C’est depuis quelques mois le rival annoncé, à moyen terme, du Bayern Munich. Si Wolfsburg, soutenu par Volkswagen, en avait déjà apporté la preuve économique, il manquait encore l’affirmation sportive de cette ambition. La déclaration d’intention des Loups est survenue dès leur première sortie de 2015, face aux Bavarois, comme pour poser les bases d’une nouvelle donne sportive.

On pouvait s’interroger sur l’état d’esprit des hommes de Dieter Hecking, pour leur premier match officiel depuis la tragique disparition de Junior Malanda dans un accident de voiture. Avant la rencontre, l’hommage rendu au grand espoir belge a pris aux tripes. Mais loin de craquer émotionnellement, Wolfsburg a paru galvanisé par l’évènement. Décomplexé.

Le grand affrontement n’est certes pas pour tout de suite, puisqu’après la démonstration de force du club de Basse-Saxe (4-1), il y a encore huit points d’écart entre les deux clubs en tête de la Bundesliga. Mais c’est une première morsure en forme de sérieux avertissement pour le Bayern. Voici en quatre points comment Wolfsburg a réussi le coup parfait.

1. UN BLOC HAUT ET DENSE

Wolfsburg a refusé de reculer. D’entrée, les Loups se sont disposés en 4-4-2 défensivement, avec Kevin De Bruyne au même niveau que Bas Dost à hauteur de la ligne médiane. Derrière eux, milieux de terrain et défenseurs ont complété un bloc compact dans la largeur comme dans la longueur et très dense dans l’axe.

Les deux attaquants de Wolfsburg ont ainsi encadré Xabi Alonso et ses décrochages en phase initiale. Toutes les lignes de passe axiales vers l’avant ont été systématiquement fermées, grâce à un gros travail du duo Luiz Gustavo-Maximilian Arnold, devant une défense prompte à suivre les décrochages de Robert Lewandowski.

Face à ce mur central, le Bayern a d’abord tenté d’allonger. Par dessus la défense en tout début de match puis latéralement, afin d’exploiter respectivement les espaces dans la profondeur et côté opposé. Problème : faute de solutions, c’est principalement Boateng qui a délivré ces longs ballons. Écarté, comme Dante axe gauche, le défenseur allemand est celui qui a eu le plus de liberté en première période. Un risque très calculé pour Wolfsburg. Boateng n’a ainsi réussi que six de ses quatorze longues passes.

À la demi-heure de jeu, l’arrière-garde munichoise a cessé de balancer, cherchant plus volontiers Xabi Alonso, David Alaba et Bastian Schweinsteiger. Mais ceux-ci ont dû décrocher jusque dans leur camp pour s’extraire d’un bloc adverse toujours bien en place et discipliné. Wolfsburg a privé le Bayern de passes pénétrantes et orienté son jeu vers les ailes pour l’y enfermer. Résultat : une grande peine bavaroise pour entrer dans les trente derniers mètres et un danger limité, avant la pause, à des frappes lointaines.

2. UNE EXPLOSION DE CONTRES

En défendant haut et en bloc, Wolfsburg ne s’est pas seulement immunisé défensivement, il s’est aussi offert des munitions offensives sur les multiples occasions de contre offertes par le Bayern. À la récupération du ballon, il y avait ainsi systématiquement plusieurs solutions de première passe rapide vers l’avant, avec un quatuor Caligiuri-De Bruyne-Dost-Perisic mobile, disponible et explosif vers l’avant, parfois accompagnés par Maxi Arnold.

Or le Bayern est l’équipe d’Europe qui s’expose le plus lors de ses phases de possession. Il n’est pas rare que Boateng et Dante restent seuls derrière, avec leurs deux latéraux très hauts dans le camp adverse et une protection des milieux pas toujours très étanche. Cela se remarque peu lorsque les Bavarois sont inspirés et fluides avec le ballon, beaucoup plus lorsqu’ils multiplient les pertes de balle compromettantes.

Wolfsburg n’a pas toujours eu besoin de gagner des ballons hauts pour être dangereux sur attaque rapide. Trois des quatre buts des Loups ont ainsi eu pour origine une récupération dans leurs propres trente mètres, à chaque fois merveilleusement exploitée par un jeu en première intention parfaitement fluide pour remonter le terrain en un temps limité. Le plan de Dieter Hecking a fonctionné à la perfection, même si le Bayern a aussi donné le bâton pour se faire battre.

3. DU RÉALISME OFFENSIF, ENFIN

Dauphin des Bavarois à la trêve en Bundesliga, Wolfsburg avait déjà affiché de belles promesses lors de la phase aller. Mais pour franchir un palier, l’efficacité devant le but restait l’un des principaux axes de progrès.

Les hommes de Dieter Hecking ont manqué la victoire à dix reprises cette saison, toutes compétitions confondues. Huit de ces matchs les ont vu tenter au moins cinq frappes de plus que leur adversaire. Pire encore, lors de quatre rencontres, le différentiel a dépassé les dix tirs :

  • à Everton (27 tirs contre 12 aux anglais, mais défaite 4-1) en Europa League
  • contre Lille (24 tirs à 12 mais match nul 1-1) en Europa League
  • contre Everton (39 tirs à 11, différentiel de +28… mais défaite 0-2 !) à domicile, en Europa League
  • contre Paderborn (21 tirs à 6 mais match nul 1-1) en Bundesliga

Les exemples les plus flagrants concernent donc l’Europa League. Mais même en Bundesliga, de manière toute relative, Wolfsburg manque d’un finisseur. Avant la réception du Bayern, Kevin De Bruyne était à égalité avec le défenseur central Naldo et Ivica Olic, retourné à Hambourg, comme meilleur buteur du club en championnat, avec cinq buts.

Pour y remédier, André Schürrle est attendu en renfort dans les prochains jours, mais Bas Dost a affiché des qualités intéressantes, son gabarit (1,92 m, 85 kg) apportant du poids bienvenu à l’attaque des Loups. Il y a aussi des signes encourageants. Contre le Bayern vendredi soir, comme à Lille (3-0) mi-décembre, Wolfsburg s’est imposé en ayant moins tiré que son adversaire (13 tentatives contre 16). Ce n’est que la cinquième fois que cela arrive cette saison.

4. LE BAYERN L’A BIEN AIDÉ

Il faut dire que le Bayern n’avait rien de l’implacable machine de la première partie de saison, à la Volkswagen Arena. « C’est impossible que l’on rejoue comme ça », a d’ailleurs glissé Jerome Boateng à l’issue de la rencontre. Lors du match aller, pourtant, le champion en titre avait été averti du potentiel de Wolfsburg, tout proche d’arracher le nul (2-1), à une maladresse près du regretté Junior Malanda. Vendredi soir, les hommes de Pep Guardiola n’ont pas eu les réponses aux problèmes posés par leur adversaire.

On a évoqué leur incapacité à percer le bloc défensif de Wolfsburg par la passe. La faute leur en incombe en partie : manque de mouvements, d’intensité et d’impact dans les duels, embouteillage axial, absence de fluidité, déchet technique… Sur les onze Bavarois titulaires, cinq ont affiché un pourcentage de passes réussies inférieur à leur moyenne de la saison.

Pas vraiment significative en soi, cette statistique prend tout son sens lorsque l’on détaille les joueurs concernés : Xabi Alonso (-5 points), Bastian Schweinsteiger (-8), Arjen Robben (-7), Thomas Müller (-3) et Juan Bernat (-8). Soit, pour les quatre premiers, les joueurs chargés de la création et de l’animation du jeu ; pour le dernier, celui qui a représenté la menace principale en seconde période.

Car après le repos, Pep Guardiola a abandonné son 4-3-3 pour un 3-4-2-1 aventureux, parfois aux allures de 3-2-5 ou 2-3-5 en fonction, dans le premier cas, de la hauteur du positionnement des latéraux, et dans le second des montées d’Alaba, replacé axe gauche de la défense sur le papier.

Avec un nombre aussi important de joueurs dans l’axe, la tâche défensive de Wolfsburg a été facilitée. Les espaces étaient sur les ailes, et Bernat en a profité sur l’unique but munichois du match – mais ce fut bien la seule fois. Côté droit, Sebastian Rode a été aussi inoffensif que dépassé par Kevin De Bruyne, qui a permuté dans sa zone entre la quinzième minute et la mi-temps. Son remplaçant, Mitchell Weiser, entré à la 51e minute, a pour sa part multiplié les mauvais choix.

Défensivement, pas besoin de faire un dessin. En accumulant des joueurs hauts sur le terrain sans parvenir à les trouver dans de bonnes conditions, le Bayern a offert des boulevards en contre. Le déficit de vitesse de Dante a été rédhibitoire alors que l’arrière-garde munichoise n’a pas mis en place son piège du hors-jeu (un seul signalé, contre De Bruyne) pourtant si efficace cette saison, comme à Manchester City (2-3).

L’absence d’agressivité de Bastian Schweinsteiger à la récupération n’a pas aidé, non plus, à empêcher les dévastatrices premières passes adverses. « Nous avons fait beaucoup d’erreur et nous sommes laissés prendre en contre », a judicieusement remarqué l’intéressé à l’issue du match.

Un chiffre résume tout, et il a déjà fait trois fois le tour de la toile à cette heure : Manuel Neuer a encaissé autant de buts en 73 minutes que pendant toute la phase aller. Bienvenue en 2015.

Julien Momont

2 commentaires

  1. Ikki dit :

    Merci pour ce bel article. Et bon courage pour la partie de Football Manager !
    Juste deux petites réflexions de bas étage (la première étant d’un niveau particulièrement faible) :
    – sur le tableau des différentiels de tir, je pense qu’il faudrait mettre le +10 en bleu clair, parce que lorsqu’on lit la phrase (4 dépassant les 10) ça fait étrange sachant qu’il y en a 5 qui sautent aux yeux dans le tableau (j’avais prévenu du bas niveau…) ;
    – plus en rapport avec le football et plus sérieusement, le fait de s’agglutiner dans l’axe, ce n’était pas également un petit peu le défaut du Barça sur la fin de l’ère Guardiola ? Je ne me souviens plus bien (moins à fond dans le foot qu’avant). Certes, ses équipes jouent sur toute la largeur, mais sans « utiliser » les ailes pour réellement faire des décalages. Sur ce match d’autant plus que ni Robben ni Müller ne sont des ailiers de débordement.

  2. Julien M dit :

    Oui c’est vrai pour le tableau, je vais rectifier ça !

    C’est vrai aussi que ce Bayern a ressemblé un peu au Barça devenu presque caricatural, parfois, dans les derniers mois de Guardiola. Surtout dans l’incapacité à exercer un pressing intense sur Wolfsburg, et aussi par la lenteur de la construction et la sur-exposition défensive.

    L’absence de Ribéry et Götze a été très préjudiciable, parce qu’il n’y avait pas de deuxième joueur de couloir percutant avec Robben. Le Néerlandais n’a d’ailleurs pas été par Rode, qui n’a pratiquement jamais dédoublé et a peut-être été le plus mauvais Bavarois.

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