendra un terrible sentiment d’injustice chez les supps de Luton Town, qui avaient réussi à imposer un consortium de représentants supporters à la tête du club. Eux considéraient donc qu’ils établissaient un modèle plus vertueux et se voulaient de bonne foi (et l’étaient, l’avenir le montrera), et donc disaient qu’il fallait leur laisser une chance et pas les matraquer ainsi.

    Mais la FA ne le vit pas du tout comme ça. Eux en avaient marre des faillites/redressements judiciaires de club (on en était alors à 60 ou 70 depuis le milieu des années 1980, mais grosse accélération dans les années 2000, voir mon poste ci-dessous, je ne voulais pas tout mettre dans un seul poste) et ils voulurent frapper un grand coup.

    La FA était particulièrement fixés sur les dettes, sur l’endettement, les créanciers, etc. et les risques en découlant et considèrent que trois faillites en dix ans cela signifiait que le club n’apprenait pas de ses erreurs, qu'il persistait à vivre au-dessus de ses moyens en collectionnant les dettes et les créances et que donc Luton Town présentait un risque particulier (en restant en Football League, donc risque préjudiciable à la FL, aux autres clubs de FL, à l'intégrité de la FL, à son image donc, au "produit FL". FL est une marque, reconnue dans le monde du football, de même que la Premier League).

    Les nouveaux dirigeants de Luton Town, donc les représentants des supps (Gary Sweet en tête, c’est l'actuel directeur général du club et l'un des fondateurs du Supporters' Trust qui sauva le club en 2008, comme mentionné dans l’article), eux disaient : “30 points de retrait, ça va nous couler. Laissez-nous une chance messieurs de la FA, on a un nouveau board, de nouveaux dirigeants honnêtes et compétents. On fera les choses dans les règles, pas comme avant. Régulez-nous et contrôlez-nous strictement si vous voulez mais ne nous imposez pas la déduction de points la plus sévère de l’histoire du football anglais, qui va certainement nous envoyer en non-League, pour des faits avec lesquels nous, nouveaux dirigeants de bonne foi et pleins de bonne volonté, n’’avons rien à lien

    Mais la FA ne voulut rien savoir et ils leur collèrent 30 points de déduction en début de saison.

    Les supps interprétèrent ça évidemment comme une “death sentence”, une injuste condamnation de facto à la non-League (qu’ils n’avaient pas connu depuis 89 ans), avec risques donc de perdre le statut pro et avec ça le club (voir l’autre relégué en non-League cette saison-là, feu Chester City, qui ne s’en est jamais remis a été dissous en 2010 lien. Reformé en Chester FC, qui démarra en D8 et est aujourd’hui un club semi-pro de D6. Pour la petite histoire, Chester est une superbe ville située à 25 kms au sud de Liverpool, à la frontière avec le Pays de galles. Leur stade, le Deva Stadium, est célèbre pour être traversé par la dite frontière, ce qui entraîna de comiques embrouilles lors des restrictions Covid (différentes au PdG et en Angleterre), voir lien ou lien.

    La non-League, ce sont les divisions sous la Football League, donc D5 (aujourd’hui quasi 100 % pro mais pas à l’époque) et divisions semi-pros et amateurs. Il est dur d’en sortir de non-League (Wrexham y est par exemple resté 15 ans), même pour un club de D4 relativement gros, car une seule montée automatique et une autre aux barrages.
    Et évidemment, la vie en non-League, même en D5, est bcp plus dure financièrement qu’en Football League, moins de billetterie, pas ou très peu de recettes médias, y’a pas le cachet de la Football League donc difficile d’attirer des pros chevronnés en fin de carrière par exemple, etc. Luton Town, qui était encore en D2 en 2007, dégringola et fut “condamné” à la non-League (D5) lors de cette saison 2008-09, non-League où ils resteront 5 ans (2009-2014).

  • Mangeur Vasqué le 21/08/2023 à 12h30
    Donc, sur les dettes (voir mon poste précédent), et sans trop entrer dans les détails, y’a deux catégories de dettes en matière de football (selon les termes de la cynique “football creditors rule” lien) :

    1) celles que le club placé en redressement judiciaire (ou menacé de) doit obligatoirement rembourser, ce sont les dettes du football (les "secured debts/creditors", dettes/créanciers sécurisé(e)s) : sommes dues à d’autres clubs, aux joueurs (salaires impayés par exemple), entraîneurs, agents ou instances. Et, en dernier lieu dans ce cadre des dettes sécurisées, si possible tous les employés du club (voir lien).

    2) celles externes au football et seulement remboursables une fois les premières réglées. Ce sont les “unsecured debts” (non sécurisées). En pratique, ces créanciers ne touchent guère, au maximum, que “15-20 pence in the pound” selon le jargon consacré, donc 15-20 % des sommes dues, et souvent bien moins. Les négociations pour ce genre de chose se font entre le club placé en redressement, le Fisc britannique (HMRC), la boîte chargée de gérer le redressement, et la Football League (ou Premier League, bcp plus rare de nos jours).

    Ces créanciers non sécurisés sont typiquement des entreprises (locales, souvent), artisans, restaurants, hôtels, fournisseurs de services, traiteurs, etc. Et même des administrations, type bureaux, hôpitaux, centre de loisirs, piscines, écoles, etc. avec lesquels le club a un deal. Portsmouth par exemple en 2010 (123 millions £ de dettes, Pompey s’était pris 9 points de retrait) devait 40 000 £ à deux écoles du coin (qui leur sous-louaient des terrains, pour l’entraînement des jeunes je crois). Ils devaient même de l’argent aux scouts (à la Scout Association de Guernesey, qui ne vit jamais son argent. Pas grand chose certes pourrait-on penser, 697 £, mais pour ce genre d'association pas thunée et qui ne reçoit aucune subvention au Royaume-Uni, c'est bcp d'argent).

    Et les dettes du fisc britannique (HMRC) ! Yes, même les dettes vis-à-vis du fisc sont non sécurisées. HMRC est furax depuis des années, et campagne pour changer cette “football creditor rule” (pour plus d’équilibre dans les remboursements entre les deux types de créanciers). Mais en vain, le lobby du football est puissant.

    HMRC se fait bien entuber aussi sur les impôts des salaires de centaines de joueurs aussi (une grosse part est déclaré en “droits d’images”, taxation à 19 % donc et non pas 45 % comme il se devrait), j’en ai parlé ici par le passé mais chépuoù. Voir par exemple cet article lien “Tax affairs of 246 footballers being investigated by HMRC in 2019-20 • Tax authorities increasingly concerned by tax loophole • Players pay 19% tax on image rights, but 45% on wages”

    Au plus fort des redressements judiciaires (1990-2000), y’avait une quinzaine de boîtes de recouvrement spécialisées dans le football, ou qui avaient un gros “département football”.

    Faut dire que ça rapporte. Je me souviens avoir parcouru les détails du redressement judiciaire de Portsmouth en 2010, dont le rapport de 100+ pages, y compris les émoluments de la boîte qui, pendant deux ans, s’occupa du redressement judiciaire (boîte dirigée par Andrew Andronikou, personnage controversé) . C’était du 500 £ de l’heure, par employé d’Andronikou, facturé à Portsmouth, endetté à hauteur de 123 millions donc... Et y’avait souvent trois employés sur place pendant des semaines. Rien que la facture du cabinet d'Andronikou s’éleva à 2 millions. Y'avait pas d’argent pour rembourser les ambulances utilisées par Portsmouth, ou les écoles, ou les traiteurs, ou les fleuristes, ou la maison de la presse du coin, etc. (y’avait 450 créanciers) mais aucun problème pour régler l’administrateur.

    Voir cette carte et liste (non exhaustives) de clubs placés en redressement entre 1984 et 2009 : lien

    On voit que beaucoup de clubs (une vingtaine) figure dans cette liste entre 2002 et 2004. Dont Luton Town, qui bizarrement n’apparaît sur la liste que pour le placement en 2008 mais qui avait bien subi un redressement en 2003 (voir lien, “Despite being placed in administrative receivership for the majority of the season following a turbulent change of ownership and having a rigorous transfer embargo imposed as a result”). Bon, après comme je l’écris, la liste ne se veut pas exhaustive.

    La raison : l’effondrement du deal ITV entre cette chaîne et la Football League (voir par exemple lien), clubs de D2 à D4 donc (chaîne terrestre mais qui avait un bras digital, ITV Digital/ONDigital, qui voulait à terme s’attaquer à la Premier League et donc concurrencer le BSkyB de Murdoch (mais qui dépassa à peine 1 million d’abonnés et ne dura que 5 ans, 1997-2002).

    ITV avait promis 315 millions £ sur trois ans aux 72 clubs de Football League, à partir de 2002-03, clubs qui bien sûr anticipèrent et s’endettèrent. Quand le deal s’écroula, la pllupart des clubs de Football League se retrouvèrent dans une mouise pas possible et une vingtaine furent placés en redressement.

  • Jah fête et aime dorer Anne le 27/08/2023 à 15h44
    Merci pour les précisions, c'est très clair ainsi.
    Et donc Luton a remboursé les dettes football et, si j'en crois les articles, s'est vu imposer un taux de remboursement de 16% pour le reste des créanciers.
    Que les salaires des employés passent en dernier dans les dettes football, c'est quand même bien moche.

  • Mangeur Vasqué le 28/08/2023 à 15h15
    Et donc Luton a remboursé les dettes football et, si j'en crois les articles, s'est vu imposer un taux de remboursement de 16% pour le reste des créanciers.

    ===================================================================

    Merci du retour.

    Oui, c’est bien ça, (seulement) 16 % pour les créanciers non sécurisés (vs 100 % pour les dettes du football, créanciers sécurisés). Voir cet article du Times par exemple :

    lien [...] “1) The new company (Luton Town 2020) should pay the unsecured creditors the amount offered at the time of the CVA hearing (16 pence in the pound).”

    J’ignore à quel taux Luton Town envisageait de rembourser les non sécurisés avant cette injonction, ou même s’ils avaient structuré une telle démarche. Peut-être pas, car comme je l’explique dans mon premier poste, le nouveau board (dirigé par des supps, donc) n’avait pas fait de CVA (cf le poste) et comptait sans doute naviguer à vue. Option bien sûr refusée par les instances.

    C’était une période très turbulente pour le club, changement de proprio après des années de galère financière et sportive (descente de D2 en D4, puis D5 en 2009), le président du Supporters’ Trust de Luton qui reprend les rênes du club dans l'urgence (donc pas ou peu d’expérience dans la gestion de club, encore moins un club en crise), etc. Cette absence de CVA de la part de Luton n’était donc pas forcément malveillante, mais juste peut-être le fruit de l’inexpérience et de la panique. Ça ne les excuse pas mais disons qu'un peu de compréhension de la part des instances envers ces supporters aurait été la bienvenue. Non, au lieu de ça, ils s'étaient pris le plus gros retrait de points de l'histoire du foot anglais. La saison précédente, les instances avaient infligé une pénalité moindre au Leeds de Ken Bates pour des faits similaires (- 25 points), un homme d’affaires peu connu pour sa probité.

    Oh, et en parlant de Luton et Newcastle, quelle jouissance ce NUFC-Liverpool hier aprèm ! J’étais en vacances quelques jours dans le Yorkshire, ai maté le match dans un pub, et pour fêter ce grand moment comique on a spontanément payé une tournée à 4 clients incrédules qui venaient d’arriver. Et on a repris la route, le cœur en joie et la tête en fête.

  • Mangeur Vasqué le 28/08/2023 à 15h40
    Que les salaires des employés passent en dernier dans les dettes football, c'est quand même bien moche.

    =============================

    En préambule, ce qui a fait particulièrement mal à Luton Town (alors en D4) pour ces 30 points retirés a été le timing : 10 points de sucrés début juin 2008 (pour des paiements illégaux à 6 agents entre 2004 et 2007 totalisant 160 000 £ ; les sommes avaient transité par la société détentrice du club alors, Jayten Stadium Limited, et non pas via les comptes du club comme le stipulait le réglement) et 20 points un mois plus tard, plus une amende de 50 000 £. Ce qui n’est pas top niveau recrutement à l’intersaison. Difficile en effet d’attirer des joueurs, même en prêt, dans une telle position (surtout que souvent dans ces cas-là, s’il n’y a pas interdiction de recruter, il y a de grosses restrictions, ce qui cependant n'était pas le cas de Luton).

    Comme tu le soulignes, quelle injustice vis-à-vis des employés du club, moins dédommagés que les autres créanciers du monde du football. Oui, évidemment, aucune différence ne devrait être faite entre les dettes liées au football. De même, tous les créanciers, sécurisés ou non, devraient être à la même enseigne et remboursé le même %. Or, d’un côté t’as les créanciers les plus riches avec obligation de les rembourser à 100 % et de l’autre, les lambdas (dindons de la farce) qui ont les miettes, au mieux 15-25 %. Quoique je viens de noter (découvrir) une récente amélioration : depuis 2022 les nouvelles règles sur l'insolvabilité des clubs font que si le club ne rembourse pas au moins 25 % aux créanciers non sécurisés, c'est 15 points de pénalité. lien, "Under EFL insolvency rules, unsecured creditors must be paid at least 25 pence in the pound to prevent a 15-point penalty when exiting..."

    Le fisc britannique (HMRC), lui-meme créancier non sécurisé malgré sa stature et son combat pour ne plus l’être, se bat depuis longtemps sur ce dossier d’un nécessaire rééquilibrage mais en vain. HMRC a tout de même récemment signé une petite victoire fin 2020, en montant en grade dans le "pecking order" (hiérarchie) des créanciers, obtenant le statut de "preferential creditor" (au nom de la "Crown Preference"), voir cet article lien. HMRC est toujours un créancier non sécurisé mais il vient preums chez les non sécurisés.

    Dans le récent cas de Derby County, dernier gros cas anglais de redressement judiciaire (septembre 2021-juin 22), HMRC a obtenu d’être remboursé entre 25 et 50 %, selon les sources (Derby County devait tout de même 35 millions £ au fisc, ça donne une idée du niveau des dépenses salariales dans ce club de D2 à l’époque, D3 aujourd’hui).

    Derby County, qui écopa de 21 points de retrait (et traînait 60-80 millions £ de dettes si on exclut les 120 millions de prêts – “soft debts/loans” – dus au proprio d’alors, Melvyn Morris, qui accepta de ne pas toucher un penny, après avoir claqué 250m en six ans pour essayer de faire remonter les Rams en Premier League, en vain). 12 points avaient été retirés fin septembre au moment du placement en redressement, puis 9 en novembre.

    Certes, Derby ne pouvait pas recruter de toute manière, sauf des joueurs libres et avec des restrictions niveau salaire, 12 000 £/semaine était le maximum autorisé (interdiction de recruter depuis avril 2022, sachant que les règles de recrutements pour les clubs de FL sont plus souples), mais peu importe, Luton n’était pas frappé par ce genre d’interdiction et sans cet horrible timing aurait pu peut-être pu faire venir quelques bons joueurs. Après, remonter 30 points de déficit est évidemment un sacré défi. Derby County à - 21, managé par Wayne Rooney, n’est pas passé loin du maintien. Jusqu’à mars, ils étaient en course pour se maintenir mais ont craqué sur la fin (il leur a manqué 7 points, sur 46 matchs).

    Une autre injustice qui “fait bouillir ma pisse” (comme on dit élégamment en anglais) : que les administrateurs se gavent autant sur la bête exsangue. Comme je l’écrivais, à Portsmouth en 2010 l’administrateur Andrew Andronikou avait pris 2 millions £ (il facturait 500 £ de l’heure, + TVA, pour chacun de ses 3 ou 4 employés sur le truc, pendant presque 2 ans, certes pas à temps plein. Le truc étant particulièrement complexe faut dire, on savait à peine qui était le(s) propriétaire(s) du club, cachés derriere des sociétés-écrans domiciliés dans des paradis fiscaux) mais nombre de créanciers n’ont quasiment pas été remboursés ou très mal.

    Dans le cas de Derby County, l’administrateur (la boîte d’insolvabilité qui supervisa tout ça, Quantuma lien – où l’on retrouve le “restructuring specialist” Andrew Andronikou d’ailleurs lien, toujours dans les bons coups lui) facturait déjà 2.1 millions £ après 6 mois (avril 2022) :

    lien “It’s reported that Quantuma racked up over £2 million in costs in the first six months of the administration. Their latest response to supporters’ groups assures us that no fees have been drawn so far, but not that they won’t be taking these from out of the sale proceeds. It appears to me that the conduct of the administrators has fallen far short of what Derby County has a right to lien

    2.1 millions en 6 mois… On ne connaît pas le montant de la facture finale mais vu que le placement avait encore duré 3 mois (fin juin 2022), ça a dû approcher les 3 millions.

    Montant totalement insensé pour une gestion très contestée de Quantuma. Certes, un redressement n’est pas une partie de plaisir. C’est un processus difficile, brutal et turbulent (faut notamment limoger des employés et forcément décevoir des créanciers). The Athletic et d’autres avaient un peu enquêté sur la gestion de ce redressement par Quantuma et c’était pas beau à lire.

    Bref, il devrait de toute manière y avoir un plafond pour ce genre d’opération, ou alors le redressement devrait être effectué par les instances elles-êmes, qu’on pourrait espérer moins gourmandes. Après tout, les instances définissent souvent un “business plan”, avec restrictions et l’imposent au club, elles savent faire et pourraient tout aussi bien gérér les redressements.

    Dans le cas de Derby County, le fisc n’a récupéré qu’entre 25 % et 50 % des 35 millions £ que le club leur devait et les autres créanciers non sécurisés en général entre 20 et 25 %.

    Mais pour certains créanciers lambdas, ça a été la galère. Si les agents sportifs ont touché chaque penny des 500 000 £ que Derby leur devait, certains créanciers ont dû être payés par les supporters, via des collectes et du financement participatif. Ça a été le cas pour les ambulances St John lien., une institution en Angleterre lien .

    St John est une “charity” qui facture les clubs pour le matos, les salariés, etc. mais qui emploient surtout des bénévoles. Ils sont très présents dans le football et le sport en général. Quand par exemple t’as un spectateur qui fait un malaise dans une tribune, ce sont bien souvent les secouristes de St John qui interviennent. Ce sont eux qui fournissent les défibrillateurs et autres dans les stades, et font bénéficier les clubs de leur savoir-faire. Les clubs paient St John bien sûr (qui se fait environ 2 millions £ par an des clubs de PL), mais beaucoup moins que si c’était des sociétés privées ou le NHS (Service National de Santé). Ce sont donc des collaborateurs privilégiés des clubs. Mais pas assez privilégiés pour toucher un penny en cas de faillite du club...

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