C’est bientôt la fin de l’été et chez TK, on a décidé d’égaler les plus grands médias en faisant une série d’été. Mais comme on a un peu trop glandé près de la piscine quand il faisait beau ou devant une Guiness dans le pub d’à côté lorsqu’il faisait moche (c’est vous dire si on n’a pas beaucoup profité de la pistoche), on a adapté notre projet en série de fin d’été. Et quoi de mieux que raconter alors ces footballeurs qui, comme l’été, ont vu leur carrière prendre fin prématurément alors qu’ils étaient plein de promesses. Pour commencer cette dépression collective : Michael Johnson, l’homme qui voulait qu’on le laisse tranquille.

4 ans dans une carrière, c’est assez court. Mais pour certains, cela équivaut à un long et fastidieux chemin de croix. Pour Michael Johnson, ces quatre années infernales entre blessures à répétition et problèmes mentaux se sont enfin terminées lors de sa rupture de contrat avec Manchester City et le plus haut niveau, le 25 décembre 2012. Un deal gardé secret par le club pour protéger le joueur mais qui fut révélé moins d’un mois plus tard. « Je suis déçu plus que n’importe qui d’autre, mais c’est la vie », répondit Johnson au Manchester Evening News, qui lui demandait s’il avait un message pour les fans déçus de ne le voir réaliser son potentiel.

Car durant longtemps, Michael Johnson fut surnommé « FEC » : Future England Captain. Né à Urmston, dans les quartiers grisonnants de la banlieue sud de Manchester, le jeune milieu de terrain ne signa pas tout de suite chez les Citizens. Grand fan de Leeds United, il rejoint d’abord le centre de formation de l’équipe du Yorkshire à 10 ans* avant de faire un détour assez surprenant au Feyenoord, peu concluant. Il décrit alors être comme « emprisonné ». « Je vivais avec une brésilienne qui s’appelait Norma et sa fille. Je ne veux rien dire de mal sur elle parce qu’elle veillait sur moi, mais ce n’était pas la personne la plus sympa du monde », dira-t-il ensuite au Daily Mail. Il n’y reste qu’un an, frustré de ne connaître personne à l’école et de devoir se taper deux trams et un bus pour y aller. Mais il apprend pas mal. « Le football était bien. Mieux qu’ici (ndlr : en Angleterre of course!). Plus technique. Regardez les équipes nationales et vous verrez à quel point c’est plus technique en Hollande ». Il y côtoie notamment Jonathan De Guzman et Royston Drenthe à l’Academy. « Je pense, en m’y repenchant, que ça m’a aidé sur certains points. Je peux mieux gérer les choses maintenant. Mais je ne le referais pas ».

De retour de l’autre côté de la Manche à Everton, il signe finalement à Manchester City en 2004 et connaît deux ans plus tard sa première titularisation lors d’une lourde défaite face à Wigan (4-0). Auparavant, il est le capitaine de l’équipe jeune des Skyblues durant la campagne 2005-2006, accompagné par Daniel Sturridge, Micah Richards ou Adam Clayton (mais aussi Ched Evans, le taulard de Sheffield, ou Kelvin Etuhu). Les jeunots vont jusqu’en finale où ils s’inclinent face à Liverpool (3-2 sur l’ensemble des deux matches).

En 2007, sa performance à l’Emirates contre Arsenal est « ahurissante » pour son manager d’alors, Stuart Pearce, dithyrambique malgré la défaite 3-1. « Nous avons de très grandes espérances pour Johnno, et plus il obtient de l’expérience contre des adversaires comme Arsenal ou Liverpool, plus il progresse. Ça ne peut que l’aider ! ». Car l’arrivée de cadors comme Elano, Martin Petrov ou Geovanni à Manchester City (on est encore loin des Aguëro, David Silva ou Yaya Touré) n’a pas freiné la progression du jeune milieu blond. « Le niveau de ses performances m’a surpris mais je savais à quel point il était fort mentalement avant même que je ne le sélectionne en équipe première, surenchérit Stuart Pearce dans le Manchester Evening News. Michael s’occupe juste de ce qu’il doit faire et c’est un professionnel dans tous les sens du terme ». Les comparaisons fusent alors : futur Paul Scholes ou Ray Parlour, successeur de Colin Bell à Manchester City et de Steven Gerrard comme capitaine de l’Angleterre. Et peut-être même de Liverpool, une offre de 10 millions de livres étant dans les tuyaux.

Sa première saison pleine, en 2007-2008, est toutefois marquée par une vilaine blessure à l’abdomen qui l’écarte des terrains trois mois durant et l’amène sur le billard. Sans que cela ne remette en cause ses qualités. « Michael jouait beaucoup et était un élément clé de mon équipe, s’est souvenu Sven Goran Eriksson, entraîneur de City lors de cette saison, pour la BBC. Il était vraiment excellent et tout le monde était sûr qu’il serait la prochaine grande star pour l’Angleterre ». « Il ne parlait pas beaucoup mais se comportait toujours de la bonne manière et c’était un grand joueur d’équipe, abonda Dietmar Hamann, son ex-coéquipier. Je dis toujours qu’un milieu spécial doit avoir comme attributs principaux : une capacité de passe, un bon moteur, un tacle ravageur, une vision de jeu et l’intelligence. Et il doit être remarquable au moins dans l’un d’eux. Je peux honnêtement dire que Michael était remarquable dans tous ces domaines. Il me rappelait Michael Ballack, avec toutes ces capacités ».

Avec de telles qualités, les propositions affluent. Une offre de 8 millions de Newcastle (qui a encore un semblant d’intelligence dans son recrutement) est refusée par City, qui contre-attaque en faisant signer au prodige un contrat de 5 ans de l’ordre de dix millions de livres. Las, c’est au moment où l’on est le plus proche du soleil que vos ailes commencent à foutre le camp, demandez à Icare. Il rechute au niveau de l’abdomen et reste absent pendant sept mois. En octobre 2009, les emmerdes sont enfin terminées, Michael Johnson inscrit son 1er but en League Cup, un an après le dernier. Moins de deux mois plus tard, c’est le coup de massue : blessure au genou qui l’écarte pour le reste de la saison. Alors que les recrues sont de plus en plus 5 étoiles chez les Citizens, Michael Johnson fait des écarts et connaît des problèmes de poids. Un penchant trop prononcé pour les fast-foods, dit-on dans la presse et sur les forums. Après coup, il jugera au Telegraph que la pression lié à son statut « est une partie de la raison pour laquelle il n’a pas été en mesure de tirer le meilleur de [ses] capacités, avec les blessures ».

Après deux passées hors des terrains, il revient pourtant s’entraîner en 2010 pour faire mentir les critiques. Patrick Viera, qui effectue sa deuxième saison à City, ne tarit alors pas d’éloges sur le phénomène : « Je l’ai vu travailler chaque jour, et lorsque quelqu’un travaille aussi dur, je suis sûr qu’il sera couronné de succès ». Même si le milieu british n’a joué que quatre matches en deux saisons. « Le futur est brillant pour lui. Sa détermination le ramènera à son meilleur niveau, assure « le grand Pat’ ». Il travaille plus que n’importe qui, et il est encore jeune donc il a le temps de revenir ».

Il ne reviendra pas. Plus jamais avec les Citizens en tout cas. En 2011, Leicester City et son ancien coach, Sven-Goran Eriksson, tentent de le relancer. Il joue 9 matches avant que les blessures ne le rattrape. Son prêt est annulé. Son contrat suit dans l’année. Avant cela, il est arrêté deux fois pour conduite en état d’ivresse. Son permis est confisqué pour 3 ans. Tous les médias se demandent comment il a pu en arriver là. La réponse est fatale : Michael Johnson souffre de dépression. « J’ai lutté contre cette maladie pendant un certain nombre d’années dans une clinique et maintenant je serais reconnaissant si on pouvait me laisser tranquille jusqu’à la fin de mes jours », indique le joueur au Manchester Evening News après que des photos de lui, méconnaissable, fuite sur le web. Il arrête définitivement le football à 24 ans.

Après / Avant

Un environnement qu’il juge « toxique » après coup au Telegraph. « Les gens dans ce jeu oublient parfois que les footballeurs sont humains, mais, malheureusement, c’est une industrie assez machiste, donc c’est difficile. Le football est un environnement dur et les gens le gèrent d’une manière différente. Certains aiment sa structure et surfent sur la pression. Mais d’autres personnes, introverties, n’aiment peut-être pas ça ou ne l’embrassent pas de la même manière. Ça m’a affecté d’une manière négative donc c’est pour cela qu’il a fallu que j’en sorte ». Pour lui, les problèmes mentaux dans le football sont « un tabou ». « Mais les gens sont plus au courant maintenant », concède-t-il. Aujourd’hui, il s’est relancé en devenant agent immobilier et souhaite investir dans un restaurant à Urmston. Loin de Manchester et du football.

Christophe-Cécil Garnier. 

*En 2010, il réaffirme malgré la déchéance de Leeds son amour pour les Peacocks : « J’ai toujours été un fan de Leeds et j’adorerais jouer pour eux ».

2 commentaires

  1. Armand dit :

    Thaks!

  2. jeronimo dit :

    Du même club et homonyme, j’ai une pensée émue pour Adam Johnson que je trouvais extrêmement talentueux, et qui a été obligé d’aller s’enterrer dans un club de ‘seconde zone’ (Sunderland je crois)… regrets éternels !

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