Ni buts ni soumises » Finales des JO de Londres 2012

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Finales des JO de Londres 2012

Les États-Unis sont championnes olympiques comme (presque) à chaque fois, en battant les championnes du monde japonaises. Les Bleues se font chiper la médaille de bronze par le Canada qui est l’équipe surprise de la compétition.

Trois des quatre demi-finalistes des Jeux Olympiques (États-Unis, Japon et France) l’étaient déjà un an plus tôt, ce qui confirme les grandes lignes de la hiérarchie mondiale. La finale était la même que l’an dernier mais le résultat a été inversé, les Américaines confirmant leur suprématie sur la compétition olympique qui ne leur a échappé qu’en 2000 (défaite en finale face à la Norvège).

Zone par zone, le tournoi sacre bien entendu l’Amérique du nord qui place ses deux représentants sur le podium. Le Japon a pris le relais de la Chine comme locomotive de l’Asie, mais semble assez seul avec le second échec de suite de la Corée du Nord. L’Europe est absente du podium mais a placé ses trois représentants en quarts de finales. Suède et France étant opposées ne pouvaient accéder conjointement aux demi-finales, seule la Grande-Bretagne a été éliminée par une équipe d’une autre zone, après avoir battu le Brésil en phase de poule.

L’équipe britannique n’était présente qu’en tant que pays organisateur et n’aurait sans doute pas eu sa place sinon. Sa poule avait été construite sur mesure pour lui assurer une place en quarts mais elle a donc justifié sa présence en battant le Brésil. Il s’agissait néanmoins de la poule la plus faible, qui n’a envoyé aucun représentant en demi-finales.

Le Brésil éliminé en quarts de finales semble en retrait par rapport à l’équipe qui était double finaliste olympique, et contrairement à la Coupe du monde, Marta n’a jamais semblé en mesure de porter son équipe. La Colombie ayant subi trois défaites au premier tour, la zone sud-américaine a manqué ses Jeux.

Au contraire, la Nouvelle-Zélande, qui personnifie la zone océanienne maintenant que l’Australie est passée en Asie, a pleinement réussi en accrochant une qualification assez inespérée pour un quart de finale contre les États-Unis.

Enfin, la zone Afrique sort de la compétition avec un bilan de 5 défaites et un nul (de l’Afrique du Sud contre le Japon qui ne voulait pas vraiment l’emporter). Mais les deux représentants africains (Cameroun et Afrique du Sud) étaient novices à ce niveaux ayant pris la places des habituelles Nigérianes.

États-Unis-Japon 2-1

Les États-Unis ont battu le Japon grâce à un doublé de Carli Lloyd, déjà auteuse du but vainqueur de la finale de Pékin. Les Japonaises ont été prises à leur propre jeu, celui qui leur avait permis de battre la France en demi-finales. Menées dès la 8e minute, elles ont vu leur adversaire les attendre et jouer en contre. Il leur a fallu une demi-heure pour prendre le jeu à leur compte, touchant plusieurs fois les montants.

Les Américaines en ont profité pour placer des contre-attaques, Alex Morgan oubliant plusieurs fois des coéquipières bien placées. Mais Carli Lloyd se chargeait d’enfoncer le clou d’une frappe de 20m.

Les Japonaises répliquaient assez vite par un but de Yuki Nagasato-Ogimi à l’issue d’une action confuse mais ne parvenaient pas à tromper une deuxième fois Hope Solo, par ailleurs auteuse de deux superbes arrêts qui auront aussi fait la différence.

Devant 80 203 à Wembley, les deux équipes ont confirmé qu’elles étaient bien les deux meilleurs du monde avec un match de haut niveau qui a couronné l’équipe la plus solide depuis le début du tournoi à défaut d’être la plus flamboyante.

Canada-France 1-0

À l’issue de la finale, les Bleues n’ont pas eu l’occasion de monter sur le podium après avoir été battues au bout du temps additionnel par le Canada à Coventry. Elles sont donc quatrièmes comme un an plus tôt mais le résultat semble plus amer parce que le statut de l’équipe de France a changé en un an et parce que la victoire contre la Suède avait semblé la faire basculer dans le camp des équipes qui gagnent les matchs couperets.

Au coup d’envoi de la petite finale, les deux équipes se présentaient dans la même composition qu’en demi-finales. Du côté français, c’était donc toujours sans Camille Abily ni Eugénie Le Sommer qui avaient dynamité les deux matchs précédents.

La première mi-temps était totalement amorphe avec des Bleues qui dominaient sans vraiment se procurer d’occasion. La situation changeait en seconde mi-temps et plus encore après l’heure de jeu et l’entrée de Camille Abily à la place de Sandrine Soubeyrand et celle d’Eugénie Le Sommer à celle de Marie-Laure Delie. Les Bleues mettaient la pression sur la défense canadienne, touchaient deux fois les poteaux et se procuraient nombre d’occasions, mais sans réussite ; puis se déconcentraient dans les derniers instants avant la prolongation et permettaient à Diana Matheson de marquer après un cafouillage devant le but de Sarah Bouhaddi.

Un an après une Coupe du monde totalement manquée (trois défaites et plus mauvais bilan de la compétition) sous la houlette de Carolina Morace, les Canadiennes ont parfaitement relevé la tête avec le nouveau sélectionneur John Herdman, sortant d’une poule difficile avec une seule défaite face au Japon, éliminant l’équipe Britannique qui avait pourtant tout fait pour avoir un quart de finale facile, puis tenant tête aux Américaines contre qui elles ont mené par trois fois au score.

Trois victoires et trois défaites

Comme en Allemagne, le bilan de l’équipe de France est nuancé. Il y a un an, la bonne surprise de la quatrième place était à relativiser avec les trois défaites concédées aux trois adversaires de haut niveau et avec un parcours relativement clément.

Cette année où la quatrième place constitue une déception, le résultat brut est à mettre en perspective avec un certain manque de réussite contre le Japon et le Canada et avec le fait que la France a éliminé la Suède qui était un vrai candidat à la médaille d’or.

La principale satisfaction française du tournoi aura été la défense centrale. Wendie Renard s’affirme à chaque match comme la patronne de la défense centrale et ne doit pas être loin des meilleures défenseuses du monde. À ses côtés, Laura Georges a supplanté Ophélie Meilleroux et a formé une charnière très solide avec sa coéquipière de l’OL.

Le reste de la défense a plutôt déçu : Sarah Bouhaddi a montré une fébrilité qui ne lui est pas habituelle à Lyon, et n’a finalement justifié son statut que contre la Suède. Sonia Bompastor a fait le travail défensivement mais a moins apporté que d’habitude offensivement. De l’autre côté Corine Franco est monté en puissance au fil de la compétition mais elle reste une intérimaire à droite, en club comme en sélection en l’absence d’une vraie solution alors qu’elle apporterait sans doute plus en milieu défensive.

Au milieu de terrain, Élise Bussaglia a été l’autre satisfaction des Bleues, malgré son pénalty manqué en demi-finale. Sandrine Soubeyrand a été titularisée lors de tous les matchs après l’ouverture contre les États-Unis. Si le choix d’une milieu purement défensive pouvait se justifier (encore que c’est surtout contre les États-Unis que qu’il aurait été intéressant), une joueuse plus mobile aurait sans doute été plus utile.

Eric Baledent/LMP

photo : Eric Baledent/LMP

Louisa Necib a joué sa partition habituelle faite de beaux gestes techniques et d’une certaine difficulté à faire le bon choix. Sa titularisation systématique, avec celle de Sandrine Soubeyrand a poussé Camille Abily sur le banc, alors qu’elle est la plus capable de créer du jeu, les fins des trois derniers matchs en attestent, mais aussi le tournoi de Chypre où elle était associée à Élise Bussaglia et où les Bleues avaient été très convaincantes.

Devant, Marie-Laure Delie a régulièrement pesé sur les défenses et marqué deux buts, même si le système de jeu l’a souvent laissée un peu seule en pointe. Élodie Thomis a été préférée à Eugénie Le Sommer à chaque match sauf contre la Colombie, afin de donner de la profondeur au jeu quand les équipes laissaient des espaces dans leur dos. Avec la titularisation systématique d’une Gaëtane Thiney en difficulté, cela a donc placé sur le banc la meilleure joueuse offensive française des deux dernières saisons. Eugénie Le Sommer a beaucoup apporté lors de ses entrées en jeu, et elle aussi était titulaire lors du tournoi réussi à Chypre.

Destination Suède

La position de ces Jeux Olympiques au milieu de la période qui va de la Coupe du monde à l’Euro oblige les Bleues à repartir très vite de l’avant puisque dans moins d’un an, elles devraient jouer une phase finale en Suède dont elles seront parmi les favorites (avec l’équipe locale et l’Allemagne). Le changement de perception entre les deux quatrièmes places semble partagé par l’équipe de France elle-même ; la déception domine dans les interviews d’après match.

Eric Baledent/LMP

photo : Eric Baledent/LMP

Le sélectionneur va devoir choisir entre continuer jusqu’à l’Euro avec le même groupe, éventuellement légèrement modifié comme dans un cycle de deux ans habituel ou bien redistribuer les cartes et tout remettre à plat. Si les Bleues avaient eu une médaille, la première solution s’imposait, mais la déception subie contre le Canada nécessite peut-être un nouvel élan.

Puis après l’Euro, il sera sans doute temps de changer de sélectionneur pour repartir sur de nouvelles bases où les statuts qui se sont construits depuis six ans pourront être revus. Cela permettra de donner des arguments dans la polémique qui oppose la ligne officielle de ceux qui pensent que Bruno Bini a porté une équipe moyenne presque sur le toit du monde à ceux qui trouvent que la France dispose d’une génération de joueuses exceptionnelles qui devrait être beaucoup plus haut.

On se souviendra que dans des circonstances analogues, Farid Benstiti avait été remplacé par Patrice Lair à l’OL juste après une finale de Ligue des Championnes. Le premier a certainement fait du bon travail mais le second semble avoir apporté quelque chose de plus.



3 commentaires pour “Finales des JO de Londres 2012”

  1. Merci CHR$ pour cette analyse, je partage absolument tout ce qui est écrit. Du coup, je serai beaucoup plus court que d’habitude ;o)
    Juste pour rajouter au sujet de la Finale que le match a été formidable et ne méritait pas un ou plutôt des vaincues.
    Seul point – très – noir au tableau : les deux grosses erreurs d’arbitrage qui privent le Japon de deux pénaltys flagrants, un par mi-temps. D’abord la main très nette de Tobin Heath sur coup france de Miyama, puis un ceinturage incroyable de Buehler sur Kumagai juste devant Solo, encore sur un coup-franc de Miyama. Les deux situations étant face au but sur coups de pied arrêtés, l’arbitre ne pouvait pas voir ces énormes fautes. Intervenant à 1-0 puis 2-1, on peut raisonnablement dire que le match a été faussé à ce niveau.
    Cela est d’autant plus gênant qu’arrivant après la grosse polémique de Usa-Canada en demie où là, l’arbitrage a carrément privé les Canadiennes de la Finale. D’une manière générale, il y a eu pas mal de fautes d’arbitrage d’ailleurs dans ce tournoi, notamment concernant les hors-jeu.
    Mais on peut être heureux quand on aime le foot féminin car on a vu de superbes matchs.

  2. Il y a un vrai problème Louisa Necib. Beaucoup apprécie sa capacité à « caresser » le ballon.
    Mais il s’ agit de football et non de jonglerie.
    Sur les 2 derniers matchs elle a plombé l’ EDF par sa lenteur, son incapacité à faire un marquage, sa perte de quasiment tous les duels, sa volonté de tirer à tort et à travers avec la force d’ un rouge gorge.
    Elle pense plus à jouer pour elle que collectivement.
    Par contre Thomis a fait de gros progrès depuis un an en étant beaucoup plus lucide. Sans oublier de parler de son énorme travail défensif.
    Tout le contraire de lou Bini qui illustre le principe de Peter. Pas de progrès depuis un an, il est spectateur au lieu d’ être acteur. y a-t-il un Aulas à la FFF pour agir ?
    Quant au but canadien il est marqué avec plus de joueuses canadiennes dans les 18m que de joueuses françaises. Un résumé des difficultés du football français en général où on manque de solidarité.

  3. raisonné, réfléchi, équilibré, bien exprimé… est-ce que tu as oublié que c’est l’internet ici CHR$? merci quand même!

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