Ni buts ni soumises » PSG, le dernier rempart ?

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PSG, le dernier rempart ?

Match de la 19e journée planté entre la 16e et la 17e, le match OL-PSG est bien le sommet de la saison même si son résultat ne devrait avoir aucune conséquence sur le classement des deux équipes. Et même si le PSG est désormais un vrai concurrent, Lyon reste favori.

Comme le calendrier de D1 féminine était trop à jour avec pas moins de 5 équipes qui n’ont pas de match en retard, la FFF a décidé de redonner de la lisibilité au classement en acceptant la demande de France 4 qui souhaitait diffuser une affiche de football féminin à l’occasion de la Journée de la femme. Ce sera légèrement en avance puisque le match Lyon-PSG de la 19e journée aura lieu le 2 mars (avant les 17e et 18e journées) et la Journée de la femme le 8. Mais il paraît que c’est la semaine qui compte.

Élodie Thomis et Eugénie Le Sommer entourent leur partenaire d'alors Aurélie Kaci

Élodie Thomis et Eugénie Le Sommer entourent leur partenaire d'alors Aurélie Kaci

Nonobstant, il s’agit bien d’un match au sommet du championnat même si son importance réelle sera essentiellement symbolique. En effet, le mode de calcul abscons1 et le calendrier en dentelles cachent un peu la situation réelle en tête : certes l’OL n’a que trois points d’avance sur le PSG, mais le match en retard contre Vendenheim lui permet d’en espérer 4 de plus. Outre une victoire à Gerland, l’équipe parisienne devrait donc espérer deux autres « non-victoires » lyonnaises pour passer devant. Et si un défaite contre Montpellier est envisageable, ce n’est pas faire injure à Vendenheim, Saint-Étienne, Arras, Issy et Rodez que de ne pas les imaginer accrocher les doubles championnes d’Europe.

Le PSG semble également à l’abri avec 6 points d’avance sur Montpellier, l’avantage dans les confrontations directes et un seul autre sommet à jouer contre Juvisy. Il semble en effet peu probable que les Parisiennes laissent à nouveau échapper des points contre Guingamp comme lors de la première journée surtout si le match est décisif pour l’Europe. D’autant plus que l’équipe parisienne a bien changé.

Une équipe en construction

Parmi les 12 joueuses les plus utilisées jusque là par Farid Benstiti, 7 sont arrivées au club cette saison, et l’entraîneur lui-même est dans ce cas. Il est donc assez naturel que l’équipe soit nettement monté en puissance après un début délicat2 remportant tous ces matchs depuis la 4e journée, sauf le match aller contre Lyon, n’encaissant que 5 buts dans cette période – autant que l’OL – et marquant 43 buts, soit plus de 3 par match.

Il est à peu près certain que le PSG est désormais une équipe qui ne perdra pas de points contre les équipes classées au delà de la cinquième place et rarement contre les autres.

Ce qui en fait le premier concurrent de l’OL depuis 2010 où l’équipe alors entraînée par Farid Benstiti avait fini un seul point devant Juvisy, et quatre devant le PSG avec deux défaites dans la saison3. La saison dernière, la place de leader de Juvisy jusqu’à un point avancé de la saison n’avait tenu qu’à l’habituel calendrier à trou et au positionnement du match entre les deux équipes lors de la dernière journée4.

Amandine Henry face à Shirley Cruz au match aller, photo Éric Baledent, Le Moustic Production

Amandine Henry face à Shirley Cruz au match aller, photo Éric Baledent, Le Moustic Production

Avec le PSG, l’OL doit faire face à une équipe qui a les mêmes forces, et un peu plus : une structure totalement professionnelle et une importante puissance financière. On ne l’a ainsi pas tellement noté mais le match aller était la première rencontre de football féminin en France entre deux équipes entièrement professionnelles.

Il y a une certaine crainte côté lyonnais face à ce concurrent qui voudra prendre la place aussi bien en France qu’en Europe. Ainsi Patrice Lair expliquait l’arrivée de Shinobu Ohno dès cet hiver par le fait que lors de la prochaine intersaison Lyon ne pourrait pas s’aligner financièrement sur d’éventuelles offres du PSG. C’est aussi la raison pour laquelle le club lyonnais s’est empressé de faire prolonger la quasi totalité de son effectif.

La bataille du milieu

Si le titre semble déjà promis à l’OL et si le PSG devrait dès l’an prochain être capable de le lui disputer, le match de cette 19e journée devrait permettre de savoir si le PSG a déjà rattrapé Lyon.

Gardiennes

En dehors de la Montpelliéraine Laetitia Philippe, les deux clubs comptent dans leurs rangs toutes les gardiennes appelées en équipe de France depuis 20085. Mais si Lyon fait jouer la titulaire des Bleues, Sarah Bouhaddi, le PSG aligne le plus souvent Véronique Pons, ancienne de la maison d’en face, et laisse la quatrième gardienne des Bleues Karima Benameur sur le banc. L’ancienne titulaire – chez les Bleues et au PSG – Bérangère Sapowicz est sortie de sa retraite mais n’a pas encore rejoué et n’avait à peu près pas repris après sa blessure lors de la Coupe du monde. Bref, le PSG n’est pas dépourvu à ce poste, l’OL garde nettement l’avantage.

Défenseuses centrales

Le PSG n’est fortement renforcé dans l’axe cette saison. Premièrement en recrutant Annike Krahn, internationale allemande à plus de 80 sélections et deuxièmement en donnant un statut professionnel à la capitaine Sabrina Delannoy qui après 10 ans de D1 a franchi le palier lui permettant d’intégrer l’équipe de France. Les deux joueuses n’ont pas laissé beaucoup de temps de jeu à la concurrence et heureusement parce que derrière ça ressemble un peu à du bricolage. Lors du dernier match contre Issy, ce sont Caroline Pizzala et Saïda Akherraze qui ont été alignée, contre Toulouse, c’est Nonna Debonne qui jouait. Et si les deux dernières sont plutôt latérale, la première jouait jusque là au milieu.

Avec les trois internationales expérimentées que sont Wendie Renard, Laura Georges et Sabrina Viguier, plus Laura Agard, Lyon n’est pas en reste, les deux premières formant actuellement la charnière des Bleues. Au niveau individuel, Wendie Renard est peut-être la meilleure joueuse française à l’heure actuelle et n’est pas loin de rivaliser avec l’expérimentée Annike Krahn. Du coup la paire lyonnaise vaut la paire parisienne, avec nettement plus de solution de repli comme lors de la blessure de Wendie Renard en octobre-novembre. Dans la mesure où l’Allemande du PSG est annoncée absente et où sa coéquipière devrait être de retour de blessure, l’OL garde là aussi l’avantage pour ce match et pour une saison grâce à sa profondeur de banc.

Défenseuses latérales

À gauche, ce match est le duel entre la titulaires des Bleues depuis 14 ans et celle qui vient de lui succéder. Pour rester poli, on dira que le changement ne s’est pas fait sur une question de niveau. Toutefois même quand les deux étaient sélectionnées, la Parisienne Laure Boulleau était mieux qu’une remplaçante de la Lyonnaise Sonia Bompastor. À ce poste, c’est Paris qui dispose de plus de solutions de remplacement avec Nonna Debonne ou Saïda Akherraze, voire Jessica Houara qui change de côté pour laisser un entrante côté droit. À Lyon par contre, rien n’a vraiment été prévu pour suppléer la capitaine : on a donc vu Amel Majri dépanner et maintenant Lara Dickenmann. On a même vu Megan Rapinoe s’y coller. Si Patrice Lair prévoit d’avoir à défendre, on devrait sans doute plutôt voir une axiale décalée, Laura Agard ou Sabrina Viguier (ou l’une de celles-ci dans l’axe et Laura Georges ou Wendie Renard à gauche). Bref, si entre titulaires, Sonia Bompastor est sans doute encore devant Laure Boulleau, en son absence l’avantage est nettement côté parisien.

À droite, Corine Franco est régulièrement pointé comme le point faible de l’OL. Ce qui n’est pas entièrement faux mais ce qui exprime surtout la qualité de l’effectif lyonnais puisque le point faible en question est titulaire chez les Bleues et sans doute la meilleure en France alors que ce n’est pas vraiment son meilleur poste qui serait plutôt celui de milieu récupératrice. En son absence, c’est Laura Agard qui a tenu le poste (et Amandine Henry une fois, plus une demi-heure contre Juvisy où Corine Franco était occupée à gauche).

À Paris cette saison, c’est Jessica Houara qui a été recyclée arrière droite avec réussite puisque c’est à ce poste qu’elle est régulièrement sélectionnée6 après une première cape d’une mi-temps en attaque en 2008. En son absence Nonna Debonne peut aussi occuper la place. Comme à Lyon, il ne s’agit pas du point fort de l’équipe mais le poste est vaillamment occupé.

Milieux

Le milieu de terrain est sans conteste le point fort du PSG avec deux joueuses exceptionnelles, Shirley Cruz et Linda Bresonik, même si l’Allemande a connu plusieurs blessures. Mais aux mêmes postes, l’OL présente aussi deux joueuses exceptionnelles Amandine Henry et Camille Abily. On ne cherchera pas à savoir qui est la plus forte de la Costaricienne ou de la Nordiste, ni de l’Allemande ou de la Bretonne. De toute façon, on ne se trompera pas de beaucoup en disant qu’on a là les 4 meilleures joueuses de milieu de terrain du championnat.

Linda Bresonik, photo Éric Baledent, Le Moustic Production

Linda Bresonik, photo Éric Baledent, Le Moustic Production

Autour d’elles, Farid Benstiti fait confiance à deux anciennes Lyonnaises Aurélie Kaci et Kenza Dali, les deux seules joueuses avec Shirley Cruz à avoir participé à tous les matchs. Entre Rhône et Saône, elles jouaient plutôt les utilités et elles sont assez loin du niveau de Louisa Necib, qui aurait pu faire partie du carré d’as, et d’Élise Bussaglia qui va peut-être enfin pouvoir commencer sa saison.

C’est sans doute pour pallier ce déficit que le PSG a engagé la championne olympique Tobin Heath jusqu’à la fin de la saison. Avec l’arrivée de la championne du monde Shinobu Ohno qui peut jouer comme meneuse, Lyon s’est aussi donné d’autres solutions. Il y a donc peut-être un très léger avantage à Lyon, mais il s’agit surtout de deux milieux de terrain de très haut niveau, sans doute pas très loin du meilleur niveau mondial.

Attaquantes

La principale différence entre les deux effectifs est donc devant. Cela n’était déjà pas le point fort du PSG les saisons précédentes malgré le bon passage des Américaines Alexandra Long et Ella Masar l’an dernier. Tout le monde est parti à l’intersaison et l’attaque a été entièrement reconstruite autour de trois recrues, jeunes internationales : la Suédoise Kosovare Asllani, l’Américaine Lindsey Horan et la Française Kheira Hamraoui qui joue plutôt milieu offensive. Si la première commence à être expérimentée en équipe nationale, les deux autres débutent seulement leur carrière en sélection. Il faut dire que l’Américaine n’a pas encore 20 ans. Le duo suédo-américain fonctionne plutôt bien puisqu’il cumule 21 buts depuis le début de saison.

Kosovare Asllani, photo Éric Baledent, Le Moustic Production

Kosovare Asllani, photo Éric Baledent, Le Moustic Production

Mais l’attaque lyonnaise est d’un autre calibre avec la meilleure joueuse suédoise Lotta Schelin, qui peut-être suppléée dans l’axe par Laetitia Tonazzi ou Eugénie Le Sommer, deux joueuses régulières au dessus de 15 buts par saisons, bien que cette dernière joue plus régulièrement sur un côté, tout comme Élodie Thomis et Lara Dickenmann, toutes deux internationales confirmées. Et on ne parle pas là d’Ami Otaki, déjà 9 buts cette saison en 7 matchs et 340 minutes, ni des arrivantes Shinobu Ohno championne du monde à plus de 100 sélections et Megan Rapinoe, star de l’équipe championne Olympique. Bref, s’il fallait trouver un défaut à l’attaque lyonnaise, ce serait plutôt qu’elle est trop riche. En tous cas, même en cas d’absences et quel que soit le schéma de départ, il y a toujours des solutions sur le banc.

Lotta Schelin

Lotta Schelin

Entraîneurs et équipes types

Le football est un sport collectif et une comparaison individuelle est insuffisante pour évaluer deux équipes. Farid Benstiti, entraîneur du PSG est expérimenté puisqu’il a été quatre fois champion avec l’OL, avant d’entraîner Rossiyanka champion de Russie et l’équipe nationale russe. Comme il le fait à Paris, il participé à la transformation du FC Lyon, club amateur de haut de tableau en un OL quasi invincible en France et habitué du dernier carré en Europe. Au PSG, il a su vite faire collectif de son effectif fortement remanié, même s’il profite des talents individuels et qu’il s’appuie surtout sur une solide base défensive lors des gros matchs.

Véronique Pons - Jessica Houara, Annike Krahn, Sabrina Delannoy, Laure Boulleau - Shirley Cruz, Aurélie Kaci, Kenza Dali, Linda Bresonik - Lindsey Horan, Kosovare Asllani

Son équipe type est à géométrie légèrement variable en fonction de l’adversaire et de la présence ou non de Linda Bresonik. Kosovare Asllani joue alors régulièrement sur un côté, Kheira Hamraoui ou Kenza Dali pouvant occuper l’autre. L’intégration de Tobin Heath l’obligera peut-être à changer légèrement son schéma.

Patrice Lair lui a succédé à Lyon en poursuivant encore la progression jusqu’au triplé de la saison dernière. Sans tirer trop de conclusions définitives sur des victoires en Ligue des Championnes d’une équipe qui n’avait perdu en finale avec Farid Benstiti qu’aux tirs aux buts et sans Lotta Schelin, Camille Abily et Sonia Bompastor, il semble avoir apporté à cette équipe en particulier par sa rigueur et son perfectionnisme.

Sarah Bouhaddi - Corine Franco, Wendie Renard, Laura Georges (Sabrina Viguier), Sonia Bompastor - Amandine Henry, Louisa Necib, Camille Abily - Eugénie Le Sommer (Élodie Thomis), Lotta Schelin, Lara Dickenmann

Son schéma principal est un 4-3-3 avec une meneuse et des ailières mais il n’hésite pas à varier les organisations en particulier en fin de matchs déjà gagnés, afin de disposer d’une plus grande palette de solutions, ce qui lui permet de s’adapter très vite comme lors du match contre Juvisy où il a chamboulé son équipe au bout d’une demi-heure. Là aussi, l’intégration de Megan Rapinoe nécessite des ajustements tactiques ou au moins des replacements, qui sont aussi liés à l’absence de Sonia Bompastor. Et Shinobu Ohno n’est pas encore rentrée dans la rotation.



3 commentaires pour “PSG, le dernier rempart ?”

  1. Encore un article excellent comme d’habitude. Merci pour ces analyses très intéressantes qui m’apprennent beaucoup sur le football féminin.

  2. Très agréable à regarder ce match. Les deux ouvertures sur les buts de Lotta Schelin, c’est du très beau football.

  3. Oui vraiment super ce match. Vous avez remarqué la grâce de Lotta quand elle court. J’espère qu’elle va rester à Lyon la saison prochaine… Dommage que les parisiennes ont baissé les bras après le 3ème but. J’ai trouvé les lyonnaises bien meilleures que contre Jusivy. Ou alors c’était Juvisy qui a été bien meilleur que le PSG ?

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