Ni buts ni soumises » La D1 2014-2015 en 5 questions

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La D1 2014-2015 en 5 questions

Le championnat est commencé depuis seulement deux journées, et l’habituel Top 4 est déjà devant pendant que deux des promus sont déjà relégables. Le championnat est-il joué d’avance ou va-t-il nous proposer quelques surprises ? Présentation de la saison en 5 questions.

Lyon sera-t-il encore champion ?

Depuis que l’OL a trouvé la bonne formule en 2006 après deux ans de tâtonnements, il n’y a pas vraiment de débat sur l’équipe qui va remporté le titre. Lyon n’a concédé que quatre défaites en 8 ans : une première contre Juvisy au tout début (2e journée de la saison 2006-2007), deux contre Hénin-Beaumont et à nouveau Juvisy qui ont marqué la fin du cycle de Farid Benstiti (saison 2009-2010) et une l’an dernier contre le PSG pour la fin de celui de Patrice Lair.

Pourtant cette saison, les choses pourraient être légèrement différentes, pour des raisons à la fois endogènes et exogènes.

Même s’il ne reste que Wendie Renard et Camille Abily1 du premier titre, l’effectif actuel a très peu bougé depuis plusieurs saisons. Parmi les titulaires potentielles, seules Saki Kumagai, Élise Bussaglia et Ada Hegerberg n’ont pas participé aux quatre saisons sous les ordres de Patrice Lair. D’un côté c’est la force de l’équipe qui lui permet d’avoir un collectif parfaitement huilé et beaucoup d’automatismes. Mais cela risque aussi d’entraîner une certaine forme de lassitude et de routine.

Le changement d’entraîneur – Gérard Prêcheur remplaçant Patrice Lair – va sans doute insuffler un peu d’air, mais avec toute l’incertitude que comporte un tel changement.

Autre conséquence de cette stabilité d’effectif, l’équipe vieillit, plusieurs joueuses atteignent ou dépassent les 30 ans et la marge de progression semble assez faible. Dans le même ordre d’idée, la seule vraie recrue2 est la Norvégienne Ada Hegerberg (19 ans) qui remplace Laetitia Tonazzi (33 ans). À moyen ou long terme, c’est très bien vu, mais à court terme, la nouvelle ne pourra pas apporter beaucoup plus que l’ancienne, meilleure buteuse du club l’an dernier.

La conséquence est que l’équipe sera globalement la même que l’an dernier, avec un effectif assez court d’une quinzaine de professionnelles expérimentées. Si tout va bien, l’équipe reste redoutable, mais s’il y a une ou deux blessures ou méformes, les solutions ne seront pas légions.

C’est sans doute dans cette optique qu’a été fait le choix de Gérard Prêcheur, longtemps formateur à la FFF et en particulier au CNFE3 dont il a même entraîné l’équipe en D1 pendant deux saisons il y a une dizaine d’années. Le restrictions budgétaires que connaît l’OL actuellement ont entraîné le départ de toute une catégorie de joueuses comme Laura Agard ou Ami Otaki qui n’étaient pas internationales mais pouvaient jouer entre 15 et 20 matchs dans la saison, permettant de faire souffler les joueuses les plus sollicitées.

L’an dernier, ce sont les jeunes de la formation lyonnaise, vainqueurs du Challenge U-19 qui auraient dû jouer ce rôle, mais seule Ève Périsset était apparue pour quelques bouts de matchs.

Le banc du PSG

Outre la possible légère stagnation lyonnaise, ce qui permet d’imaginer que le titre sera cette année disputé est la présence d’un vrai concurrent. Depuis deux saison, Lyon n’est plus le club le plus puissant. Le PSG dispose des ressources pour se bâtir un effectif du même niveau que son concurrent. Il avait fallu deux saisons de construction à Farid Benstiti pour aller chercher le titre avec Lyon. Il a construit pendant deux saisons avec le PSG et dispose sans doute désormais d’une équipe apte a finir en tête. Josephine Henning et Caroline Seger s’affrontaient en mai en finale de Ligue des Championnes, niveau que Fatmire Bajramaj a pour sa part atteint quatre fois avec Duisbourg, Potsdam et Francfort.

L’effectif parisien compte ainsi une vingtaine de joueuses internationales4 et semble paré pour faire face à tous ce qui peut arriver au cours d’une saison. L’incertitude sera la capacité de Farid Benstiti à faire cohabiter tout ce monde. Il compte par exemple dans son effectif de quoi faire la charnière centrale de l’équipe de France (Sabrina Delannoy et Laura Georges) et celle de l’équipe d’Allemagne (Josephine Henning et Annike Krahn) ce qui va l’obliger à une habile gestion des temps de jeu.

Si l’on veut schématiser, on dira que Lyon une meilleure équipe type mais le PSG un meilleur effectif. Dans le cadre de la saison de D1 où ces équipes auront à peu près seulement à être concentrées pour remporter 16 matchs sur 22, la profondeur de banc est souvent moins importante que la capacité à remporter les confrontations directes.

Lyon a sans doute encore un petit avantage à condition d’échapper aux blessures ou à la méforme d’une ou deux joueuses.

Guingamp peut-il bousculer le quatuor de tête ?

Depuis qu’en 2009 le PSG a décidé que sa section féminine devait jouer un rôle en D1 et a fait venir des joueuses comme Jessica Houara, Julie Soyer, Élise Bussaglia, ainsi que Camille Abily et Sonia Bompastor en intersaison américaine, l’équipe parisienne fait partie du quatuor de tête avec Lyon, Juvisy et Montpellier.

Les places d’honneurs varient mais depuis 5 ans, ce quatuor est en haut du championnat avec une marge appréciable sur la concurrence, jamais moins de 14 points sur la 5e place.

Yzeure et Saint-Étienne ont longtemps été les leaders de ce second championnat, mais les premières se sont sabordés l’an dernier et joueront cette saison en D2 tandis que les secondes n’ont pas été loin d’en faire autant. C’est l’En Avant Guingamp qui a repris le flambeau. Cinquième l’an dernier pour l’arrivée de Sarah M’Barek, les Bretonnes ont pour ambition de faire au moins aussi bien et de titiller les équipes qui les précèdent.

Pour cela, le club s’appuie sur une forte ossature de jeunes joueuses dont 7 étaient à la dernière Coupe du monde M-20. Le fer de lance sera bien sûr Griedge Mbock Bathy, future taulière des Bleues, dans un avenir très proche. Cinq internationales M-20 sont arrivées lors des deux dernières intersaison (Marine Dafeur et Aminata Diallo cette année, Charlène Gorce, Margaux Bueno et Faustine Robert l’an dernier).

Menée par les expérimentées Emmeline Mainguy, Audrey Février et Salma Amani, Guingamp dispose d’un groupe riche et homogène qui n’a sans doute pas d’équivalent dans le « deuxième championnat », d’autant plus qu’il aura en pointe la Nigériane Désirée Oparanozie en provenance de Wolfsbourg (ou elle ne s’était pas imposée) en passant par la Turquie.

Juvisy dans la continuité, Montpellier poursuit sa reconstruction

Toutefois, cela ne devrait pas être suffisant pour rivaliser avec Juvisy et Montpellier. L’équipe essonnienne poursuit son chemin singulier d’équipe féminine de haut niveau qui n’est pas adossée à un club professionnel, et ne dépend ni ne profite des subsides d’une équipe de garçons.

Du côté de l’effectif, la grande affaire a été la retraite de l’emblématique Sandrine Soubeyrand5. La Stéphanoise (de Neuilly) Aude Moreau aura la lourde charge de la remplacer. Pour le reste les ajustements se font à la marge et sur le long terme : la gardienne Romane Bruneau arrive de La Roche-sur-Yon et la défenseuse Théa Gréboval. Avec Aïssatou Tounkara et Kadidiatou Diani, elles sont sans doute déjà l’avenir du club.

Et pour peu que Sandrine Dusang et Laure Lepailleur puissent faire une saison à peu près complète, cela donnerait à Juvisy un effectif impressionnant en nombre et en qualité.

Mais l’évolution du club se joue aussi dans les structures et les conditions d’entraînement qui se rapprochent de plus en plus du professionnalisme, dans la manière de travailler à défaut des moyens financiers.

Autant dire qu’il est plus probable de voir Juvisy concurrencer les deux équipes de tête que descendre au-delà de la quatrième place, dévolue depuis deux ans à Montpellier.

Laetitia Tonazzi (Montpellier)

Laetitia Tonazzi (Montpellier)

Après le départ de Sarah M’Barek la saison dernière, le MHSC a continué sa mue en laissant partir cettte saison plusieurs joueuses emblématiques : Hoda Lattaf et Ophélie Meilleroux ont arrêté leur carrière tandis qu’Élodie Ramos et Ludivine Diguelman joueront en D2 à Nîmes. En deux ans, Montpellier a profondément renouvelé son équipe type, ne conservant qu’une ossature constituée de Viviane Asseyi, Solène Durand, Laetitia Philippe, Kelly Gadea, Claire Lavogez, Marion Torrent et Rumi Utsugi.

Poursuivant dans la lignée de l’an dernier, le club a recruté les internationales suédoises Linda Sembrant en provenance de Tyresö et Sofia Jakobsson de Cloppenbourg mais passée par Umeå, Rossiyanka et Chelsea, qui prendront la suite de Josefine Öqvist qui a arrêté sa carrière. L’Américaine Genessee Daughetee et la Camerounaise Francine Zouga complètent cet effectif cosmopolite dont la capitaine sera cette saison Laetitia Tonazzi venue chercher dans l’Hérault un statut de titulaire qu’elle n’avait pas à Lyon. Elle devra apporter son expérience à un effectif jeune qui comptera sur l’explosion des stars de l’équipe de France M-20 Claire Lavogez et Sandie Toletti.

Si la mayonnaise prend, Montpellier restera bien à sa place dans le quatuor de tête. Guingamp aura du mal à venir s’insérer à la régulière.

Les promus vont-ils redescendre comme d’habitude ?

Depuis que le nombre de relégations en D1 est passé à 3 en 2010-2011, il y a toujours eu un promu qui est redescendu. Il y en a même eu deux lors des trois dernières saisons. Toutefois, dans la mesure où le quatuor de tête n’est pas concerné par la lutte pour le maintien, n’importe quel choix de trois équipes parmi les huit restantes a 80% de chances d’en voir une ou deux parmi les relégables, y compris donc si ce choix de trois se trouve être les promus.

Depuis l’arrivée de Saint-Étienne et jusqu’à l’arrivée de l’Olympique de Marseille, les promus n’ont pas en général la prétention de se mêler tout de suite au haut du classement, ils s’intègrent donc naturellement à un ensemble qui comprend à la fois le milieu de tableau et la zone de relégation.

Cette saison, aucun des promus ne semble promis au retour immédiat en D2 comme pouvait l’être Muret l’an dernier. Les modèles de Soyaux et Hénin-Beaumont l’an dernier ont été suivis, même si les nordistes ont finalement été reléguées sur le fil. Mais il faut dire que comme à Muret et Yzeure, la saison n’avait pas été sans accroc dans l’effectif, ce qui a conduit à ce que cette saison, Hénin-Beaumont ne compte plus que trois joueuses qui faisait partie régulièrement de l’équipe l’an dernier. De même, Yzeure n’avait pas su capitaliser sur sa cinquième place et s’était au contraire payé un psychodrame et un balayage d’effectif.

Bref, l’expérience de la saison passée enseigne que dans un championnat aussi serré (en bas), il convient déjà d’éviter de se saborder en mettant à l’index une moitié de son équipe type.

Albi a profité des soldes à Yzeure en recrutant Catherine Fitzsimmons, Alexandra Renault, Tatiana Solanet et Alexia Trevisan. La prometteuse Marion Romanelli est arrivée de Monteux et l’attaquante irlandaise Stephanie Roche de Peamount pour compléter l’effectif des championnes de D2 en titre, privé toutefois de la buteuse Sandra Maurice. Le modèle ressemble fortement à celui de Soyaux la saison dernière, avec une grande continuité et un recrutement malin.

Sarah Huchet (Issy)

Sarah Huchet (Issy)

C’est aussi cette politique qui a été employée à Issy, qui profite en plus de son expérience en D1 il y a deux ans, qui ne s’était pas très bien terminée sur le terrain et en dehors, mais le club s’est structuré et l’effectif a été pensé dès l’an dernier en vue de la remontée. Les recrues devront apporter l’expérience de leur club précédent, Lyon pour Pauline Peyraud-Magnin, PSG pour Nonna Debonne et Juvisy pour Inès Dhaou. Comme Albi, Issy a perdu sa buteuse Gwenaëlle Migot (partie à Soyaux), mais avait déjà fait toute la phase retour sans. Et Charlotte Lozé et Luce Ewele Ndolo sont toujours là.

C’est le troisième promu, Algrange qui semblait le plus fragile. Mais c’était avant de devenir l’équipe féminine du FC Metz et de recruter une dizaine de joueuses dont la Roumaine Daniela Gurz, l’Estonienne Getter Laar (en provenance de Guingamp), la Camerounaise Rigoberte M’Bah (d’Hénin-Beaumont) et la Brésilienne Simone Gomes Jatoba, passée par Lyon il y a quelques années. L’équipe type semble beaucoup plus modifiée que celle d’Albi pour un nombre de recrues assez similaire, ce qui va peut-être nécessiter un temps d’adaptation plus grand.

Toutefois, on évitera de tirer des conclusions de la défaite 15-0 concédée sur la pelouse de Saint-Symphorien dans un contexte d’un grand stade face à une équipe de l’OL qui cherche à se rassurer, toutes choses qui ont pu inhiber l’équipe messine en plus d’être des difficultés objectives.

Les maintenus se renforcent

Les trois promus ne partiront donc pas battus d’avance. Mais les autres membres du championnat pour le maintien ne semblent pas non plus avoir raté leur intersaison. Soyaux a surfé sur sa très bonne saison, ne perdant que la jeune Alice Benoit tout en poursuivant sur sa lancée de recrutement en D2 avec les arrivées de Gwenaëlle Migot, Marion Leroy et Melissa Godart. Il comptera aussi sur le retour de Charlotte Bilbault. La principale évolution sera finalement le changement d’entraîneur : Jean-Claude Barrault a dû renoncer pour des raisons professionnelles et est remplacé par Jean Paredes qui avait déjà occupé le banc sojaldicien de 2006 à 2008 avec à la clef une quatrième et une sixième place.

La continuité est également de mise à Rodez qui a certes perdu Séverine Cabec, Marine Augis, Aline Liaigre et Manon Guitard, et qui voit arriver l’ancienne capitaine de Montpellier Stéphanie De Revière et l’ancienne joueuse de Claix Marine Lespinasse.

La fusion Arras-Hénin-Beaumont

Troisième de la bande, Arras a profité de la descente (et de la liquidation de l’effectif) d’Hénin-Beaumont pour se renforcer : le seul départ a été celui d’Aminata Diallo à Guingamp, en contrepartie les Arrageoises ont accueilli leurs voisines Céline Musin, Morgane Duporge, Rachel Saïdi, Justine Rougemont et Aurélie Desmaretz. L’équipe type d’Arras cette saison ressemblera beaucoup à un mélange à parité des deux équipes de l’an dernier. Sans compter que Marie Gosse, Ludivine Bultel ou Laurie Dacquigny sont aussi passées par Hénin-Beaumont.

Finalement, l’équipe qui semble s’être le moins renforcé (avec Lyon qui n’en avait pas besoin) est Saint-Étienne qui a perdu deux de ses meilleures joueuses, Méline Gérard à laquelle succède Marion Mancion et Aude Moreau, remplacée numériquement par Alice Benoit. Pour le reste, les Vertes compteront sur leur jeunesse avec plusieurs joueuses de l’équipe M-19 qui seront dans le groupe de l’équipe première.

Difficile donc de dire qui descendra mais à première vue, aucune équipe ne se détache nettement. Metz et Saint-Étienne n’ont pas les faveurs des pronostics mais adossés à des clubs professionnels, ils bénéficieront des infrastructures liés à ces institutions.

La D1 est-elle l’Eldorado du football féminin ?

Une trentaine de joueuses internationales représentant d’autres sélections que la France participeront à la prochaine saison de première division. C’est une importante progression depuis quelques années. En 2010-2011 par exemple, elles n’étaient qu’une douzaine dont près de la moitié à Lyon (Shirley Cruz, Simone Gomes Jatoba, Ingvild Stensland, Lotta Schelin et Isabell Herlovsen). Montpellier (Rumi Utsugi), le PSG (Katia Teixeira Da Silva) et plus surprenant Hénin-Beaumont (Rigoberte M’Bah) comptaient aussi une joueuse étrangère, tout comme Yzeure qui avait déjà commencé sa tradition de recruter sa gardienne à l’étranger avec la Brésilienne Thais Da Silva6. La Canadienne de Juvisy Sandra Couture et la Suissesse de Saint-Étienne Muriel Bouakaz étaient en France pour études et n’ont d’ailleurs pas beaucoup joué7.

Sofia Jakobsson (Montpellier)

Sofia Jakobsson (Montpellier)

Cette saison, le plus gros contingent est bien sûr au PSG qui compte 11 internationales étrangères8, avec trois grosses pointures de plus. Dans l’optique de concurrencer Lyon y compris sur la scène européenne, c’est assez logique pour le club parisien qui compte aussi 9 internationales A françaises.

De même, Montpellier veut se repositionner dans le (très) haut du tableau et a attiré deux internationales suédoises Linda Sembrant et Sofia Jakobsson, et la Camerounaise Francine Zouga qui viennent s’ajouter à l’Écossaise Jennifer Beattie arrivée l’an dernier et à la Japonaise Rumi Utsugi qui entame sa cinquième saison dans l’Hérault. On peut ajouter la latérale Américaine Genessee Daughetee qui n’est pas encore internationale.

Lyon compte toujours quatre étrangères dans son effectif avec l’arrivée de la Norvégienne Ada Hegerberg qui remplace numériquement Megan Rapinoe partie en cours de saison dernière.

La surprise messine

Il n’est pas très étonnant que des équipes dotées de gros budgets (à l’échelle du football féminin) et de grosses ambitions – y compris sur la scène européenne – fassent appel à des joueuses de top niveau, internationales Allemandes, Suédoises, Américaines ou Japonaises. Ce n’est pas le signe que la D1 est attractive mais que quelques clubs le sont.

Mais si quelques clubs ont profité d’une bonne affaire, comme Albi avec Catherine Fitzsimmons, venue pour une expérience à l’étranger à Yzeure et passée dans le Tarn pour rester en D1, cela semble plus ciblé dans le cas de Metz. La gardienne estonienne Getter Laar arrive en Moselle dans le même genre de conditions que sa consœur d’Albi puisqu’elle était à Guingamp l’an dernier pour pallier la blessure qui coûté la phase aller à Emmeline Mainguy, mais si Rigoberte M’Bah est en D1 depuis 2008, Daniela Gurz arrive de Cluj en Roumanie et Simone Gomes Jatoba du Brésil.

Ce dernier cas est significatif : le club cherchait une joueuse expérimentée pour encadrer un effectif qui ne l’est pas et n’a pas hésité à prospecter à l’étranger, même si c’est pour trouver une joueuse qui connaît très bien la D1 pour l’avoir remporté quatre fois avec Lyon où elle a joué cinq ans.

Ce n’est sans doute pas tout à fait un hasard si ce recrutement international intervient de façon concomitante avec l’intégration d’Algrange au FC Metz. La professionnalisation du championnat se traduit aussi au niveau des méthodes de recrutement, et le contrat fédéral en tant que vrai contrat professionnel facilite le transfert de joueuses, que ce soit depuis la France ou l’étranger.

Va-t-on vers une D1 avec des clubs de L1 ?

Avec le passage d’Algrange sous le giron du FC Metz, la moitié du plateau de la D1 féminine est constituée de sections féminines de clubs professionnels masculins (par ailleurs tous en L1 cette saison avec la remontée du même FC Metz). Si l’on se souvient que la plupart des clubs historiques du football féminin sont à l’origine des sections féminines de clubs masculins (l’Étoile Sportive Juvisienne, le FC Lyon, l’AS Soyaux, l’Olympique Héninois) qui ont pris leur indépendance quand il est apparu que les arbitrages se faisaient toujours en faveur des équipes masculines, y compris quand le niveau auquel jouaient les uns et les autres n’avaient rien à voir et quand c’est l’équipe féminine qui abondait le budget.

Mais la situation est très différente actuellement puisque le football professionnel des garçons draine de des sommes phénoménales et qu’un faible pourcentage de celles-ci fait un budget confortable pour une équipe de D1 féminine.

L’effet Superleague Formula

Devant les exemples de Montpellier et de Lyon, le discours actuel est de souhaiter que chaque club pro masculin investisse dans le football féminin. Ce serait certainement une très bonne chose qu’une partie du budget du football professionnel permette d’améliorer les structures et la formation du côté des filles.

Mais adosser de façon systématique une équipe féminine à un club masculin fait d’office que cette équipe n’est plus l’équipe fanion du club, et par suite qu’en cas de difficulté du club, elle sera parmi les premières à subir les conséquences.

L’arrivée prochaine de l’Olympique de Marseille, qui ne devrait pas rester longtemps en D2 fait saliver certains commentateurs, persuadés que le football féminin a à gagner à des affiches OM-PSG et ASSE-OL. Pourtant, si le projet marseillais est séduisant, c’est parce qu’il s’agit de la construction de A à Z d’une équipe féminine qui monte les échelons et qui disposera de structures de haut niveau, pas à cause d’un badge « Droit au but » destiné à créer une concurrence artificielle avec tel ou tel club.

Outre que les rivalités du football masculin ne sont pas obligatoirement ce qui est le plus à copier dans le football féminin, jusque là relativement épargné par sa faible médiatisation, ce n’est sans doute pas une bonne manière de valoriser la discipline.

Au milieu des années 2000, quelque promoteur a pensé bénéficier de la notoriété des clubs de football et de la passion de leurs supporters pour organiser une compétition reprenant les couleurs de grands clubs. Cela aurait pu être des courses de chevaux et des casaques de jockeys, mais ça a été des courses automobiles.

La curiosité a été de mise un an ou deux pour voir la voiture du FC Bâle prendre un tour à celle de Manchester United.

Puis rapidement, l’intérêt pour cette formule monoplace avec des pilotes inconnus s’est émoussé et au bout de quelques années, le championnat a été arrêté.

La leçon que peut en tirer le football féminin est que si la compétition en elle-même n’est pas intéressante, le fait de porter les couleurs de clubs connus ne va pas faire illusion très longtemps. Et qu’il vaut mieux travailler à des ressources propres comme le fait Juvisy d’un côté, ou Lyon de l’autre où le club cherche à développer des revenus directement liés à l’équipe féminin pour équilibrer son budget, produire un jeu séduisant et un championnat palpitant, que de compter uniquement sur des « affiches » venues d’un autre contexte.



3 commentaires pour “La D1 2014-2015 en 5 questions”

  1. Très bon article, comme toujours. On a hate de voir ce que va donner cette saison de D1. Dès ce Samedi déjà, avec le choc Lyon-Montpellier.

  2. merci pour encore un article lucide, neutre, plein de connaissance et de bon sens.

    mon grain de sel sur les situations de OL et de PSG:

    si l’effectif des fenottes est faible numériquement dans l’absolu, la polyvalence des joueuses fait en sorte que tous les postes sont amplement couverts à l’exception de la défense centrale où, après les titulaires, aucune solution existe en dehors d’un plan D; même si on sent que des nanas comme Amandine Henry, Camille Abily or Corine Petit pourrait tirer leur épingle du jeu en charnière il semble impensable que Lyon n’ait pas quelqu’un sur les tablettes.

    qualitativement il y a une progression; pas fulgurante peut-être mais appréciable et réelle. si plusieurs joueuses clés sont plus près de la fin de leur carrière que du début, d’autres comme Le Sommer et Henry sont en train de monter d’un palier, et Elodie Thomis, à défaut d’être toute jeune, s’améliore encore et toujours dans les compartiments de jeu qui lui faisaient défaut, voir ses percées dans l’axe contre MHSC; pour la 1ère fois elle n’a pas joué dans le couloir.

    plus important sont les apports d’Amel Majri, en voie de confirmer tout le bien qu’on a pensé d’elle et encore, et Ada Hagerberg. avec tout le respect qu’on doit à Laëtitia Tonazzi, Hagerberg semble promise à un tout autre statut mondial; Seulement 19 ans et deux matchs et elle pèse déjà plus dans l’équipe que Toto ait jamais fait.

    en ce qui concerne la lassitude, deux solutions se présentaient: soit renouveller un tiers voire la moitié de l’équipe, soit changer d’entraineur. la deuxième était plus simple et, à la vue des entrainements que j’ai regardé, éfficace. à tola il y a encore de la joie!

    Sur le PSG je ne vais pas m’étendre autant, je n’ai pas la connaissance pour. C’est clair que sur papier leur effectif peut faire rêver. mais il me semble que la saison passée elles avaient tout ce qu’il fallait pour déposer Lyon en qualité et en quantité; même l’équipe d’il y a deux ans aurait pu suffir à la limite. Mais Paris ferait mieux de laisser progresser l’équipe en place au lieu de la chambouler à chaque mercato.

    Ce méthode n’a fini par marcher pour leurs hommes en L1 que parce que le niveau de L1 est rélativement faible; pour les parigotes, il n’y a pas cette même grosse marge entre « ce qui se fait de mieux » et l’équipe qu’elle cherche à battre. On fait fausse route.

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