Archive for the ‘Legend’ Category

Après son article du début d’année, l’équipe TK s’est mis en tête de démarrer une nouvelle chronique intitulée ‘Les statistiques d’Obi Mikel’, du nom de ce joueur relativement inutile mais toujours prêt à rendre service. Comme lui, elle sera irrégulière et ne vous prendra pas beaucoup de temps en terme d’analyse. En revanche, elle fera sa meilleure intervention au moment où vous vous y attendiez le moins.

On inaugure cette chronique aujourd’hui en vous souhaitant une bonne fin d’année. Avec des matchs tous les trois jours, impossible de s’occuper du blog. Ensuite, on part skier sur Ben Nevis, en Ecosse, et on revient quand on aura réussi à trouver la neige.

Dimanche 2 décembre à 12 h 30, à l’occasion du deuxième tour de FA Cup, l’AFC Wimbledon (D4) affrontera sa nemesis, son usurpateur d’identité, Milton Keynes Dons (D3). Une rencontre que toute l’Angleterre du football attend sabre aux dents depuis dix ans.

La lecture de l’introduction est fortement recommandée.

[Cliquer sur les photos fait tout chose parfois]

Début années 80.

Si les Dons aiment muscler les matchs, ils affectionnent aussi les entraînements à la fois (très) rugueux et décalés.

Dave ‘Harry’ Bassett ordonne par exemple à ses joueurs de courir les bras en l’air puis d’hurler « Power » en sautant (ce rituel bizarre deviendra une célébration de but) et il encourage activement le jeu dur (notamment lors d’un exercice assez violent intitulé mystérieusement « Harry Ball »). Leur style de foot se transforme en un sport de collision, en une sorte de soule contemporaine, et il n’est pas rare que certaines séances de ce Harry Ball se terminent avec du sérieux grabuge (chevilles esquintées, épaules demises, etc. – on comptera même des cotes cassées).

Et inutile de compter sur les petits nouveaux pour zénifier l’ambiance. Le milieu Dennis Wise arrive de Southampton fin mars 1985 (à 18 ans) après s’être brouillé avec le manager des Saints.

Un an plus tard (mars 1986), débarque une autre forte tête : l’attaquant John Fashanu, 23 ans (Fash the Bash – Fash le Cogneur), acheté à Millwall pour 125 000 £.

Se pointe même… Ian Holloway, 22 ans (pour 35 000 £ et une pige express).

Mai 1986. Le miracle se produit, Wimbledon FC finit 3è de D2 et accède à la D1 ! Leur ascension a été fulgurante : les Dons étaient encore amateurs en 1977 et en D4 en 1983 !

A l’intersaison, le club recrute un parfait inconnu, un joueur amateur du coin manoeuvre de chantier la semaine à 60 £ / hebdo et footeux à ses heures perdues : un certain Vincent Peter Jones, 21 ans. Vinnie Jones arrive de Wealdstone (D9) pour seulement 10 000 £.

Mai 1987. Pour leur toute première saison de D1, les Dons finissent à une superbe 6è place. Derrière eux, du beau linge : Nottingham Forest (8è), Manchester United (11è), Chelsea (14è), Newcastle (17è), Manchester City (21è) et Aston Villa, 22è (tous deux relégués). Les Dons ont collectionné les scalps prestigieux, dont une victoire 2-1 à Liverpool le 28 mars.

Anecdote toute Wimbledonnienne à l’occasion de cette première visite des Dons à Anfield… En descendant les marches sacrées du tunnel, alors que les Reds touchent le This is Anfield de la main, l’impayable Vinnie Jones préfère coller une feuille de papier sur le légendaire panneau. Dessus, le hard man a écrit : « On s’en tape ».

Juin 1987. Dave Bassett quitte le club pour Watford (D1), autre minot inconditionnel du kick and rush (sous le légendaire Graham Taylor, avec Elton John aux commandes) qui a récemment gravi tous les echelons de la Football League en hyper accéléré (D4 a D1 en quatre ans, 1978-1982). Le nouveau manager des Dons est Bobby Gould.

13 mai 1988, veille de la finale de FA Cup. Les Dons viennent de finir 7è de D1 et s’apprêtent à vivre l’évènement le plus important de leur histoire centenaire : la finale de FA Cup contre le quasi invincible Liverpool. Comme il sied tant aux Dons, la préparation sera des plus rock and roll.

Le manager veut faire les choses très professionnellement et isole le groupe dans un hotel chic de Wimbledon (le Cannizaro’s) pour une préparation calme et sereine. Mais la cure de repos va vite tourner à la mise aux verres : les joueurs passent la veille du match à se pinter au Fox & Grapes, le pub local qui servit autrefois de vestiaire à Wimbledon FC à sa création en 1889.

Et ce avec la bénédiction forcée de Bobby Gould, qui après avoir vainement tenté de retenir ses ouailles dans l’hôtel, jette l’éponge et donne lui-même de l’argent aux plus fauchés du groupe pour qu’ils aillent rejoindre la bande à Vinnie au comptoir…

Une soirée qui s’achève sur un sérieux incident entre John Fashanu et un reporter de feu le torchon dominical News of the World (le torchonneux lui avait posé des questions sur ses supposées infidélités ; Fash s’était emporté et, de rage, avait fracassé une porte. Son poing morfla mais il disputa tout de même la finale).

14 mai 1988, Wembley, finale de FA Cup. En déjeunant, les Dons voient Alan Hansen (joueur-cadre des Reds) declarer à la télé, goguenard :

« A Wembley aujourd’hui, il n’y a que des supporters de Liverpool ! Le stade est plein de Reds ! »

Les chants des supps Reds chambrent aussi les Dons, sur le thème des Wombles, leur surnom tiré d’un célèbrissime personnage pour enfants, une sorte de taupe bisounours écolo qui vit dans Wimbledon Common… (clip du tube – numéro 1 des Charts dans les Seventies – et ouais, y’avait pas que les Clash qui cartonnaient à l’époque).

Il n’en faut pas plus pour remonter le Crazy Gang comme des coucous enragés.

Deux heures avant la finale, les Dons commencent leur séance d’intimidation : ils cognent sur les murs du vestiaire des Reds en hurlant insultes et menaces.

Rebelote dans le tunnel de Wembley où ils entonnent leur bizarres chants guerriers, ponctués d’un mystérieux cri hyèneux (« Yiiiiiiiiidaho »). Vinnie Jones va même voir Kenny Dalglish et lui lâche : « Toi, je vais t’arracher une oreille et après je cracherai dans le trou. »

Victoire 1-0 des Dons (voir article TK et clips immanquables), une prouesse considérée comme l’une des plus grosses surprises en finale de la compétition.

Malgré la gloire, l’imprévisible Sam Hammam vit ce triomphe comme un aboutissement et met toute l’équipe en vente ! Dave Beasant, un historique du club (depuis 1979), part pour Newcastle.

1988-1992. Sous la houlette de Bobby Gould (jusqu’en 1990) puis Ray Harford (1992), le club finit 12è, 8è, 7è et 13è de D1. Les affluences moyennes tournent autour de 8 000 spectateurs et ce malgré les prix parmi les plus élevés de D1 (entre 7 et 14 £ – quand un billet dans le Kop d’Anfield ne coûte que 4 £ maximum).

Les joueurs clés de cette période (outre les déjà cités) sont John Scales (futur Red), le milieu Robbie Earle et les attaquants Alan Cork et Dean Holdsworth (à partir de 1992 pour ce dernier).

1991. Hammam déclare vouloir fusionner avec Crystal Palace pour créer « le superclub du sud londonien » et annonce la construction d’un grand stade sur Wimbledon. Les supporters protestent et les médias s’en mêlent. Tous sont unanimes pour condamner cet énième projet insensé. Hammam jette finalement l’éponge.

D’aucuns pensent que ce mariage de convenance n’avait qu’un but strictement financier : Hammam possède des terrains (et parkings) tout autour de Plough Lane et un merger aurait considérablement fait monter la cote du club, surtout à l’orée de cette Premier League qui attisent tant les convoitises.

1991-92. Avec la Premier League qui se profile et le début de la course aux armements, le club connaît de graves problèmes financiers. Les rapports entre Sam Hammam et le Conseil d’arrondissement de Merton (Wimbledon) sont difficiles et le Libanais cherche une solution pour se passer d’eux…

Parallèlement, la ville nouvelle de Milton Keynes (alors ambitieuse cité de 150 000 habitants) continue à rechercher désespérément un club professionnel.

MK, c’est aussi un troupeau de vaches en béton disséminées à travers la ville, triste symbole de cette cité quadrillée à l’américaine et alors seule agglomération européenne de taille sans club de football pro. MK a pigé qu’il serait infiniment plus facile de s’approprier un nid bien douillet plutôt que d’essayer de métamorphoser son piteux club de D8 en machine conquérante bâtie pour affronter les exigences de la Football League.

Eté 1991. Wimbledon quitte le mythique Plough Lane, un stade totalement déglingué que Sam Hammam décrète inadaptable aux nouvelles normes all-seater (rapport Taylor consécutif à la tragédie de Hillsborough).

Pas de superclub avec Crystal Palace mais un partage de stade avec les Eagles ; Wimbledon FC évoluera donc à Selhurst Park dès août 91, sans toutefois abandonner l’ambition de se trouver un chez-soi, ce qui engendrera des années de conflit entre Sam Hammam et le Conseil d’arrondissement. Plough Lane continuera à être utilisé par la réserve Don.

1992. Joe Kinnear est nommé manager. Il fera de l’excellent boulot et restera à Wimbledon jusqu’en mai 1999.

1994. Sam Hammam revend Plough Lane à feu Safeway (supermarchés) pour 4M £. Certains observateurs notent le côté louche de la manoeuvre et l’extrême complaisance du Conseil d’arrondissement concernant la mystérieuse altération des statuts du stade. Envolées donc les covenants, restrictions majeures qui stipulaient que le site, si vendu, ne pourrait servir qu’à la pratique du sport ou d’autres loisirs.

1995. Formation du WISA, la Wimbledon Independent Supporters’ Association, un groupe militant qui éclipsera le Wimbledon FC Official Supporters Club, jugé trop mou pour mener à bien les rudes luttes à venir. WISA deviendra très actif par la suite, notamment dans la création du Dons Trust début 2002, groupe d’un millier de supporters-membres qui fondera l’AFC Wimbledon six mois plus tard.

Côté terrain, les Dons alignent les excellentes saisons en D1 : 9è en 1995, 14è en 1996 et 8è en 1997 (auxquels s’ajoutent  deux demi-finales de coupe en 1997, FA Cup et League Cup).

1996-1997. Plusieurs Conseils d’arrondissement du sud de Londres refusent d’accorder un permis de construire au projet de nouveau stade du Wimbledon FC (on refuse également à Sam Hammam l’implantation de divers business, dont une usine).

Hors de lui, le Libanais met le paquet pour délocaliser Wimbledon qui se voit envoyer aux quatre coins du Royaume et au-delà : Manchester, Gatwick (!), Cardiff, l’Ecosse, la côte Sud et surtout Dublin, destination fortement convoitée. Malgré le feu vert de la Premier League (la FA ne tranche pas) et le fort intérêt suscité à Dublin notamment auprès de la population locale et de personnalités (dont Paul McGuinness, manager de U2), sevrées de football de haut niveau, la fédé irlandaise refuse cette énième excentricité Dons (un Niet approuvé, après coup, par l’UEFA et la Fifa).

C’est à cette époque que Sam Hamman vend 80 % de Wimbledon à deux richissimes pigeons norvégiens de passage (alors parmi les plus grosses fortunes d’Europe) attirés par cette Premier League si aguichante (ils viennent d’échouer dans leur tentative de racheter Leeds United). Hammam leur fait superbement l’article et les assure qu’ils n’auront aucun mal à délocaliser. Les deux gogos mordent à l’hameçon et s’imaginent acheter une franchise à l’américaine.

Tout en restant au board, Hammam réalise une incroyable plus-value :  Wimbledon est officiellement vendu pour 30M de £ [1], soit une invraisemblable culbute de x 750 ! (en 16 ans, et peu d’investissements).

Janvier 1999. Wimbledon frappe un grand coup sur le marché des transferts : le Gallois John Hartson est acheté à West Ham pour 7,5M £, record du club.

Mars 1999. Joe Kinnear, manager, est foudroyé par une crise cardiaque (non fatale) juste avant un match contre Sheffield Wednesday à Hillsborough et se retire temporairement du football. Les Dons sont sous le choc et dégringolent de la sixième à la seizième place en deux mois, leur classement en fin de saison. Cela sent le purgatoire de D2 pour eux et Hammam tempête :

« Si l’on doit descendre, on laissera une trainée de sang d’ici à Tombouctou. »

Eté 1999. Hammam se brouille avec les deux zillionnaires Norvégiens et quitte le club. Enfin, plus ou moins, car tout comme Vinnie Jones (qui vient de raccrocher les crampons après une saison à QPR), il n’est jamais bien loin (il possède encore des actions, qu’il vendra neuf mois plus tard).

Juillet 1999. Un nouveau manager arrive et il détonne sérieusement : il s’agit du marxiste-léniniste norvégien Egil Olsen (ci-contre). Le cérébral Egil, réputé man-motivator hors pair (à la Brian Clough), commettra l’erreur fatale de se pointer aux premiers entraînements Dons… en Wellingtons vertes, déclenchant l’hilarité générale. Enfin, pas longtemps, car le Crazy Gang lui brûlera ses deux paires. Il continuera à les porter en arpentant la ligne de touche pendant certains matchs, ce qui ne manquera pas de faire pouffer.

Le mariage entre ce petit club moribond et celui qui a hissé la Norvège dans le Top 10 du classement Fifa dans les Nineties interloque (4è en 1993 et 7è en 1999, deux phases finales de Coupe du monde. Entre 1993 et 1996, la Norvège n’encaissa qu’un seul but en open play ! Olsen tentera d’adopter ce système à Wimbledon, sans grande réussite).

Les experts rassurent, en soulignant la filiation naturelle entre le Wimbledon de Harry Bassett et la philosophie kick and rush d’Olsen depuis les Seventies (basée sur une défense de zone, des contre-attaques éclairs, un targetman géant et des ailiers supersoniques). Les non experts, eux, ne s’embarrassent pas de ces considérations tactiques et se lêchent les babines à l’idée de voir Olsen se faire bizuter par le Crazy Gang.

Car les énergumènes du CG n’ont que faire de l’éblouissante carte de visite de ce maître-tacticien et le premier entraînement est surtout mémorable pour la sauvagerie de l’accueil réservé à l’intello Scandinave : les joueurs lui…

A suivre.

Kevin Quigagne.

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[1] Selon le WISA, l’un des rares à avoir eu accés aux comptes du club au moment du redressement judiciaire en 2003, cette somme de 30M £ souvent avancée dans les médias serait exagérée, sans que l’on connaisse le montant de la vente – comptes opaques.

Matchbox vintage – Angleterre 1 – 3 Pays-Bas (15 juin 1988)

La semaine dernière, la Suède a zlatané* l’Angleterre, le premier quadruplé encaissé par les Anglais dans leur histoire. Et le dernier triplé ? Il remonte à 1988. Récit.

Euro 1988, 2e journée Groupe B, 15 juin 1988 à Düsseldorf
Dans un match couperet pour les deux équipes, les Pays-Bas infligent une cuisante défaite aux Anglais, et van Basten inscrit un hat-trick.

Buts : Robson (53′) – van Basten (44′, 71′, 75′)

Le point sur le classement au coup d’envoi (uefa.com)

Dos au mur suite à leur défaite 1-0 face au rival irlandais, les Three Lions doivent absolument se reprendre face aux Hollandais s’ils veulent éviter une élimination prématurée, avant même le dernier match de poule.

Les Pays-Bas sont dans une situation identique, s’étant inclinés également 1-0 face à l’URSS lors de la première journée.

Le onze anglais

Peter Shilton – Tony Adams, Kenny Sansom, Gary Stevens, Mark Wright – Glenn Hoddle, Bryan Robson, Trevor Steven (Chris Waddle 69′) – John Barnes, Peter Beardsley (Mark Hateley 74′), Gary Lineker

Coach : Sir Bobby Robson

Le onze batave

Hans van Breukelen – Ronald Koeman, Frank Rijkaard, Berry van Aerle, Adri van Tiggelen, Gerald Vanenburg (Wim Kieft 62′) – Ruud Gullit, Erwin Koeman, Arnold Mühren, Jan Wouters – Marco van Basten (Wilbert Suvrijn 87′)

Coach : Rinus Michels

1988, l'époque où l'on pouvait encore faire le fier avec un maillot dégueu.

1988, l'époque où l'on pouvait encore faire le fier avec un maillot dégueu.

Les buts au ralenti

44ème minute : Suite à un duel remporté par Rijkaard face à Lineker, à l’aide peut-être d’une faute, le ballon se retrouve sur l’aile gauche, où Gullit le récupère dans les pieds de Gary Stevens, déborde, et centre de l’extérieur du droit. Le cuir arrive à ras de terre, dans le dos de van Basten, mais l’attaquant parvient à contrôler et se retourner, puis il élimine Tony Adams d’une accélération fulgurante, avant de tromper Shilton, bien aidé par le retour en catastrophe de Stevens. Une ouverture du score qui ne reflète pas forcément le déroulement de cette première période, les occasions les plus franches ayant été obtenues par les Anglais : un poteau de Lineker après avoir éliminé van Breukelen, et un coup-franc de Hoddle sur la barre. 0-1.

53ème minute : Robson obtient le ballon à 25 mètres des buts adverses, dans l’axe, et joue le une-deux avec Lineker à l’entrée de la surface. Sur la remise de l’avant-centre, Robson est plus prompt que ses adversaires, et il s’en va tromper van Breukelen. Michels paye peut-être son choix d’aligner une défense centrale (Koeman – Rijkaard) très joueuse à défaut d’être intraitable. 1-1.

71ème minute : Un coup-franc hollandais mal dégagé par la défense adverse revient dans les pieds de Gullit à l’entrée de la surface, lequel contrôle, puis décale van Basten sur sa gauche. Lancé, l’avant centre s’en va battre Shilton d’une belle frappe croisée du gauche. Un véritable cauchemar pour le gardien anglais, qui fête sa 100e sélection. 1-2.

75ème minute : Et le cauchemar n’est pas fini. 4 minutes plus tard, le corner d’Erwin Koeman est prolongé au premier poteau par Kieft, jusqu’à van Basten qui rôde au deuxième, et qui, d’une volée du droit, clôt le score. Le premier triplé encaissé par l’Angleterre depuis 1959. 1-3.

Les buts en video

Le classement à la fin du match

Si le nul entre l’Irlande et l’URSS n’arrange pas les Hollandais, il élimine définitivement les Anglais, qui rentreront chez eux penauds, et vierges de tout point ; ils seront en effet battus 3-1 par l’URSS lors du dernier match.

Les Hollandais, eux, doivent s’imposer face à l’Irlande lors du dernier match, et ils y parviendront, grâce à un unique but de Kieft à 8 minutes du terme. Ils battront ensuite l’Allemagne de l’Ouest en demi, avant de retrouver l’URSS en finale, et de s’imposer 2-0 pour remporter leur premier et pour l’instant seul titre majeur sur la scène internationale. Monsieur Marco** van Basten, lui, finira meilleur buteur de l’Euro, avec 5 buts inscrits.

* L’emploi du très controversé terme « zlataner » est assumé par l’auteur de cet article, mais n’engage en rien la position de la rédaction de TK, ou des Cahiers du Football.

** Toujours pas de pizza au caviar.

Matchbox vintage – Newcastle United 8 – 0 Sheffield Wednesday (19 septembre 1999)*

Pour le premier match de Robson, Newcastle signe son record pour une victoire à domicile. Deuxième quintuplé de l’histoire de la Premier League pour Shearer.** Sheffield se vengera sur Wimbledon deux semaines plus tard.***

Buts : Hugues (11′), Shearer (30′, 33′ (sp), 42′, 81′, 84′(sp)), Dyer (46′), Speed (78′) ;

Le point sur le classement au coup d’envoi (statto.com)

Après la démission de Keegan en 1997, les managers se sont succédé à la tête de Newcastle, sans parvenir à retrouver le succès de leur prédécesseur. Le club ne doit sa dix-neuvième place qu’à un meilleur goal-average. De plus, leur dernier match à domicile s’est soldé par une défaite, 2-1, contre les voisins de Sunderland. Ca fait tâche.

En Premier League depuis 1992, Sheffield se bat chaque année pour ne pas descendre (septième place comme meilleur résultat). Avec quinze buts encaissés pour trois marqués, la confiance ne règne pas dans le Yorkshire.

Le onze de Newcastle

Coach : Bobby Robson (en place depuis dix-sept jours)

Le onze de Sheffield

Coach : Danny Wilson (premier coach non-anglais du club depuis 1942) (en place depuis un an et deux mois)

Les buts au ralenti

11ème minute : les noirs et blancs se passent le ballon dans l’entrejeu. D’abord à droite, il atterrit dans les pieds de Dyer sur l’aile gauche. Son centre trouve la tête vainqueur d’Aaron Hugues, à peine 20 ans. 1-0.

30ème minute : corner côté droit, Solano et Ketsbaia le jouent à deux. Le premier centre pour Shearer, qui coupe du pied droit au premier poteau. Petit filet gauche. 2-0.

33ème minute : le latéral droit Barton joue le renard dans la surface adverse. Emerson Thome (du Brésil, pas de Savoie) dévie le ballon de la main. Pénalty, que Shearer se charge de transformer en but. 3-0.

42ème minute : dans le rond centrale, Kestbaia transmet à Dyer sur l’aile gauche. Son contrôle n’est pas très professionnel, mais le marquage non plus. Aux abords de la surface, il centre pour Shearer qui devance son défenseur pour marquer son troisième but. 4-0.

46ème minute : Shearer, sur l’aile gauche, qui s’infiltre dans la surface et centre à ras de terre pour Speed. Sa main l’aide à prendre le dessus sur son défenseur, mais pas sur le gardien, qui repousse son tir. Le ballon revient sur Shearer qui centre à nouveau, de la tête. Dyer est en embuscade aux six mètres. D’ailleurs, c’est une action assez confuse. 5-0.

78ème minute : superbe remontée de balle de Newcastle en neuf passes, coup-franc de Solano, dégagement de la défense, corner de Solano, tête aux 10 mètres de Speed. Robson : « We need for Speed. ». 6-0.

81ème minute : Sheffield n’y est plus tellement. Mr. Robinson obtient un coup-franc sur la côté droit, que Solano se charge de frapper. Pressman et Walker se gênent, le ballon atterrit dans les pieds de Shearer. Cadeau, 7-0.

84ème minute : Le pas mauvais Sibon vient de remplacer Donnelly. Après dix secondes de jeu, il fait faute sur Robinson dans la surface. Shearer salue la foule pour la cinquième fois. 8-0.

Et Sheffield dans tout ça ?

Pas grand-chose à se mettre sous la dent, même s’ils n’ont pas été ridicules offensivement. Mais Andy Booth, blessé, est sorti très tôt du match, et Gilles de Bilde n’a pas compensé.

Bilan carbone désastreux pour Sheffield

Bilan carbone désastreux pour Sheffield

This is the end

* Il faut remonter à 1904 pour revoir une telle somme de buts entre ces deux équipes (le 17 décembre, 6-2 en faveur de Newcastle qui jouait à domicile).

* Shearer a été devancé par Andy Cole, le 4 mars 1995, et sera imité par Jermaine Defoe, le 22 novembre 2009, puis par Dimitar Berbatov, le 27 novembre 2010.

* 5-1 à domicile, leur seule victoire sur leurs dix-sept premiers matchs.

Ancien international espoirs anglais, Justin Fashanu avait devant lui un avenir radieux dans le football, jusqu’à ce que les blessures gâchent sa carrière. Un destin triste, certes, mais fréquent. Destin qui a par la suite basculé dans le tragique, sur fond de tabloids, d’homophobie et d’agression sexuelle. Ambiance.

Né en 1961 à Londres, Justin Fashanu et son frère John, d’un an son cadet, sont placés très jeunes en famille d’accueil suite à la séparation de leurs parents. Enfant, Justin pratique la boxe et aurait pu envisager une carrière dans ce sport.

Le premier joueur noir à £1M

Mais c’est le football qu’il a choisi. Formé à Norwich, il signe son premier contrat pro fin 1978, pour débuter en championnat au début de l’année suivante, un mois avant son 18e anniversaire.
Considéré comme un futur grand du football anglais, il joue plus de cent matchs avec les Canaries en trois ans, inscrivant une quarantaine de buts, certains splendides (dont celui-ci, désigné Goal of the Season 1979-80 contre Liverpool), et obtient six capes chez les espoirs anglais.
Tout roule, donc, et il est transféré à l’été 1981 à Nottingham Forest pour £1M, devenant ainsi symboliquement le premier joueur noir ayant coûté cette somme.
Mais à Forest, tout ne se passe pas comme prévu.

Brian Clough : « Qu’est-ce que tu fous dans ce bar à pédés ? »

Fashanu semble en manque de confiance à Nottingham, son rendement est famélique (trois buts en plus de trente matchs), en partie à cause du traitement qui lui est réservé par son entraîneur.
La rigueur et la fermeté de Brian Clough sont relativement incompatibles avec le tempérament du jeune attaquant, qui, à 20 ans, semble encore en pleine exploration de sa sexualité.
Les rumeurs font état de visites fréquentes de Fashanu dans des bars et des boîtes gay, Clough n’apprécie pas et lui fait savoir, en lui interdisant l’accès aux entraînements, même avec la réserve.
Clough publiera la conversation suivante dans son autobiographie, en 1995 :

Clough : « Où vas-tu si tu veux acheter une baguette de pain ? »
Fashanu : « Chez le boulanger. »
Clough : « Et où vas-tu si tu veux acheter un gigot d’agneau ? »
Fashanu : « Chez le boucher »
Clough : « Alors qu’est-ce que tu vas foutre tous les soirs dans ce bar à pédés ? »

La situation devient intenable pour Fashanu, qui s’exile au début de la saison suivante à Southampton, en prêt. Neuf matchs et trois buts plus tard, la confiance semble être revenue, et si les Saints ne peuvent l’acheter, faute de liquidités, c’est Notts County, l’éternel rival de Forest, qui flaire la bonne affaire en l’engageant pour £150 000.
Néanmoins, son niveau n’est plus le même qu’à Norwich, malgré un but tous les trois matchs en moyenne, et il est vendu en 1985 à Brighton, pour encore moins cher qu’il n’avait été acheté.

Blessure, coming-out, exil et retour

Fashanu a à peine commencé à jouer qu’il se blesse gravement au genou. Sa blessure le force alors à s’exiler aux Etats-Unis, pour se faire soigner, dans un premier temps, puis découvrir le soccer.
Après près de deux ans de rééducation, il signe en 1988 à Los Angeles, puis l’année suivante à Edmonton et Hamilton. Pendant ce temps, son frère John réussit une saison pleine à Wimbledon, et remporte la même année la FA Cup contre Liverpool (voir Le hold-up du Crazy Gang).
Sur le continent américain, Justin flambe aussi, mais le niveu n’est pas le même qu’en Angleterre, et il tente un come-back, raté.
Deux matchs en 1989 à Manchester City, puis deux matchs à West Ham, cinq à Leyton Orient, et il signe l’année suivante à Southall, pour six matchs comme entraîneur-joueur, avant de retourner pour l’été à Toronto.
Mais le fait marquant de sa carrière ne se situe pas dans ces changements de clubs. À 29 ans, en 1990, il devient le premier joueur de football en activité à faire son coming-out.

Il accorde une interview scandale au Sun, dans laquelle il révèle avoir eu notamment une relation avec un député londonien.
Les réactions sont multiples, et quand bien même Justin lui-même prétend que ses coéquipiers ont bien pris la nouvelle, lâchant cependant quelques vannes à gauche et à droite, dans l’opinion publique, c’est un choc. Beaucoup de footballeurs déclarent qu’un homosexuel n’a pas sa place dans un sport d’équipe, et, évidemment, les supporters adverses s’en donnent à cœur joie.
La réaction la plus troublante est néanmoins celle de son frère. John rejette son aîné, déclarant à la presse qu’il a toujours été un paria, que le football est un sport d’hommes, et qu’il y a une raison pour laquelle aucun footballeur ne s’est jamais déclaré comme homosexuel.
Pendant ce temps, Justin peine à refaire surface sur les terrains, effectue un essai infructueux à Newcastle, avant, enfin, de se poser à Torquay. Il y reste deux ans, joue bien, marque des buts, mais ne peut empêcher la descente du club en quatrième division. Nommé entraîneur-adjoint l’année suivante, il ne parvient pas à décrocher le poste d’entraîneur après les licenciements successifs d’Ivan Golac et Paul Compton, et est devancé par Neil Warnock.
Pendant ce temps-là, une autre affaire fait grand bruit dans les tabloids anglais, toujours friands de la moindre rumeur : on lui prête une relation avec l’actrice Julie Goodyear, qu’il dément, mais celle-ci déclarera dans son autobiographie que la relation était réelle.

Présumé coupable

Miné par toutes ces affaires, peu préparé aux retombées de son coming-out, Fashanu décide à nouveau de partir d’Angleterre, direction, dans un premier temps, l’Ecosse et les Airdrieonians, qu’une fois de plus, il ne sauvera pas de la relégation.
S’ensuivent alors des piges à Trelleborg en Suède, puis à Heart of Midlothian, Atlanta et enfin Miramar, en Nouvelle-Zélande. Quatre saisons peu convaincantes au terme desquelles il prend sa retraite en 1997, pour aller coacher l’équipe des Maryland Mania, à Ellicott City.
C’est là, en mars 1998, que se déroule l’ultime drame : Justin est accusé d’agression sexuelle par un adolescent de 17 ans. Interrogé le 3 avril puis relâché, il s’envole pour l’Angleterre au moment où, une nouvelle fois d’après la rumeur, des policiers débarquent chez lui pour l’arrêter.
Un mois plus tard, Justin Fashanu est retrouvé mort, pendu dans un hangar à Londres, peu après avoir visité un sauna gay.
Dans sa lettre de suicide, il déclare avoir le sentiment « d’avoir été présumé coupable » sans preuve, et « ne plus vouloir embarasser sa famille et ses amis ».
Une enquête est ouverte à Londres et rend ses conclusions en septembre : Justin Fashanu s’est bel et bien suicidé, et la police américaine avait arrêté la procédure, par manque de preuves.

Retombées et héritage

Dix ans après la mort de Justin Fashanu a été créée une association nommée The Justin Campaign, pour lutter contre l’homophobie dans le football, et en mars 2009, les Justin Fashanu All-Stars, une équipe de football montée par cette association et soutenue par la FA a organisé un match de gala, à Brighton.
En février dernier, Amal Fashanu, nièce de Justin et fille de John, a réalisé un documentaire diffusé sur la BBC3, intitulé Britain’s Gay Footballers, dans lequel elle dénonce l’homophobie latente du monde du football, en soulevant la question suivante : « Pourquoi aucun des 5 000 footballeurs anglais n’a t-il déclaré être homosexuel ? ».
Depuis, les clubs de la Premier League ont signé une charte (voir ici), condamnant, entre autres, l’homophobie.
John Fashanu, lui, même s’il a déclaré regretter profondément sa réaction à l’annonce du coming-out de son frère, ne croit toujours pas que Justin était gay, mais qu’il avait seulement « besoin d’attention » (lire l’interview de John Fashanu : My brother Justin wasn’t gay).
Espérons que les actions d’Amal Fashanu et de la Justin Campaign ouvre les yeux à un monde où l’homophobie est bien présente, en témoignent les tollés que soulève la question du mariage gay en France, et que d’autre footballeurs, plus charismatiques qu’Olivier Rouyer, fassent leur coming-out, même si, comme le dit John, « il y a plus de chance de voir un pape noir qu’un footballeur gay ».

Matchbox vintage – Liverpool 6 – 2 Tottenham (8 mai 1993)

Graeme Souness, parti superviser Peter Ndlovu à Coventry, n’a pas pu/voulu assister à la probable plus belle performance de son équipe sous son commandement. Victoire sans l’ombre d’une moustache. 

Buts : Rush (20′, 88′), Barnes (45′, 89′), Nethercott (csc) (47′), Walters (85′, pen) ; Sheringham (46′), Sedgeley (77′)

Le point sur le classement au coup d’envoi (statto.com)

Titré en 1990 (le 18ème) et tenant du titre en Cup, Liverpool est 8ème à l’orée de cette saison, et suit une mauvaise pente (2ème en 91, 6ème en 92). Pour eux, il s’agit de bien finir la saison.

Troisième en 1990 et vainqueur de la Cup en 91, Tottenham est 10ème à l’orée de cette saison, et fait du faux plat (10ème en 91, 15ème en 92). Pour eux aussi, il s’agit de bien finir la saison.

Le onze de Liverpool

Coach : Graeme Souness (en place depuis deux ans et un mois)

Le onze de Tottenham

Coach : Doug Livermore & Ray Clemence (en place depuis dix mois)

La première mi-temps

Une première période plutôt animée, avec des occasions côté visiteurs, notamment une barre transversale de Van den Hauwe sur un centre élémentaire de Watson, ou encore un tir foudroyant d’Anderton après une contre-attaque éclair, mais du réalisme côté local. Un 2-0 cher payé pour Liverpool, qui n’en demandait pas tant.

Les buts au ralenti

20ème minute (Liverpool) : le moustachu Ian Rush récupère un centre de Barnes au deuxième poteau, résiste au retour du défenseur et fusille le gardien de but. Simple comme bonsoir. Son 300ème but pour Liverpool. On ignore toujours si le commentateur a crié « It’s goal » ou « It’s God ». 1-0.

45ème minute (Liverpool) : le moustachu Grobbelaar anticipe un ballon en profondeur et l’intercepte hors de sa surface. La balle circule dans les pieds des Reds jusqu’à Redknapp, qui alerte Walters sur sa droite en transversale. Un passement de jambes, une course vers l’avant, et un centre pour Barnes esseulé au point de pénalty qui place sa tête. Le retour de Sedgley n’y change rien, et le gardien est battu. 2-0.

"Le vert est satanique."

Rush dit :"Le vert est satanique."

La deuxième mi-temps

Quarante-cinq minutes d’excellente facture, où les trois-quarts des occasions que les joueurs se sont procurées ont modifié le tableau d’affichage. Tottenham a réduit deux fois la différence, mais les velléités offensives de Liverpool ont eu raison de leur persévérance. Rush a raté un duel face au gardien, et Sheringham un pénalty dans les arrêts de jeu.

Les buts au ralenti

46ème minute (Tottenham) : sur un coup-franc joué depuis son propre camp, Ruddock* envoie un ballon dans la surface adverse en espérant une tête ou une déviation. Miracle, la défense joue (très) mal le hors-jeu. Sheringham se retrouve au point de pénalty et ne loupe pas son face-à-face. 2-1.

47ème minute (Liverpool) : dans la foulée, David Burrows obtient un corner sur le flanc gauche. Le frère de Lincoln le joue vite avec Redknapp, qui transmet à Harkness en passe courte. Son centre est dévié par Nethercott, remplaçant de Van den Hauwe à la pause. Le gardien dévie le ballon mais ne peut rien. 3-1.

77ème minute (Tottenham) : un long dégagement imprécis du gardien, une déviation chanceuse de la tête, une simili-passe-lob, puis un contrôle approximatif de Sedgeley aux 16 mètres qui lui permet de devancer miraculeusement le défenseur. Mais, finalement, une jolie frappe de l’intérieur du pied gauche. Ca compense en partie. 3-2.

85ème minute (Liverpool) : un pénalty que Rush obtient au métier. Transformé par Barnes, sans trembler. 4-2.

88ème minute (Liverpool) : joli mouvement en triangle des Scousers sur le côté droit, mais le ballon est intercepté par Danny Hill, qui veut relancer rapidement. Erreur, Redknapp traine dans les parages, récupère aux 25 mètres, rentre dans la surface côté droit. Il passe facilement Ruddock, qui se livre autant qu’un libraire, et centre pour Rush, qui finit le travail au milieu de trois défenseurs. Le jeune Jamie, à peine vingt ans, est amplement félicité. 5-2.

89ème minute (Liverpool) : le ballon circule proprement au milieu de terrain entre les chaussettes rouges. Il arrive jusqu’à Walters, qui a tout le temps de soigner son centre pour Barnes. Mabbutt néglige son marquage, et permet au capitaine Red de réussir le doublé. 6-2.

In the end

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*Neil «Razor » Ruddock, plus connu pour son match contre Cantona (durant lequel il parvint à le déstabiliser en lui rabaissant le col) que pour ses interventions défensives.

L’effervescence footballistique de ces derniers mois a balayé un évènement remarquable : Vincent Péricard a raccroché les crampons.

Fin février, celui que les médias anglais aiment à présenter comme un « ex Juventus striker » a dit stop. Basta. A seulement 29 ans. Ou plutôt c’est son club de Havant & Waterlooville (mini cylindrée de D6 anglaise) qui l’aurait envoyé à la retraite anticipée en décidant, fin décembre 2011, de ne pas prolonger son contrat de trois mois. Une fin brutale pour un chasseur de buts qui fit jadis rêver dans certaines chaumières reculées de l’Angleterre profonde.

Des débuts bioniques

Tout commence chez les Verts pour ce joueur d’origine camerounaise. Vince fait toute sa formation à Sainté et après deux matchs de Ligue 1 saison 1999-2000, la Juventus le kidnappe. L’effet Mondial 1998 joue à plein pour les mini-Bleuets et la formation à la française a la cote. Vince fait partie de cette génération de jeunes cadors français dont les clubs italiens raffolent soudain (citons Mickaël Sylvestre, Ousmane Dabo ou Jonathan Zébina).

C’est Carlo Ancelotti qui l’a repéré avec l’équipe de France des U18. A 17 ans et demi, Vince cotoie les Zidane, Thuram, Nedved et autre Trézéguet et en profite pour s’imprégner de l’ambiance d’un grand club auquel il semble promis.

Tous lui prédisent en effet un avenir d’extraterrestre, à la Steve Austin. A commencer par Julien Courbet qui est frappé d’une inspiration géniale en lui consacrant en 2000 un numéro choc, sobrement intitulé « Vincent Péricard, l’homme qui vaudra des milliards », dans son émission Les 7 péchés capitaux (voir Top 10 des Cahiers ici).

Toutefois, loin de déraciner les arbres, Vince doit se contenter de la réserve Bianconera pendant deux ans (et de trente minutes de Ligue des Champions contre Arsenal, en mars 2002). Chez les coiffeurs, il décoiffe – deux fois meilleur buteur – mais la concurrence est féroce. Dans une interview accordée à The Independent en novembre dernier, il revient sur son étourdissant séjour transalpin :

« Au début, je ne parlais pas italien et je ne connaissais personne.  […] Zinédine Zidane était un ami et il m’arrivait de passer chez Edgar Davids pour croquer un morceau. Mon copain de chambrée, c’était Lilian Thuram. »

Été 2002, la Vieille Dame décide de le prêter au Portsmouth de Milan Mandaric, alors en D2. Le culture shock va être violent.

Vincent Péricard : « Même le manager, Harry Redknapp, disait « Péricard ne sait pas jouer au foot«  »

When Harry meets Vince

L’intersaison n’augure rien de bon. Le manager de Portsmouth, Harry Redknapp, se demande ouvertement s’il a tiré le bon numéro (Vince avait, dit-on, impressionné Harry lors de ce Juventus-Arsenal). Plus tard, Vince déclarera :

« En arrivant à Portsmouth à l’intersaison, j’en ai bavé. Le choc des cultures a été terrible et ça m’a affecté. Même Harry disait « Péricard ne sait pas jouer au foot », et c’est vrai que j’en touchais pas une les premières semaines. »

Entre deux coups de sang (savourez ce clip de 2002-03), Harry doit toutefois ravaler ses médisances car les débuts de Vince à Pompey sont fracassants, il fait notamment mouche lors de son premier match contre Nottingham Forest. Associé à Svetoslav Todorov (26 buts), Paul Merson (12), Yakubu et Steve Stone, Vince affolera les compteurs lors de cet exercice 2002-03, 9 pions. Puissant, technique, excellent dans la conservation du ballon, Vince impressionne.

Pompey finit largement premier (98 points) et retrouve l’élite quittée quinze ans auparavant. Été 2003, la Juventus le cède aux Anglais pour 400 000 £. L’avenir s’annonce des plus radieux.

Las ! Tout comme les emmerdes, les blessures vont arriver en escadrilles, principalement quadriceps et ligaments croisés. Entre le 13 décembre 2003 et le 13 août 2005, il ne dispute aucun match et révélera plus tard avoir sombré dans la dépression durant cette période (« Le médecin me prescrivait du Prozac mais franchement, je ne le recommande à personne ce truc. »).
Une fois la rééducation achevée, été 2005, il s’entraîne avec les internationaux camerounais en France, à l’occasion d’un match amical des Lions Indomptables.

Alain Perrin, le nouveau manager de Pompey, le juge toutefois encore un peu tendre pour la Premier League et, en septembre 2005, « Reggie » le prête pour trois mois à Sheffield United (D2). A son retour sur la côte sud, Perrin a péri et c’est son vieux pote Harry qu’il retrouve. Ce dernier ne sait trop quoi faire de lui et l’expédie chez les Pélerins (Pilgrims) de Plymouth (D2) en février 2006. A peine débarqué parmi les ancêtres du Mayflower, Vince claque un hat-trick mais sa pige Pilgrim sera plus un remake de « Vogue la galère » que de « L’île au trésor » (15 matchs, 4 buts).

Fin mai 2006, de retour dans un Portsmouth qui a frôlé la descente deux saisons d’affilée, Harry lui annonce qu’il veut monter un effectif bâti pour le milieu de tableau de Premier League. Exit Vince.

Nouveau départ avec passage par la case prison

Le 19 juin 2006, Stoke City (club ambitieux de D2) le recrute, pour trois ans et 15 000 £ de salaire mensuel. Tout comme à Portsmouth, ses débuts sont tonitruants (3 buts en 10 matchs). Puis commence une longue traversée du désert peu orthodoxe. D’octobre 2006 à mai 2007, il ne plante plus un pion (21 matchs). Les supporters lui reprochent une certaine lenteur et sa propension à tomber trop facilement.

Peu à peu, il est eclipsé par le déménageur Ricardo Fuller qui, lui, fait tomber les adversaires. Vince est cependant loin de se douter que sa méforme sportive va vite devenir le cadet de ses soucis. Fin août 2007, une banale infraction routière commise dix-huit mois plus tôt vient bouleverser sa vie.

Le 6 mars 2006, Vince s’était fait flasher près de Plymouth à 165 kilomètres/heure sur l’A38 (limitée à 112 km/h) au volant de sa Mercèdes. Le hic, c’est que Vince est un récidiviste des gros excès de vitesse.

Pour éviter les ennuis, il avait alors tenté de feinter la patrouille en déclarant que son beau-père, Jack, était au volant… Ce dernier, contacté par la police britannique, était tombé de haut. Et pour cause : Jack vit en France et n’avait pas mis les pieds en Angleterre depuis presque quatre ans !

Le 24 août 2007, le tribunal de Plymouth condamne notre Vince national à quatre mois de prison pour « entrave à la justice ». Vince déclarera à sa sortie de zonzon :

« Le juge qui m’a envoyé au trou ce jour-là était de mauvaise humeur et a voulu faire de mon cas un exemple. A l’annonce de la sentence, la police m’a menoté et conduit en cellule. Pendant plusieurs jours, j’étais en état de choc. […] Cette expérience est une dure leçon pour moi. Dorénavant, je respecterai scrupuleusement la loi et je conseille à tous de faire de même. »

Heureusement pour Vince, son avocat obtient rapidement une libération conditionnelle et l’extrait de la HM Prison Exeter le 20 septembre 2007, après quatre semaines de nick. Il rejoint alors une open security prison pendant dix jours avant d’être définitivement libéré. Seule condition : il devra porter un bracelet électronique pendant trois mois. Il devient le troisième footballeur du pays à avoir les chevilles qui enflent électroniquement, après Gary Croft (2000) et Jermaine Pennant (2005).

Harry Redknapp, le sauveur

Dans le Mirror du 9 octobre 2007, sous l’intitulé « My prison hell », Vince raconte pêle-mêle son Midnight Express à lui au pénitencier d’Exeter. Le détenu voisin qui se pend, les traumatismes, les cornflakes dégueulasses, l’isolement, la claustrophobie, la promiscuité, le défi mental permanent et la vie de sous-tricard à sept livres la semaine.

Ce pécule (7 £ hebdo), précise-t-il, qui lui a sacrément servi pour améliorer l’ordinaire. Comme par exemple se payer des rations supplémentaires de nourriture et des crédits pour son téléphone. Il confessera plus tard que Stoke City avait continué à lui verser ses quinze patates mensuelles pendant son incarcération. De quoi consommer de la céréale upmarket tous les matins.

Il avoue aussi ne pas savoir s’il aurait pu tenir le coup sans le soutien d’Harry Redknapp et Teddy Sheringham, son ex-coéquipier à Pompey. Il remercie également Tony Pulis et le board de Stoke City. Les Potters le soutiennent et ont decidé de lui accorder une seconde chance. Vince déclare que porter un bracelet ne lui posera aucun problème et envisage l’avenir immédiat avec bonheur :

« C’est comme si c’était Noël pour moi. Je suis aux anges de retrouver mes amis et coéquipiers et de ne plus être parmi les criminels. »

Mais lors d’une séance d’entraînement peu après sa sortie, la guigne s’acharne : la douceur des tacles de ses coéquipiers Potters fait exploser son bracelet électronique. La justice ne lui fait pas de cadeau pour autant et il doit passer deux semaines en confinement à Manchester.

Fin novembre, Vince-la-scoumoune se blesse à nouveau. Le 14 mars 2008, il est prêté à Southampton (D2), sans succès. Le bilan de la saison est déprimant : un séjour en prison, un bracelet qui éclate, une libération avortée, un retour en prison, des blessures, onze matchs, zéro but. Entre temps, Stoke City est monté en Premier League et ne compte plus franchement sur lui. Vince se met à sévèrement gamberger.

A suivre…

Kevin Quigagne.

Aujourd’hui, Alex Ferguson fête ses vingt-cinq ans à la tête de Manchester United – toute personne s’intéressant un tant soit peu à la chose footballistique n’aura pas pu y échapper. Un règne démesuré qui a logiquement accouché de moult flops. Petite sélection.

Bellion, David

Auteur d’un but en vingt matches de Premier League avec Sunderland, Bellion tape mystérieusement dans l’œil de Ferguson. Mais après tout, le « nouveau Thierry Henry », surnom dont on l’affuble, n’a que vingt-et-un ans, et d’aucuns voient en lui le futur de l’équipe de France.

Las! Bellion n’est presque jamais titulaire, et l’arrivée de Louis Saha en janvier 2004 lui complique la tâche. Bis repetita l’année suivante: une fois titulaire en dix matches de championnat, son influence demeure très limitée. Sa méthode d’entrainement est peut-être à revoir.

Arrivée : juillet 2003 (3M€)
Départ : mai 2006 (0,5M€)
En prêt à West Ham d’août 2005 à janvier 2006 et à Nice de janvier 2006 à mai 2006

Cruyff, Jordi

Après deux ans passés à Barcelone, Cruyff atterrit à United. Ferguson l’estime alors de la trempe des Paolo Maldini, plutôt que celle des Thibault Giresse. Par (mal)chance, il ne verra pas beaucoup jouer la progéniture du grand Johan à Manchester.

Blessé à répétitions, le Néerlandais n’apparait que 55 fois en quatre ans, pour 8 buts, tandis que son expérience européenne se limite aux phases de groupe de la Ligue des champions. Ultime infortune: il est prêté au Celta Vigo l’année du triplé. Il part à Alavés en 2000 dans une indifférence quasi générale.

Arrivée : juillet 1996 (2,5M€)
Départ : juillet 2000 (gratuit)
En prêt au Celta Vigo de janvier 1999 à juillet 1999

Djemba Djemba, Eric

À vingt-deux ans, Djemba-Djemba arrive en Angleterre pour remplacer Roy Keane, armé de son bagage national (un titulaire en puissance à Nantes) et international (une finale de Coupe des confédérations avec le Cameroun). Bien que souvent titulaire lors de sa première saison, la marche est bien trop haute, et il est rapidement vendu à Aston Villa à l’hiver 2005.

Dans une interview, Ferguson n’impute cependant pas cet échec aux seules performances sportives de Djemba-Djemba et remet en cause ses règles de vie: très dépensier (il aurait possédé dix 4×4 et une trentaine de comptes en banque, selon son agent), il devait, en 2008, 600.000€ au fisc anglais, selon plusieurs sources.

Arrivée : juillet 2003 (4,5M€)
Départ : janvier 2005 (2,5€)

Dong, Fangzhuo

Tel Ghostface Killer hantant les nuits de Sidney Prescott, ceux qui ont vu jouer Dong s’en souviennent. Le Chinois fait ses gammes au Royal Antwerp (spin-off belge de MU), puis revient en Angleterre pour montrer ses qualités, du moins ses capacités. Mais force est de constater que Dong n’a pas le niveau. Point positif: il est titulaire en Premier League pour la première fois contre Chelsea, en mai 2007. Point négatif: point d’enjeu, MU était déjà champion. L’aide apportée par Cristiano Ronaldo, si elle est sincère, n’en est que plus remarquable.

Arrivée: janvier 2004 (730.000€)
Départ: août 2008 (gratuit)
En prêt au Royal Antwerp FC de janvier 2005 à janvier 2007.

Forlan, Diego

Forlan n’est pas à proprement parler un flop lorsqu’il quitte MU en 2004 (encore que, par certains aspects…); c’est plutôt rétrospectivement et à la lumière de sa carrière postérieure, que l’on peut considérer que sa période anglaise n’est pas sa meilleure, pour le dire pudiquement.

17 buts en 108 matches joués, le ratio n’est pas très bon en comparaison de celui de van Nistelrooy, mais il a laissé à Manchester une empreinte bien plus profonde que les quatre précédents flops réunis. Reste Youtube, qui n’oublie pas grand-chose.

Arrivée : janvier 2002 (11M€)
Départ : août 2004 (3,2M€)

Kléberson

À l’été 2003, Ferguson effectue sans doute l’un des plus beaux mercati de sa carrière: départs de Veron et Beckham, arrivées de Bellion, Djemba-Djemba, Kléberson, Howard et Ronaldo (ouf!). Kléberson, le troisième associé cuvée 2003 de notre classement, est le premier Brésilien à signer à MU, Ferguson souhaitant surfer sur la vague de la Coupe du monde 2002.

Pourquoi pas. Mais Kléberson déçoit et joue relativement peu (un peu plus de vingt matches en deux ans). Le second Brésilien, Anderson, sera autrement plus convaincant, les supporters ne s’y trompant pas.

Arrivée: juillet 2003 (8,6M€)
Départ: juillet 2005 (2,6M€)

Miller, Liam

La relève technique au milieu de terrain se fait toujours attendre. Malgré l’audace apparente des transferts de Klerberson et Djemba-Djemba, Ferguson reculait pour mieux sauter. En 2004, il choisit de nouveau une jeune pousse, Liam Miller, alors connu des Lyonnais pour son but l’année précédente. Considéré comme un cadre au Celtic par Martin O’Neill, Miller s’embourbe à Manchester.

Il dispute le premier match de la saison 2004/05, à Chelsea, puis ses apparitions diminuent à mesure que le public prend conscience de sa fragilité et de ses limites. Neuf matches de championnat en tout et pour tout, avant d’être prêté à Leeds (Championship). Si on était cynique, on ajouterait que Miller, au moins, n’a rien coûté.

Arrivée: juillet 2004 (gratuit)
Départ: août 2006 (gratuit)
En prêt à Leeds de novembre 2005 à mai 2006

Milne, Ralph

Lors du dîner de la League Managers’ Association, en novembre 2009, on demande à Ferguson sa plus grosse erreur de recrutement. « Ralph Milne. Je ne l’ai payé que 170.000£, mais on me le reproche encore. » [« I only paid £170,000 but I still get condemned for it. »]

Le ratio de 3 buts pour 23 apparitions, pour un ailier gauche qui avait tant brillé à Dundee United, s’avère être assez maigre. Ses problèmes d’alcool et de discipline reviennent régulièrement dans le débat pour justifier ses  échecs, y compris par son entraîneur en Ecosse, Jim McLean. N’est pas George Best qui veut.

Arrivée: novembre 1988 (170.000£)
Départ: juin 1991 (gratuit)

Poborský, Karel

Ferguson veut profiter de l’éclat de la République tchèque à l’Euro 1996 et recrute Poborský, présent dans l’équipe-type du tournoi. Mais la forme du printemps n’est pas celle de l’automne, et les supporters peinent à reconnaitre le coéquipier de Nedvěd et Berger. Surtout, la montée en puissance de David Beckham handicape son intégration.

Pas un flop retentissant, donc (3 buts en plus de 20 matches), mais un échec assez cuisant. L’on trouve tout de même des motifs de satisfaction: si Cantona marque ce but légendaire, c’est aussi grâce à Poborský (si, si, regardez, la crinière blonde qui fait l’appel à droite). Respect.

Arrivée: juillet 1996 (4M€)
Départ: juillet 1998 (2,8M€)

Prunier, William

Il n’a fallu que deux apparitions pour que les Anglais connaissent le nom français de l’arbre qui donne de petits fruits de forme ronde ou allongée à la chair sucrée. À vingt-huit ans, Prunier a acquis une solide expérience en France, et côtoyé bon nombre d’internationaux, dont Éric Cantona. En décembre 1995, libéré de son contrat avec Bordeaux, il est appelé pour un essai par Ferguson, qui souhaite juger sa valeur au sein de la réserve mancunienne. Mais à la suite d’une pénurie de défenseurs centraux, il se voit très vite titulariser en Premier League.

Si son premier match est anecdotique, le second (le jour de l’an) s’avère beaucoup plus délicat. Quatre buts encaissés à Tottenham, dont l’un contre son camp. En mars 1996, au lieu d’un contrat, Ferguson lui aurait proposé de prolonger son essai. Ce que Prunier refusa, gelant ses statistiques anglaises (deux matches, un but) pour l’éternité.

Arrivée : décembre 1995 (à l’essai)
Départ : mars 1996

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Massimo Taibi et Juan Sebastian Veron feront l’objet d’un autre classement, sans quoi ils n’auraient sans doute pas dépareillé dans celui-ci. En outre, il nous a été difficile de départager la course à la meilleure cascade des gardiens de but de l’ère post-Smeichel [à savoir, hormis Taibi, Bosnich, van der Gouw, Culkin, Rachubka, Barthez, Goram, Carroll, Ricardo et Howard]; aussi, leur relative homogénéité les avantage puisqu’ils ne figurent pas dans ce Top
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Matchbox vintage – Liverpool 3 – 1 Chelsea (9 septembre 1967)

A une époque où tout le monde trottinait sur un terrain de football, certains joueurs de Liverpool couraient. Ample victoire des locaux, sans l’ombre d’un doute.

Buts : Smith (38′), Hateley (46′, 47′) ; Houseman (78′)

l'excellent statto.com)

Le point sur le classement au coup d'envoi (source : l'excellent statto.com)

Remontés en D1 en 1963, Chelsea est alors un bon club quoi que modeste : deux titres remportés et autant de finales perdues (Community Shield excepté).  Mais, en quatre ans, les londoniens se sont peu à peu mêlés à la lutte, en terminant deux fois cinquième et une fois troisième. Reste à poursuivre.

Revenus en D1 en 1962, Liverpool gagne le titre en 1964, puis réitère en 1966, son septième sacre national. La défense de leur titre s’est soldée par une cinquième place, pêchant par leur irrégularité à domicile. En étrillant Newcastle 6-0 lors de la 3ème journée, les Rouges se sont rassurés. Reste à confirmer.

Liverpool

Le onze de Liverpool

Le onze de Liverpool

Coach : Bill Shankly (en place depuis sept ans et neuf mois)

Chelsea

Le onze de Chelsea

Le onze de Chelsea

Coach : Tommy Docherty (en place depuis six ans et cinq mois)

Le Onze de Larqué

Le Onze de Larqué

La première mi-temps

Très grosse domination de Liverpool, avec un Thompson omniprésent. Les occasions de Chelsea se sont réduites à des corners, bien que la plus dangereuse d’entre elles vienne d’une action placée. Hateley, tout juste transféré de Chelsea à Liverpool, n’a aucun scrupule vis-à-vis de ses anciens coéquipiers. Avantage « mérité ».

Le but au ralenti

Lawrence, gardien sans gant, dégage au pied. Le ballon arrive dans les vingt-cinq mètres londoniens. La défense renvoie péniblement, et St. John récupère aux trente mètres. Il s’avance et frappe. Waldron contre le ballon, qui parvient à Hateley aux seize mètres, dans l’axe. Harris, le défenseur-sandwich, panique un peu et tacle le buteur en retard. Pénalty, que Smith se charge de tirer. Bonetti, l’autre gardien sans gant, ne peut rien contre le poteau rentrant. 1-0 (38′).

une affiche souvent alléchante, des hectolitres d'alcool, beaucoup de moyens mais les drapeaux nous bouchent la vue et on repart toujours un peu deçu du spectacle

Anfield, c'est un peu comme les Vieilles Charrues : une affiche souvent alléchante, des hectolitres d'alcool et beaucoup de moyens, mais les drapeaux nous bouchent toujours la vue et on repart systématiquement déçu du spectacle

La deuxième mi-temps

Hormis quelques rares incursions dans la surface des Reds, Chelsea boit le calice jusqu’à la lie après les deux buts très précoces encaissés. Liverpool, bien aidé par Thompson, la Botte Increvable de l’équipe, a dominé le match dans ses grandes largeurs, profitant des lacunes défensives de leurs adversaires. Sans Bonetti (et sa barre transversale), l’écart aurait pu être un peu lourd.

Les buts au ralenti

Liverpool donne le coup d’envoi. En deux touches de balle, le ballon arrive à Thompson, excentré sur l’aile. Il contrôle de la poitrine, avance en provoquant son adversaire direct et passe en retrait à Hugues, aux abords de la surface. Celui-ci centre instantanément du gauche sur Hateley qui, d’une tête plongeante aux six mètres, double le score. 2-0 (46′).

Hollins récupère le ballon dans son propre camp et, n’étant pas attaqué, s’avance jusqu’au rond central. Il tente une passe ras de terre à son attaquant, mais le défenseur adverse a bien anticipé et intercepte sans mal. Celui-ci relance immédiatement sur Thompson, sur sa gauche. L’ailier contrôle le ballon sur la ligne médiane et accélère, prend de vitesse Hinton, rentre dans la surface et centre fort devant le but. Hateley se jette et aggrave la marque. 3-0 (47′)

Baldwin récupère le ballon sur l’aile gauche. Le jeu bascule dans l’axe, sur Osgood,  qui passe dans la profondeur à Hollins à l’entrée de la surface. Il perd son duel face à Smith, mais Chelsea garde la possession. Houseman, légèrement décalé sur la gauche, frappe instantanément des seize mètres. Petit filet, 3-1 (78′).

Spectateurs

Officiellement 53839, mais 150000 à vue de nez.

Matchbox vintage – Liverpool 4 – 3 Newcastle United (3 avril 1996)

Considéré comme l’un des tout meilleurs matchs de Premier League depuis sa création, ce LFC-NUFC a d’abord excité par l’ampleur de son enjeu, puis brillé par le plaisir du jeu. Un régal à déguster, car on ne vit que deux fois.

Buts : Fowler (2’, 55’), Collymore (68’, 90+2’) ; Ferdinand (10’), Ginola (14’), Asprilla (57’)

Le chox des étoiles

Le choc des étoiles

Premiers pendant 29 journées, Newcastle se fait dépasser par Manchester United à la défaveur d’une quatrième défaite en six matchs, cette fois à Arsenal (0-2) quelque part dans le temps. Liverpool a également perdu à Notthingham Forest (0-1), mais conserve sa troisième place. Toutefois, rien n’est joué. De multiples matchs en retard subsistant, le suspense demeure en haut de tableau.

Danse avec les Stars du centre.

Danse avec les Stars du centre.

Liverpool

David James

John Scales – Mark Wright – Neil Ruddock

Jason McAteer – Jamie Redknapp – John Barnes (c) – Rob Jones

Steve McManaman

Stan Collymore – Robbie Fowler

Coach : Roy Evans (en charge depuis deux ans et deux mois)

Newcastle

Pavel Srníček

Steve Watson – Steve Howay – Philippe Albert – John Beresford

Peter Beardsley (c) – David Batty – Robert Lee – David Ginola

Faustino Asprilla – Les Ferdinand

Coach : Kevin Keegan (en charge depuis quatre ans et deux mois)

Le match

Newcastle donne le coup d’envoi de cette guerre des abîmes, obtient même un corner, mais se fait surprendre par Fowler. Après une remontée de balle très propre, Redknapp hérite du ballon au milieu du terrain, qu’il expédie aussitôt vers Jones, sur l’aile gauche. Celui-ci transmet en une touche à Collymore qui centre sur Fowler. Déjà auteur de 23 buts, le buteur Red profite de l’hésitation du tchèque Srníček pour faire chauffer Anfield.

Newcastle est touché, mais pas coulé. Maîtrisant la possession du ballon, les minutes suivantes semblent à leur avantage, grâce à un pressing haut et agressif. Asprilla et Ginola tentent leur chance, mais James veille au grain. A la 10ème minute, ils sont logiquement récompensés de leurs efforts. Après une touche de Watson, Asprilla se joue de Ruddock (petit pont) pour rentrer dans la surface et centrer sur Ferdinand qui, aux six mètres, et malgré la vigilance de Wright, trompe un James apathique.

L’enjeu galvanise les Magpies, l’opération Tonnerre sur Manchester est en marche. Ainsi, quatre minutes plus tard, la défense récupère un ballon dans son camp, transmet à Ferdinand au milieu du terrain, qui lance Ginola dans la profondeur. Après une course de trente mètres, le français résiste au retour en forme de poursuite impitoyable de Scales et vient tromper James du pied gauche. Les Reds touchent les grands fonds. Leur trou noir a duré cinq minutes.

A la 18ème minute, Redknapp réveille un peu ses troupes en tentant un tir des 20 mètres qui frôle le poteau droit de Srníček. Mais si l’anglais ne trouve pas le cadre, il a le mérite de recadrer quelque peu ses coéquipiers, au cœur de la tourmente. Car Liverpool ne convainc pas, et l’on se demande si McManaman ne pense pas déjà à sa reconversion sur ESPN. A la décharge des milieux de terrain, il est vrai qu’ils n’ont que peu l’occasion de briller, tant le ballon file d’un but à l’autre à une vitesse folle.

Si la défense de Liverpool parvient désormais à juguler les attaques adverses, ni Fowler (23ème minute, après un coup-franc de Redknapp), ni Redknapp himself (31ème minute, sur une frappe aux 20 mètres), ni McManaman (43ème minute, seul aux 6 mètres mais très, très approximatif de la tête) ne peuvent égaliser.

L’arbitre décide de siffler la pause. Après 45 minutes aux allures de haute randonnée, le ballon peut enfin souffler. Half time.

Supporter de Newcastle, l'envoyé spécial de Teenage Kicks était soucieux.

Supporter de Newcastle, l'envoyé spécial de Teenage Kicks était soucieux.

La deuxième mi-temps commence comme la première : beaucoup de déchets techniques, mais un rythme soutenu et un scénario dramatique qui compensent. Guerre et passion sont au rendez-vous.

Fowler, décidément la fièvre au corps, est le premier à se mettre en évidence. A la 55ème minute, il reçoit un ballon face au but au point de pénalty de la part de McManaman. Sa reprise puissante fait mouche. Les Reds reviennent dans la partie.

Mais dans la foulée, le French Lover Ginola récupère un ballon au milieu du terrain, fait la passe entre trois défenseurs pour Lee, qui sert Asprilla en profondeur. Aux vingt mètres, celui-ci met l’extérieur de son pied droit pour tromper James, sorti faire la cueillette.

Alors, pour conjurer le jour du fléau, Liverpool repart de l’avant. Et parvient à recoller dix minutes plus tard, grâce à Collymore, venu dans la surface à la réception du centre de McAteer.

Le score est nul, et aucune des deux équipes ne semble s’en réjouir. Bien que Liverpool se crée les meilleures occasions (par Fowler et Barnes, notamment), Ferdinand est tout proche de marquer après avoir gagné son duel à double tranchant face à Harkness, rentré à la pause à la place de Wright, mais James apporte sa première contribution du match en repoussant la frappe de l’attaquant anglais.

A dix minutes du terme, le vétéran Ian Rush remplace Rob Jones, pour l’un de ses derniers matchs sous le maillot Carlsberg. Roy Evans choisit la carte du cœur, car les diamants sont éternels.

On rentre alors dans le temps additionnel, et l’expert McManaman obtient un corner. Qui ne donne rien.

A la 92ème minute, Barnes trouve Rush en double une-deux pour infiltrer la surface des Magpies, puis sert Collymore sur sa gauche. Esseulé, le justicier solitaire anglais contrôle et trompe Srníček dans son angle fermé. Boom ! Anfield est en furie, Keegan est furieux. Full-time.

De mauvaise humeur, il ira pondre un résumé de 15000 signes.

De mauvaise humeur, il ira pondre un résumé de 15000 signes.

Le classement du Top 5 restera inchangé. Il se dit que Roy Evans était au service de sa Majesté Alex Ferguson. Cette année-là, Newcastle a peut-être laissé à Anfield ses espoirs de remporter son premier championnat depuis 1927. Pleure ô pays bien-aimé.

Bonus : les buts et un point de vue du Guardian sur ce match.

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