2002 moins 1 : France-Japon
Le Japon mesure l'écart On pourra gloser sur la qualité de l'opposition, mais ces adversaires-là avaient donné du fil à retordre aux Bleus au tournoi de Casablanca, à la veille de l'Euro 2000 (2-2, 4 tab à 2). Moins pusillanimes que les Allemands le mois dernier, mais tout aussi impuissants, les Japonais repartent avec une valise beaucoup plus lourde. Ils ne sont pas parvenus à montrer leur habileté dans le jeu court ni à placer leurs accélérations, sinon sporadiquement par Nakata qui a pu faire valoir la qualité de ses frappes. Lors de la précédente confrontation, Troussier avait affirmé que si son équipe ne battait les champions du monde, les responsables japonais seraient bien capables de le limoger… Il semble qu'il ait depuis lors suffisamment assis son autorité pour échapper à pareille sanction. La claque reçue a Saint-Denis devrait lui permettre de recadrer les ambitions de la sélection nippone, et l'aider à la remettre au travail (notamment sur les plans athlétique et tactique). Mais ce n'est pas la capacité de travail qui lui fait défaut.
Trop beau?
Les Bleus se sont créé des occasions à un rythme infernal, ne laissant que des miettes à leurs adversaires, dominés dans toutes les lignes. Roland et Larqué ont eu bien raison (il faut le signaler) de rappeler qu'il fallait profiter du plaisir à voir cette équipe évoluer à un tel niveau, à l'image de son meneur de jeu. Elle a si souvent été réduite à sa force athlétique, tactique et collective qu'on est presque surpris de la voir évoluer avec une facilité technique croissante, qui ne tient pas au seul Zidane. Elle compte en effet quelques orfèvres, que l'on a vu briller malgré la lumière du numéro dix.
Tout semble si simple que Lamouchi trouve le bon placement naturellement (on lui pardonnera sa petite cagade, qui nous a permis d'apprécier le beau tir de Nakata sur l'équerre), comme Silvestre un peu plus tard, sans parler des entrées gagnantes de Wiltord et Trezeguet.
Le match contre l'Espagne devient indispensable, soit pour calmer l'euphorie tranquille qui s'est installée, soit pour la conforter… Car si la France étincelle contre des oppositions sensiblement inférieures, elle doit encore se doter des mêmes assurances en face de formations d'élite (avec le Portugal à suivre, elle pourra s'étalonner).
Le club France n'est pas un club de vacances
À la fin de l'automne et après trois matches nuls (Angleterre 1-1, Cameroun 1-1, Afrique du Sud 0-0), certains doutaient de la motivation des internationaux, prédisant l'ouverture d'un nouveau cycle de matches amicaux ennuyeux et sans signification ("Il faudra s'y faire", titrait L'Equipe le 5 octobre, au lendemain du Cameroun). Les trois démonstrations accomplies à Istanbul et au Stade de France et la détermination montrée à chaque occasion indiquent que les champions d'Europe n'ont pas l'intention de faire baisser la pression, ni de lâcher quoi que ce soit à leurs adversaires. La sélection est désormais un lieu d'excellence, où l'on voit les joueurs donner le meilleur d'eux-mêmes (à l'image de Zidane ou Desailly, leaders surmotivés). Pour les deux prochaines confrontations contre les Ibères revanchards, l'enjeu est assuré. Et la Coupe du monde 2002, c'est déjà dans quatorze mois...
Le soufflé retombe en sifflant
Nous n'allons pas faire un couplet sur le public du SDF à chaque match des Bleus, mais tout de même: après une Marseillaise vaillante et dix premières minutes engageantes, il s'est profondément endormi devant un spectacle pourtant extraordinaire, ne se réveillant que pour siffler Karembeu…
Roland et Larqué font semblant de ne pas comprendre pourquoi ce dernier est sifflé. Font-ils semblant ou sont-ils tellement dans leur bulle qu'ils ignorent réellement que la sélection du Kanak est contestée. Dans le contexte unanimiste qui entoure l'équipe de France, et qui voit même Dugarry enfin épargné (le Girondin a encore été extraordinaire samedi soir, n'en déplaise aux aveugles), Karembeu reste l'ultime sujet de polémique. Les journalistes peuvent eux aussi s'offusquer de ce traitement ("Karembeu, assez inexplicablement sifflé par une partie du public que les buts ne suffirent pas à rendre intelligente" écrit Vincent Duluc dans L'Equipe), mais ils oublient qu'ils y ont contribué, notamment par les polémiques entretenues dès que le sélectionneur annonce une liste, particulièrement "des 22". Une sélection nationale ne s'établit pas selon un système de cotation (d'après lequel, entre parenthèses, ce seraient quarante joueurs qui mériteraient de porter le maillot bleu). C'est faire peu de cas des qualités humaines ou du passé d'un joueur comme Karembeu (souvenons-nous de son Euro 96), de son apport au groupe. Et si l'on peut discuter sa présence parmi les Bleus (rappelons cependant qu'il n'est pas titulaire…), en aucun cas il ne mérite des huées. Rendons quand même grâce à la partie du public qui a contre-attaqué en scandant son nom.
BLOC-NOTES
compteurs
Si Zidane tire les penalties, il va rapidement rattraper Djorkaeff au classement des buteurs. Et si en plus ce dernier voit Trezeguet et Wiltord lui piquer sa place de joker et, avec Henry, le griller au ratio buts/matches… Il va falloir en donner des interviewes pour être dans les 22 en 2002.
psychiatrie
Larqué est toujours obsédé par la règle des six secondes pour le gardien, il les compte dans sa tête et fait des "attention Ulrich (ou Fabien, Grégory etc.)". Au premier arbitre qui siffle un coup franc, il va exploser.
instinct
Liza est un défenseur intraitable : même dans la surface adverse, il contre les tirs (Vieira, 78e).
c'est pas le moment
Les caméras cadrent Nelly Viennot, 4e arbitre. Larqué évoque vaguement Strasbourg-Metz, mais Roland change très vite de sujet.
années-lumière
Letizi se rappelle le match amical PSG-Japon, au cours duquel son club avait eu des difficultés: "Aujourd'hui c'est quand même une meilleure équipe en face".
avec Nico, c'est toujours compliqué
La non-sélection d'Anelka est-elle la conséquence d'une "méprise", Lemerre le croyant actuellement blessé (ce qu'a démenti Fernandez)? À moins qu'il s'agisse d'une raison diplomatique, d'un côté ou de l'autre.