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Il y a vingt ans, le 20 février 1992, la dernière pierre de la création du championnat de Premier League était enfin posée. Cet aboutissement mettait fin à douze ans d’un combat sans merci entre les clubs majeurs et les instances, le tout sur fond de déliquescence – puis résurrection -du football anglais.

Pour l’intro, voir première partie. Quatrième et dernière partie aujourd’hui : du printemps 1991 à la création de la bête.

[abréviations : FA = Football Association ; FL = Football League].

1991 : la Premier League voit enfin le jour

Début 1991, un mois après les réunions entre le Big Five et la FA, la fédération consulte individuellement tous les clubs de D1 pour prendre la température de la situation sur le terrain. Ces derniers ont tous reçu la visite de Rupert Murdoch et savent que les droits TV pour la période 1992-97 seront renégociés en fin de saison 91-92. En clair, au lieu de toucher de la FL environ 400 000 £ par an, celui que l’on surnomme Dirty Digger (le fouille-merde) leur en promet dix fois plus. Les derniers réticents sont vite convaincus.

Début avril 1991, lors d’une conférence de presse, le président de la FA annonce officiellement la naissance imminente de la Premier League (d’inspiration Bundesliga comme le souhaitait la FA, théoriquement prévue pour 18 clubs – un mois plus tard le Big Five la fera passer à 22 clubs).

Le modèle allemand a fait long feu

Le modèle allemand coopératif a fait long feu

Le 13 juin 1991, 16 clubs signent un accord préalable. La FA pense avoir  réussi son coup en obtenant l’inscription dans les textes que la PL évolue « within the administration of the Football Association », comme outre-Rhin où la Bundesliga fait partie intégrante de la fédération (DFB). La FA s’est en effet inspirée des structures allemandes en organisant l’affaire avec le Big Five. En réalité, la PL ne s’éternisera pas dans le giron de la FA…

Dans le même temps, la FL traîne la FA devant les tribunaux, l’accusant d’avoir créé une League « illégalement » (le 31 juillet 1991, au terme de quatre jours d’audition, le juge Sir Christopher Rose renverra l’amère FL dans ses foyers).

Le 17 juillet 1991, tous les clubs de D1 signent le Founder Members Agreement et le 23 septembre 1991, le document est ratifié par la FA, les clubs et la FL. Après quatre heures de palabres, on se met d’accord sur le nom du bébé : FA Premier League. Certains clubs anti-FA sont farouchement opposés à la présence de la FA dans l’appellation – on ne démarre pas sous les meilleurs auspices et, de fait, les relations FA-PL seront tendues. Un an plus tard, la PL adoptera le nom du sponsor et s’appellera (Carling / Barclaycard / Barclays) Premiership de 1993 à 2007.

1991-92 : trois instances et un coup fin

En théorie, le sigle FA est toujours utilisé pendant cette période mais, fatalement, il disparaît définitivement lors des renégociations avec Barclays en 2007, les relations FA-PL s’étant considérablement refroidies. Outre les considérations juridiques, nombre de propositions émanant de la FA et qui figuraient dans son Blueprint for the future of football (voir fin de troisième partie), initialement acceptées par la PL, furent graduellement abandonnées (surtout celles d’ordre financier – partage des revenus du sponsoring – et en rapport avec la représentation de la FA au directoire PL). La vision initiale que la FA entretenait sur la PL, centraliste et quelque peu paternaliste, diffère grandement de la version actuelle.

Nonobstant ces tiraillements FA-PL qui iront crescendo, la création officielle de la FA Premier League signe la fin d’années de conflit permanent entre les principaux acteurs du football anglais (y compris des menaces de grèves, via la PFA, équivalent de l’UNFP). Le cordon ombilical centenaire entre  l’élite des clubs et les instances est définitivement coupé. La PL est indépendante, souveraine et promise à un avenir des plus prospères. Le 20 février 1992, l’ultime acte légal est adopté, la FA donne officiellement naissance au championnat de Premier League.

Les discussions sur le partage des revenus médias s’engagent. On se met d’accord sur une formule à l’esprit comparable aux débuts de la FL. Il est décidé que les droits perçus par le champion ne seront pas supérieurs à une fois et demie ceux versés au dernier du classement.

En avril 1992, les clubs de l’élite démissionnent de la FL et se constituent en limited company le  27 mai. La Premier League prend ses modestes quartiers dans une aile de la FA (la fédération est aujourd’hui installée dans le New Wembley et la PL en plein coeur de Londres – photo du haut -, dans Mayfair, à deux pas du Sherlock Holmes Museum…).

1992 : Sky remporte la bataille des droits télévisuels

Le moment clé de la négociation des droits TV pour la période 1992-1997 survient le 18 mai 1992. Sky (devenue BSkyB en novembre 1990) est en concurrence avec ITV. Toutes deux proposent environ 200M aux clubs. ITV surenchérit à 224M et son package a largement la faveur des clubs du Big Five. ITV est une chaîne terrestre et commerciale aux audiences vingt fois supérieures à Sky, chaîne câblée encore confidentielle (600 000 abonnés seulement – 10.5 millions aujourd’hui).

Peu avant le meeting, ITV a finement joué en promettant au Big Five de diffuser prioritairement leurs matchs (un point sur lequel Sky est resté vague). Quatre clubs du Big Five se laissent convaincre par ITV. L’affaire semble perdue pour la Team Murdoch qui a pourtant impérieusement besoin du football pour remettre d’aplomb un Sky mal en point (500M de dettes).

Sky sort alors sa botte secrète : Alan Sugar. Cet hommes d’affaires en électronique et informatique (Amstrad) a racheté Tottenham la saison précédente. Pendant les négociations, il ordonne à Murdoch au téléphone de mettre le paquet. Et pour cause : si Sky remporte les droits, Sugar fournira tout le kit d’installation aux futurs abonnés. Mais Sky est déjà fortement endetté et l’Australo-Américain hésite.

Va alors se dérouler un épisode demeuré célèbre dans le folklore de la PL. Au plus fort des négociations, Alan Sugar appelle Sam Chisholm, le chief exec d’un Murdoch prêt à jeter l’éponge, et lui aboie au téléphone : « Dis au boss de mettre le paquet, il faut exploser ITV ». Murdoch s’exécute et offre 250M. ITV surenchérit : 262M. Sugar d’agite de plus en plus au bout du fil. Sky abat sa toute dernière carte : 304M de £. ITV est « explosé ». Les clubs votent au deux tiers pour Sky. Depuis, le couple Sky-PL est inséparable.

Le 15 août 1992, la PL démarre enfin. Les 22 heureux élus sont (entre parenthèses, division actuelle) : Arsenal, Aston Villa, Blackburn Rovers, Chelsea, Coventry City (zone rouge D2), Crystal Palace (D2), Everton, Middlesbrough (D2), Norwich City, Nottingham Forest (zone rouge D2), Oldham Athletic (D3), Queens Park Rangers, Sheffield United (D3), Sheffield Wednesday (D3), Southampton (D2), Tottenham et Wimbledon (D4, AFC).

Une révolution aussi dans les mentalités

Le but de ce dossier n’est pas d’étudier ou comparer les transformations entre le début des Nineties et l’ère PL actuelle, telles l’évolution du profil du « supporter moyen » (beaucoup plus âgé, 41 ans), « l’invasion » des joueurs étrangers, la prolifération des agents, la nature des investisseurs ou même l’explosion du coût global d’un match – billet, déplacement, etc. – (calculé à 101 £ par la Football Supporters’ Federation lors d’une enquête récente auprès de 4 000 suppporters). Cette thématique appartient à l’histoire proprement dite de la PL.

Toutefois, arrêtons-nous brièvement sur un aspect fondamental des bouleversements que la PL a entraînés : le changement radical dans la gestion d’un club. Jusqu’au début des années 90, seuls les résultats comptent. Le but de tout club ambitieux est de remporter le plus de trophées possibles en fonctionnant sur le mode d’un « utility maximiser » comme l’écrira un économiste, à savoir le plus chichement possible. On maximise l’outil de travail (les infrastructures) sans chercher outre mesure à dégager des bénéfices.

La « Révolution financière » post 1992 va faire voler en éclat cette loi d’airain. Les clubs vont progressivement se transformer en machine commerciale et sportive tournée vers la diversification et le profit (revenus médias, merchandising, sponsoring, flottation en bourse, utilisation du stade hors match, recherche d’extension de la fanbase, etc.). Les clubs se muent alors en entreprises et en épousent le jargon. On parle autant de brand awareness, de global brand equity ou de profit maximisation (et parfois de debt recovery plan) que de 4-4-2 ou back four.

Une success story sans équivalent

En fin d’année, la Premier League débutera son tour du monde des renégociations de droits médias overseas pour la période 2013-2016 (211 pays et territoires, couverts par 98 diffuseurs partenaires de la Premier League plc).

La dernière fournée pour 2010-13 a rapporté gros : 1.6 milliards £. Soit presque le triple du terme précédent (2007-10) et presqu’autant que les droits domestiques, 1.78 milliards. A titre d’exemple, WinTV déboursa 30M pour la Chine ; Canal Plus 60M pour la France et Pologne ; Cable TVHK 150M pour Hong-Kong ; SingTel 200M pour Singapour ; Abu Dhabi Media Company plus de 200M pour le Golfe Persique, Moyen-Orient et Afrique du Nord. Cette fois-ci, les revenus provenant de l’étranger dépasseront probablement le montant des droits domestiques, qui devraient stagner. La PL lorgne désormais bien davantage vers la Chine et le Sud-Est asiatique que l’Europe.

En 2010, Irving Scholar, l’un des initiateurs de la PL déclarait :

« Personne ne peut contester que la Premier League est un succès retentissant qui a transformé le football. »

Le produit PL est une success story sans doute inégalée dans l’histoire du sport. Le football anglais, ce gueux des années 70 et 80, est aujourd’hui über glamour. Cependant, nombreux sont ceux qui jettent sur la First Division d’antan un regard nostalgique en se remémorant les ingrédients magiques qui firent du football anglais l’envie de l’Europe ; les chants, le soutien indéfectible du public, la communion et proximité avec le douzième homme sont ancrés dans la légende. Pour beaucoup, ce mythe a été sacrifié sur l’autel de la health & safety et du consumérisme.

Certes, il serait vain et absurde de comparer les deux époques tant l’univers du football anglais a changé ces vingt dernières années. Néanmoins, incontestablement, l’aspect aseptisé et mercantile de « l’expérience PL » est pour beaucoup dans cette vague de nostalgie inconvenable et ambivalente (personne en effet ne voudrait revivre les heures sombres des Eighties). Le match est devenu un « spectacle », policé par des stadiers zélés et suivi sagement par un public quadragénaire embourgeoisé (cette fameuse gentrification). Des avatars qui paraissent incompatibles avec la nature passionnée et le substrat populaire de ce sport.

Ces dernières années, ce que l’on nous présente souvent comme le « modèle allemand » en matière de stade (sécurité, ferveur, prix raisonnables) a viré à l’obsession chez les médias anglais. Il y a quelques semaines, Aston Villa évoquait la possible réintroduction d’une section safe-standing à Villa Park (voir article), ces mythiques terraces qui firent tant fantasmer l’Internationale des supporters et ultras.

Si le « Soldat » Football anglais a été sauvé grâce à la création de la Premier League, hyperboliquement surnommée « The greatest show on earth » par les médias anglais, tout le monde semble aujourd’hui s’accorder sur le besoin urgent de réanimer l’ambiance plate de ses stades, victime collatérale de la révolution PL. Le « plus grand show planétaire » méritera alors pleinement son surnom.

Kevin Quigagne.


Before and after (tous chiffres en £)

Abonnement meilleur marché dans le Kop d’Anfield saison 1989-90 :  60 £
Abonnement meilleur marché dans le Kop d’Anfield saison 2010-11 : 730 £

Affluence moyenne D1 1991-92 : 21 622 (69 % taux de remplissage)
Affluence moyenne PL 2010-11 : 35 283 (92 % taux de remplissage)

Chiffre d’affaires de la Premier League plc en 1992-93 : 46M
Chiffre d’affaires de la Premier League plc en 2010-11 : 1,2 milliards

CA de Manchester United en 1989-90 :     6M
CA de Manchester United en 2009-10 : 286M

Salaire mensuel du joueur le mieux payé en 1992 : 45 000 £ (John Barnes)
Salaire mensuel du joueur le mieux payé en 2012 : entre 850 000 et 1M (C. Tévez et W. Rooney)

Masse salariale D1 1991-92 : 31M
Masse salariale PL 2009-10 (y compris charges) : 1,38 milliards

Montant des droits TV touchés par les 22 clubs de D1 en 1991-92 : 7M
Montant des droits médias touchés par les 20 clubs de PL en 2010-11 : 1 milliard

Montant des dettes des clubs de D1 saison 1990-91 : quelques dizaines de millions
Montant des dettes des clubs de PL à l’été 2010 : 2,6 milliards

Nombre de joueurs de D1 non britanniques et irlandais saison 1992-93 : 22
Nombre de joueurs non britanniques en 2011 : 257 (sur les listes des 25 de sept. 2011)

Pourcentage masse salariale/CA des clubs de D1 en 1991-92 : 41 %
Pourcentage masse salariale/CA des clubs de PL en 2009-10 : 77 %

Prix moyen d’un match de D1 en 1990 : approx. 4 £
Prix moyen d’un match de PL en 2012 : approx. 35 £

Revenus médias PL en 1992-93 : 80M
Revenus médias PL en 2010-11: 1,17 milliards

Revenus total des 22 clubs de D1 en 1991-92 : 75M
Revenus total des 20 clubs de PL en 2009-10 : 2,1 milliards

Salaire mensuel moyen PL 1992-93 : approx. 6 000 £ (4 fois plus qu’un joueur de D4)
Salaire mensuel moyen PL 2009-10 : approx. 125 000 £ (30 fois plus qu’un joueur D4)

Transfert record première saison PL entre clubs anglais : Roy Keane, 3.75M (08/1993)
Transfert record PL entre clubs anglais à ce jour : Fernando Torres, 50M (01/2011)

Valeur de Man United en 1990 (tentative d’achat par M. Knighton) : 20M
Valeur de Man United en 2012 : entre 1 et 2 milliards

Quatrième et dernière partie des évènements et futilités du mois dans le football anglais, un mois déchaîné… Du 24 au 31 janvier (première partie ici, la deuxième ici, et la troisième ici).

Au Sommaire :

  • Scandale à Sky : dossier complet et analyses sur le limogeage des présentateurs vedettes Andy Gray et Richard Keys
  • Le clan Murdoch, en marche vers la World Domination
  • Messi & le Barça n’arrivent pas à la cheville de Stoke City (pour Andy Gray)
  • La taupe « stevesimons409 » frappe à Sky
  • Rio Ferdinand, nouvel apôtre de la rectitude morale
  • L’Olympic Park Legacy Company temporise : va-t-on vers un « Stratford Hotspur » ?
  • Blackpool écope d’une amende et Holloway démissionne
  • Tragédie au Dulwich Hamlet FC, l’ex club de Peter Crouch
  • 16è de finale de FA Cup
  • Crawley (D5) : les Cure, Kevin Muscat et un 8è de FA Cup contre Man United
  • Deadline Day du mercato d’hiver : the madness has returned

Lundi 24 janvier

Scandale retentissant à Sky. La chaîne « propriétaire » de la Premier League annonce le limogeage d‘Andy Gray, son présentateur football vedette (salaire annuel : 1,7M de £), officiellement pour une série de propos sexistes tenus contre Sian Massey, l’arbitre assistante du Wolves-Liverpool du week-end. Richard Keys, son confrère-siamois, est suspendu, mais ses heures sont comptées. Il ne présentera pas le Bolton-Chelsea de ce soir (le veinard). Depuis 1990, l’inséparable duo a commenté plus de deux mille matchs sur Sky. Un couple dont l’égo avait enflé à mesure que l’incestueux tandem Premier League-Sky grossissait exponentiellement. L’explosion en vol était donc aussi imminente qu’inévitable.

Sky Sports, pour le grand public, c’est les innovations techniques, les « Super Sundays » hyperboliquement présentés d’un immense studio James Bondien où tous les matchs sont « massive » ou à « six points », et le moindre attaquant un peu doué est une « Legend ». Avec Gray & Keys, même un Wigan-Burnley disputé devant 14 000 frigorifiés un lundi de décembre devenait l’affiche de l’année

D’un statut de simples présentateurs lambda il y a vingt ans, petit à petit, du studio hi-tech Sky Sports d’où ils présentaient leurs « Super Sundays » et autres mégashows dans une explosion de superlatifs, Gray et Keys s’étaient transformés en pipoles cotoyant les puissants du football international, en se donnant l’apparence de personnages investis d’une mission quasi churchillienne. Avec la célébrité, le pouvoir et l’argent, étaient venues l’arrogance, le sentiment d’invincibilité, l’isolation et le refus d’évoluer avec le monde extérieur.

On top of the world

Richard Keys et Andy Gray : on top of the world

Sky Sports, pour le grand public, c’est la palette, les innovations techniques, un déluge de pyrotechnie, les « Super Sundays » et les Monday Night shows hyperboliquement présentés d’un immense studio James Bondien où tous les matchs sont « massive », cruciaux ou à six points, et le moindre attaquant un peu doué est une « Legend ». Avec Gray et Keys, même un Wigan-Burnley par un lundi de décembre pluvieux, devant 14 000 frigorifiés, devenait l’affiche de l’année.

Petit aparté machiavélique et politico-judiciaire sur les possibles raisons réelles de ce limogeage express. Ce carton rouge coïncide étrangement avec l’action en justice intentée par Andy Gray contre le groupe News Corporation du clan Murdoch (actionnaire à 39 % de BSkyS) et propriétaire du torchon dominical News of The World qui, pendant des années, jusqu’en 2009, mit sur écoute trois mille personnalités, dont Andy Gray (et Alex Ferguson, Paul Gascoigne, les princes William & Harry, etc.). Une affaire aux multiples ramifications politiques qui s’est immiscée dans de nombreux secteurs de la vie publique anglaise, jusqu’à éclabousser le gouvernement récemment. Cette interminable saga à tiroirs connaît depuis cinq ans des rebondissements aussi cocasses qu’insensés, des « affaires dans l’affaire ». Dont celle d’Andy Hayman, ce patron de Scotland Yard en charge de l’enquête pendant longtemps qui démissionna de son poste… pour se faire embaucher dans l’un des journaux du groupe Murdoch !

Les Murdoch, proches du Premier Ministre David Cameron (qui essaie cependant de prendre ses distances avec l’envahissante famille), sont actuellement en guerre contre Ofcom, l’autorité régulatrice des télécoms et médias depuis 2004 (« diabolique » création de son ex grand ami Tony Blair, qu’il avait stratégiquement et tardivement soutenu par le biais de son Sun en mars 1997 lorsqu’il il réalisa que les Conservateurs n’avaient aucune chance aux General Elections – « Aucune décision majeure du gouvernement Blair n’était validée sans consulter trois personnages clés : Gordon Brown, John Prescott et Rupert Murdoch. En fait, il était le 24ème ministre du gouvernement », écrivit Lance Price en 2006, ex conseiller de Tony Blair).

L’effroyablement influent Américano-Australien tente depuis des mois d’acquérir à la hussarde la totalité du groupe BSkyS. L’affaire est actuellement entre les mains d’Ofcom, et pourrait passer devant la « Competition Commission ». Toutefois, il paraît probable que Murdoch arrive à ses fins, au moins dans les grands traits de son projet (lire ici).

Vous avez bien compris, je veux tout, TOUT

Vous m'avez bien compris, je veux tout, TOUT

Revenons à Gray & Keys. Ces deux commentateurs aux émoluments de footballeurs, sont souvent présentés dans les tabloïds comme ayant « révolutionné la manière dont on regarde le football en Angleterre ». Ailleurs, on les décrit plutôt comme de grands potaches sexistes et attardés, à l’égo surdimensionné et rompus dans l’art du débitage de clichés. Des opportunistes qui ont su utiliser et s’approprier des avancées technologiques et méthodes inventées par d’autres. Ils ont surtout su profiter de l’extraordinaire ascension hégémonique de Sky, sans qui la Premier League ne serait qu’un championnat parmi d’autres. At the right place at the right time.

Un scandale étiqueté « sexism row » qui prend rapidement une ampleur nationale et sociétale, glissant sur les terrains de la place de la femme dans la société et de la sous représentation des « minorités » dans le football et les médias en général.

Les faits

Avant le Wolves – Liverpool, en « off », les inséparables Gray & Keys (ainsi qu’un reporter, Andy Burton) s’étaient permis une série de commentaires aussi sexistes qu’ignorants sur Sian Massey, la juge de touche, mettant en doute ses compétences professionnelles (Massey a bien sûr passé les mêmes examens et tests que les hommes). Comme si un cerveau féminin avait été privé à la naissance de la capacité à juger un hors-jeu… (voir plus bas « les deux faits de jeu à l’origine du scandale »).

Sian Massey, une entrée fracassante dans la profession

Sian Massey

Les personnages

Andy Gray, 55 ans, est un ancien avant-centre international écossais, à Sky depuis les débuts de la chaîne (1990). Donc, selon Sky, depuis les débuts du football anglais. Gray est l’ex pro du duo, vieille école, grande gueule et peu indulgent avec ceux « qui parlent de foot sans avoir jamais été pro ». On le dit dogmatique et dur, mais avec un côté jovial et abordable (dans les bons jours).

Au début des années Sky-Premier League, 1990-1992, Gray avait introduit toute une série d’innovations et de gadgets (dont une sorte de palette), à l’époque forcément « révolutionnaires ». Gray parlait tactique quand ce n’était pas encore sexy et discutait Prozone quand la plupart des amateurs de football pensaient encore que c’était un gimmick pour zones érogènes.

Pas assez bon pour Stoke City

Lionel Messi, trop juste pour Stoke City

Il sait parfois sortir des commentaires inouïs, comme celui sur Lionel Messi récemment, probablement la perle de l’année 2010 en Angleterre. Il y a deux mois, en discutant avec Keys des candidats au Ballon d’Or, Gray n’avait pas hésité à déclarer :

« Je ne sais pas si Barcelone a déjà joué dans un stade comme le Ewood Park ou le Britannia Stadium, et a eu à endurer le genre de traitement infligé par Blackburn Rovers ou Stoke City, rugueux, tout en coups de pied arrêtés, longs ballons et touches-missiles […]. Franchement, je ne pense pas que Lionel Messi réussirait en Premier League. C’est une chose d’enquiller les buts à Barcelone, c’est plus facile en Espagne, la Liga n’est pas aussi bonne que la PL. Je crois que Messi aurait beaucoup de mal à s’exprimer contre des équipes comme Stoke City, au Britannia Stadium, un soir de décembre. »

Extraordinaire. On aurait eu envie de lui répondre : « Andy, on ne s’exprime pas contre Stoke un soir de décembre au Britannia, on tente de survivre, de ressortir en un morceau et de ne pas faire partie des dommages collatéraux causés par les bombardements aériens de Delap & co. »

Richard Keys, 53 ans, est le journaliste du duo, un ex présentateur du Télématin d’ITV fin années 80. Il s’est forgé une place dorée dans le commentaire football à l’ombre de Gray. Sympathique en public mais qu’on dit tyrannique et imbuvable aussi bien professionnellement qu’en privé. Il a la réputation de traiter ses subordonnés comme des moins que rien.

Keys, payé 1,6M de £ par an, sur Theo Walcott : « Walcott, relève-toi, espèce de stupide petit gamin, t’as été nul à chier avec tes chaussures roses à la noix, t’es une nullité »… Sur les îles Féroé : « Petit stade zéro, match sans intérêt, allez vous faire foutre. »

Keys s’est souvent « lâché » par le passé, mais les multiples avertissements reçus (pour la forme) n’ont jamais eu raison de ce personnage jugé « indispensable », donc intouchable, et jusque là très protégé par son supérieur direct, Andy Melvin, le principal artisan du phénoménal succès de Sky. Parmi les nombreuses bévues, Keys (payé 1,6M de £ par an), avait insulté Theo Walcott lors d’un match de Ligue des Champions (en « semi off », un micro traînait) :

« Walcott, relève-toi, espèce de stupide petit gamin, t’as été nul à chier avec tes chaussures roses à la noix, t’es une nullité. »

Il avait aussi envoyé du lourd contre… les îles Féroé ( !) qui affrontait l’Ecosse (voir le clip) :

« P’tit stade zéro, match sans intérêt, allez vous faire foutre. »

Keys « l'expert » ne kiffe pas les grolles de Theo

Richard Keys « l'expert » ne kiffe pas les grolles roses de Theo

Un journaliste du milieu résume ainsi Richard Keys et sa formidable ascension dans le paysage audiovisuel anglais :

« Keys, sous un aspect extérieur raffiné et courtois, est devenu tellement imbu de sa personne que même la partie de son cerveau censée le protéger contre de potentiels accidents d’antenne s’est arrêtée de fonctionner. »

Roy Keane (qui avait fait une pige express sur Sky en 2008), disait de son expérience avec Richard Keys :

« Plus jamais ça ! Je préférerais encore aller chez le dentiste. S’asseoir à côté de type comme Richard Keys et autres et les entendre inventer des trucs qui ne se déroulent pas dans le match, c’est insupportable. »

Le scandale et les mœurs Sky

Un scandale sur fond de misogynie, de préjugés imbéciles, de méthodes professionnelles d’un autre âge et d’habitudes importées tout droit du vestiaire et du « Old Boys’ Club » et jamais réactualisées. Au cours des jours suivants, de nombreux témoignages (et clips) laisseront entrevoir de l’intérieur une culture figée dans un passé lointain (« stuck in a timewarp »), et des pratiques douteuses, aux relents de harcèlement, peu en phase avec le zeitgeist. Mais surtout, pour Sky, des pratiques antagoniques à l’image et aux « valeurs » de la chaîne, familiales, saines et consensuelles. On peut légitimement supposer que si tout cela était resté confiné au studio, Gray et Keys seraient toujours fidèles au poste, grâce notamment à la protection de leur supérieur, Andy Melvin. Avant l’incident de samedi 22, des insiders décrivaient Keys et Gray comme « bombproof ».

Ces deux articles du New Statesman et du Guardian dépeignent les mœurs Sky Sports, et révèlent l’extraordinaire influence que ces deux présentateurs vedettes exerçaient dans le milieu par le biais du tout puissant Sky. De leurs avant-postes, Sky Sports et ses présentateurs phares entretenaient des relations commerciales et professionnelles de dominant à dominé avec les chaînes majeures, ITV (diffusion de la Ligue des Champions), la BBC (Match of the Day), et ESPN (Premier League). De fait, indirectement, Gray et Keys faisaient un peu la pluie et le beau temps sur la répartition des droits de diffusion du football en Angleterre.

Les deux faits de jeu à l’origine du scandale et la taupe

Deux conversations (filmées, prouvant si besoin était que rien n’est jamais « hors antenne », ce dont Ron Atkinson pourrait témoigner) ont immédiatement été portées à la connaissance des patrons de Sky par une taupe (visiblement par un employé peu fan du duo, un mystérieux youtubeur qui s’est inscrit le jour même sous le pseudo stevesimons409).

1) D’abord, une conversation sur la ligne de touche (voir le clip), entre Andy Gray et principalement Andy Burton (reporter ligne de touche) :

BURTON : « Apparemment Andy, d’après Steve [caméraman] c’est une femme ligne de touche qu’on a aujourd’hui, et elle est bien foutue ! »

GRAY (moue dubitative) : « Une femme ligne de touche ? »

BURTON : « C’est ce que Steve m’a dit. Il me dit qu’elle est pas mauvaise, mais bon, je sais pas si on doit lui faire confiance là-dessus [au caméraman] »

GRAY : « Nan, moi je lui ferais pas confiance, certainement pas ! »

STAFF SKY (hors champ) : « Une femme juge de ligne… Et Andy, t’approuves, toi ? »

GRAY : « Non… tiens, je la vois d’ici, qu’est-ce que les femmes connaissent à la règle du hors-jeu ? Elles sont nulles à chier » [le fucking hopeless est couvert par un bip]

2) En studio. Gray et Keys, hors antenne, juste avant le match, en parlant de Sian Massey (voir le clip) :

KEYS : « Ouais, ben, quelqu’un ferait bien de descendre [au niveau de la ligne de touche] et lui expliquer la règle du hors-jeu »

GRAY : « Ouais, j’y crois pas, une femme juge de touche ! C’est ce que je disais, les femmes ne connaissent pas la règle du hors-jeu »

KEYS : « Bien sûr qu’elles la connaissent pas ! » […] « Ça, c’est certain qu’il va y avoir une grosse erreur de commise aujourd’hui, Kenny [Dalglish] va pêter un cable ! C’est pas la première fois qu’on voit une femme juge de touche, y’en avait pas une avant ? »

GRAY : « Ouais… »

KEYS : « Wendy Toms, non ? »

GRAY : « Ouais, Wendy Toms, ou un nom comme ça »

KEYS : « Le foot marche sur la tête ! T’as entendu la charmante Karren Brady ce matin se plaindre du sexisme [dans le foot] ? S’il te plaît, arrête ton cinéma ! »

Mardi 25 janvier

Blackpool 2 – 3 Manchester United, match en retard de la 16è journée.

Deux équipes qui ne s’étaient pas affrontées parmi l’élite depuis 1971. Et de vingt-huit matchs sans défaite pour les Red Devils, invaincus en PL depuis avril 2010… Man United signe là le comeback de l’année. Les Diables Rouges étaient menés 2-0 à vingt minutes de la fin par un Blackpool étincelant, entreprenant et inventif. Buts de DJ Campbell et Cathcart (ex stagiaire à MU). Puis, dans le dernier quart, terrible réveil de MU, trois buts signés Berbatov, 72ème et 88è et Hernandez, 74è (superbe enchaînement contrôle-frappe). Berbatov en est à dix-neuf réalisations.

Hernandez, entré à la 66è, est devenu un super sub, et malgré l’insolente réussite du duo Rooney-Berbatov, il devrait engranger plus de temps de jeu dans les semaines à venir. C’est surtout grâce à l’entrée de Giggs en deuxième mi-temps que United a pu renverser la vapeur. Dix minutes d’arrêt de jeu furent sifflées, un record.

Toujours aussi décisif à 37 ans

Toujours aussi décisif à 37 ans

Sky, again. Le scandale se transforme en affaire nationale. Le limogeage de Richard Keys (suspendu) semble inévitable. Les langues se délient à Sky, les témoignages contre lui en interne sont accablants, et certaines chutes de programme sont envoyées à la direction, et d’autres mis sur Youtube (ce stevesimons409 a vraiment une dent !).

Ce clip-ci (cliquez ici), sans être particulièrement atterrant, est révélateur, et amusant. Keys tente d’être « one of the lads », de faire partie de la bande exclusive des ex-pros.Avant un match de Ligue des Champions à Chelsea, sont présents dans le studio : Jamie Redknapp, Ruud Gullit, Graeme Souness et Richard Keys.

Tandis que Gullit joue avec son téléphone, une personne (hors caméra) mentionne une femme, Louise (pas la même Louise actuelle épouse de Redknapp Jr).

REDKNAPP : « Ah, cette Louise, ah oui… tu l’as déjà rencontrée Graeme ? »

SOUNESS : « Non, juste ses parents »

KEYS : « Tu l’a sautée ? »

[ndlr : le « it » = her !]

REDKNAPP : « Ouais ouais, ben, j’ suis sorti avec elle »

KEYS : « Ouais, évidemment, stupide question de ma part, si t’étais dans le coin, effectivement, aucun doute, tu te l’ai faite ! »

[Souness, visiblement gêné, tente de changer de conversation… en vain]

KEYS : « J’suis sûr que si tu t’étais pointé chez elle n’importe quel soir, t’aurais trouvé mon Redknapp pendu à l’arrière du truc »

Pas un fan de l'humour Keysien

Graeme Souness, pas un fan de l'humour Keysien

(hilarants coups de pied de Souness sous la chaise, l’air de dire : « Du respect imbécile, t’es pas au pub avec Andy Gray. »).

La Louise en question, Louise Glass, une ancienne petite amie de Jamie et aujourd’hui âgée de 38 ans, aurait l’intention de poursuivre Keys en diffamation…

Les blagues et clips pastiches sur les analyses tactiques du duo ressortent sur la toile. Celui-ci est particulièrement amusant. Ainsi que ce dessin, la règle du hors-jeu expliquée aux femmes, par Andy Gray et Richard Keys.

Parmi les prétendants les plus cités pour la succession de Gray & Keys, il y a Lee Dixon (ex Arsenal, actuellement sur la BBC) et Jamie Redknapp (Liverpool, Spurs, Thomas Cook, Nintendo, Marks & Spencer, etc.), déjà consultant sur Sky.

Redknapp en pole-position... avec Gary Neville

Redknapp en pole-position... avec Gary Neville

Mercredi 26 janvier

Liverpool 1 – 0 Fulham, match (assez quelconque) en retard de la 18è journée. Les Reds sont désormais 7è au classement.

Birmingham bat West Ham 3-1 en demi-finale de la Coupe de la Ligue et affrontera en finale Arsenal (le 27 février), vainqueur d’Ipswich 3-0.

Suite et fin du scandale Sky : Richard Keys est limogé. Ce dernier avait désespérément tenté de sauver sa peau sur TalkSport l’après-midi, pendant une bonne heure (dont 45 minutes de pub), en évoquant notamment des mystérieuses « dark forces ». En fait, il avait accumulé les boulettes et davantage aggravé son cas qu’autre chose.

Keys, selon le mot d’un journaliste : « The anchorman who puts the W in anchor. » (= wanker : connard).

Par ailleurs, l’organisation Professional Game Match Officials annonce que Sian Massey est temporairement « withdrawn » des deux matchs où elle devait officier fin janvier – sur la touche, au propre comme au figuré (un de D4 et l’autre de D6). Et ce, pour lui « éviter toute pression inutile », selon le PGMO.

Rio Ferdinand, le nouvel apôtre anglais de la rectitude morale, commente ce scandale sur Twitter :

« Je suis à fond pour les femmes arbitres dans le foot, la discrimination ne devrait pas exister dans notre sport… si vous pensez autrement, c’est que vous avez des opinions préhistoriques. »

Vendredi 28 janvier

Le « Olympic Park Legacy Company », comité qui gère l’après Jeux Olympiques de Londres 2012, reporte sa nomination de l’occupant du Olympic Stadium après les J.O de Londres. Devant l’extrême confusion régnant sur Londres au sujet de l’avenir du stade olympique, principalement entre West Ham et Tottenham (mais impliquant aussi Crystal Palace, divers Conseils municipaux d’arrondissements, et Leyton Orient ! ainsi que Chelsea, indirectement), le OPLC a décidé d’accorder plus de temps aux candidatures en lice pour peaufiner leur dossier.

Le dossier West Ham prévoit de garder la piste d’athlétisme (et coûterait au minimum 100M de £), tandis que Tottenham transformerait l’enceinte en vrai stade de football… et adopterait le nom « Stratford Hotspur » (coût : 250M – Lamine Diack, président de la fédération internationale d’athlétisme, critique vivement le projet Spurs car les engagements pris par les Anglais étaient de conserver le stade en l’état).

Bref résumé de la situation, ainsi qu’une présentation complète des forces en présence : lire la rubrique Post-Olympics. Un dossier sur lequel nous reviendrons quand l’heureux sera décidé (aucune date annoncée).

Les instances de la Premier League infligent une amende de 25 000 £ à Blackpool FC pour avoir aligné un XI soi-disant « affaibli » contre Aston Villa le 10 novembre dernier (défaite 3-2 – dix changements par rapport au match précédent). La PL avait prévenu qu’elle sévirait, comme elle l’avait fait un an auparavant contre Wolves (25 000 £ d’amende, en sursis).

On peut légitimement se demander ce qu’il serait arrivé si James Collins, l’arrière central de Villa, n’avait pas marqué à la dernière minute. Il aurait été très difficile pour la Premier League d’infliger une amende à un promu qui venait de tenir en échec le sixième de PL de la saison écoulée !

Comme il l’avait promis, Ian Holloway offre immédiatement sa démission au Chief exec du club, Karl Oyston (qui la refuse, bien évidemment).

Le coup de gueule de l'année, contre la FA

Le coup de gueule de la saison, contre les instances

Cette incompréhensible posture de la PL avait déclenché une réaction cinglante d’Holloway qui avait promis de démissionner s’il écopait d’une amende. Un coup de gueule aussi justifié que mémorable en conférence de presse à Villa Park où Ollie s’étrangla de rage. A (ré)écouter !

Le courroux passionné d’Ollie s’explique par les modifications opérées cette année dans le règlement PL par rapport à 2009-2010. Quand Wolves avait été sanctionné, la fameuse « Liste des 25 » n’existait pas. Ce qui rend les fameuses règles B13 et E20 de la Premier League caduques : « In every League Match each participating club shall field a full-strength team » (chaque club doit aligner sa meilleure équipe possible).

On peut cependant se demander ce qu’il serait arrivé si James Collins, l’arrière central de Villa, n’avait pas marqué à la dernière minute. Il aurait été très difficile pour la Premier League d’infliger une amende à un promu qui venait de tenir en échec le sixième de PL de la saison écoulée !

La Football League (D2 à D4) et la FA (les deux autres instances du football anglais) ont déjà sanctionné des clubs dans des cas similaires… mais seulement quand ces équipes ont perdu. Il existe plusieurs cas d’équipes totalement modifiées et « affaiblies » (notamment par l’inclusion de jeunes) mais tout de même victorieuses (Swindon Town ou Millwall dans les années 90). Aucune sanction ne fut prise contre elles, « in the interest of the game », déclara-t-on à l’époque.

La question qui reste en suspend et que la Premier League a soigneusement éludé : à quoi sert l’établissement de la règle des 25 si cette même PL décide de facto que certains joueurs ne sont pas « dignes » d’y figurer ?

Vendredi 28 / Samedi 29 janvier

Tragédie dans le sud londonien, au Dulwich Hamlet Football Club, où une violente bagarre dégénère après une fête dans les locaux du club. Un jeune de 18 ans, Daniel Thompson-Graham, meurt de ses blessures (sauvagement poignardé par d’autres jeunes). Un garçon de 13 ans s’est aussi servi d’un revolver pour tirer sur l’assemblée, faisant au moins deux blessés. Des rivalités entre gangs semblent être à l’origine de ce drame. Dulwich Hamlet était surtout connu jusqu’à présent pour avoir accueilli en 2000… Peter Crouch (prêt des Spurs). Ce jeune est le quatrième adolescent tué à Londres depuis le début de janvier (dont trois victimes de la tristement notoire et absurdement nommée « knife culture »).

Samedi 29 et dimanche 30 janvier

16è de finale de FA Cup. Tous les résultats, résumés et stats de match ici. Parmi les scalps et autres surprises du chef :

Fulham 4 – 0 Tottenham

Notts County (D3) 1 – 1 Man City

Swansea (D2) 1 – 2 Leyton Orient (D3)

Watford (D2) 0 – 1 Brighton (D3)

Torquay (D4) 0 – 1 Crawley Town (D5)

Excellent match de Huddersfield (D3) contre Arsenal, qui se sauve dans les dernières minutes (pénalty), ainsi que de Southampton (D3) contre Man United. Reading (D2) a aussi difficilement battu Stevenage (promu de D4), 2-1.

Dans le match Birmingham 3 – 2 Coventry, à signaler. But victorieux pour les Blues du grand joueur qu’est Kevin Phillips, Sunderland Legend, et toujours dynamiteur de surfaces à presque 38 ans. Il avait permis aux Brummies de rester dans la Coupe de la Ligue en marquant à la 90è contre Brentford. Résultat : Birmingham affrontera Arsenal en finale le 27 février.

Kevin Phillips, 37 ans passés, 250 buts et toujours la pêche

K. Phillips, 37 ans passés, 250 buts et toujours la pêche

Comme tant de grands joueurs anglais, Phillips commença en non-league (D5 et en dessous). Repéré par Watford alors qu’il avait 21 ans, ce joueur complet d’1m69 qui s’épanouit sur le tard n’en finit pas d’étonner. Même si le Londonien est barré par Zigic et maintenant Obafemi Martins, il est toujours là, et bien là, onze ans après avoir obtenu le Golden Boot européen en 2000 pour ses 30 buts en Premier League avec les Black Cats, pour sa première saison de PL ! (tournant en ridicule la prédiction de Rodney Marsh : « Kevin Phillips aura du mal à marquer six buts cette saison »).

Son entraîneur, Alex McLeish, rend hommage à celui qu’il appelle affectueusement « the wee man » (le petit homme) :

« Que dire sur lui ? Si j’ai la chance d’entraîner encore vingt ans, il est fort possible que je ne cesse jamais de le recruter. »

Crawley Town (surnom : « The Red Devils », ou simplement « The Reds ») sera donc le petit poucet des huitièmes. Ce club argenté qui évolue en Conference National, D5 (ou Blue Square Premier, pour les intimes) a successivement éliminé Swindon Town (D3), Derby County (D2) et Torquay United (D4). Crawley, parfois étiqueté « Le Man City de la D5 », n’avait pas gagné un seul match de FA Cup depuis huit ans ! Cette formidable épopée rapportera au club environ 1,5M de £.

Crawley, ville de 100 000 habitants qui vit à l’ombre de l’aéroport de Gatwick, a eu l’honneur de voir naître le groupe The Cure. Ils ont eu moins de chance avec leur autre célébrité, Kevin Muscat. Crawley est seulement le sixième club de non-League (D5 et en dessous) depuis l’après-guerre à atteindre ce stade de la compétition. Aucune de ces équipes cependant ne parvint à se hisser en quart. La dernière, Kidderminster, en 1994, perdit 1-0 contre West Ham.

Chant favori des adversaires de Crawley : « You’re just a car park for Gatwick »

Le hasard du tirage les fera affronter les autres Red Devils, ceux de Man United… Ce match sera l’occasion d’une rencontre entre deux Glasvégiens, Sir Alex et le manager de Crawley, le très controversé Steve Evans, un ancien attaquant au sang chaud qui n’hésite pas à faire le coup de poing sur la ligne de touche et qui colle bien à l’image de mal-aimé du club. Crawley, « the club others love to hate », lit-on souvent à leur sujet. Chant favori des adversaires de Crawley : « You’re just a car park for Gatwick ».

Un dossier spécial sur Crawley Town sera publié avant leur match contre Manchester United le 19 février prochain, live sur ITV. Il y a tant à dire sur ce petit club étrange… (et absolument détesté de Robbie Savage !).

Le tirage des huitièmes (19 et 20 février) :

West Ham v Burnley (D2)

Manchester City ou Notts County (D3) v Aston Villa

Stoke City v Brighton (D3)

Birmingham City v Sheff Wednesday (D3)

Leyton Orient (D3) v Arsenal

Chelsea or Everton v Reading (D2)

Manchester United v Crawley Town (D5)

Fulham v Bolton Wanderers ou Wigan Athletic

Lundi 31 janvier

Le Sun nous apprend que Leroy Lita, l’attaquant puncheur de Middlesbrough, a mis soixante litres d’essence… dans sa Range Rover diesel ! L’attaquant de Middlesbrough a réalisé son erreur à la caisse et s’est fait remorquer sa voiture au garage le plus proche.

Le même jour où Charlie Adam se fend d’un dîner romantique pour demander en mariage sa fiancée, Sophie-Leigh Anderson, ex Miss Blackpool & Miss England. Pas à Blackpool évidemment, mais dans un restaurant de Manchester. Les combos fish & chips & mushy peas sont bien meilleurs en terre mancunienne.

A part ces deux nouvelles d’une importance extrême, c’est Deadline Day pour les transferts. Une folle journée qui fait titrer au Guardian : « The day the madness returned to football ». 155M de £ ont changé de main en ce lundi (dont la moitié à Chelsea), concluant un mois de janvier où les dépenses ont approché les 230M. L’adage minimaliste « Money talks » vient à l’esprit… La croisade de Michel Platini pour un semblant de fair-play financier ressemble de plus en plus à une « losing battle ».

Un responsable de l’UEFA se déclare (faussement ?) « surpris » des dépenses de Chelsea, car (je cite cet insider) :

« le président de Chelsea, Bruce Buck, a récemment déclaré qu’il soutient les initiatives de l’UEFA en matière de contrôle financier et a même proposé de les étendre à l’introduction d’un plafond salarial. Tout cela est inquiétant. »

Le plus inquiétant serait plutôt que l’UEFA commence à croire les sornettes que les argentés du football anglais débitent à longueur d’année.

Là-dessus, Richard Scudamore, indéboulonnable chief exec de la Premier League et jamais en retard d’un « soundbite » superflu, déclare sur un ton mi faussement catastrophé, mi exalté: « Un transfert à 100M est désormais inévitable. »

Une journée d’anthologie sur laquelle notre spécialiste Transferts reviendra plus en détail dans quelques jours. En attendant, cliquez ici pour consulter la liste des principaux mouvements conclus aujourd’hui (ainsi que ceux de janvier en Premier League). Il est d’ailleurs intéressant de comparer avec celle de 2010, ici (dont le total s’élevait à… 33M de £).

Le mercato d’hiver en chiffres (en £) :

230M : montant total dépensé en Premier League ce mois-ci. Le plus élevé, devant janvier 2009 (181) et 2008 (175). L’année de son introduction (2003), 35M furent dépensés.

250 000 : offre faite, l’avant-veille de la clôture, par Tottenham à Everton pour Phil Neville (34 ans, 59 capes pour l’Angleterre – qualifiée de « insulting » par David Moyes).

115M : montant échangé entre clubs de PL. Le reste avec l’étranger (100), et la Football League (15).

50M : nouveau record entre deux clubs britanniques (pour F. Torres).

6 : le nombre de deals qui éclipsent le précédent record (Andrey Arshavin, 15M). Fernando Torres, 50M, Andy Carroll, 35M, Edin Dzeko, 27M, Luis Suarez, 22,8M, Darren Bent, 18-24M, David Luiz, 21,4M (plus Nemanja Matic).

14 : nombre de clubs de PL qui ont enregistré des pertes l’an dernier.

726M : total dépensé par Roman Abramovich depuis son rachat du club à Ken Bates et d’autres actionnaires en 2003.

515M : total dépensé par Sheikh Mansour depuis son rachat du club en 2009.

71M : pertes de Chelsea pour la saison 2009-2010

3 milliards : total des dettes des vingt clubs de Premier League.

Kevin Quigagne.