Robin Friday (1952-1990), terrassé par un arrêt cardiaque dû à une overdose d’héroïne, aurait pu être un grand du football anglais. Au lieu de ça, il a été son enfant terrible le plus givré.

Paolo Hewitt, journaliste, et Paul McGuigan, l’ex bassiste d’Oasis, ont retracé son incroyable histoire dans un livre paru en 1997, The greatest footballer you never saw. The Robin Friday story. Un bouquin qui consiste en une série d’interviews et témoignages de proches et d’anciens coéquipiers, le tout accompagné de coupures de presse ainsi que d’interventions d’historiens des deux clubs où il évolua (Reading FC et Cardiff City, élu Player of the Century de ces deux clubs en 2000). Le tournage du film dédié au « Janis Joplin » du football (il fut aussi surnommé « Le Keith Richards du football ») commencera en août au Pays de Galles et ce biopique devrait sortir début 2015 (l’inclassable Russell Brand pourrait interpréter le rôle principal). En attendant, vous pouvez toujours mater ce clip et ceux-ci, ici et ici.

Plutôt que d’ajouter mon nom à la longue liste des articles et dossiers écrits sur Robin Friday, j’ai (Kevin Quigagne) traduit l’essentiel de ce fascinant livre. Et à mon humble avis, si vous ne devez lire qu’un bouquin foot cette année, ne cherchez pas plus loin.

The greatest footballer you never saw: THE ROBIN FRIDAY STORY

SHEILA FRIDAY, mère de Robin : On est mariés depuis 45 ans. Je viens d’Acton Green et Alf de South Acton [quartiers de l’ouest londonien]. On s’est rencontrés au Boathouse, à Kew. Tu t’en souviens Alf ?

ALF FRIDAY, père : Ouais, le Boathouse n’existe plus depuis longtemps d’ailleurs. A l’époque, nos parents nous interdisaient de trop s’éloigner, on pouvait juste aller au cinéma, ou dans le centre-ville d’Acton pour s’acheter un sandwich. C’était mieux que maintenant. Aujourd’hui, les gens sont obsédés par l’argent, c’est vital faut dire. On vivait bien plus simplement avant.

SHEILA FRIDAY : On s’est rencontrés à 17 ans et mariés à 20. Robin et Tony sont nés un an plus tard, le 27 juillet 1952, des jumeaux. On habitait toujours chez ma mère parce qu’à l’époque, c’était dur de se loger.

ALF FRIDAY : Ouais, on habitait tous chez elle. Son frère y créchait, sa mère et sa grand-mère.

TONY FRIDAY, frère : Robin et moi, on est nés à Hammersmith [ouest londonien], à trois minutes d’écart. On se ressemblait beaucoup, dans les traits, la façon d’être.

SHEILA FRIDAY : Mon père à joué au foot, à Brentford et aux Corinthian-Casuals. Il est mort il y a deux ans, à 93 ans. Quand les enfants avaient deux ans, on a déménagé dans une espèce de maisonnette préfabriquée à Acton Green [logements vite montés après la Seconde Guerre mondiale pour parer au plus pressé, Nda], et on y est restés sept ou huit ans.

ALF FRIDAY : A l’époque, je bossais dans une laverie, je faisais des livraisons et j’avais aussi d’autres petits boulots.

SHEILA FRIDAY : Robin et son frère étaient sages. Robin était très timide. Petits, ils me disaient : « Maman, si on te voit un jour parler à un autre homme que papa, on te parlera plus jamais. »

ALF FRIDAY : Ils s’entendaient super bien ces gamins, ils se disputaient jamais. Tony était le plus effronté.

SHEILA FRIDAY: C’est vrai. Mais tout ça a changé quand on a déménagé dans cette HLM de South Acton et que Robin a fréquenté Farraday School.

ALF FRIDAY : C’était plus pareil en effet. Quand tu vis dans une une maisonnette, tu peux surveiller tes gamins. Mais en immeuble HLM, s’ils sortent, tu les revois plus.

SHEILA FRIDAY : On a dû déménager car ce préfabriqué s’enfonçait dans le sol, alors on nous a envoyés dans cette cité HLM.

ALF FRIDAY : Quand on y habitait, c’était un quartier sympa, mais aujourd’hui, j’y traînerais pas trop.

TONY FRIDAY : Mon grand-père jouait à Brentford avant la guerre, en D1. Mon père a joué au football, mais à un tout petit niveau. Il bossait dans une laverie. Quand on habitait à South Acton, on surnommait le coin « Soap Sud Island » tellement y’avait de laveries [environ 600, qui travaillaient pour l’industrie hôtelière de l’ouest londonien, Nda].

ALF FRIDAY : Je jouais avec eux, dès tout petits.

SHEILA FRIDAY : C’est vrai, tu les emmenais au parc tous les jours, et même une fois voir Brentford alors qu’ils n’avaient que deux ans.

ALF FRIDAY : Ah ouais, et quel match de merde ce jour-là !

SHEILA FRIDAY : Tu finissais le boulot à la laverie à 16 heures et ensuite vous filiez à South Fields Park.

ALF FRIDAY : Non, non, je les emmenais à Acton Green. Robin jouait gardien, il était excellent. Il avait une sacrée frappe pour cinq ans, il te dégageait le ballon à une distance phénoménale ! C’est à ce moment-là que les premiers ballons à valve sont sortis, les anciens avec les lacets ont alors disparu.

SHEILA FRIDAY : La première tenue de foot qu’on leur a offerte à Noël était celle d’Everton. On a mis le cadeau au pied du lit et le matin, en rentrant dans leur chambre, on les a vus profondément endormis, vêtus de la tenue complète : chaussures, short et maillot !

ALF FRIDAY : Ils supportaient Everton car c’était vraiment le club phare quand ils avaient dix ans [1963 – champion d’Angleterre, photo ci-dessus]. Everton avait une belle équipe avec Alex Young, Brian Labone, etc. Après, ils ont supporté Brentford.

TONY FRIDAY : On jouait tout le temps au foot avec mon frère, tous les jours, grâce à mon père en fait, il nous emmenait partout. Sa carrière, Robin la doit à mon père. Plus tard, quand il est passé pro, mon père allait voir tous ses matchs.

ALF FRIDAY : Ils ne pouvaient pas s’empêcher de jouer, même dans la maisonnette ! A onze ans, Robin a joué pour l’équipe de son école, et puis pour le District. Il était très technique et jonglait comme personne, même avec une orange.

TONY FRIDAY : Il adorait George Best évidemment, aussi Pelé et Peter Osgood, mais quand il était plus jeune, celui qu’il admirait c’était Jimmy Greaves, parce que c’était un buteur hors pair.

SHEILA FRIDAY : Est-ce que vous saviez qu’il faisait de la boxe ?

TONY FRIDAY : Ouais, de la boxe et du tennis.

ALF FRIDAY : Et du cricket, c’était un putain d’excellent bowler. Il était grand, ça l’avantageait pour lancer.

TONY FRIDAY : A l’école, on avait des classes de niveau, moi j’étais avec les meilleurs et lui avec les cancres. Il était pas con mais les cours l’intéressaient pas. Il séchait constamment, il préférait aller retrouver les filles au parc du coin.

ALF FRIDAY : Robin était un gamin d’une gentillesse incroyable. J’ai passé tellement de supers moments avec lui. C’était sa personnalité, il pouvait être impossiblement adorable.

TONY FRIDAY : Le samedi matin, on jouait dans l’équipe de l’école, l’après-midi, pour notre club et le dimanche, en Pub League. Des fois, on faisait quatre matchs par week-end. On a commencé à jouer avec des adultes à 14 ans, pour la réserve de la Acton British Legion. C’est en jouant avec des plus vieux qu’on progresse.

ALF FRIDAY : A cet âge-là, Robin s’est mis à aimer le hard rock, il adorait Janis Joplin. Moi, je pouvais pas la supporter.

SHEILA FRIDAY : Il allait souvent au Roundhouse [salle de concert londonienne] le dimanche après-midi. Il dansait beaucoup aussi, dans les fêtes, c’était le meilleur danseur du coin, il impressionnait son monde.

TONY FRIDAY : Y’avait une émission le samedi soir, The Rock’n’ Roll Years, il adorait ça, et Desmond Dekker et toute la musique Ska. Mais ensuite, il s’est mis à écouter Janis Joplin. D’une certaine manière, la vie de Robin a un peu été le reflet de celle de Joplin.

TONY FRIDAY : Côté foot, on était toujours dans l’équipe du district, et on battait tous les autres districts, même les plus gros comme Islington, ou South London. Hormis Robin, on avait des joueurs comme Steve Perryman [qui deviendra une Tottenham legend, voir portrait TK], David Coxhill, un jeune de Millwall, ou Peter Carey, qui jouait à West Ham. Plusieurs sont passés professionnels. Jusqu’aux U14, Robin jouait dans les buts pour l’équipe du District, il était excellent et n’avait peur de rien, il aurait fait un excellent gardien pro mais il préférait marquer des buts.

ALF FRIDAY : C’est quand déjà qu’il a rejoint le centre de formation de Crystal Palace ?

TONY FRIDAY : A 13 ans. C’était pas Crystal Palace FC mais un club de ce quartier au nom similaire. Y’avait un entraîneur là-bas qui adorait Robin, un vrai coach, un ex pro.

ALF FRIDAY : Ah oui, Harry Medhurst, un ancien de Chelsea. C’est vrai qu’il l’adorait notre Robin. Moi-même, j’ai contacté Chelsea pour un essai, et ils l’ont accepté. Mais Il n’y est resté qu’un an. Ils vous gardent pas longtemps ces gros clubs, si vous leur plaisez pas, vous virez. C’était Tommy Docherty le manager à l’époque.

ALF FRIDAY : Mais jamais, même pas une fois, il n’a dit vouloir devenir pro, c’était vraiment pas son truc. Après l’épisode Chelsea, il s’est remis à jouer au foot avec ses copains.

TONY FRIDAY : A 13-14 ans, avant Chelsea, il a fait une saison à Queens Park Rangers. Mais bon, ça n’a pas collé, il était trop individualiste pour ces clubs. Par exemple en match, il choisissait jamais l’option la plus évidente, il essayait toujours des trucs pas possibles. Dans ces clubs, on te formate avant tout, et c’est ça qui cloche avec notre football.

TONY FRIDAY : On avait pas les mêmes potes avec Robin, on était pas toujours ensemble non plus. Il a commencé à sortir plus tôt que moi, avec les filles, tout ça. A 15 ans, il a commencé à prendre des pilules de speed. Moi, j’ai jamais touché à ça.

ALF FRIDAY : C’est un truc incontrôlable, quand un jeune grandit, on n’a plus de prise sur lui. C’est vrai que j’ai jamais été trop dur avec mes deux fils. Evidemment, je les engueulais vertement mais, au bout d’un moment, tu peux pas passer ton temps à juger et à diriger la vie des autres à leur place. S’ils ont envie de faire quelque chose, ils le feront.

TONY FRIDAY : C’était par périodes. A l’époque, si t’avais 15 ou 16 ans, tout le monde commençait avec des Blues [du speed], puis ensuite de la méthadone [produit de substitution à l’héroïne]. Robin en consommait beaucoup, mais sans être dépendant, enfin, façon de parler. Des rumeurs parfois couraient comme quoi il en prenait avant les matchs, mais c’est n’importe quoi.

ALF FRIDAY : Robin a quitté l’école à 15 ans. Il était très doué en dessin mais un beau jour, il s’est totalement arrêté de dessiner. J’ai pas compris pourquoi. Il dessinait Andy Capp, ses talents de dessinateur impressionnaient tout le monde. Pis subitement, il n’a plus touché un crayon.

 Statue du célèbre Andy Capp à Hartlepool (ville de son créateur), chômeur professionnel et footballeur bastonneur

Statue du célèbre Andy Capp à Hartlepool (ville de son créateur, région de Newcastle), chômeur professionnel et footballeur bastonneur

TONY FRIDAY : On jouait pour deux équipes de l’arrondissement, South Acton et St Cuthbert’s. Le type qui dirigeait tout ça s’appelait Harry Fountain, un ancien maçon qui devait avoir 70 ans. Un personnage ce Harry ! Même à 70 balais, il te mettait une droite, tu te relevais pas. Il adorait Robin et disait qu’il lui rappelait les joueurs d’antan. Je me souviens d’une victoire 6-0 match contre des plus vieux, Robin avait marqué les six buts. Harry a couru sur la pelouse et a embrassé Robin ! C’était la première fois de sa vie qu’il exprimait ce genre d’émotion.

TONY FRIDAY : Quand il a quitté l’école à 15 ans, Robin a été pris par une entreprise de plâtrerie pour lui enseigner le métier mais bon, le boulot et lui ça faisait deux.

SHEILA FRIDAY : Le grand-père de mon mari était plâtrier et Robin disait vouloir faire ce métier. Donc, quand il a quitté l’école, je l’ai emmené chez un gros artisan d’Ealing [ouest londonien], un truc très classe, avec de hauts plafonds et tout le tremblement, et ils l’ont pris. Mais il a démissionné au bout de deux mois. Ensuite, il a fait tout un tas de petits boulots, pas mal de jobs de livraison.

ALF FRIDAY : Ouais, il fallait que je l’aide le samedi, je bossais pas ce jour-là, il me disait : « Papa, s’il te plaît, je dois aller nettoyer des vitres, file-moi un coup de main. » Il grimpait aux échelles à une vitesse incroyable et il faisait des boulots de réfection mais sans même une brouette ! Il portait tout à la main… Quel numéro ce Robin, il nous faisait tous rire, il se foutait de tout.

SHEILA FRIDAY : Après, il s’est mis à l’asphaltage, hein ?

ALF FRIDAY : Ouais, grâce à un type qu’il a rencontré, mais il faisait pas les routes, juste les toits plats.

TONY FRIDAY : A 16 ans, il a fait un séjour en maison de correction. Bizarrement, ça l’a aidé. Il avait déjà un tas de petites condamnations à son casier mais ce qui l’a fait atterrir en maison de correction a été un vol d’autoradio, ou un truc comme ça. D’abord, on l’a envoyé dans un centre de détention pour mineurs, mais comme il était asthmatique, ils ne l’ont pas gardé. Puis trois mois plus tard, il s’est fait choper pour un autre truc, et on l’a envoyé à Feltham [gros établissement pénitentiaire londonien pour mineurs, Nda]. Il a fait 14 mois. Mais je peux te dire que leur équipe de foot à Feltham, elle gagnait tout quand Robin y jouait ! C’est là-bas qu’il a commencé à se muscler et à vraiment prendre du volume, faut dire qu’il avait trois repas par jour. Des fois, il jouait contre des équipes civiles, sous escorte. Feltham lui a même accordé une dispense pour qu’il joue en Juniors dans le District de Reading. Et vers la fin de sa détention, un type l’a repéré et a contacté Reading. Puis, après sa sortie, il a rencontré Maxine (ci-dessous), ils se sont maqués et ont emménagé ensemble à South Acton.

ALF FRIDAY : Il a toujours été sympa avec les gens de couleur. Toujours. Il s’entendait super bien avec eux. Et faut le souligner car à l’époque, la plupart des gars de South Acton voulaient surtout que ces gens-là retournent dans leur pays.

SHEILA FRIDAY : Robin avait 17 ans quand il s’est marié à Maxine. Elle avait un appart sur Larden Road. On était contre cette union mais bon, elle avait le bébé. Je suis allée au mariage à la mairie d’Acton mais pas Alf. Et puis, quelque temps après il est revenu vivre chez nous, il avait rencontré une autre femme, je me souviens plus de son prénom, une fille sympa et classe. D’ailleurs, il sortait toujours avec des filles un peu classieuses. Et puis il est retourné vivre avec Maxine.

ROD LEWINGTON, ami : A l’époque, il arrivait qu’un gars noir sorte avec une femme blanche mais tu voyais jamais un Blanc avec une Noire. A ma connaissance, Robin était le seul dans ce cas-là. Une fois de plus, il était unique.

TONY FRIDAY : Maxine habitait également Acton, Robin l’a rencontrée dans un pub, le White Hart. Y’avait une piste de danse dans ce pub et c’était l’endroit que les jeunes du quartier fréquentaient. Elle avait son propre appartement, elle s’entendait pas avec sa mère. Robin y restait souvent. Et c’est donc à cette époque que Maxine est tombée enceinte de Nicola. Maxine était sympa et très sociable. Robin jouait alors pour Hayes, et y’avait quelques gars limités dans l’équipe. Après un match, tout le monde est parti faire la fête, y compris Robin qui avait invité Maxine. Un gars a fait une réflexion, et Robin s’est battu contre deux types. A l’époque, c’était un rebelle, lui et la norme, ça faisait deux.

TONY FRIDAY : Un de nos amis jouait pour Walthamstow, un bon petit club amateur pétri de tradition. Robin a signé pour eux et a commencé à affoler les compteurs. Hayes, qu’était un plus gros club, l’a recruté. C’était bien plus près de chez Robin et on lui offrait 30 £ par semaine, le triple de ce qu’il touchait à Walthamstow. Y’avait des gars qui bossaient dans l’asphalte, ils lui ont proposé un boulot et Robin a accepté.

SHEILA FRIDAY : C’est là qu’il a eu son terrible accident, à 20 ans. La police m’appelle et me dit qu’il est à l’hosto. Six heures sur le billard.

ALF FRIDAY : Le plus incroyable, c’est que peu de temps après, il rejouait. Il était incroyablement fort.

TONY FRIDAY : Il se trouvait sur l’échafaudage et y’a eu un problème avec le cordage. Il a été déséquilibré, a chuté et a atterri sur ce pieu, qui lui est rentré dans le cul. Il a réussi à se dégager, un exploit en soi, faut dire qu’il avait beaucoup de force. Heureusement pour lui, ça s’est passé à Lambeth, tout près de l’hôpital St Thomas’s. Quand il s’est rétabli, son club de Hayes a affronté Bristol Rovers (D3) en FA Cup. Hayes a gagné et Robin a super bien joué. Le tour suivant, ils ont rencontré Reading (D4), 0-0, grosse prestation de Robin. Reading a remporté le match d’appui 1-0 mais Hayes méritait de gagner. C’est là que le manager de Reading, Charlie Hurley*, a repéré Robin [*Légende du football irlandais et de Sunderland. Voir article TK].

Début 1974, Robin Friday est recruté par Reading FC (D4).

ROGER TITFORD*, auteur et journaliste : Charlie Hurley était le genre d’entraîneur qui concevait le foot comme une bataille de tranchées. Il lui fallait des joueurs costauds, pas des petites natures. Pas vraiment du football élaboré, quoi. C’était son premier boulot dans le management – et ce fut aussi le dernier. C’est pas qu’il était contre le football élégant mais, à mon avis, le management en lui-même lui faisait peur. Je crois que la meilleure décision de sa carrière de manager fut de recruter Robin et d’oser l’aligner, tout le temps. Sous Hurley, Robin ne fut jamais remplaçant. Cela dit, je pense pas que Hurley avait un quelconque contrôle sur Robin en dehors du terrain.

[*Contributeur régulier du magazine When Saturday Comes, auteur du livre-photos The Legend of Robin Friday et accessoirement supp de Reading FC]

DAVID DOWNS, historien de Reading FC : La première fois que j’ai vu Robin jouer, c’était en 1973 à l’occasion d’un Reading-Hayes en FA Cup. Ce dont je me rappelle, c’est que Robin a mis un coup sur notre gardien, Steve Death, et que ce dernier a tellement boîté que l’arbitre a cru qu’il cherchait à gagner du temps et lui a mis un carton jaune. C’était la première fois en douze ans de carrière à Reading que Steve se prenait un avertissement !

CHARLIE HURLEY, manager de Reading : Il me fallait absolument un attaquant et j’allais souvent voir Hayes, qui jouait en Isthmian League, un excellent championnat [amateur/semi-pro]. Je connaissais la réputation de Robin, son passé en centre de détention pour mineurs, peut-être en prison, je ne sais pas trop. Quand on est entraîneur d’un club de D4, on regarde les joueurs sur le terrain, pas en dehors, car bon, on peut pas tout avoir. Après l’avoir observé plusieurs fois, je l’ai fait signer. Pour 750 £ ! Je l’ai enrôlé comme amateur, dans la réserve. Pour son premier match, il se pointe hyper en retard, vingt minutes avant le coup d’envoi, couvert de poussière de brique, des chaussures dégueulasses, bref, une vision d’horreur. Mais bon, sur le terrain, y’avait pas photo, il écrasait tout le monde. Il avait pas vraiment le sens du placement mais techniquement, il était époustouflant et doté d’une vision de jeu impressionnante. Je me suis dit qu’il fallait l’aligner avec l’équipe première.

DAVID DOWNS : Pour son premier entraînement, lors d’un match 6 v 6, Robin n’a pas arrêté de savater les joueurs les plus expérimentés du club, tant et si bien que plusieurs gars ont dû arrêter ce match. Le manager lui a dit : « Oh, du calme Robin, va pas m’envoyer toute l’équipe à l’hosto. »

A suivre.

Dans la même série TK des grands tarés du foot british :
Lars Elstrup
Chic Charnley

6 commentaires

  1. ALGDCM dit :

    Ça c’est une semaine qui commence bien, merci Kevin !

  2. fred dit :

    Merci, super !

  3. Ferdinand dit :

    Excellent!

    Est-ce que la traduction française sera proposée quelque part, à la lecture ou à la vente?

  4. Kevin Quigagne dit :

    Merci à vous.

    @ Ferdinand.

    J’en sais rien mais vu que le livre (The greatest footballer you never saw) est sorti en 1997 en Angleterre et qu’aucun éditeur francophone ne l’a traduit (à ma connaissance), possible qu’il ne le soit jamais. Maintenant, si le film marche en France (en salles ou en DVD), peut-être le bouquin sortira-t-il en français.

    Je n’ai pas tout traduit, j’ai dû traduire approx. les deux tiers du bouquin (assez court, 192 pages, ça doit faire dans les 35 000 mots), n’ai ni traduit l’avant-propos ni l’intro. Mais fais-moi confiance, j’ai gardé l’essentiel des conversations/coupures de presse/CR de matchs en équilibrant ma trad’ quand il le fallait afin de restituer le plus fidèlement possible le contenu, l’ambiance, etc. et rester fidèle à la texture du texte et du contexte.

    Comme je poste ça sur le Net, j’ai dû tailler et synthétiser un peu, car même en sérialisation je me vois mal mettre plus de 6 volets ici (à raison de 3000-3300 mots/volet). Une partie des propos des intervenants sont soit écourtés soit résumés, ainsi que les nombreux mini CR de matchs présents dans le bouquin, pour deux raisons :

    a) je doute que les CR des Reading-Workington ou Cardiff-Plymouth des années 70 intéressent grand monde (désolé pour les plus « anoraks » de nos lecteurs/trices).

    b) ça aurait vraiment fait trop long (pour le lecteur) de mettre le truc in extenso. J’ai donc dû trier et sélectionner mais (je répète) en faisant gaffe que la suppression de phrases/passages n’entraîne aucune déperdition de sens/force ; un élagage pour plus de lisibilité et sans conséquence – je l’espère – pour l’appréciation du livre. Je n’ai pas encore fini la traduction (je l’achève actuellement pendant mes vacances) mais ma trad’ devrait faire 20 000 mots/115 000 signes au final.

    J’avais fait le gros de cette trad’ vers 2012 quand on commença à parler ici en Angleterre de la réalisation d’un film sur Friday, avec sortie à l’origine prévue pour 2013 ou 2014. Mais comme ce projet de biopique fut retardé – problèmes de casting, financements, autorisations de tournage, etc. – j’ai préféré attendre la (quasi) confirmation que le tournage se ferait bien (quasi confirmation que j’ai reçue par email de la prod américano-britannique y’a peu) pour reprendre ma trad’ et donc la publier ici dans TK.

  5. Standard ole ole dit :

    Super Génial comme d’habitude, grand merci Kevin

    pour ceux intéressés, le bouquin est sur l’app store mais en anglais uniquement….

    Hail to the king Kevin !

  6. Aurel dit :

    Super boulot encore une fois Kevin.
    En plus je ne connaissais pas du tout ce joueur avant cet article. Vivement la suite qu’on en sache plus, en attendant le film.

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