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Veillée d’armes européenne

À dix jours de leur entrée en Ligue des Championnes, les deux équipes françaises engagées s’affrontaient en championnat.

Si la victoire de l’OL permet d’envisager sereinement l’entrée en matière européenne, la défaite du PSG ne remet pas vraiment en cause ses ambitions mais incite à la prudence avant une compétition qui démarre tout de suite par un gros morceau.

La Ligue des Championnes 2014 a débuté au mois d’août par sa traditionnelle phase de poules dont sont dispensées les meilleures équipes du continent, parmi lesquelles les deux françaises, l’OL et le PSG qui visent ouvertement la finale du 22 mai à Lisbonne (surtout pour la première).

Quatre pays seulement se sont partagés 40 des 48 places de demi-finalistes (et 16 sur 16 depuis que les meilleurs pays engagent deux équipes). L’Allemagne se taille évidemment la part du lion avec 15 demi-finales en 12 saisons (et une seule absence en 2007), la Suède a été présente 10 fois, la France 9 et l’Angleterre 6. Leurs représentantes seront bien entendu favorites cette saison, mais il pourrait bien y avoir une surprise dans le dernier carré.

La révolution anglaise

Toutes les présences anglaises en demi-finales ont été le fait d’Arsenal, qui a battu Postdam l’an dernier en huitièmes de finale. Mais les Ladies d’Arsenal viennent de perdre leur titre face à Liverpool. Elles ne sont pas non plus parvenues à préserver la deuxième place qualificative pour l’édition suivante, la faute à un retrait de point pour avoir aligné une joueuse non qualifiée. Ça ne sera que la deuxième fois qu’elles seront absentes de la scène européenne, après la saison 2004 où Fulham avait représenté l’Angleterre.

Cette saison, Arsenal est bien là et visera une quatrième demi-finale d’affilée. Mais la baisse de régime manifestée par la perte du titre pourrait avoir des conséquences et surtout, le calendrier de mars à septembre de la FAWSL pourrait pénaliser les clubs anglais, qui joueront les deux premiers tours longtemps après la fin de sa saison, et d’éventuels quarts juste à la reprise. Mais Arsenal et Birmingham, quatrième cette saison (mais qualifié comme deuxième l’année passée) ont deux premiers tours faciles1 avant les quarts de finales, qui seraient une première pour Birmingham, et quasiment pour un club anglais autre qu’Arsenal puisque seul Everton en 2011 (et Fulham en 2004, dans une compétition très différente) avait atteint ce stade.

Ça chauffe dès le début

Au contraire, Allemandes, Suédoises et Françaises sont embarquées dans un tirage qui en éliminera au moins la moitié avant les quarts. Le PSG et Tyresö s’affrontent dès le premier tours, et en cas de qualification, Lyon devrait rencontre Potsdam, et Wolfsbourg faire face à Malmö.

On n’ira pas jusqu’à imaginer des boules à température variables, mais pour une compétition un peu décriée pour son faible niveau avant les quarts et le peu de variété des équipes présentes dans les derniers tours, c’est du pain béni : il y aura vraisemblablement trois confrontations du niveau d’une demi-finale deux ou trois tours plus tôt et cela pourrait ouvrir le plateau des derniers tours.

Le revers de la médaille, c’est que le vainqueur du quatuor composé du Konak Belediyesi (Turquie), de l’Unia Racibórz (Pologne), de l’Apollon Limassol (Chypre) et de Neulengbach (Autriche) risque d’être une proie facile en quart, ce qui ne manquera pas de faire dire aux contempteurs de la compétition que même dans les derniers tours, il n’y a que quelques rares bonnes équipes.

Les chances françaises

Peu importe, les duels seront donc plus répartis sur la durée de la compétition cette année et ils concernent les deux équipes françaises. Nos deux représentants seront donc l’OL et le PSG, le deux seuls clubs entièrement professionnels de la Division 1, qui ont aussi des budgets parmi les plus importants en Europe, et l’ambition affichée d’aller au bout du parcours.

Shirley Cruz et Amandine Henry

Shirley Cruz et Amandine Henry

Parisiennes et Lyonnaises se sont affrontées dès la quatrième journée du championnat au Stade Charléty. C’est l’occasion de faire le point sur leur état de forme à l’heure européenne.

Lyon en ordre de bataille

Vainqueur 3-0 du match au sommet, Lyon semble plus que jamais au point, après avoir déjà remporté le match contre Juvisy (demi-finaliste européen l’an dernier) sur le même score. Le dégraissage lié à la situation financière du club et de l’équipe masculine ne se fait pas sentir. Lyon a laissé partir 6 joueuses professionnelles, mais seules Laura Georges et Sonia Bompastor étaient vraiment titulaires2. Pour les remplacer sont arrivées Saki Kumagai et Melissa Plaza, et quelques jeunes joueuses sont plus régulièrement intégrées au groupe professionnel.

La Japonaise venue de Francfort s’est parfaitement adaptée et forme avec Wendie Renard une charnière qui a peu d’équivalent en Europe. La place de latérale gauche revient pour l’instant à Lara Dickenmann qui l’avait déjà occupée avec succès durant la blessure de sa capitaine la saison dernière. Pour le reste, l’équipe n’a pas tellement changé et reste une impressionnante machine à gagner.

Lindsey Horan et Marie-Laure Delie n'ont pas réussi à prendre en défaut Saki Kumagai et Wendie Renard

Lindsey Horan et Marie-Laure Delie n'ont pas réussi à prendre en défaut Saki Kumagai et Wendie Renard

La question qui reste en suspens va être la profondeur de banc : avec quatre professionnelles de moins, Lyon sera plus sensible aux absences ou aux méformes. On peut penser que pour le quotidien du championnat, ça ne devrait pas poser de problème sauf pour les matchs au sommet (mais il y en a déjà deux de passés), sauf si Patrice Lair ne parvient pas à doser la rotation de son effectif et tire trop sur la corde pour certaines joueuses. Mais le risque est faible.

Par contre, pour les gros matchs de Coupe d’Europe, le problème pourrait se poser : jusque là, l’OL a joué plus ou moins à 14. En ajoutant Sabrina Viguier peu utilisée et Megan Rapinoe qui vient de revenir, on arrive à 16. Autant dire que les blessures simultanées de deux joueuses dans le même secteur de jeu obligerait à innover et serait difficile à surmonter sur la scène européenne. Mais c’est le lot de presque toutes les équipes. L’an dernier Wolfsbourg a montré qu’il est possible de gérer des absences de poids : pour la finale, Ralf Kellerman avait placé Alexandra Popp arrière gauche, et remonté Lena Goeßling en milieu de terrain alors qu’elle occupait l’axe de la défense depuis le début de saison. Les deux joueuses avaient été parmi les meilleures de la finale.

Le PSG à la recherche de la bonne formule

Du côté parisien, en dehors de quelques ajustements concernant des joueuses qui n’avaient pas beaucoup joué et l’arrivées de jeunes prometteuses, la nouveauté de la saison est la signature des deux internationales Laura Georges et Marie-Laure Delie.

Si l’attaquante arrive dans un secteur où la rotation est en général importante et où Linsdey Horan et Kosovare Asslani n’ont pas complètement convaincu sans avoir démérité, la défenseuse trouve une charnière Annike Krahn-Sabrina Delannoy déjà bien en place.

Le recrutement de l’ancienne lyonnaise pourrait assez naturellement s’expliquer par la longue indisponibilité de l’internationale allemande l’an dernier pendant laquelle il avait fallu faire redescendre Caroline Pizzala en défense et qui avait montré la nécessité d’un effectif étoffé.

Pourtant, depuis le début de saison, Farid Benstiti a choisi de ne pas choisir et fait jouer ses trois défenseuses centrales. Outre que cela laisse en l’état le problème d’une éventuelle absences (mais le recrutement de Sara Gama est peut-être lié), ce système n’a semblé convaincant ni contre Soyaux (victoire 3-2) ni contre Lyon.

Face à la seule Lotta Schelin en première mi-temps, les trois défenseuses sont restées bien sagement à leur place, aucune n’est jamais venue apporter le surnombre en attaque. Et quand Laetitia Tonazzi a remplacé Élodie Thomis à la mi-temps, elle a suffi à désorganiser totalement la triplette.

Lotta Schelin, entourée d'Annike Krahn, Laura Georges et Sabrina Delannoy

Lotta Schelin, entourée d'Annike Krahn, Laura Georges et Sabrina Delannoy

L’analyse de l’entraîneur parisien est que son équipe s’est effondrée après avoir encaissé le premier but. On peut avoir une vue légèrement différente. Son équipe s’est effondrée ce qui a provoqué le but concédé. L’entrée d’une ailière qui est régulièrement entré dans l’axe comme une deuxième avant-centre a complètement semé le trouble dans la défense parisienne, ce qui a rapidement mené au premier but.

En l’absence des créatrices que sont Linda Bresonik et Tobin Heath, le PSG expose ses limites dans ce 5-3-2. Avec le surnombre défensif et le profil des deux attaquantes, Marie-Laure Delie et Lindsey Horan, plus joueuses de surface que d’espace, toute la responsabilité du jeu repose sur le trio du milieu, souvent en infériorité numérique. Et sans faire injure à Aurélie Kaci et Kenza Dali qui sont de bonnes joueuses, il est peu probable qu’elles aient à Paris la capacité à porter une équipe de ce niveau qu’elles n’avaient pas à Lyon.

Le seul avantage de ce système pourrait être de libérer les deux latérales internationales, Laure Boulleau à gauche et Jessica Houara à droite pour jouer très haut. Mais contre Lyon, elles se sont régulièrement retrouvées en infériorité numérique ce qui a semblé doucher leurs velléités offensives. Et pour la plupart des matchs de championnats, on peut penser qu’elles devraient pouvoir passer leur temps dans le camp adverse même si leur charnière ne compte que deux joueuses.

On n’enterrera pourtant ni le PSG ni son système. Avec le retour de joueuses plus créatives comme Kosovare Asslani et Tobin Heath, en attendant peut-être Linda Bresonik, la qualité de buteuse de Marie-Laure Delie dans la surface pourrait payer. Et Sabrina Delannoy semble avoir toutes les qualités nécessaires pour jouer le rôle de libero qui apporte le surnombre en attaque.

Mais il y a urgence à trouver cet équilibre puisque les prochains matchs opposeront le PSG successivement à un Montpellier qui a le vent en poupe et à Tyresö avec toutes ses stars.



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