Les toiles de Mickaël Landge : l’oeil du dandy Hoaraule

« Par son geste sublime, le PSG secoue le championnat à la fois par le haut et par le bas »

L’artiste et critique d’art Guillaume Hoaraule revient sur la 400ème performance de Mickaël Landge au festival d’art contemporain Ligue 1 Orange, lors de la rencontre Bordeaux-PSG au cours de laquelle il a encaissé ses 397ème, 398ème et 399ème buts en Ligue 1…

Comment analysez-vous la dernière performance de Mickaël Landge ?

Mickaël Landge est un grand artiste. Bien que fort médiatisées, ses dernières toiles ont été incomprises. En vérité, elles avaient seulement pour but de faire coïncider sa 400ème performance en L1 avec son 400ème but encaissé. Malheureusement la chance ne lui a pas souri cette fois-ci, et il s’arrête à une toute petite unité de cet objectif symbolique.

Pourquoi n’a-t-il pas forcé le destin ? Il suffisait d’une simple boulette…

Parce qu’il n’a pas voulu tricher et mettre lui-même le but de l’exploit. Il voulait que les quatre derniers buts arrivent sans intervention de sa part, et c’est presque ce qui s’est passé, il y en a eu trois. Certes, il en manque un, mais pour lui, il ne faut pas forcer la nature, il faut laisser faire les choses ; et il faut avoir une sacrée paire de Pollocks pour les laisser faire à ce point-là. Mickaël est un homme qui ne triche pas.

Arts décoratifs : il est vraiment fort, Micka…

On dit pourtant que Mickaël Landge a le bras long…

C’est ridicule. Je crois que cette idée fausse vient d’une mauvaise interprétation d’une peinture de la chapelle Sixtine, œuvre de son ancêtre. Mais il suffit de le voir tous les samedis pour se rendre compte qu’il a de tout petits bras.

Même s’il n’a pas le bras long, ne pensez-vous pas que Mickaël Landge a la grosse tête ?

Non, les grands artistes comme lui gardent toujours les pieds sur terre, ils ont une ligne et ils ne l’abandonnent jamais.

Jamais ?

Jay Romröten est resté un vrai artiste tant qu’il a suivi sa ligne. Depuis qu’il l’a quittée, il donne l’impression de tourner en rond sans savoir où il va. Quelqu’un comme Amaradi Ané aurait pu lui-aussi être un grand artiste. Mais à défaut d’avoir une ligne, il en reste à gribouiller des brouillons dont ne peuvent sortir que d’épisodiques chefs-d’œuvre, qui, bien que spectaculaires, sont condamnés à rester isolés. Et comment ne pas évoquer, en termes de bourdes, les accumulations d’Arman sur la ligne des 6m50 ? Depuis qu’il est à nouveau réaliste, c’est un désastre décoratif.

Jay Roma-Lonzo montre à Jay Romröten qu’en gardant sa ligne, on garde aussi son véhicule et ses points.

Vous ne croyez pas qu’il existe des artistes d’avant-garde ?

Il faut en finir avec l’idée des artistes avants-gardiens. Dans l’art footballistique, l’avant-gardien n’a pas sa place : Damian Gray-Gorini le montre à chacune de ses interventions. Je vous renvoie à mon ouvrage sur le sujet, Le Portrait de Damian Gray. Tout avant-gardien qui ne sait pas garder la ligne, comme Ceedrika Razo, perd rapidement sa place.

Bernd Armendi, disciple du surréaliste Miro, a-t-il une ligne ?

Bernd Armendi n’a pas de ligne. Il est la ligne. Son œuvre majeure et controversée, le Ballon de plomb, figure justement le fil à plomb, symbole de la verticalité absolue vers laquelle il tend.

Mais son grand pont sur Robert O’Carlos n’est-il pas une entorse à la ligne ?

Non, car il n’a pas fait de grand pont ! Si vous regardez les images, vous verrez qu’il part tout droit ; il avait bien conscience qu’il avait Duchamp devant lui, même si O’Carlos ne lui lâchait pas les Basquiat. Au fond, il y a deux moments dans toute action de Bernd Armendi : la course, horizontalité pure, puis la frappe, verticalité pure. Rien d’autre.

Mais on ne l’a pas trop vu à Bordeaux, tandis que Mickaël Landge…

Certes, mais de toute façon cette performance n’est pas seulement l’œuvre d’un homme. C’est le mouvement de tout un club qui traduit de façon grandiose l’angoisse et la douleur. Se soucier davantage du « comment » et du « pourquoi » du football plutôt que du contenu, c’est ça le néo-expressionisme parisien… Par Son Geste sublime, le PSG réveille le championnat en le secouant à la fois par le haut et par le bas. Paris est bel et bien magique.

L’heure est noire, l’oeuvre controversée de Marcel Duchamp