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Vendredi 15 Septembre 2006

15/09/2006 – 20:12

Cher Journal,

Hier avec le PSG, on est allé jouer en Irlande. C’est bien l’Irlande, j’y suis allé en voyage de classe quand j’avais 10 ans, avant d’entrer au centre de malformation du PSG. Les gens y sont sympas, les rouquines sont mignonnes, et il y a la Guinness, la seule bière au monde qui ressemble à un liquide, mais en fait c’est un solide. Du genre qui tient du caillou. La seule bière au monde aussi qui sait pas voyager : demande à un irlandais, la Guinness, elle a pas le même goût là-bas que chez nous. Alors t’y vas et t’essaie parce que ça peut pas être pire qu’en France, hein ? Non, normalement, ça ne devrait pas pouvoir…

Bon on y est allé, on avait un match. Normalement, je devais pas être là, Moustache avait prévu Vikash pour jouer au milieu. Logique : jouer dans un stade improbable au milieu des champs, avec un tas d’alcooliques en guise de spectateurs qui regardent plus la buvette que le match, Vikash, il est habitué puisqu’il va souvent jouer avec la CFA. Mais quand Moustache lui a dit qu’il devait aller en Irlande, Vikash il a levé un sourcil et dit : « Y a un vernissage à Derry ? Parce que moi, j’ai un super vernissage à Paris jeudi, alors arrête de déconner… ». J’ai bien vu que Moustache il était déçu. Alors, finalement, il a pas emmené Doud non plus et a pris Banning, Hellebuyck et moi pour jouer au milieu. Rapport au CFA sans doute.

Bon, moi j’étais content. T’imagines ? Mon premier match de coupe d’Europe !!! Ca se fête hein. Et puis c’est la vraie coupe qu’on aime, nous au PSG, celle où il y a que des matches aller et retour, où t’es jamais vraiment ridicule longtemps. Parce que, nous, la Champions League, c’est pas notre truc. C’est trop la honte. On fait de notre mieux, mais on finit toujours par être minable pendant 6 matches devant les télés de toute l’Europe. Et ca se finit avec un match contre le CSKA où c’est Pancrate qui nous redonne un bout d’espoir à un moment. Non, c’est pas possible. Nous, notre truc, c’est l’UEFA. Deux matches pépères par-ci par-là, c’est suffisant. Bon il y a un risque cette année, il y a une nouvelle phase de groupe en UEFA, et ça, ça ne nous rassure pas des masses, alors on se demande s’il faut qu’on se qualifie ou bien si on a le droit d’être ridicules maintenant histoire d’être débarrassés. Mais personne n’a osé demander à Moustache…

Avant de partir, on a eu un problème. Sylvain ne voulait pas venir. Il avait pas de vernissage, lui, non, le mot est trop long, il aurait pas su ce que c’était. Mais on voyait bien qu’il y avait un truc qui le chiffonnait, mais il voulait pas dire. Alors Mario l’a regardé un peu fixement, et Sylvain il s’est mis à parler. Il a un truc, Mario, quand il te regarde comme ça, tu sais que t’as intérêt de parler, que sinon il va te faire des trucs que t’as pas envie de savoir. Ca doit être un truc local. C’est pas des drôles en Colombie, suffit d’imaginer que Mario passe pour un défenseur technique au pays (remarque, à côté de Cordoba…) pour comprendre qu’ils ne sont en général pas là pour rigoler. Bref, Sylvain s’est mis à parler. Normal. Il a dit qu’il était pas rassuré pour ce match, qu’il préférait pas venir, rester à la maison tranquille. On lui a dit que c’était peinard, qu’on irait boire des bières ou manger de la Guinness après le match, mais y avait rien à y faire. Alors il nous a dit qu’en tant qu’arrière gauche, il était pas rassuré de partir loin de la maison alors que Rothen est pas avec nous. Là, on a compris. Alors, Pedro, bon capitaine, il a proposé qu’on emmène Jérôme, rapport qu’en plus ça ferait très « cohésion de groupe » pour les journalistes. Nous, on n’était pas sûrs. Et puis Sammy a dit « huhuhuhu, quitte à venir avec une blonde, et si on emmenait plutôt la femme de Sylvain avec nous ? ». Là, on a tous applaudi. Mais on a bien vu que Pedro, il était un peu déçu à sa façon de regarder ses chaussures comme s’il cherchait encore la taupe.

Alors on est partis. C’était sympa le voyage. Et puis même Pedro était finalement content que la femme de Sylvain soit avec nous. Parce qu’elle est très gentille. Physiquement gentille. Du genre de nanas que tu te souviens pourquoi t’as fait footballeur plutôt que garagiste.

Le match, c’était sympa, une bonne ambiance, on jouait normal, à notre niveau, on se sentait sûrs de nos automatismes. Alors bien sûr, on était moins efficaces que d’habitude, à cause des changements faits par Moustache. Il nous manquait les penaltys de Mario derrière, les sprints de Mendy et les buts de Pedro devant pour avoir tous nos automatismes, mais à part ça, on jouait normalement.

Nous on était embêtés pour Pedro. Mais lui il disait : « c’est normal dans grand cloube, les joueurs ils tournent, il faut la concurrence ». Pedro il vit son truc à fond, alors personne n’ose lui dire la vérité. Cet été Cayzac il a revendu sa maison pour augmenter Pedro, lui montrer qu’on a des ambitions. En vrai, on pouvait pas lui faire ça, Pedro il aurait été trop triste de devoir partir à Lyon. Bon, moralité on a plus de sous, mais on a Pedro, et lui, il y croit et nous on fait de notre mieux. Pour lui, on se défonce à l’entrainement, on joue comme des bêtes. Alors, on a plus rien dans la chaussette pour le match de championnat, mais pour Pedro, c’est pas grave, lui, il nous voit toute la semaine être méga forts, il peut faire ses interviews et dire que le PSG c’est un grand club, avec de grands joueurs et qu’on va faire mieux. Nous, on sait, hein, mais on le laisse faire.

A la fin du match, Moustache m’a fait entrer. Il m’a dit « Clément, tu fais ce que t’as à faire ». Alors, j’ai fait mes lacets et je suis entré sur le terrain. Quand je me suis placé, il y a Hellebuyck qui est venu me voir, et m’a dit : « bon t’en fais pas, joue ton jeu, petit, je suis là au cas où ». Je ne sais pas de quoi il parlait. Après, c’est Sammy qui m’a glissé : « Huhuhuhu. T’inquiète pas si tu perds la balle, je suis derrière toi ». C’est à ce moment là que j’ai commencé à transpirer du front.

Finalement, ça c’est bien passé. Mon premier match de coupe d’Europe. 0-0. On garde toutes nos chances pour le retour, on a encore 2 semaines pour savoir si on doit passer ou pas. On s’est donné de l’air. C’est pour ça que Sylvain a dit qu’il était rassuré à la fin du match. Ou alors il parlait de sa femme. Nous, on en sait rien, on était déjà au pub…

Au revoir journal,

Clément.

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